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The Legend of Zelda : L'Epopée d'Hyrule

Ecrit par Caramelink/Miss Army, Nessy, Nouka et Nesumi
Chapitres 1 à 15   •   Chapitres 16 à 24   •   Chapitres 25 à 33   •   Chapitres 34 à 42   •   Chapitres 43 à 51   •   Chapitres 52 à 53
Chapitre 25 : Dans les plumes d'un oiseau   up

Frambra-Shiro soupira mentalement. Sa pensée s'était égarée l'espace d'une seconde vers son corps alors que Midona usait de sa magie. Une seconde seulement. Peut-être même moins. Mais cela avait suffi pour qu'elle arrive ici, devant ce temple qui l'avait vue d'abord souffrir, puis mourir. Elle tourna sur elle-même. La forêt où devaient se trouver Lovio et Hönir était bien loin d'ici et elle avait des ailes minuscules. Il lui faudrait des jours et des jours pour traverser le désert sans se faire croquer par un vautour. Il lui en faudrait autant ensuite pour rejoindre cette forêt qu'elle n'avait jamais vue de sa vie. Le petit oiseau ne resta pas pour autant à faire du sur-place à trop réfléchir. Il était bien trop dangereux de traîner à découvert dans les parages. Frambra-Shiro décida donc de se diriger vers le Colosse du Désert. Malgré la terreur que les lieux et son occupant principal lui inspiraient, elle voulait savoir ce qu'il était réellement advenu de son ancien corps. Pourquoi Ganondorf avait-il souhaité la ramener à la vie après l'avoir tuée de ses mains ? Voulait-il se servir d'elle contre Hönir ? Avait-il d'autres buts ? Toutes les hypothèses auxquelles elle pensait la terrifiaient et lui donnaient la nausée.

Elle vola jusqu'au visage de la statue monumentale ornant la façade du temple. Elle n'avait aucune idée de combien de temps avait passé depuis qu'elle avait emprunté ce même chemin sur le dos du tapis avec ses amis. Elle réussit à trouver une fenêtre à barreaux et à se faufiler sans problème au coeur du temple. Personne ne faisait attention à un oiseau aussi minuscule et elle prenait bien garde de rester au plafond, dans les ombres des antiques colonnes.

- Frambra.
La voix de Ganondorf cloua Frambra-Shiro sur place, lui serrant le coeur. Elle dut se faire violence pour refouler la terreur qui manquait de la submerger. Si elle avait encore eu des bras, elle aurait certainement porté ses mains à son cou meurtri par réflexe.
- Mets ça.

Le petit oiseau vola discrètement jusqu'à la pièce d'où était venue la voix et se percha sur une lampe éteinte, dans un coin, hors de vue. Ganondorf était assis sur son lit, torse nu. Ses cheveux roux étaient peignés différemment de la dernière fois. Tirés en arrière, il les avait disciplinés à l'aide d'une sorte de diadème ou de couronne complexe en or, avec des décorations en forme de pics agrémentées de joyaux verts. Se prenait-il déjà pour un roi ? Le menton posé sur ses mains jointes, il avait l'air pensif. Il jetait sans arrêt des coups d'oeil vers le paravent qui trônait dans un coin de la pièce.

- As-tu terminé ?
- Oui, Maître.

Frambra-Shiro frémit à la voix féminine qui sortit de derrière le paravent. Etait-ce sa propre voix avec ce ton si froid et monocorde ? Elle ne put que constater qu'il en était bien ainsi lorsqu'elle se vit apparaître. C'était réellement différent que de se voir dans un miroir. Ce n'était pas un reflet plat imitant chacun de ses gestes, c'était son propre corps qui bougeait et parlait et elle n'en était plus aux commandes. Frambra-Shiro se sentit étouffer sous le flot d'émotions qui la paralysa à cette vision et elle faillit tomber de son perchoir. Elle se força à se reprendre et à continuer d'observer. Ganondorf se leva, laissant sa chemise sur le lit, et fit signe à Frambra d'approcher, ce qu'elle fit sans un mot ni même manifester la moindre émotion. Ses yeux violets étaient aussi inexpressifs que la pierre qui ornait son front. Le Gerudo la regarda de la tête aux pieds.

- J'ai fait venir les plus beaux tissus pour toi, dit-il d'un ton plus doux que Frambra-Shiro ne lui connaissait pas. J'espère que cette tenue te plaît.

Frambra ne dit rien. Ganondorf attrapa un petit coffret sur une table et l'ouvrit pour en sortir deux bracelets en or frappés de ses armoiries et de celles des Gerudos. Il prit délicatement le bras gauche de sa poupée et l'en ceignit. Il fit de même avec l'autre bras. Les bracelets étaient si larges qu'ils montaient jusqu'au milieu des avant-bras. Pour Frambra-Shiro, même en or et décorés, ils ne lui rappelaient que trop les fers qu'elle avait portés pendant sa captivité ici. Après cela, Ganondorf glissa ses doigts sur la peau pâle de la Gerudo, caressant lentement sa joue dans un geste d'affection évident qui donna un peu plus encore la nausée à Frambra-Shiro.

- Si tu savais combien j'ai souhaité t'emmener loin de cette oasis cette fois-là, murmura-t-il soudain. Loin de "Lui". Ces jours-là... je ne les ai jamais oubliés. Nous étions si bien ensemble...

Il continuait à caresser avec douceur le visage de Frambra qui ne réagissait à rien, ni à ses doigts sur sa peau, ni à ses paroles. De son côté, Frambra-Shiro aurait bien voulu oublier l'épisode dont il parlait, leur première rencontre. Elle venait à peine de faire la connaissance d'Hönir et elle avait vite compris, après coup, que ce n'était pas avec lui qu'elle avait passé ces quelques jours. Elle ne l'avait jamais avoué à son ami. A l'époque, il n'était pas encore prêt à connaître toute la vérité sur ses origines et elle, elle ne souhaitait qu'une chose : oublier qu'elle avait apprécié la compagnie de l'homme responsable de la mort de sa mère.

- Je regrette tellement d'avoir dû en arriver là, continua-t-il en glissant un doigt sur l'odieuse cicatrice qu'elle avait au cou et qui était cachée par le col de sa nouvelle tunique. Tout ça, c'est sa faute, mon amour. Nous lui ferons payer bientôt.

Frambra-Shiro était pétrifiée sur son perchoir. Dire qu'elle ignorait les sentiments de Ganondorf à son égard aurait été un mensonge. Elle les connaissait même trop bien depuis qu'il l'avait enfermée dans cette minuscule geôle. Mais jamais elle n'avait accepté que cela puisse être de l'amour véritable. De la jalousie, une obsession maladive et perverse, le besoin de contrôler celle qui lui résistait, oui. Après s'être joué d'elle comme il l'avait fait, après l'avoir torturée psychologiquement, tout cela ne pouvait être de l'amour. Et pourtant, il semblait que s'il avait ressuscité son corps, c'était bien parce qu'il croyait que c'en était. Cela la rendait malade et, surtout, cela faisait bouillonner en elle une rage et une colère comme jamais elle n'en avait ressenti.

- Nous allons régner sur le monde, mon amour, murmura-t-il en se penchant vers le visage de Frambra avant de l'embrasser.

L'oiseau crut qu'il allait défaillir ou vomir. Comment osait-il poser ses lèvres infâmes sur les siennes ? Comment pouvait-il disposer d'un corps qui n'était pas le sien comme s'il s'agissait d'un jouet ? Elle manqua de s'envoler pour aller lui picorer ses sales petits yeux quand il rompit l'étreinte de lui-même dans un rugissement de rage et s'éloigna pour attraper sa chemise, une expression d'intense déception sur le visage. Intérieurement, Frambra-Shiro, elle, sourit de satisfaction. Visiblement, le manque total de réaction de son corps ressuscité ne semblait guère au goût de son assassin. Ce qu'il tenait n'était qu'une poupée sans âme, sans émotion. Elle pouvait peut-être lui obéir au doigt et à l'oeil, être à ses côtés, elle ne valait pas mieux qu'une statue. Cela mettait un peu de baume au coeur de Frambra-Shiro en attendant de trouver le moyen de délivrer son corps de son emprise. Elle serait peut-être éternellement Shiro, mais il n'était pas dit que son corps reste l'esclave de Ganondorf, elle en faisait le serment. Elle préférait largement qu'il disparaisse à jamais.

* * *

Framba quitta le temple et vola tant bien que mal jusqu'à une oasis. Elle se posa sur le premier rocher. Elle revoyait encore la scène, Ganondorf qui embrassait son corps zombifié. Elle secoua la tête pour évacuer ces images quand elle entendit une mélodie. Impossible se dit-elle. Elle vola en direction du son et vit une petite cascade dissimulée derrière un mur de pierre. Quelqu'un barbotait dans l'eau. Elle se rapprocha et se posa sur le sable. Elle sautilla jusqu'à l'eau, quand l'inconnu s'adressa à elle :

- Bonjour, petit oiseau, je m'appelle Asarim, pourrais-tu te retourner pour que je sorte de l'eau ?
Frambra s'exécuta, elle sentit ses joues rougir. Après un court instant, Asarim lui demanda :
- Tu t'es perdu ? Où peut-être que ma mélodie t'a conduit ici ?
Frambra regarda le piaf en se demandant comment lui répondre, seule Midona pouvait communiquer avec elle par la pensée.
- Eh bien, tu as perdu ton bec, petit oiseau ?
"Mon bec", se dit Frambra, "c'est vrai je suis un oiseau, autant essayer".
Elle ouvrit son bec et un joli son en sortit.
- Cui cui.
- Bizarre... je ne te comprends pas.
Le piaf s'avança vers Frambra et la prit dans son aile.
- Je comprends mieux, dit-il après avoir examiné l'oiseau. Tu n'es pas de chez nous. Tu es un shiro du royaume du Crépuscule.
Frambra fit oui de la tête.
- Et comment t'es-tu retrouvé ici ? La princesse du Crépuscule serait en Hyrule ?
Frambra secoua la tête. Asarim se gratta la tête de son aile libre.
- Tu ne peux pas rester ici, petit shiro. Je me rends dans un relais où des réfugiés seraient arrivés en masse. Il faut bien remonter le moral des gens ! sourit Asarim. Je suis un poète, je chante mes vers avec mon accordéon. Si tu veux, tu peux m'accompagner. Tes ailes sont petites, il te faudrait des semaines pour te rendre quelque part.
Frambra sautilla en guise de réponse, cela ne pouvait pas mieux tomber. Asarim la posa sur son épaule et récupéra son accordéon au sol.
- Tu me fais penser à Kuigri, une de mes filles, dit Asarim. Je te la présenterai un jour. Bon, tu es prête ?
Frambra acquiesça.
- Direction le relais !
Asarim poussa sur ses jambes et donna de grands coups d'ailes.
- Tu veux que je te conte mes poèmes sur la princesse du Crépuscule ?

Chapitre 26 : La rencontre   up

Voilà déjà plusieurs heures que Link marchait dans la forêt, toujours accompagné de la petite fée. A chaque changement de direction, celle-ci s'agitait en poussant des "Hey !!!", ce qui commençait un peu à l'agacer. Link se demandait quand il sortirait d'ici. Les bois étaient épais et il avait eu plusieurs fois l'impression d'être suivi. Effectivement, il n'était pas seul. Il entendait une mélodie au loin : de la flûte. C'est alors qu'il se rappela les histoires qu'on racontait aux enfants pour qu'ils ne s'aventurent pas seuls en forêt. Il était dit que lorsqu'un enfant s'égare dans les bois, il se transforme en Skull Kid, une créature sans visage. A cette pensée, Link déglutit.

La mélodie s'arrêtait quelques instants pour reprendre de plus belle toujours suivie de ricanements. Au loin, Link aperçut une silhouette sautillant d'une jambe sur l'autre, et tournant sur elle-même à quelques reprises. La musique venait de là, et l'individu se rapprochait de notre jeune Hylien. Navi, qui avait dû sentir les ennuis arriver, s'agitait de plus belle. Elle essayait de faire presser le pas à Link, mais celui-ci était intrigué par la mélodie. L'inconnu arriva à sa hauteur, il avait des allures d'épouvantail et portait un chapeau de peau qui lui cachait le visage. La créature jouait frénétiquement de la flûte quand il s'arrêta et leva doucement la tête pour faire face à Link. Celui-ci, surpris par ce qu'il voyait, trébucha sur une branche en reculant de plusieurs pas. Il était en présence d'un Skull Kid ! Celui-ci fit signe à Link de le suivre tout en reprenant son air de flûte. Navi n'avait pas l'air d'accord et tournoyait autour de lui en guise de protestation, mais il était comme envoûté par la mélodie. Il suivit le Skull Kid qui le guida vers les tréfonds de la forêt. Navi, quant à elle, essaya tant bien que mal de faire sortir Link de sa torpeur. Quand celui-ci perdit l'équilibre, son pied heurta une racine et il s'écroula. Link porta une main à son front, le Skull Kid continuait de sautiller d'une jambe à l'autre sans se retourner. Link se releva péniblement, il ne comprenait pas ce qui lui était arrivé. Il regarda Navi voler autour de lui et réalisa qu'il n'était plus dans la forêt mais sur une route.

* * *

Pendant ce temps-là, aux abords de Toal...

- Allez, plus qu'une, dit Jehd.
- Oh quel dommage ! Je ne te verrai plus te trémousser comme un dindon, rigola Hergo.

Sheik était resté à l'écart des deux garçons. Le spectacle était le même à chaque fois : Jehd allait s'agacer et essayer de frapper Hergo et celui-ci l'attraperait pour lui coincer la tête sous le bras et lui ébouriffer les cheveux. Il se contenta donc de regarder tout cela de loin, assis sur un rocher en hauteur, le loup à ses côtés.

- Le ciel commence à s'obscurcir, le néant n'est pas loin de faire son apparition.
Le loup s'allongea et couina comme pour lui donner raison.
- Encore quelques pleines lunes. Mais Toal sera en sécurité. Il me reste tellement à faire jusque-là... Il faut que je retrouve le détenteur de la Triforce du Courage.

Le loup se redressa subitement, le vent venait de se lever. Sheik se mit debout et scruta l'horizon. Le loup sauta du rocher pour rejoindre Jehd et Hergo qui avaient fini de se battre. Les deux jeunes hommes étaient étonnés : le loup ne les avait que très peu approchés depuis son arrivée.

- Sheik, ton... ton loup... trembla Jehd.

Le loup se mit en position de chasse, oreilles vers l'arrière. Hergo voulut se saisir de son épée mais trop tard : l'animal se jeta sur eux. Les deux jeunes hommes se jetèrent au sol, apeurés, mais le loup sauta au-dessus d'eux pour s'attaquer à un Stalfos. Sheik rejoignit le groupe alors que la créature était démembrée par les crocs du loup.

- Il faut qu'on se dépêche de retrouver la dernière statue avant que ses bestioles n'arrivent chez nous, dit Hergo un peu paniqué par ce qui venait de se passer.
Sheik approuva. Il remit les quelques branches qui cachaient la statue en place.
- Au fait, Jehd, on ne pouvait pas allumer celle proche de chez nous en premier ? demanda Hergo.
Jehd porta une main à son front en secouant la tête.
- Non, pour la énième fois : il y a un schéma à respecter, un ordre si tu préfères, sans quoi cela ne fonctionnerait pas enfin ...
- Enfin quoi? l'interrogea Hergo.
Sheik prit la parole.
- Si tu allumes les joyaux à l'envers, tu protèges Toal, mais tu ne seras pas dans le périmètre de sécurité.
- Ah ben effectivement, vaut mieux le faire dans le bon sens, bredouilla Hergo, qui eut l'air bête.
- Allez, fini de bavarder, le cristal bleu ne se voit plus, filons, dit Jehd. Toal est à une journée de marche, alors dépêchons-nous.

Le groupe reprit la route malgré la fatigue qui les guettait.

* * *

Le loup filait à travers la forêt, Sheik dans son sillage. Le jeune homme n'avait pas compris quelle mouche l'avait piqué, mais son nouveau compagnon l'avait brusquement attrapé par la manche pour l'obliger à le suivre dans une course folle. Jehd et Hergo avaient tenté de suivre, mais évidemment, aucun des deux n'avait pu garder le rythme. Avant que le premier ne crache ses poumons, Sheik leur avait ordonné de continuer vers Toal pour activer la dernière statue. D'ordinaire, le Sheikah ne les aurait pas laissés derrière, mais d'une part, ils étaient proches du village, de l'autre, son instinct lui soufflait que quelque chose d'important se jouait.

Tous deux couraient à toutes jambes, sautant des troncs d'arbres morts, traversant une petite rivière d'un bond, se moquant des fourrés et évitant les branches basses. Le loup fut le premier à franchir la lisière de la forêt de Firone pour sortir sous un soleil éclatant. Sheik arriva quelques secondes après seulement. Il écarta l'écharpe qui masquait son visage pour reprendre son souffle, regardant tout autour d'eux. Ils étaient sur la route qui longeait l'ouest de la forêt. Au-delà s'étalait un paysage vallonné de petites collines parsemées de petits bois. Les premiers hameaux étaient encore loin et Sheik espérait que le Mal ne les avait pas encore atteints. De ce qu'il savait, les armées de Ganondorf n'avaient pas encore passé le fleuve Hylia, préférant s'occuper des plaines et des territoires situés au sud du château, mais ce n'était qu'une question de temps pour que tout Hyrule soit envahi. Il en saurait certainement plus quand Impa, sa mère adoptive et son mentor, serait de retour de mission.

- Pourquoi tu nous as amenés jusqu'ici, mon ami ? demanda-t-il au loup.

L'animal humait le vent et ses oreilles tournaient dans tous les sens. Sheik observa encore les alentours, mais ils étaient déserts. Le loup finit par se tourner vers le nord et fit un geste de la tête pour enjoindre le Sheikah à le suivre. Tous les deux repartirent, mais à une allure plus modérée. La route faisait une boucle pour contourner un énorme rocher.

- "Hey" quoi ?

Sheik s'arrêta en entendant la voix d'un jeune homme. Il voulut tirer son sabre, au cas où, mais le loup s'assit au milieu de la route, bougeant la queue de droite à gauche, la langue pendante. Visiblement, qui que soit celui qui arrivait, le loup ne le considérait pas comme un danger. Sheik décida de lui faire confiance. Ils n'eurent qu'une poignée de secondes à attendre. Link apparut, Navi voletant autour de lui. En voyant le loup et son compagnon, l'Hylien se stoppa net. Il n'échappa nullement à Sheik qu'il avait rapproché sa main de la poignée de son épée. Le silence plana pendant un bref instant jusqu'à ce que le loup se lève et que Navi quitte Link pour tourner autour de lui en tintant joyeusement. Le loup était surpris : il n'avait jamais rencontré de fées par le passé, et celle-ci agissait comme si elle savait qu'il n'était pas un animal ordinaire. Le loup s'avança lentement vers Link, humant son odeur, recherchant malgré lui une trace de celle d'Iria ou de leur fils, un indice olfactif qui lui prouverait que ce jeune homme était bien son descendant. Il le regardait avec insistance de ses yeux bleus, essayant de trouver une ressemblance. Peut-être... oui, peut-être était-il de sa lignée.

- Qui es-tu ? demanda Sheik en observant l'étrange manège du loup.
- La politesse voudrait qu'on se présente avant de demander, répliqua Link, mal à l'aise.
- C'est vrai. Je m'appelle Sheik.
Link ouvrit grand les yeux. Il fit un pas en avant, mais recula aussitôt, pas encore sûr que le loup n'allait pas se jeter sur lui.
- Sheik ? Tu... tu connais Impa ?
Cette fois, ce fut au tour du jeune homme d'afficher sa surprise. Il plissa les yeux, méfiant.
- Comment connais-tu Impa ? Et qui es-tu ?
- Je m'appelle Link et...

Une flèche de foudre tomba à leurs pieds, les obligeant à reculer pour ne pas être pris dans l'arc électrique. Le loup se mit en position d'attaque, montrant les crocs et grondant alors qu'ils entendaient un bruit de sabots lancés à toute vitesse.

- A couvert ! cria Sheik alors qu'un Lynel apparaissait, rangeant son arc pour sortir une épée aussi large que Link.
- Mais qu'est-ce que c'est que ça ? fit le jeune homme qui n'avait encore jamais vu de telles créatures.

La créature avait le corps d'un cheval, le torse d'un homme et la tête d'un lion avec une longue chevelure. Link s'empara de son épée et se mit en garde, quand une seconde flèche vint se loger au pied de Sheik. Link observa du coin de l'oeil le jeune homme : il n'avait pas peur, ou alors, il ne la montrait pas. Sheik sortit une drôle d'arme de derrière son dos. Link ouvrit de grands yeux et l'interpella, au moment où une troisième flèche fendit l'air et vint se loger dans un tronc derrière lui.

- Une lyre, sérieusement ? Tu penses qu'il a le temps de t'écouter jouer ?!
- Regarde avant de parler.

Sheik caressa délicatement les cordes de l'instrument et un vent tournoyant comme une tornade, apparut comme par magie. Il soufflait fort et Link dut porter une main devant ses yeux. La tornade alla s'écraser contre le Lynel, mais celui-ci était impassible et n'arborait aucune égratignure. Sheik resta concentré et tenta un nouveau coup, mais une flèche l'obligea à se jeter sur le côté. Notre loup, quant à lui, ne voulait pas être spectateur de la scène et s'élança vers la bête, qui d'un revers de main l'envoya valdinguer contre un arbre. Le loup gémit lorsque son corps heurta le conifère et il tomba au sol. Link brandit son épée et fit un pas vers le monstre, qui décocha une nouvelle flèche. Après plusieurs minutes de combat, nos deux aventuriers étaient vraiment en mauvaise posture.

- Nous n'arrivons pas à l'approcher, il est trop fort, s'exclama Link, haletant.
- Je sais, mais mon village est au bout de la route et je ne peux le laisser passer, retorqua Sheik.

Quand soudain, une explosion détonna juste devant eux, puis une deuxième. Une fois la fumée dissipée, ils purent voir que le Lynel était à genoux, étourdi et blessé. Sheik en profita pour rejouer de la lyre et lui renvoya sa tornade. Link courut dans sa direction, prit de l'élan et sauta pour loger son épée entre les yeux de la bête, qui plia et s'effondra au sol. Le loup se redressa et arriva en boitant vers Link, Sheik les rejoignit.

- D'où venaient ces explosions ? demanda-t-il.
- J'ai une petite idée sur la question, je ne connais qu'une personne qui sait faire de tels explosifs, répondit Link. Mon ami Lovio.
Il leva la tête et Sheik fit de même. Dans le ciel virevoltait un oiseau gigantesque. Soudain, une petite tête se fit voir, un jeune homme coiffé d'un bob rose.
- Alors, content de me voir, Sheik ?
- Era ! Que fais-tu là ?

L'oiseau tourbillonna dans le ciel d'azur et se posa tout près de Sheik et Link. Le jeune homme qui était précédemment perché sur l'oiseau se laissa glisser et mit pied à terre. Il était plutôt grand, un sourire illuminait son visage. Il était dévêtu, ce qui mit mal à l'aise Link. Son bob rose était son seul vêtement, et il le portait avec fierté. Il lança à Sheik :

- Alors, mon mignon ? Comment ça va ?
Sheik se rembrunit. Il n'aimait pas ce surnom.
- Eraaaa... hum... que fais-tu là ?
- Eh bien... j'ai entendu dire qu'il y avait un super bar avec de jolies filles dans le sud, il me semble. Cela s'appelle le Philtre d'Amour... et tu sais comment je suis, mon poussin d'amour, même si je n'accepte pas trop, trop que tu m'aies viré...
- Era... je ne suis pas gay... ni bi où je ne sais quoi...
Era haussa les épaules.
- Ça peut toujours s'arranger.
- Enfin bref, c'est gentil de nous avoir sauvé la mise
- Tout le plaisir est pour moi. Allez viens, Cochonou, on repart vers le bar. A plus les amis. Tu m'appelles si tu as besoin d'aide, Sheik !

Il fit un clin d'oeil au jeune homme, salua Link et remonta sur son célestrier. L'oiseau déploya ses larges ailes et s'envola avec une forte bourrasque. Link observa Sheik. Ce dernier était légèrement gêné, il rangea sa petite lyre. Il proposa à Link de repartir vers Toal rapidement. Celui-ci accepta et ils se mirent en route. Ils entrèrent dans la forêt.

La nuit finit par tomber. Link et Sheik s'étaient perdus peu de temps après être entrés dans la forêt. Je ne sais pas si vous êtes déjà allés vous promener dans la forêt, mais les "chemins" n'en sont pas. Ils disparaissent systématiquement. C'est ce qui arriva aux deux jeunes hommes. Chaque fois que l'un apercevait un chemin, il l'indiquait à l'autre et ils marchaient un peu avant de se rendre compte que ce n'était pas un chemin. Les deux compagnons étaient pleins de boue, des brindilles dans les cheveux et leur moral très bas. D'un commun accord, ils se posèrent dans une clairière pour y passer la nuit.

* * *

Pendant ce temps, dans une petite plaine, une triste mélodie d'accordéon se fait entendre, accompagnée d'un chant grave et mélancolique.
- ... Le Héros ainsi martyr, rejoignit sa douce éprise, sous une forme autre qu'homme. Le crépuscule faisant de lui une bête, il ne put alors s'attendre à une vie quiète, allant et venant dans ce royaume des morts, à ressasser le passé empli de remords...
Frambra écoutait silencieusement la fin de la chanson d'Asarim, lui faisant étrangement penser à l'histoire que lui avait racontée Midona, par rapport à son loup.
- Alors petit Shiro, que penses-tu de ce poème ? demanda le grand oiseau à la Gerudo, non sans s'arrêter de jouer de son instrument de musique.
En guise de réponse, celle-ci sautilla sur place pour lui assurer qu'elle l'avait apprécié.
- Je m'en doutais, déclara Asarim en souriant. Cet air, c'est mon maître qui me l'a appris, lorsque je n'étais qu'un frêle oisillon plein de mépris.

Telle était la phrase qu'il disait après chaque chanson. Au loin, le soleil se couchait et Frambra se demanda quand est-ce qu'elle pourrait revoir ses amis. Avec l'oiseau chanteur, ils avaient volé quelques heures, avant de faire une halte pour se reposer. Il n'en a peut-être pas l'air, mais ce grand gaillard d'Asarim n'est vraiment pas un grand voyageur ! Et cela, la Gerudo s'en était vite aperçu, au grand dam de sa patience. Mais elle devait faire avec, car de toute façon, elle n'irait pas plus vite seule.

- Veux-tu que je te conte le poème d'un roi malchanceux ? demanda le saltimbanque en commençant déjà un nouvel air de musique.
Frambra-Shiro acquiesca mollement, sentant légèrement la fatigue venir.
- Très bien... fit-il en se raclant la gorge. Il fut un temps, où un roi malchanceux, eut pour seul enfant, un prince bien peureux. Voulant d'un preux chevalier, le roi en fit un piètre cavalier, et ne sachant pas lui-même combattre, envoya son fils dans des bains rougeâtres. Malgré lui ce fils fut bien chanceux, de survivre à ces combats désastreux. Le roi non peu fier de son fils, ne le montrait point devant lui, afin de lui en demander encore plus, lui servant son interminable laïus. Un jour, lassé de cette interminable vie, le prince surveillé par l'ancienne tribu, se regarda dans le lac et se dit maudit. Amorçant un acte qui lui était défendu, priant son père de ne plus être si imbu, il se laissa couler, sous les cris de personnes affolées, désormais déchues par sa faute, et condamnées à errer dans les terres hautes.
"C'est d'une telle tristesse..." pensa Frambra, dont les paupières devenaient de plus en plus lourdes.
- Alors petit Shiro, que penses-tu de ce poème ? demanda Asarim, continuant toujours de jouer de son accordéon. C'est mon maître qui me l'a appris, lorsque je n'étais qu'un frêle oisillon plein de mépris.
Mais le grand oiseau n'eut pas de réponse de la part du Shiro, et regarda alors plus attentivement l'animal, remarquant qu'il dormait paisiblement. "Qu'il en soit donc ainsi" se dit Asarim "demain, une longue journée nous attend, il vaut donc mieux qu'il se repose..."

Chapitre 27 : Ghyni   up

Cela faisait un jour et demi qu'Hönir et Lovio avaient quitté le relais. Lovio toujours sur le tapis s'ennuyait de plus en plus. Le Gerudo n'était pas le compagnon de voyage le plus agréable. Il ne parlait pas, ne plaisantait pas. Lovio avait même essayé de chanter, mais c'était pire. Il s'était donc résigné à garder une distance suffisante entre eux. Du haut de son perchoir, Lovio guettait le paysage, il vit au loin du mouvement. Il demanda au tapis de se mettre à la hauteur d'Hönir.

- J'ai vu bouger au loin, sûrement un bokoblin. Tu veux que j'aille vérifier ?
- Si tu veux, mais ne t'éloigne pas trop, Hylien, je ne vais pas te sauver la peau à chaque fois.

Lovio grimaça sans se faire voir et demanda au tapis d'accélérer en direction de ce qu'il avait vu plus tôt. Hönir, quant à lui, arriva près d'un petit pont. Une fois de l'autre côté, il fut brusquement désarçonné. Il roula aussitôt au sol et se saisit de son cimeterre. Il se mit en position de défense et aperçut dans le bosquet une silhouette enfantine encapuchonnée. Celle-ci était armée d'une épée bien trop lourde pour son âge. Elle la leva et se jeta sur le Gerudo qui esquiva.

- Je vais te tuer, Ganondorf, et s'il le faut, j'y laisserai ma vie. Pour Hyrule ! cria-t-elle quand Lovio passa par-là et attrapa la capuche de l'inconnue.
Celle-ci se débattit comme elle put et hurla.
- Lâche-moi ou je te tue aussi !!!
- Je te lâche, si tu promets de ne pas vouloir tuer mon ami.
Lovio se pencha pour voir le visage de l'inconnue. Il regardait des yeux ronds d'un vert émeraude. Il pencha la tête sur le côté et sourit gentiment
- Mais tu es une enfant !? s'étonna t-il.

Le tapis les ramena au sol et Lovio lâcha prise. L'enfant enleva sa capuche et lui fit face. C'était une fille ou plutôt une adolescente de 14 ans environ. Elle avait les cheveux blonds, presque blancs, attachés en une jolie natte, de jolis yeux verts et portait la tenue des Sheikahs. Hönir s'approcha doucement.

- Je suis Hönir, le frère jumeau de Ganondorf.
La jeune fille le regarda incrédule, puis croisa le regard de Lovio qui était couché à plat ventre sur son tapis, les mains tenant son menton, et balançant ses jambes, l'air de s'ennuyer.
- Qui êtes-vous ? lui demanda la jeune fille. Et que faites-vous avec ce monstre ?
- Je m'appelle Lovio, je viens de Cocorico, et voici mon ami.
Lovio regarda Hönir.
- Enfin, si je peux dire ça... Nous nous sommes retrouvés dans une aventure plutôt bizarre et nous avons perdu mon autre ami en allant en Firone, du coup nous partons le chercher et...
- C'est bon, Lovio, elle a compris, l'arrêta Hönir. Et toi qui es-tu ?
- Moi, je m'appelle Ghyni, je suis une Sheikah, à la recherche de mon mentor, nous avons été séparées dans une bataille.
- Ton mentor ? s'exclama Lovio. Une femme d'un certain âge habillée comme toi ? Du nom de Impar ou Impa ?
- Impa, oui !
- Je suis désolé, Ghyni, nous l'avons croisée, mais elle n'est plus de ce monde, fit Hönir.

La jeune fille se mit à pleurer. Hönir, mal à l'aise, regarda Lovio et lui fit signe de faire quelque chose. L'Hylien sauta de son tapis et la prit dans ses bras. La jeune fille resserra son étreinte. Il lui caressa gentiment la tête et la rassura. Quand elle repoussa Lovio, elle s'essuya les larmes du revers de la manche, et déclara :

- Bien, je vais rester avec vous, et je garderai un oeil sur toi, Gerudo.
- Nous n'avons pas le temps de nous occuper d'une enfant, s'agaça Hönir. Suis le chemin et tu arriveras au relais où ton mentor repose.
La jeune fille lui lança un regard froid, s'approcha de Lovio et du tapis et conclut l'échange par :
- Je suis une Sheikah, pas un vulgaire enfant. Et puis tu n'as pas ton mot à dire !
Lovio ricana.
- Je crois que je t'aime bien, fit-il à Ghyni.

La jeune fille rougit et prit place sur le tapis. Hönir ne prit pas la peine de dissimuler son agacement. Il se demanda même si, à la prochaine halte, il ne devrait pas laisser Lovio derrière et foncer droit vers Firone. Après tout, l'Hylien seul était déjà un boulet à son pied, et voilà maintenant qu'il devait se traîner une mini-guerrière ! Cela commençait à faire beaucoup pour un homme si peu patient tel que lui. A cette pensée, il tourna la tête vers le château dont on n'apercevait que les nuages noirs planant au-dessus des tours. Son frère était-il là-bas ? Etait-il resté dans le désert ? Sans s'en rendre compte, il avait serré les mains sur les rênes de son cheval et tout son corps s'était contracté alors qu'il repensait à la mort de Frambra, aux dégâts que causait la soif de pouvoir de son jumeau... Il piqua des deux et son cheval reprit sa route. Il se désintéressa du château, le regard droit vers la Forêt de Firone dont ils apercevaient déjà la masse épaisse des arbres dans le lointain. L'urgence était de retrouver Link, de reforger son épée et ensuite... oui, ensuite, il pourrait aller tuer Ganondorf.

La nuit tombait alors qu'ils arrivaient à la lisière de la forêt. Le voyage avait été une épreuve pour le Gerudo. Comme il l'avait craint, Lovio et la petite peste s'entendaient à merveille. Loin d'avancer en silence, tous les deux n'avaient eu de cesse de discuter de choses futiles tout l'après-midi. Ils avaient eu de la chance de ne pas avoir ameuté les sbires de Ganondorf.

- Va chercher du bois, ordonna-t-il à Ghyni une fois qu'ils eurent trouvé un endroit où bivouaquer.
Hönir ne voulait pas s'engager dans la forêt en pleine nuit et avait choisi un coin à l'écart de la route, sous les premiers arbres de Firone.
- Et pourquoi je t'obéirais, suppôt de Ganondorf ? lui lança-t-elle avec morgue, croisant les bras de défi.
- Ghyni... ne l'appelle pas ainsi. Il n'a rien à voir avec l'autre, je te l'ai déjà dit, lui glissa Lovio. Tu veux bien aller chercher du bois, s'il te plaît ?
La jeune fille eut un soupir énamouré en regardant Lovio et hocha la tête.
- Tout ce que tu veux, Lovio.
Elle disparut en sautillant dans les bosquets alentours alors que Lovio s'approchait d'Hönir.
- Elle est adorable, tu ne trouves pas ? s'amusa-t-il.
- Non.
La réponse avait été cinglante, nette et tranchante comme une lame. Lovio leva les yeux au ciel.
- C'est une gamine, ne fais pas attention à ce qu'elle dit.
- Pourquoi tu ne l'as pas envoyée au relais ? Elle va nous ralentir, ou pire. Tu fais confiance à tout le monde.
- Et toi à personne, répliqua Lovio en haussant les épaules.
- Ça m'a maintenu en vie.

Hönir le planta là, se refermant comme une huître, et s'occupa de panser son cheval. Lovio le regarda longuement, puis il porta son attention vers la forêt. Link lui manquait. La dernière fois qu'ils avaient été séparés, il s'était retrouvé tout seul vers le désert, mais c'était un temps béni en comparaison d'un voyage avec Hönir. Il ne comprenait pas comment Frambra avait pu être amie avec un type aussi peu aimable ! Il soupira en pensant à la jeune femme et prit une grande inspiration. Il ne devait pas s'attarder sur la Gerudo, sur combien elle lui manquait. Il ne voulait pas se mettre à pleurer.

- Lo-vi-o ! J'ai ramené du bois !
Ghyni lui sauta sur le dos, entourant son cou de ses bras, ce qui le fit sursauter.
- Ça va ? Qu'est-ce que t'as dans les yeux ? demanda-t-elle en bondissant devant lui.
- Rien. Une poussière, répondit-il en retrouvant un sourire un peu forcé.
- C'est lui ? Il t'a dit un truc ? fronça-t-elle les sourcils. Il va voir !
Il l'arrêta en la prenant par le bras dès qu'il vit qu'elle sortait son poignard de son fourreau.
- Non, c'est pas lui. C'est...
Lovio détourna les yeux un instant. Il n'avait vraiment pas envie de parler de ça. Contre toute attente, il sentit un baiser léger sur sa joue.
- Tu vas voir, je vais te préparer un truc extra : de la grenouille grillée ! C'est hyper savoureux.
Sans lui laisser l'occasion de dire quoi que ce soit, elle se pendit à son bras, se collant contre lui. Lovio lui sourit gentiment.
- OK. J'ai acheté des épices au relais, on pourra peut-être concocter un bon petit plat tous les deux. J'adore faire la cuisine.
- Oh oui, oh oui !

Les yeux verts de Ghyni se mirent à briller telles deux émeraudes et Lovio sourit un peu plus largement. Le repas fut sommaire, mais relativement savoureux. Ghyni avait été très fière de son plat et tout ce qui l'avait intéressée était de savoir si Lovio l'avait apprécié.

- Dis, toi, fit-elle à Hönir alors que Lovio s'était absenté deux minutes pour assouvir un besoin naturel.
Le Gerudo leva la tête vers elle, intrigué. Elle l'avait complètement ignoré depuis leur dernier échange et cela lui convenait très bien.
- Tu sais si Lovio a... enfin... s'il a...
Le colosse fronça les sourcils en l'observant se tortiller d'un pied sur l'autre.
- Abrège, fit-il simplement de son habituel ton un peu sec.
- S'il a une petite amie à Cocorico ?

Hönir manqua de s'étouffer avec la fin de son repas. Il toussa et se frappa la poitrine du poing pour faire passer le morceau de grenouille qui avait failli mal passer sous la surprise.
- Lui ? Tu l'as bien regardé ?
- Oh oui... soupira-t-elle d'un air rêveur.
Le Gerudo leva les yeux au ciel. Il ne manquait plus que ça !
- C'est possible qu'il en ait une, répondit-il avec un sourire un peu mauvais.
C'était petit et mesquin, mais il n'avait pas pu résister. Elle le regarda, le toisant de toute sa petite hauteur bien que même assis par terre, il soit quasiment aussi grand qu'elle.
- Tu mens comme un arracheur de dents. C'est dans ton sang, probablement.

Hönir jeta son bol au sol et tendit la main pour l'attraper, mais elle fit un bond très souple en arrière. Elle le provoqua encore du regard, puis son expression changea du tout au tout en entendant Lovio revenir.
- Lo-vi-o ! tu m'as manqué ! cria-t-elle en lui sautant encore une fois au cou.
- Déjà ? Je ne suis parti que deux minutes, s'amusa l'Hylien en riant de bon coeur.
Hönir se passa la main sur le visage dans un soupir las. Cela n'allait vraiment pas être un voyage de tout repos. Peut-être qu'il allait suivre son plan : les attacher pendant leur sommeil et partir seul. Peut-être.

- Bon, il est tard, grommela Hönir. Je prends le premier tour de garde, puis ce sera ton tour, Lovio.
- Et moi ? demanda Ghyni.
- Toi, quoi ?!
- Je peux veiller aussi !
Hönir voulut lui répondre quand Lovio prit la parole.
- Tu es gentille de te proposer, Ghyni, c'est à nous de veiller sur toi, et non l'inverse.
Ghyni examina Lovio avec attention, ce qui mit celui-ci pour la première fois mal à l'aise.
- Je m'entraine au combat depuis l'âge de 5 ans. Et Sheik dit que je suis bien meilleure que lui à son âge. Ce qui fait que je suis sûrement plus apte à combattre un bokoblin que toi.
- Là-dessus, je suis d'accord avec elle, ricana Hönir.
- Mes bombes t'ont sauvé les miches, Gerudo.

Lovio se renfrogna, il croisa les bras et partit s'assoir près du feu. Hönir ramassa son cimeterre au sol et partit monter la garde à l'écart du feu. Ghyni s'installa à côté de Lovio. Elle regarda danser les flammes. Et pour la première fois depuis leur rencontre, elle était silencieuse. Lovio la regarda du coin de l'oeil, ce silence le gênait, il se racla la gorge et finit par le briser.

- Dis, Ghyni, tu nous as dit être une Sheikah.
La jeune fille ne quitta pas le feu des yeux et acquiesça de la tête.
- Comment cela se fait-il que tes yeux soient verts ? Les Sheikahs ont les yeux rouges, non ?
Ghyni ramena les genoux vers son visage et les entoura de ses bras. Elle posa son menton dessus.
- Je ne suis qu'à moitié Sheikah, ma mère en était une.
- Oh, je suis navré, lui dit Lovio.
Il posa sa main sur son dos et le caressa pour la réconforter.
- Qui est Sheik ? Tu en as parlé avant.
Ghyni se redressa.
- C'est un Sheikah comme moi, il est l'un de mes instructeurs. Je le considère comme mon frère. A Toal, c'est une des personnes les plus influentes avec Impa.
- C'est vrai ce qu'on raconte sur les Sheikahs ?
- Qu'ils sont les protecteurs de la famille royale ?
- Oui, mais il n'y a plus de Sheikahs en Hyrule depuis des décennies.
- Tu connais un peu l'histoire des Sheikahs ? l'interrogea Ghyni.
- Vous êtes un peuple de l'ombre, choisi par la déesse Hylia pour servir la famille royale.
- C'est dans les livres tout ça. Mais pour faire simple : il y a de ça bien longtemps, le roi d'Hyrule a voulu que le peuple Sheikah lui fasse allégeance pour ainsi profiter de nos pouvoirs et de nos forces. Notre chef a refusé car nous n'étions pas à son service pour conquérir et faire la guerre. Nous fumes exilés d'Hyrule pendant longtemps. Le roi actuel a voulu convenir d'un traité de paix et ainsi faire valoir la volonté de la Déesse. Mais un drame est survenu, je pense que tu connais la suite de l'histoire ?

Le silence s'installa de nouveau un long moment. Lovio fut réveillé par Hönir, le feu était éteint. Il regarda en direction de la boule allongée à côté de lui et se demanda quand est-ce que Ghyni s'était installée à ses côtés. Hönir se coucha sans un mot. Lovio fit quelques pas et scruta l'horizon. Il ne faisait pas totalement nuit, la lune était à moitié pleine. Il vit un rocher et s'installa dessus. Il commençait à penser à Link, il espérait que tout allait bien pour lui. Il se mit à rêvasser quand une brise glaciale lui caressa le coup. Il se leva dans un sursaut. Pris de panique, il observa tout autour de lui, mais il n'y avait rien. Hönir et Ghyni dormaient à poings fermés.

- Je ne suis pas une cocotte mouillée, je peux le faire comme un homme, un vrai.

La brise lui chatouilla la joue et un murmure lui parvient. C'était une voix familière, mais il n'arrivait pas à se rappeler où il l'avait entendue. Instinctivement, il se dirigea vers le bosquet. Il s'arrêta un instant et regarda vers lui comme s'il cherchait quelque chose. Il vit au loin des lumières danser. De petites boules vertes et jaunâtres tournoyaient.

- Ohhh des lucioles !

Le spectacle était si beau ! Il fit un pas vers elles, puis un autre, et un autre, quand il arriva soudain au bord d'une étendue d'eau. En son centre était érigée une statue. Lovio avança prudemment dans cette scène féerique. Il enleva ses chaussures et retroussa son pantalon pour rejoindre la statue. Ce n'était pas la première fois qu'il voyait une, mais celle-ci était différente. Une aura verte se dégageait d'elle. Il arriva devant la statue et reconnut Farore, déesse du Courage, quand un événement auquel Lovio n'aurait jamais pensé voir se produisit. Les petites lucioles se rassemblèrent devant la statue pour former une boule de lumière. Lovio, ébloui, mit les mains devant ses yeux. Une fois la lumière dissipée, il regarda la statue et vit un petit objet bleu à son pied. Il s'en approcha et le ramassa. La brise lui caressa une nouvelle fois la joue et la voix lui murmura de prendre soin de l'ocarina qu'il tenait dans ses mains. Puis ce fut le noir, le bosquet s'assombrit et Lovio se hâta de retourner auprès du campement, l'objet toujours à la main. Il vit Hönir se lever à son approche, et par reflexe il cacha l'objet dans son dos.

- Tu ne dors pas ? l'interrogea Lovio.
- Je prends le prochain tour, lui répondit le Gerudo.
- Hönir, le stoppa Lovio, ne sois pas trop dur avec la gamine, tu veux bien ?
- C'est une Sheikah, elle doit en avoir l'habitude, et puis on ne fait pas une excursion.

A ces mots, il s'éloigna du campement. Lovio voulut s'assoir, mais la nuit était fraiche et le feu ne crépitait plus. Il jeta de petites brindilles et quelques bouts de bois, ainsi qu'un tout petit peu de poudre qu'il utilisait pour ses bombes. Juste une pincée, c'était suffisant pour faire une flamme. Puis il s'installa en tailleur à côté de Ghyni. Il sortit l'ocarina de sa poche. Il le tenait délicatement au creux de ses mains. Il ne cessait d'examiner l'objet à la recherche d'un mode d'emploi, ou d'une minuscule inscription mais il ne trouvait rien. Il souffla bruyamment, et Ghyni se mit à gigoter à côté de lui.

- Mmmmmhhhh....
- Ce n'est rien, rendors-toi, lui dit Lovio en posant une main sur elle.
La jeune fille ouvrit un oeil, puis l'autre. Elle regarda Lovio un long moment sans rien dire, quand elle vit l'objet dans ses mains. Ghyni s'assit brusquement et fit sursauter Lovio qui manqua de faire tomber l'ocarina.
- Où as-tu trouvé ça ? lui demanda la jeune Sheikah.
- Euh, là-bas pourquoi ? répondit-il en désignant le bosquet du doigt.
- Je n'en crois pas mes yeux, il ressemble à l'Ocarina du Temps.
- L'Ocarina du Temps, s'étonna Lovio. Mais c'est une légende !
- Je peux ?
Ghyni tendit les mains avec un grand sourire et Lovio lui donna délicatement l'objet. La jeune fille l'examina prudemment.
- Regarde, ici, il y a le symbole de la Triforce, mais comment as-tu pu tomber sur cet ocarina !
- C'est le vent qui m'a guidé dans le bosquet.
- Le vent ? La déesse Farore ? Dans quelle aventure tes amis et toi vous êtes-vous embarqués ?

Lovio ne savait pas s'il devait tout lui raconter, Hönir l'avait déjà réprimandé une fois. Il reprit l'instrument des mains de la jeune fille, il sortit une boîte de sa sacoche et y posa doucement l'objet dedans.

- Cet ocarina a de grands pouvoirs selon les légendes que Sheik m'a racontées, reprit Ghyni. Il suffit d'en jouer des mélodies spécifiques et tu te retrouves téléporté dans certains endroits. Il paraît que l'on peut même reculer et avancer le temps, mais aussi...
Lovio regardait Ghyni qui s'excitait au fur et à mesure qu'elle racontait son histoire, et il décida de l'interrompre.
- Tu sais, c'est une petite babiole, on verra bien ce qu'on en fera, et puis si tu dis vrai, elle est destinée à...
- Bon, vous deux, c'est l'heure, on lève le camp, les interrompit Hönir. Si vous pouvez bavasser, vous pouvez aussi tenir assis sur le tapis.
Il mit un coup de pied dans le feu pour l'éteindre et jeta un peu de terre dessus.
- Ramassez vos affaires, on ne va pas s'éterniser ici. Et Lovio, ne perds pas l'objet que tu as mis dans ta sacoche, comme l'a dit la Sheikah, il pourrait nous servir.

Ghyni se retenait de l'insulter, après tout il avait écouté leur conversation, mais elle faisait beaucoup d'efforts pour Lovio. Celui-ci déroula le tapis qui s'étira et fit deux trois cabrioles avant de revenir à leur hauteur. Lovio jeta sa sacoche sur l'épaule et tendit une main à Ghyni. Celle-ci sentit ses joues rougir, elle lui prit la main et baissa un peu la tête pour ne pas être vue des deux garçons. Le tapis se plia de manière à faire une petite marche, la jeune fille s'installa sur le tapis suivie de Lovio.

- C'est parti, Tapis. En route pour les Bois Perdus, lui indiqua Lovio.
- Non.
- Non ? reprirent Ghyni et Lovio.
- Et on va où, demanda l'Hylien.
- Nous allons à Toal.
- Comment ça ? demanda la jeune Sheikah.
- Ton peuple a des connaissances que nous n'avons pas, on pourrait en apprendre plus sur cet objet et sur les légendes....
Tout en disant cela, Hönir monta à cheval.
- Je prends votre silence pour un oui. Direction Toal.
- Et Link ? demanda Lovio complètement perdu.
- Ne t'inquiète pas pour lui, il saura nous retrouver, le rassura Ghyni en lui agrippant le bras.

Chapitre 28 : Toal   up

Le lendemain, Link et Sheik sondèrent les bois pour trouver leur chemin. Le Sheikah avait envoyé "son" loup chasser pour qu'ils aient de quoi manger. Link essayait de demander à Navi de s'envoler pour voir au-dessus du feuillage des arbres mais elle semblait ne pas comprendre. Elle voletait autour de Link en criant "hey". Le loup revint, mais sa proie laissa Sheik perplexe.

- Les renards des plaines... comme leur nom l'indique, ne vivent pas dans les bois... le loup a peut-être trouvé le chemin !

Le loup pencha la tête sur le côté, la langue tirée. Sheik lui demanda de le conduire là où il avait chassé. Le loup, contrairement à Navi, fit une sorte de jappement et partit d'un léger pas vers un bosquet. Link emballa leurs affaires et les deux hommes le suivirent. Le loup marcha un peu, puis, d'un coup disparut sous un épais buisson. Sheik et Link se regardèrent. Ils se penchèrent et observèrent le buisson. Il était normal à première vue. Mais en regardant bien, il dissimulait une petite entrée vers la terre, une sorte de terrier de lapin mais en plus grand. Le loup fit un signe pour qu'ils viennent. Link se faufila, les jambes en premier. Il rampa et sentit Sheik descendre dans le boyau. Tous deux marchèrent à quatre pattes pendant un moment. Enfin, Link vit une légère pente qui remontait à la surface. Il sortit du tunnel, essaya de dépoussiérer ses habits et observa l'endroit où il venait d'arriver.

Les immenses arbres avaient laissé leur place à un paysage champêtre, mais néanmoins ils étaient dans un petit bosquet, cachés à la vue de tous. Une cachette idéale pour observer sans être vu. Quelques renards se promenaient dans le champ. Sheik apparut derrière lui et observa à son tour l'endroit. Il félicita le loup d'une petite tape amicale sur la tête. Ce dernier marcha un peu hors du bosquet, s'immobilisa et montra les crocs, les poils de l'échine tout hérissés. Une voix que Link connaissait bien gémit :

- Oh non petit loup, va-t'en... ne me mange pas...
- Je pourrais le maîtriser si jamais il devient agressif, dit une autre voix que Link connaissait tout aussi bien.
- Il a l'air gentil, regardez ! dit une voix cristalline.
Le loup revint auprès de Sheik. Une adolescente aux cheveux blonds presque blancs apparut, Lovio et Hönir la suivaient de près.
A la grande surprise de Sheik, Link se leva d'un bond pour sortir de leur cachette.
- Lovio ! Hönir !
- Liiiiiiiiiiink !
Lovio sauta de son tapis volant pour se jeter dans les bras de son ami de toujours. Il se mit à rire de joie.
- Où étais-tu passé ? Tu avais encore disparu !
Link s'écarta de son ami, un peu gêné de lui avoir causé du souci bien que toute cette histoire n'était vraiment pas de sa faute.
- Et vous ? Quelle surprise de vous retrouver là !
Link adressa un signe de la main à Hönir qui était descendu de son cheval. Le Gerudo se contenta de lui répondre d'un hochement de tête.
- Oh, on a plein de choses à te raconter ! continua Lovio surexcité. D'abord, il faut que je te présente notre nouvelle amie.
Il attrapa la main de Ghyni qui fit de son mieux pour ne pas rougir à ce contact.
- Elle s'appelle...
- Ghyni.

A l'appel de son prénom, la jeune fille reprit brusquement sa main, reconnaissant la voix avant même de voir Sheik sortir à son tour de sa cachette, le loup à ses côtés. Le Sheikah avança vers eux, le dos toujours aussi droit que d'ordinaire.

- Sheik... mais...
- Oh ! C'est ton mentor, fit Lovio en regardant le jeune homme les rejoindre.
- Tu la connais ? demanda Link à son nouveau compagnon.
Mais Sheik ne s'intéressait sur l'instant ni à Lovio, ni à Link. Son regard était uniquement fixé sur Ghyni qui regardait ses pieds, les mains derrière le dos. Il sembla à Hönir que si elle avait pu, elle serait devenue une souris pour disparaître dans le premier trou à sa portée.
- Sais-tu combien nous nous sommes inquiétés ? Où étais-tu passée ? demanda-t-il d'un ton sec sans pour autant élever la voix. On s'est tous fait un sang d'encre ! Et ton père ! Tu as pensé à ton père ?
- Je... C'est...
Hönir eut un sourire en coin en regardant l'adolescente.
- Alors, c'est ça la vérité : tu as fugué.

L'adolescente se tourna brusquement vers lui pour le foudroyer du regard, ce qui ne lui fit ni chaud ni froid. Sheik en profita pour la rejoindre. Le jeune homme était soulagé de la revoir saine et sauve, mais il ne pouvait pas passer l'éponge aussi facilement. Elle avait disparu le jour-même du départ d'Impa. Leur cheffe avait refusé de l'emmener sous le prétexte qu'elle n'était encore qu'une apprentie, qu'elle n'était pas prête. Depuis, le père de Ghyni et quelques autres la cherchaient partout. Si Sheik n'avait pas eu cette mission à remplir avec la barrière, il se serait lui aussi lancé à sa poursuite. Il mit sa main sur la tête de Ghyni et l'obligea à se plier en deux face aux amis de Link.

- Pardonnez-la si elle vous a gênés dans votre voyage, s'excusa-t-il en regardant enfin Lovio et le Gerudo. J'en porte la responsabilité, elle est mon apprentie.
- Oh non, pas du tout, s'empressa de dire Lovio, bien embêté pour sa nouvelle amie.
- Et bien, vous allez pouvoir la ramener chez vous et surtout, la garder, fit Hönir en haussant les épaules.
Lovio leva les yeux au ciel en entendant cela.
- Toi, on t'a pas laissé dans le désert, à ce que je sache.
- Répète ça un peu pour voir.
Link soupira en les voyant se défier du regard. S'il était surpris de voir Lovio faire face au Gerudo, il n'était pas étonné de constater que deux jours seuls sans lui n'avaient finalement pas arrangé leur relation.
- Et si on allait discuter de tout ça à Toal ? fit-il pour apaiser les tensions. Je pense qu'on a tous beaucoup à se dire.

Il échangea un regard avec Sheik. Ils avaient parlé de Toal la veille, ainsi que d'Impa et des circonstances de sa mort. S'il avait également évoqué Ganondorf et leur rencontre, il n'était pas rentré dans les détails au sujet de l'épée brisée, n'oubliant pas les mises en garde de l'Arbre Mojo.

- Les chemins à l'ouest se sont brouillés, approuva Sheik en regardant Ghyni qui ouvrit grand les yeux.
- Firone ne veut plus de nous ? Sa magie nous repousse ?
- Je n'en sais rien, mais nous devons nous hâter de rentrer au village. La barrière devrait être élevée très bientôt et il vaut mieux que nous soyons du bon côté quand ça arrivera.
Ils hochèrent tous la tête malgré les nombreuses questions qui se bousculaient dans leurs esprits et se mirent en route. Cette fois, Sheik semblait reconnaître les lieux et réussir à s'orienter sans difficulté.
- Sheik...
Ghyni avait attrapé sa manche, la tête basse.
- Impa, elle...
- Je sais, répondit-il plus doucement, posant sa main sur la sienne dans un geste d'affection. Link m'a raconté.

Ghyni se contenta d'un signe de tête, ravalant ses larmes. Elle glissa un coup d'oeil à son mentor. Le jeune homme ne laissait transparaître aucune émotion, comme d'habitude quand il était en mission. Pourtant, elle savait que son coeur devait être brisé : Impa l'avait élevé comme son propre fils, il l'avait toujours considérée comme sa mère. Pourtant, elle n'insista pas et lui lâcha le bras. Elle hésita, puis rejoignit Lovio pour se pendre à son bras, comme si de rien n'était. Elle voulait en profiter au maximum. Une fois à Toal, elle n'était pas sûre que son père ne l'assomme pas de corvées pour la punir de sa petite incartade.

***

Sheik guida le petit groupe à travers la forêt. Si le jeune homme et Ghyni restèrent quasiment silencieux tout au long du trajet, cela ne fut guère le cas de Lovio qui ne put résister à harceler Link de ses questions. Son ami, toujours amusé par tant d'enthousiasme, lui raconta alors sa rencontre avec Navi dans le petit bois près de leur campement, puis son arrivée chez les Kokiris. Devant un Lovio dont les yeux brillaient d'excitation et d'émerveillement, il décrivit le Village Kokiri et l'Arbre Mojo.

- Et qu'est-ce qu'il t'a dit ? Est-ce que tu as retrouvé tous les morceaux de l'é...
- Lovio ! l'interrompit sèchement Hönir.
- Quoi encore ? soupira l'Hylien en le regardant.

Le Gerudo lui fit les gros yeux, essayant de lui faire comprendre qu'il ferait mieux de la fermer. Il n'était pas encore certain de pouvoir faire confiance aux deux Sheikahs, mais surtout, il craignait que la forêt n'ait des oreilles malveillantes. Link attrapa son meilleur ami par la manche pour se rapprocher de lui et pouvoir murmurer à son oreille.

- Je te raconterai la suite plus tard, quand nous serons en sécurité. Tu vas voir, tu vas adorer.

Link lui sourit chaleureusement et Lovio n'eut d'autre choix que de capituler. Cela ne l'empêcha nullement de recommencer à bavarder, racontant à son ami tout ce qu'il avait raté depuis leur séparation. Si Link l'écouta volontiers, il ne pouvait cependant s'empêcher de jeter de fréquents coups d'oeil à Sheik et au loup qui les devançait de quelques mètres. Quelque chose l'interpelait chez ces deux-là, mais il n'arrivait pas à savoir quoi. En tous cas, son instinct lui soufflait qu'il pouvait leur faire confiance, aussi étrange que cela paraisse.

- Nous arrivons, annonça finalement Sheik.
Ghyni baissa la tête tristement. Depuis leurs retrouvailles, l'adolescente s'était faite le plus discrète possible, ce qu'Hönir aurait cru impossible. Sheik forma un appeau avec ses deux mains et lança un appel ressemblant au cri d'une chouette. Il guetta le silence de la forêt, puis recommença.
- Ho ! T'en as mis du temps, Sheik !
La voix grave venait d'un arbre à proximité. Debout sur une grosse branche, appuyé contre le tronc, Hergo les observait avec attention.
- Qui c'est, ceux-là ? demanda-t-il en sautant à terre.
Lovio cacha sa bouche de sa main en voyant la coiffure improbable du nouveau venu, n'arrivant pas à se retenir de pouffer de rire.
- Des amis. Jehd est prêt ? demanda Sheik.
- On n'attendait plus que toi. Hé ! Ghyni !
La jeune fille s'était cachée derrière Lovio, se cramponna à sa tunique à capuche. Le colosse roux s'avança vers eux et mit les poings sur les hanches.
- Mais où étais-tu passée, crevette ?
- M'appelle pas comme ça, sale coq ! répliqua-t-elle en lui tirant la langue.
- Un coq ?
Lovio éclata de rire.
- Un coq ! Mais c'est vrai !

Son rire se transforma en fou rire incontrôlable. Il finit par se tenir le ventre tellement il riait, incapable de se calmer. Hergo fronça les sourcils, contrarié que cet étranger se paye sa tête. Il allait répondre quand Hönir intervint.

- Toujours à faire le pitre. On peut y aller, oui ? râla le Gerudo en bousculant Lovio pour le faire cesser de se tordre de rire.
- Ne touche pas Lovio, toi ! rugit soudain la gamine, sortant son couteau dans un geste menaçant.
Hergo l'attrapa aussitôt par la capuche et la souleva de terre sans effort. Elle se débattit de son mieux, mais il ne lâcha pas sa prise.
- Toujours aussi vive à ce que je vois, fit-il en s'éloignant avec Ghyni.
- Mais lâche-moi, sale coq ! Gros bêta ! Crétin !
- Ghyni, ça suffit, trancha Sheik toujours sans élever la voix.
La jeune fille se tut aussitôt et croisa les bras, serrant la mâchoire. D'un geste, Sheik ordonna à Hergo de la reposer à terre.
- Assez perdu de temps. Dis à Jehd qu'il peut activer la barrière.

Hergo hocha la tête et disparut entre les arbres en appelant Jehd. Comme s'il n'y avait eu aucune interruption, Sheik reprit la marche, entraînant le groupe à sa suite. Très vite, cachée au milieu des arbres et des buissons, ils distinguèrent une haute barricade faite de rondins de bois. Un homme montait la garde dans un mirador. Il était vêtu de la même façon que Sheik et échangea avec lui un signe de la main.

- Bienvenue à Toal, leur annonça le jeune homme en les faisant passer sous un porche.

Au-dessus des grandes portes se trouvait une pancarte indiquant le nom du village encadré par le symbole de la Triforce et de l'oeil sheikah. Le garde souffla dans une corne, annonçant leur arrivée si bien que les habitants du village se regroupaient pour les accueillir quand ils arrivèrent au coeur du village. Link, Lovio et Hönir n'auraient jamais pensé qu'un endroit pareil puisse exister. La majorité des maisons étaient creusées dans les souches d'arbres gigantesques et Link trouva que cela ressemblait assez au village des Kokiris. Aucun des trois n'aurait également cru qu'autant de gens puissent vivre cachés au coeur de la forêt. Certains d'entre eux étaient indubitablement sheikahs, avec leurs cheveux blancs et leurs yeux rouge sombre. Les autres étaient hyliens. Tous portaient l'oeil sheikah brodé sur leurs vêtements ou comme bijou. Quelques-uns, essentiellement des Sheikahs, l'avaient tatoué sur le visage.

Sheik prit la parole, présentant ceux qui l'accompagnaient comme des amis, et certifiant que si Hönir avait le même visage que leur ennemi, il n'était pas Ganondorf. Il annonça également dans la foulée que Ghyni était de retour, mais aussi qu'Impa était malheureusement décédée. Si la première nouvelle avait été vécue comme un soulagement évident, la seconde plongea tout le monde dans une grande tristesse. Les plus anciens Sheikahs décidèrent alors d'organiser une cérémonie d'hommage à leur cheffe à la nuit tombée. Soudain, une grande lumière bleue éclata dans le ciel autour de Toal, surprenant tout le monde. Tous les regards se levèrent vers le dôme qui venait d'apparaître et dont on distinguait les vagues d'énergie.

- Le village est désormais protégé, annonça un Sheikah.
- Venez. Je vais vous installer chez moi, dit Sheik aux trois amis restés perplexes par ce qui venait d'arriver. Nous avons beaucoup de choses à nous dire.
Lovio resta en arrière un instant et sourit à Ghyni.
- Va retrouver ton père. Il a dû beaucoup s'inquiéter.
- Mais... Lovio...
- Nous nous verrons à la cérémonie, d'accord ?

La jeune fille soupira mais approuva d'un signe de tête. A la grande surprise du jeune homme, elle lui sauta dans les bras pour le serrer fort contre elle, puis déguerpit en quatrième vitesse, fendant la foule pour rentrer chez elle. Lovio la suivit du regard en souriant, attendri, puis rattrapa les autres qui arrivaient déjà devant la plus grande maison du village.

Chapitre 29 : Traîtrise   up

Ghyni courut jusqu'à la maison où elle avait passé son enfance. Elle toqua prudemment à la porte en bois massif et attendit que son père arrive. Quelques instants plus tard, un colosse arriva. Il avait exactement la même carrure que Honïr mais avait des traits sheikhas. Ses cheveux d'un blanc immaculé accentuaient la pâleur de son visage. Il portait des vêtements avec le symbole sheikah. Il ouvrit la bouche et une voix rauque en sortit.

- Ah, mademoiselle la fugueuse. Vous revoilà. Vous méritez une bonne correction pour avoir désobéi.
L'adolescente était toute rouge, fixait le sol et ne répondait rien. Le colosse reprit :
- Votre père vous attend au salon. Suivez-moi et restez bien devant. Je ne dois pas vous quitter des yeux.

Ghyni se plaça devant cet homme pour le moins singulier et marcha à travers un dédale de couloirs et de pièces. Enfin, elle déboucha dans le salon. C'était une immense pièce, sa décoration montrait la richesse que possédait le propriétaire autrefois. Malheureusement, les aïeuls de Ghyni avaient eu des dettes et leur fortune avait été dilapidée. Désormais, la maison tombait en ruine et le père de Ghyni n'avait plus assez de sous pour la restaurer. Dans ce salon se trouvait un canapé. Il était tout simple, mais il semblait terriblement confortable. Un vieil homme était dedans, et il avait l'air d'être englouti par les coussins. Rajoutez à cela une énorme couverture et des petits coussins d'un autre temps entassés sur le vieil homme, et vous aurez la vision qui s'est imposée à Ghyni. Le vieil homme tourna la tête.

- Merci, Nogna, de l'avoir amenée. Vous pouvez disposer.
Le colosse hocha la tête et sortit. Le père de Ghyni reprit :
- Tu m'as désobéi. Tu seras punie.
- Oui, Papa.
- J'aimerais qu'à l'avenir, tu écoutes un peu plus. Et que tu obéisses, naturellement.
- Papa...
- Oui, Ghyni ?
- Qui est cet homme... Nohan c'est ça ?
- Nogna. C'est un nouvel apprenti. Il souhaite qu'on le loge ici et en contrepartie, il aide à la maison. Un peu de renouveau ne lui fera pas de mal, s'esclaffa-t-il.
- Tu es au courant pour Impa ?
- Oui. C'est regrettable. J'ai grandi avec elle. C'était une femme extraordinaire. Pleine de vie et de charisme.
- Il y a une cérémonie en son honneur ce soir...
- Et tu veux y aller ?
Il leva un sourcil interrogateur.
- Oui, papa, si tu me le permets, promis je ne m'enfuirai plus.
- Je n'avais pas d'idée de punition, mais tu viens de m'en donner une. Tu n'iras pas, tu resteras enfermée dans ta chambre pour la soirée.
- Oh non, papa ! Tu ne peux pas ! Je veux revoir mes amis... et Lovio...
La petite fille rougit légèrement. Son père soupira.
- Une punition est une punition, Ghyni.
L'adolescente hocha tristement la tête. Alors qu'elle allait repartir, Nogna l'arrêta. Il était sur le seuil de la porte et paraissait étrange. Une lueur brillait au fond de ses yeux.
- Tu n'iras pas dans ta chambre, Ghyni... Tu viens avec moi sur la place. Nous allons assister à la cérémonie.
- Oh, c'est vrai !!?
- Oui. Et toi aussi le vieux. Vous avez intérêt à être gentils ou je vais m'énerver.

***

Pendant ce temps, le soir tombait doucement sur le village. Sheik avait conduit Link, Lovio et Hönir dans la maison qu'il partageait avec Impa. Elle était en forme de souche comme les autres, mais paraissait confortable. Chacun pouvait y être à son aise. Les garçons prirent un léger bain tour à tour dans l'étang juste derrière la maison. L'eau était merveilleusement chaude, Link s'étonna de cette particularité. En sortant, il passa des habits de cérémonie sheikhas et rejoignit Sheik tandis que Lovio se disputait sur son tour de passage avec Hönir. Le jeune homme blond s'assit près de Sheik.

- L'eau de l'étang était chaude. Comment cela est-il possible ? Même dans le Désert Gerudo l'eau n'était pas aussi chaude.
- C'est une source chauffée grâce à un geyser, fit Sheik en riant. C'est assez compliqué, mais l'eau est chaude quasiment tout le temps
- Ah d'accord. Quand partons-nous ?
On entendait derrière des protestations de Lovio et Hönir. Sheik soupira.
- Lorsque ces deux- là auront pris leur bain.

Finalement, tous furent prêts. Ils avaient de jolis vêtements de cérémonie. Comme il leur restait un peu de temps avant de partir, Link raconta sa rencontre avec les Kokiris et l'Arbre Mojo, puis ce qui s'était passé avec le petit lutin que Sheik appela un Skullkid avant d'enchaîner sur l'attaque du Lynel. Quant à Hönir, Lovio et Ghyni, ils avaient rapidement trouvé leur chemin dans la forêt grâce à la jeune fille. Cependant, il était évident maintenant qu'elle avait peut-être un peu ralenti le pas ou les avait fait tourner en rond de crainte de retourner au village qu'elle avait fugué. Ils se levèrent finalement et repartirent en direction de la place, à l'exception d'Hönir qui préféra d'abord s'occuper de leurs bagages en prévision d'un départ rapide.

Au centre du village régnait une atmosphère particulière. Les jeunes enfants couraient, les parents discutaient entre eux et les anciens se concertaient. Les garçons arrivèrent. Lovio chercha du regard Ghyni, sans la trouver. Enfin, un ancien demanda le silence. Chaque habitant devint silencieux et grave, et s'assit par terre, en cercle autour du feu. Derrière se tenait une tombe. Les anciens chantèrent un peu, leurs voix accompagnées de celles des femmes. Enfin, l'un d'entre eux prit la parole et selon les coutumes, procéda à l'enterrement des vêtements de cérémonie d'Impa, faute d'avoir son corps. Le silence était interrompu seulement par le hululement d'un hibou au loin. Soudain, on entendit au loin une petite voix crier, celle d'un vieil homme se lamenter et enfin une voix profonde qui grondait des ordres. Vous l'aurez compris, Ghyni, son père et Nogna venaient d'entrer en scène. Il gardait attachés l'adolescente et son père par de solides liens. Il les poussait. Enfin, il s'adressa aux anciens :

- N'enterrez pas ces vêtements.
- Nogna ? Mais...
- Faites ce que je vous dis ou je tranche la gorge de ces deux-là.

Il sortit un couteau de son manteau et le fit briller au clair de lune. Il mit la lame sous le menton de Ghyni avant de sourire. Link observait la scène, comme tous les autres habitants. Seulement, le sourire et la manière de faire rappela à Link une certaine personne, mais il n'arrivait pas à se souvenir qui. Il se contenta d'observer la scène. Les anciens s'entretenaient entre eux. De temps en temps l'un d'eux jetait un coup d'oeil vers le colosse. Il semblait s'impatienter. N'y tenant plus, il fondit vers le cercueil. Les anciens tentèrent de l'arrêter, en vain. Il prit les vêtements de la vieille dame et les mit dans un sac sans aucun scrupule. Les habitants se levèrent et protestèrent. Le colosse prit Ghyni et remit son couteau sur sa gorge. Le sang perla.

- Le premier qui s'approche, je tranche la gorge à cette fille, la honte de votre peuple, celle qui vous a trahis !
Les habitants chuchotèrent entre eux. Trahis ?
- Elle parle si fort et si souvent que j'ai réussi à la suivre jusqu'ici. Mes gardes sont juste de l'autre côté de ce barrage, vous êtes tous mes prisonniers. Vous allez donc gentiment me laisser partir avec les habits de la vieille Impa.
Soudain, Link se rappela, alors que le colosse fit une pause, enleva sa perruque, dévoilant des cheveux roux vifs. Il eut un sourire machiavélique avant de dire :
- Prosternez-vous devant votre nouveau roi, Ganondorf...

Le sortilège d'illusion qui lui avait donné un autre visage pour mieux s'infiltrer prit fin en même temps qu'il ôtait sa perruque, et le visage de Ganondorf apparut clairement à tous. Il y eut des cris de terreur et de stupéfaction mêlées. Les femmes agrippèrent leurs enfants contre elles et beaucoup regardèrent la barrière d'énergie magique au-dessus d'eux. Elle était toujours là pour protéger le village et ses habitants, mais le danger n'était pas à l'extérieur. Il était bel et bien à l'intérieur. Les guerriers sheikahs se positionnèrent aussitôt entre Ganondorf et les Toaliens, prêts à sortir leurs armes.

- Non ! ordonna aussitôt Sheik en levant le bras pour les empêcher d'avancer.

Le jeune homme ne quittait pas le Fléau des yeux, ni la pauvre Ghyni qui retenait difficilement ses larmes. Il essayait de trouver une échappatoire et espérait que certains de ses compatriotes s'étaient déjà éclipsés pour aller vérifier ce que Ganondorf venait de dire sur ses troupes. Le silence qui régnait sur le village fut soudain interrompu par un petit bruit incongru, comme quelque chose de mécanique qui roulait. Un étrange objet percuta le pied de Ganondorf. Le Gerudo, surpris, regarda au sol pour découvrir une espèce de souris métallique sur roulettes. Sa queue flexible bougeait légèrement et la sphère qui en ornait le bout clignotait en rouge, comme le museau.

- Ghyni !

La jeune fille comprit au cri de Lovio qu'il fallait qu'elle bouge. Par chance, Ganondorf avait relevé la tête vers Lovio qui le toisait d'un sourire mauvais, brandissant fièrement la télécommande de ses missiles. D'autres arrivaient vers le Gerudo dans le même bruit mécanique. Comprenant le danger, il relâcha son étreinte sur la jeune fille qui en profita pour glisser au sol et bondir loin de lui. Ganondorf n'eut le temps de rien faire que Lovio appuya sur le bouton de sa télécommande, faisant exploser tous les missiles.

- Dis merci à la Grande Fée ! hurla-t-il sous les yeux ébahis de Link qui ne s'était pas attendu à cela, ayant un peu oublié l'existence de ces bombes mobiles.

La déflagration jeta au sol les personnes les plus proches de Ganondorf et tout le village fut soudain noyé sous une fumée âcre. Sheik s'était précipité pour récupérer Ghyni, la protégeant de son corps, alors que les habitants fuyaient les lieux. Le jeune homme avait confiance dans les gens de Toal pour qu'ils se mettent à l'abri de façon efficace et sans trop de panique. Depuis que les Sheikahs vivaient ici, ils avaient été entraînés pour ce genre de situation.

Un rire sinistre retentit au coeur de la fumée. Entre deux quintes de toux, Sheik, Link et Lovio aperçurent une lumière rouge dans la brume. La seconde qui suivit, une déflagration de pouvoir les frappa, la fumée se dissipa et Ganondorf, flottant dans les airs à quelques mètres du sol, redescendit à terre. Link chercha une arme des yeux, mais ils étaient tous venus sans pour rendre hommage à Impa. Sheik avait bien une dague, mais cela ne suffirait pas.

- Je dois avouer que je n'avais pas vu cela arriver, se moqua Ganondorf en époussetant ses vêtements.
Les bombes avaient réussi à le blesser à la jambe droite, mais pour le reste, il était indemne. Il avait malheureusement eu le temps de se protéger par magie. Il regarda Lovio.
- Je m'occupe de toi dans une minute. D'abord, l'Elu de la Déesse, fit-il en tournant la tête vers Link, toujours désarmé.
Il se mit à rire quand Sheik, abandonnant Ghyni, vint se mettre entre lui et Link en position de combat.
- Comme vous voulez. De toute façon, je ne laisserai aucun Sheikah vivant.

Il prit son élan, arme en main, mais alors qu'il bondissait sur ses adversaires, il fut brutalement projeté à terre. Il ne comprit ce qu'il se passait que lorsque le poing de son frère jumeau s'écrasa sur sa mâchoire avec une violence qui n'avait d'égal que la rage d'Hönir. Les minutes qui suivirent ne furent qu'échanges de coups de part et d'autre, les jumeaux roulant au sol dans une étreinte qu'ils voulaient mortelle pour l'autre.

- Hönir !
Link appela son ami, mais le Gerudo ne l'écoutait pas, complètement envahi par la rage de tenir enfin l'assassin de Frambra sous ses poings.
- Ordure, tu vas payer pour Frambra, fit Hönir, une lueur meurtrière dans les yeux.
- Quoi ? Tu vas me blâmer pour ça ? C'est uniquement de ta faute si elle est morte, répliqua Ganondorf avec une haine palpable. TA faute !
Hönir serra encore plus fort la mâchoire à cette remarque qui ne faisait qu'appuyer sur la culpabilité qu'il ressentait pour la mort de son amie. Dans un cri, il se jeta à nouveau sur son frère qui lui rendait ses coups.
- Ghyni ! Tu n'es pas blessée ?
Lovio avait rejoint la jeune fille qui hocha la tête, encore sous le choc. Elle se jeta soudain à son cou et le serra si fort qu'il crut qu'elle allait lui déboîter une épaule. Gentiment, il lui tapota le dos et l'entraîna plus loin, hors de portée du combat.
- Tout va bien, Ghyni.

Lovio jeta un coup d'oeil aux Gerudos qui continuaient à se battre, un goût amer dans la bouche. Il n'avait pas réussi à tuer Ganondorf comme il se l'était promis. Il regarda finalement Ghyni qui s'agrippait toujours à lui et soupira. Au moins, il avait sauvé leur nouvelle amie. Quand il avait vu la lame de Ganondorf sur sa gorge, il s'était retrouvé complètement glacé et pétrifié. L'histoire se répétait. Ganondorf menaçait encore quelqu'un à qui il tenait devant lui. Sauf que cette fois, il avait pu agir, et même s'il avait échoué à pulvériser leur ennemi, Ghyni était saine et sauve. Lovio vit passer Hergo en courant devant lui. Le colosse de Toal rejoignit Sheik et lui remit ses sabres, ainsi qu'une épée pour Link.

- Jehd est parti à la barrière, cria-t-il à Sheik.
Celui-ci jeta un oeil aux alentours et aperçut Lovio.
- Lovio ! Accompagne Hergo auprès de Jehd. Ghyni, avec eux !

Lovio serait bien resté avec Link, mais il comprit aussitôt ce que Sheik avait en tête. Il siffla et le tapis débarqua en quatrième vitesse pour le soulever avec Ghyni. Ils prirent Hergo au passage. Si les troupes de Ganondorf étaient vraiment dans le coin, les Sheikahs auraient bien besoin d'une assistance aéroportée. Alors que tous les trois disparaissaient avec le tapis, Hönir poussa un cri de douleur, la lame de son frère plantée dans le flanc droit. Il glissa au sol, mais tenta de se relever.

- Non, Hönir.
Link avait bondi à ses côtés, l'empêchant d'ôter la lame de sa blessure. En faisant cela, il risquait de déclencher une hémorragie fatale. Tous les deux échangèrent un regard, mais Hönir ne comptait pas abandonner face à son jumeau malgré sa blessure.
- Il est à moi, tu l'as promis.
- Je sais, mais je me suis promis aussi qu'aucun de mes amis ne mourrait de ses mains.

Il se redressa pour rejoindre Sheik et le loup qui faisaient face à Ganondorf. Celui-ci était blessé et épuisé. Link trouvait étrange qu'il ne se serve pas de sa magie contre eux comme dans le temple. Depuis l'explosion, il n'avait pas eu recours à ses pouvoirs. Peut-être n'en avait-il plus en réserve ?
Ganondorf regarda Link avec mépris.

- Tu crois être assez fort pour me battre ? Tu n'as même pas l'Epée de Légende. Elle est brisée.
- Et elle sera reforgée, crois-moi, répondit Link prêt à se battre.

Le loup montra les crocs. S'il ne connaissait pas ce Ganondorf-là, il savait quel monstre il cachait à l'intérieur de lui. Tout son être se hérissait à l'approche de la Bête qu'il avait déjà affrontée autrefois. Alors qu'il allait se jeter sur lui, suivi par Sheik et Link, une intense lumière blanche les fit reculer et se protéger les yeux.

- Qu'est-ce que... Non ! Non ! Pas maintenant ! entendirent-ils crier Ganondorf de rage.

La lumière explosa, les obligeant à fermer les yeux. Quand l'obscurité de la nuit reprit ses droits, Ganondorf avait disparu. A sa place se tenait un vieil homme vêtu d'une longue robe jaune. De la main gauche, il se tenait appuyé sur un grand bâton alors que de la droite, il lissait sa longue barbe blanche.

- Ah la la, mes enfants, j'ai bien cru que je n'arriverais pas à temps.
- Sahasrahla ! Mais que faites-vous là ? s'exclama Link sans en croire ses yeux.
Les jambes du vieil homme se dérobèrent sous lui et Sheik le rattrapa de justesse. Le sage le regarda avec un petit sourire malicieux bien qu'il était évident qu'il était complètement épuisé.
- Toal est sauvé, mais je n'ai plus de pouvoir, mes enfants, murmura-t-il.

Le vieil homme s'évanouit alors que derrière eux, Lovio revenait en leur criant que les troupes ennemies venaient de disparaître dans un flash de lumière. Sheik tenait fermement le Sage dans ses bras.

- Il a besoin de repos. Link, viens m'aider à le transporter chez moi !
Celui-ci approuva d'un signe de tête. Lovio, toujours sur son tapis, les rejoignit.
- Que s'est-il passé ? Que fait le Sage Sahasrahla ici ? Il y a eu un éclair de lumière et pouf ! les sbires de Ganondorf ont disparu ! Et Ganondorf, où est-il ? Le Sage... il est... et Hönir ?
- Du calme, Lovio, le coupa Link. Ganondorf a disparu grâce à l'intervention du Sage. Et ne t'inquiète pas, il s'est juste évanoui. Nous l'emmenons se reposer chez Sheik.

Hönir avança doucement vers le groupe, un morceau de tissu appuyé sur la plaie pour arrêter l'hémorragie. En le voyant, Lovio sauta du tapis et lui proposa de s'allonger dessus. Hönir grommela, mais ne protesta pas davantage.

- Merci pour ta bienveillance, lui dit Sheik. Ton ami peut le transporter jusqu'à ma maison.

Chapitre 30 : Nouveaux buts, nouveaux chemins   up

Une fois chez Sheik, Hönir s'affala dans un fauteuil. Lovio regarda sa blessure et recousit la plaie. Les jours du Gerudo n'étaient heureusement pas en danger. De leur côté, Link et Sheik déposèrent le Sage sur une couchette et veillèrent tour à tour sur le vieil homme. Ghyni finit par les rejoindre une fois le calme revenu sur Toal. Hönir, quant à lui, était finalement sorti, préférant rester dehors à monter la garde, même avec une blessure. Un peu plus tard, Jedh vint les prévenir qu'il avait vérifié le dôme avec Hergo et que tout fonctionnait parfaitement.

Après plusieurs heures, le Sage ouvrit les yeux péniblement. Le loup, qui se trouvait au pied du lit, leva la tête en direction du vieil homme qui bredouilla quelques mots.

- Link... épée... temps... fléau...
Sheik, au chevet du Sage, chercha Link qui était installé autour d'une table avec les autres.
- Il se réveille et te demande.
Link se leva et entra timidement dans la chambre, suivi de Sheik.
- Sahasrahla, vous m'avez demandé ?
- Link, mon petit... approche... s'il te plaît...
Link s'installa aux côtés du vieil homme.
- Je suis faible, la magie me quitte...
- Je peux revenir, lui dit Link.
- Mon petit, je suis mourant... Sans la lumière, je ne peux survivre... dit-il difficilement.
Link lui prit la main pour le rassurer du mieux qu'il le pouvait.
- Tu es en possession de Fay...
Link acquiesça.
- Il te faut la réparer... mais...
Le vieil homme chercha son souffle du mieux qu'il le pouvait, il sentait la magie et la vie le quitter doucement.
- Sahasrahla !
Link bondit sur ses pieds de peur que le Sage ne rende son dernier souffle.
- Il te faudra surmonter bien des épreuves... mon petit...
Lovio, qui était caché derrière la porte entrouverte, se montra.
- Sage Sahasrahla, y a t-il un moyen de vous aider ?
- Fa... ro... re, toussa le vieil homme. Temps...
Le Sage avait de plus en plus de mal à parler et dans un dernier souffle, il arriva à dire :
- O... carina... princesse...

Ses yeux se refermèrent. Le Sage paraissait endormi. Le loup hurla et Lovio versa une larme. Quant à Link, il tenait toujours la main du vieil homme dans la sienne. Sheik s'avança et mit une main sur l'épaule de Link, c'était sa manière de réconforter quelqu'un. Link posa délicatement la main du Sage et le recouvra d'un drap blanc. Les trois garçons et le loup retournèrent auprès des autres pour leur annoncer la mauvaise nouvelle et leur faire part de ce que le vieil homme leur avait dit.

- Nous voilà sans Sage ? s'interrogea Ghyni.
- Seule la descendance peut prétendre au titre de Sage, répondit Sheik.
Link s'installa à table, encore secoué par l'événement.
- Tu es en possession de l'Epée de Légende ? demanda Sheik.
Link sortit de sa besace l'épée, morceau par morceau. Il ne savait toujours pas pourquoi, mais il avait confiance en Sheik.
- Elle est brisée, s'étonna le jeune homme.
- Oui, mais je sais comment la réparer. L'Arbre Mojo m'a dit de me rendre sur les terres bénies des trois Déesses : la terre aride de Din, celle engloutie de Nayru et le sommet perpétuellement soufflé par les violentes bourrasques de Farore. Là-bas, je trouverai les minerais sacrés : alzanine, aquanine et smaragdine.
- Très bien. Si cela ne te dérange pas, je vous accompagnerai.
Hönir ouvrit la porte d'entrée et dit :
- Autant de monde pour ces recherches, nous ne passerons pas inaperçus.
Sheik approuva.
- Il va falloir se séparer.
- Encore ! s'exclama Lovio.
- Lovio viendra avec moi ! dit Hönir.
- QUOI !!! hurla ce dernier.
- Tu m'insupportes, petit Hylien, mais il faut avouer que tu es utile parfois.
- Bien, j'irai donc avec Link et le loup, continua Sheik.
- Et moi ? demanda une petite voix toute faible.
Sheik se retourna pour faire face à Ghyni.
- Comment ça "et toi" ?!
- Il est hors de question que je laisse Lovio avec cette brute.
Hönir roula des yeux et croisa les bras sur son torse.
- Ta place est avec tes copines, fillette, grommela le Gerudo.
- Je viens puis c'est tout, je suis une Sheikah.
- Non Ghyni, l'interrompit Sheik.
- Je viens. Il faut bien que je veille sur Lovio, et puis le Sage a parlé de l'Ocarina du Temps.
- Oui et ?
Lovio venait de comprendre, il laissa Sheik et Ghyni jouer à "oui, je viens et non, tu restes" le temps de trouver l'objet qu'il avait soigneusement mis dans sa sacoche.
- J'ai trouvé ça dans la forêt au pied de la statue de Farore.

Soudain le silence, Lovio tenait l'ocarina devant lui pour le montrer à tout le monde. Sheik, après avoir demandé l'autorisation, examina l'instrument sous toutes les coutures.

- Je savais bien que tu me cachais un truc, fit remarquer Hönir à Lovio qui se contenta de hausser les épaules.
- Venez avec moi.

Sheik les entraîna à l'extérieur jusqu'à un arbre presque aussi grand que l'Arbre Mojo. A l'intérieur était installée une vaste bibliothèque. De très nombreux livres étaient disposés sur des étagères qui épousaient la forme du tronc. Les lieux étaient éclairés par de grands lustres. A cette heure, la bibliothèque était vide, à l'exception, évidemment, de Jehd qui était penché sur une grande table de travail au milieu d'ouvrages qui avaient l'air très anciens. Hergo n'était pas loin, à ronfler dans un fauteuil.

- Jehd, j'ai besoin de tes lumières.

Le jeune homme fut surpris de voir tout ce monde, mais il le fut encore plus lorsque Sheik lui remit l'ocarina. Devant les yeux écarquillés de Link, Lovio et Hönir, le jeune homme bondit sur ses pieds et, en marmonnant des choses pour lui-même à une vitesse impressionnante, il fila vers les rayons sans plus se préoccuper d'eux. De temps en temps, il se parlait à lui-même, se posant des questions et faisant les réponses.

- Ne vous inquiétez pas, il fait ça tout le temps, fit Sheik avec un léger sourire amusé.
- Tout à l'heure, Ghyni a dit qu'il n'y avait plus de Sages... Sahasrahla en était un, il me l'a raconté à Cocorico.
Il s'était passé tellement de choses depuis cette discussion que le jeune homme n'était plus très sûr de ce que le vieil homme lui avait dit.
- Autrefois, il existait sept Sages, approuva Sheik. Leurs pouvoirs combinés permettaient de garder scellé le Banni. Mais ces dernières décennies, trois lignées se sont éteintes. Et maintenant que lui et Impa ne sont plus là...
- Ganondorf était là à cause d'Impa, non ? demanda Lovio.
- Il m'a demandé où était son corps, fit Ghyni d'une toute petite voix. Je crois qu'il était là pour ça, mais vous l'aviez déjà enterrée. Cela l'a mis en colère et il a dit que les vêtements de cérémonie devraient suffire...
- Suffire à quoi ? fit Hönir, ne comprenant pas à quoi son jumeau pouvait penser.

Ils se regardèrent tous sans avoir la moindre idée de la réponse. Finalement, Sheik bougea pour aller secouer Hergo et lui demander d'aller chercher deux Sheikahs en particulier. Son ami bougonna un peu d'avoir été réveillé en sursaut, mais obtempéra.
- J'ai trouvé quelque chose, cria soudain Jehd en sortant la tête d'un livre.
Il revint avec et le posa sur la table pour que tout le monde puisse voir une superbe enluminure ancienne de l'Ocarina du Temps entre les mains d'une jeune fille blonde portant une couronne et les symboles de la Triforce sur sa robe.

- Voilà. C'est un très ancien conte. Je savais bien que j'avais déjà lu quelque chose sur un ocarina. Il y a tellement de légendes sur des instruments qui...
- Jehd. S'il te plaît, l'interrompit Sheik.
- Ah... oui. Pardon.
Le rat de bibliothèque remit ses lunettes en place et se passa la main dans les cheveux de son habituel air emprunté.
- C'est bien l'Ocarina du Temps, fit-il en montrant la gravure. Il appartient à la famille royale depuis des temps immémoriaux. Il était transmis aux princesses, qui étaient les gardiennes du Chant du Temps créé par les Déesses.
- Ça ne nous avance à rien, intervint Hönir brusquement. Le roi n'avait pas de fille.
- Et l'ocarina avait disparu depuis longtemps, continua Jehd en montrant une note dans le bas d'une page de l'écriture d'Impa.
- Et sur la réincarnation de la Déesse, que sait-on ? demanda Link.
- Cela fait partie des légendes que les Sheikahs se transmettent de génération en génération, expliqua Jehd.
Il leur raconta alors la légende de la Déesse Hylia et du Banni, ainsi que du premier Héros. Il fallut que Sheik recentre son récit plusieurs fois pour qu'il reste le plus concis possible.
- Pourquoi t'intéresses-tu à cela ? demanda Sheik.
- Parce que l'Arbre Mojo m'a dit qu'en plus des minerais sacrés, il fallait une larme de la réincarnation de la Déesse Hylia. Apparemment, c'est indispensable pour que l'épée retrouve toute sa puissance. Enfin, s'il ne s'est pas trompé une deuxième fois... Je crois qu'il s'emmêle un peu les idées parfois.

Link était même en train de se dire que, par mesure de précaution, il ramènerait aussi les ingrédients de l'engrais spécial. Au cas où.

- La réincarnation de la Déesse Hylia ! Rien que ça ! s'exclama Hönir qui commençait à en avoir assez qu'on leur donne des quêtes impossibles. Tout ce que je veux, c'est tuer Ganondorf une bonne fois pour toutes.
Il frappa du poing sur la table si fort que cela fit sursauter le pauvre Jehd, Ghyni et Lovio.
- Et c'est ce que nous ferons, Hönir, lui rappela Link. Il est hors de question que nous échouions.
Les deux hommes échangèrent un regard qui sembla calmer le Gerudo. Link ne mentait pas lorsqu'il disait cela. Leurs raisons étaient différentes, mais leur but était le même.
- Pour ce qui est de la réincarnation de la Déesse et le Chant du Temps, peut-être que les deux Sages restants auront une piste, reprit Sheik alors qu'Hergo revenait avec deux Sheikahs. Je vais envoyer les chercher. Nous devons les protéger si Ganondorf en a après eux.
Le jeune homme donna ses instructions. Les Sheikahs hochèrent la tête et s'éclipsèrent aussitôt pour remplir leur mission.
- Nous devrions aller nous coucher, reprit-il en revenant vers le groupe. L'aube sera bientôt là et nous ne devons pas tarder à nous mettre en route pour aller chercher ces minerais.
- Ho ! Quels minerais ? Tu t'en vas ? demanda Hergo.
- Oui, et toi aussi.
Sheik mit rapidement Jehd et Hergo au courant de la situation.
- Nous avons besoin de toi ici, fit-il à Jehd. Ganondorf sait où nous sommes. Il pourrait revenir.
- Je m'occupe de la barrière, tu peux compter sur moi. J'ai aussi quelques idées pour rajouter des protections et des pièges.
- Tu vas encore devoir danser et je vais louper ça ? se moqua Hergo.
- Lovio et Hönir vont se rendre chez les Gorons.
- Pourquoi là-bas ? demanda le Gerudo par simple curiosité, la destination lui important finalement peu.
- Les Gorons respectent la force. Si jamais ils imposent quelques épreuves pour donner l'alzanine, tu seras en mesure de gagner.

Hönir hocha la tête. Cette raison lui convenait. Lui aussi avait entendu parler des compétitions de force que les Gorons organisaient entre eux et il voyait mal une crevette comme Link arriver à les remporter.

- Link et moi, nous irons chez les Zoras pour l'aquanine. J'en connais quelques-uns, cela nous facilitera la tâche.
Sheik se tourna vers Hergo.
- Quant à toi, tu vas aller chez les Piafs pour demander la smaragdine à leur chef. Demande à Priya de venir avec toi. Elle est la meilleure ici avec un arc. Méfiez-vous, il y a des lynels dans les plaines de l'ouest.
- Ça marche, Sheik, approuva le rouquin en se frappant le torse du poing.
- Et moi ? demanda Ghyni avec le plus d'aplomb possible.
- Toi, tu restes ici, fit son mentor avec fermeté. Tu aideras Jehd dans la protection du village.
- Mais... Sheik ! Je veux rester avec Lovio ! Je veux dire... je veux l'accompagner, je leur serai utile.
- Ghyni, quelle est la première chose qu'on enseigne à un Sheikah ?
Le jeune homme la regardait avec un sérieux qu'elle ne lui avait connu que rarement.
- D'obéir aux ordres, de toujours remplir sa mission, murmura-t-elle, une boule dans la gorge.
- Tu as déjà désobéi une fois. D'ordinaire, cela serait la fin de ton apprentissage. Tu as une seconde chance, ne la gâche pas.

La jeune fille hocha la tête, le dos droit malgré l'envie de pleurer. Elle ne versa aucune larme cependant, restant digne. Sheik se radoucit et posa sa main sur sa tête avec affection.

- Jehd et le village ont besoin de toi. J'ai besoin que tu restes ici pour protéger ceux qui ne savent pas se battre.
Après ces paroles, ils prirent tous la direction de la sortie.
- Attendez ! J'allais oublier ! cria Jehd en courant pour les rattraper, le bâton Anima dans une main.
Il brandit le bâton et le fit tourner entre ses doigts.
- Si vous passez la barrière, vous serez coincés derrière, sauf si je vous donne la clé. Il faut que je... enfin, vous savez...

Il rougit, puis exécuta une petite danse devant un Link abasourdi, un Lovio hilare et un Hönir désabusé. Hergo faillit faire une remarque, mais Sheik l'en empêcha d'un regard. La danse de Jehd fut plus courte que pour allumer les statues et cette fois, ce fut le bas du bâton qui s'illumina. Le bibliothécaire essoufflé attrapa la main de son ami et y pressa le bout lumineux. Un glyphe s'imprima dans la paume du Sheikah avant de disparaitre. Il fit ensuite de même avec chacun de ceux qui devaient quitter le village.
- Voilà... C'est fait...

Sheik remercia son ami d'une accolade et Jehd leur souhaita bonne chance. Ils rejoignirent ensuite la maison du Sheikah pour profiter de quelques heures de sommeil avant leur nouvelle séparation. Avant d'entrer, Lovio, l'ocarina à nouveau en poche, regarda une dernière fois derrière eux. Ghyni avait disparu bien avant que Jehd ne leur donne la clé. Il avait de la peine pour elle, mais il préférait la savoir en sécurité ici plutôt que sur les routes avec eux. Il espérait pouvoir lui dire au revoir avant de partir.

Chapitre 31 : Le départ   up

Le matin venait à peine de se lever et Sheik, Hönir et Link étaient réveillés. Lovio, lui, était encore couché, les bras écartés, un pied hors de la couverture, à ronfler à pleins poumons, la bouche ouverte. Link l'observait, assis sur une chaise.

- Il arrive toujours à dormir, peu importe les évènements en cours, déclara-t-il.
- Oui, s'il pouvait seulement le faire en silence... grommela Hönir.
Link rit, suivi de Hönir.
- Avec ses ronflements, il risquait de rameuter tous les sbires de mon frère. Je ne comprends toujours pas comment la gamine arrivait à fermer l'oeil, couchée à ses côtés, ricana le Gerudo.
- Il paraît tellement insouciant... et je pense que Ghyni a un petit faible pour notre ami.
- Petit, c'est peu dire...

Hönir et Link continuèrent de rigoler. Quant à Sheik, il terminait de rassembler quelques vivres pour le voyage. Au vu du raffut fait par les deux hommes, Lovio ouvrit péniblement les yeux. Il s'était assis en tailleur sur la couverture qui lui servait de lit et s'étira, bafouilla quelques mots que personne ne comprit, puis il reprit, son esprit soudain réveillé par une odeur.

- Quelle est cette délicieuse odeur ?
- Oeuf au plat au riz, lui répondit Sheik.
- Ohhh ! ça a l'air bon, je peux ? demanda-t-il en désignant le repas alléchant.
- Bien sûr.

Ni une ni deux, Lovio sauta sur ses jambes et s'installa à table avec ses amis. Il engloutit de grosses fourchettes de l'assiette que lui avait donnée Sheik. Celui-ci continua de vaquer à ses occupations, allant et venant d'une pièce à une autre, remplissant les sacs quand il s'arrêta net dans l'embrasure d'une pièce qui semblait être un bureau. Il tenait un papier à la main qu'il semblait essayer de décrypter.

- Tout va bien ? lui demanda Link.
Sheik leva les yeux du parchemin :
- C'est un parchemin adressé à Impa. Il a dû être déposé là par Priya. Je l'ai ouvert, mais je ne comprends rien de ce qui est écrit dessus, les lettres sont mélangées. Cela ne veut rien dire, expliqua-t-il, perplexe.
Link se leva pour le rejoindre. Il observa le parchemin avec attention.
- De qui cela vient-il ? lui demanda-t-il.
- C'est signé "ton amie Aëline". C'est l'un des derniers Sages encore en vie.
- C'est un code ? demanda Link.
Les deux hommes s'installèrent à table. Sheik posa la lettre pour que tout le monde puisse la voir.
- C'est du charabia pour moi, dit Hönir, et les énigmes ce n'est pas mon fort.
Lovio fourra une dernière fourchette en bouche et inspecta le parchemin à son tour.
- Si on met cette lettre-là, qui ressemble à un "S", avec celle-là et ces deux-là, ça forme le mot "suis", remarqua Link.
- Wow, belle avancée ! ironisa Sheik. Un mot parmi une infinité de possibilités avec l'intégralité d'une feuille remplie de lettres !
- Mon dieu, on va y passer des jours à ce rythme-là... souffla Hönir en s'affalant sur la table, laissant tomber sa tête soudainement lourde dans ses bras.
- Arrêtez de râler ! C'est sûr qu'en y mettant de la mauvaise foi on ne va pas y arriver du tout ! s'énerva Link en lançant des regards noirs à ses deux amis.
- Mais alors, comment on va faire pour déchiffrer la lettre ? demanda Sheik avec une voix aiguë suite à l'impatience.
- Je réfléchis ! Et puis, si tu avais un peu de patience, on avancerait beaucoup plus vite ! s'emporta le blondinet.
- Attends, quoi ?! Je n'ai pas bien entendu, c'est moi qui n'ai pas de patience !? Alors que Hönir part défaitiste depuis le début ?! s'indigna le Sheikah, se levant brusquement de sa chaise et pointant du doigt le pauvre Gerudo qui le regardait d'un oeil mauvais.

Alors que les trois compagnons débutèrent une cinglante dispute, ce cher petit Lovio resta pensif, sa fourchette toujours en bouche, alors que son contenu se trouvait déjà bien au fond de son estomac. Il se leva distraitement, sans attirer l'attention de ses camarades, trop occupé à faire un stupide concours de celui qui criera le plus fort et attirera le plus d'ennemis. Il s'accroupit au bord de sa couchette et faillit s'étouffer avec sa fourchette, qui lui glissa au fond de la bouche, la crachant et toussant fortement. Il s'empara d'une certaine sacoche, et alla se rassoir après avoir récupéré le maudit couvert, sagement installé par terre, dégoulinant de salive se mélangeant à la terre. Sur la fameuse sacoche était cousu une espèce d'oeil avec une larme. Lovio se l'était vue confiée par feue Impa, juste avant de décéder. Il l'ouvrit et en sortit un objet.

- Arrête de me chercher, Link, ou tu le regretteras ! menaça Sheik.
- Ah ouais ? et bah j'aimerais bien voir ça, tu vois ! ricana Link d'un air supérieur.
- Tu veux vraiment le voir ? Et bien tu vas pouvoir ! Je te défie en duel, jeune impétueux !
- Heu les gars, c'est pas trop le mom... commença Hönir, voyant la scène dégénérer un peu trop.
- Tais-toi !!! le coupèrent violemment le Sheikah et l'Hylien.
Le pauvre Gerudo leva ses mains en l'air en signe de paix, faisant de gros yeux devant leur agressivité.
- Qu'est-ce que c'est que cette histoire... murmura Lovio pour lui-même, inspectant plus attentivement la lettre, ne faisant pas du tout attention à la dispute de ses amis.
- De quoi ? demanda Hönir en portant son attention sur lui. Mais c'est... ! s'exclama-t-il en voyant l'objet dans les mains de son camarade. Comment tu... ?
- Une intuition, déclara Lovio, concentré au maximum sur le parchemin. Je me suis dit qu'un tel objet appartenant à Impa devait bien lui servir à des fins mystérieuses. Alors quoi de mieux qu'un texte codé, dont le contenu est des plus troublants... expliqua-t-il, lisant et relisant les mots enfin déchiffrables.
- Que dit-elle ? demanda le Gerudo, se rapprochant de son ami pour voir à travers l'objet. Une princesse ? Quelle princesse ? Et puis, c'est quoi cette histoire de parents biologiques de Sheik ?
- Je ne sais pas. Peut-être est-ce encore un message codé de la part du Sage, que seule Impa aurait été capable de déchiffrer, suggéra Lovio.
- En garde, Hylien ! Tu vas apprendre à ne plus me tenir tête de cette façon ! cria Sheik en armant sa lyre.
- Hé les amis ! On a trouvé comment déchiffrer la... s'exclama Lovio en se levant de sa chaise et en se tournant vers ses deux compagnons, qui depuis s'étaient écartés un peu plus loin, face à face.
- Et toi tu vas apprendre à ne pas me regarder de haut, Sheikah ! cria Link, épée au poing, prêt à bondir sur Sheik.
- Lettre... termina Lovio dans un souffle, halluciné par la scène se déroulant sous ses yeux.

Tout à coup, sans que ni Hönir, ni Lovio ne puissent faire quelque chose, les deux amis se jetèrent l'un sur l'autre, chacun dans le but de faire taire l'autre, devant trois paires d'yeux écarquillés. Au moment où Link se jeta sur Sheik, Hönir s'interposa. Le colosse saisit les deux garçons par les oreilles.
- Ce n'est pas bientôt fini vos âneries, je vous signale que nous avons tous le même but : éliminer Ganondorf !
- Aïeeeeuuh ! firent en coeur les deux garçons.
Lovio se pencha légèrement sur sa chaise, pour voir son ami et leva le doigt en guise de triomphe.
- Et moi j'ai réussi à déchiffrer le parchemin, dit-il avec un grand sourire.

Hönir relâcha les deux intrépides. Sheik baissa sa garde et laissa tomber ses bras le long du corps, il souffla tout en regardant ses mains. Il ne comprenait pas comment il avait pu s'énerver aussi vite, lui qui d'ordinaire était toujours très calme. Il releva la tête et s'excusa auprès de Link.

- Je suis désolé aussi, je ne comprends pas ce qui m'a pris, avoua Link.
- Si vous avez fini, j'ai une histoire de princesse fugueuse à vous lire, ricana Lovio.
Link et Sheik s'assirent autour de la table.
- Bien, fit Lovio, J'ai trouvé ceci dans le sac qu'Impa nous avait laissé. Une loupe magique.
Lovio montra l'objet.
- Le monocle de vérité ! s'étonna Sheik.
- Je préfère loupe magique, continua Lovio, bref je l'ai positionné au-dessus du parchemin et voilà le résultat.

"Ma chère Impa,
Je t'écris en ces heures sombres car la princesse a fugué. Elle a découvert la vérité en tombant sur un de nos échanges. Elle a décidé de retrouver sa moitié. Je n'ai rien pu faire pour l'en empêcher. Mais je ne m'inquiète pas pour elle, son destin est tout tracé.
De ton côté as-tu pu révéler la vérité à Sheik sur ses parents biologiques ?
Nous aurons besoin d'eux pour combattre Ganondorf avant qu'il ne prenne sa forme démoniaque, sans quoi cela deviendra compliqué pour la réincarnation du Héros.
J'espère que cela ne sera pas notre dernière correspondance, les troupes du roi Gerudo arrivent près du village de la Jeune Fille Bleue.
A bientôt,
Ton amie,
Aëline"

Sheik reprit le parchemin et le monocle pour relire encore une fois le message. Si la mention d'une princesse l'intriguait, il était surtout concentré sur la question à propos de ses parents. Le jeune homme avait toujours su qu'Impa l'avait adopté alors qu'il n'était encore qu'un tout petit garçon. Il connaissait cette histoire par coeur : alors que les Sheikahs venaient d'être désavoués par le roi et forcés à nouveau à la clandestinité, Impa l'avait trouvé, seul, blessé et amnésique. Peut-être à cause de sa blessure à la tête, il ne se rappelait pas comment il était arrivé là, ni même son propre nom. Les Sheikahs l'avaient pris sous leur aile et ils avaient tous rejoint Toal pour s'y installer, pour veiller sur Hyrule en secret. Impa l'avait pris avec elle et était devenue sa mère, son mentor. Elle l'avait appelé "Sheik", pour qu'il se sente totalement accepté par le peuple de l'Ombre.

En grandissant, évidemment, le jeune homme avait essayé d'en savoir plus sur ses origines, en vain. Impa avait toujours dit ne rien savoir et il avait fini par ne plus y penser. Et puis, Impa avait décidé de partir seule en mission alors que les rumeurs venues du désert devenaient de plus en plus préoccupantes. Le matin de son départ, elle l'avait serré contre elle comme elle ne l'avait plus fait depuis des années. Il se souvenait très bien des dernières paroles qu'elle lui avait dites : "Nous parlerons à mon retour. Il y a des choses qu'il est temps que tu saches sur toi." Avec tous les derniers évènements, il n'y avait plus pensé, et Impa décédée, il n'avait plus de raisons de se préoccuper de cette question. Visiblement, il se trompait : Aëline avait l'air de savoir ce qu'Impa voulait lui révéler. Sheik n'était pourtant pas certain de vouloir le savoir : il était un Sheikah corps et âme et il était heureux ainsi.

- Sheik ?
Le jeune homme sortit de ses pensées en entendant son prénom. Link le regardait d'un air interrogatif, peut-être même inquiet. Il reposa le parchemin et le monocle.
- Une idée de qui peut être cette princesse ? demanda Hönir.
- Aucune, répondit le Sheikah. Je n'ai jamais rencontré Aëline et je ne connais aucune princesse dans aucun peuple.

Impa l'avait emmené plusieurs fois chez le quatrième Sage, mais elle avait toujours rendu visite seule à Aëline, le laissant à chaque fois chez les Zoras.

- Tout ce que je sais d'elle, c'est que c'est une sorcière. Elle vend des potions aux voyageurs de passage et nous en procure aussi régulièrement. Il me semble qu'elle a une fille, mais à part ça...
- Et pour tes parents ? demanda Lovio sans imaginer que cela pouvait être une question délicate.
- Aucune importance, trancha Sheik en se levant, roulant le parchemin pour le glisser dans la sacoche à sa ceinture. Il faut nous mettre en route. Plus nous tardons, plus Ganondorf gagne du terrain.
- Et justement, pour ses armées qui sont aux portes du village de... comment c'est déjà ? demanda Link.
- Le village de la Jeune Fille Bleue. C'est à proximité de chez Aëline. C'est un village hylien, mais les Zoras le protègent. C'est à la limite de leur domaine.
Link et Sheik échangèrent un regard, sur la même longueur d'ondes.
- C'est sur notre route. Nous passerons par là-bas avant d'aller chercher l'Aquanine. Je vais envoyer un oiseau au roi des Zoras pour le prévenir.

Tous furent d'accord et comme personne n'avait plus rien à ajouter, ils préparèrent leurs bagages. Il ne leur fallut pas longtemps pour retrouver sur la place Hergo, Priya et Jehd. Les deux Sheikahs qu'il avait envoyés chez les Sages étaient déjà partis. Les amis, anciens et nouveaux, se firent leurs adieux. Lovio eut bien du mal à se séparer encore de Link.

- Prends à garde à toi, lui dit ce dernier dans une dernière accolade.
- Tu me connais, je fais toujours attention.
Les deux amis se regardèrent avant d'éclater de rire.
- Si je disparais, tu sauras qu'Hönir a enterré mon corps quelque part.
- Je ne laisserai aucune trace, fit ce dernier en donnant une tape dans le dos de l'Hylien qui manqua de tomber à la renverse.

Sur ces dernières paroles, ils se séparèrent. A l'entrée de Toal, Hergo lança un dernier salut à Sheik et Jehd, puis prit le chemin vers l'ouest avec Priya. Puis, Sheik, le loup et Link se mirent en route à leur tour, vers le sud-est. Lovio regarda partir son meilleur ami avec un pincement au coeur, puis jeta un dernier coup d'oeil vers le village.
- Jehd... dis à Ghyni que nous nous reverrons très vite, fit-il en grimpant sur son tapis où les bagages attendaient.
- Je pensais qu'elle viendrait vous dire au revoir, répondit le jeune homme.
- Ce n'est pas plus mal, rétorqua Hönir, déjà à cheval. Nous n'avons pas de temps à perdre.
- Sans coeur... soupira Lovio.
Hönir haussa les épaules, absolument pas touché par la remarque.
- Allez, Lovio. En route.

Le Gerudo piqua des deux et lança son cheval noir au trot, obligeant Lovio à le suivre. L'Hylien salua une dernière fois Jehd, puis se tourna vers le nouveau chemin qui s'ouvrait à eux.

Chapitre 32 : Vers le volcan   up

Lovio marchait péniblement sur le sentier escarpé, accroché au pompon du tapis qui le tirait de son mieux. La sueur perlait à son front. D'un geste, il l'essuya. Derrière lui, Hönir grognait. Leur ascension de la montagne Goron était pénible et douloureuse. Lovio était certes plus énergique, mais il supportait mal la chaleur tout comme le tapis qui ne le portait plus. De son côté, Hönir portait une partie de leurs affaires. Grâce à ses origines gerudos, le jeune homme supportait mieux la température qui ne cessait de grimper en même temps que l'altitude. Les deux hommes avaient laissé le cheval d'Hönir un peu plus bas, ne pouvant l'emmener sur le sentier pentu. Ils lui avaient rendu la liberté en prenant toutes leurs affaires.

Le sol était désormais rocheux. Il leur avait fallu toute une journée pour traverser les bois qui abritaient Toal et ils grimpaient le flanc de la montagne depuis l'aube. Ils arrivaient tout juste en territoire goron. Au loin se découpait une haute montagne qui ressemblait fortement à un volcan. Les rumeurs racontaient que le village Goron était caché au creux du volcan, sous une salamandre géante. Lovio soupira à l'idée que le voyage serait long et en pareille compagnie, il le serait encore plus ! Il songea que si Link avait été son camarade d'expédition (si l'on pouvait appeler les paires comme ça), le trajet aurait été infiniment plus agréable ! Ils se seraient raconté des histoires, des légendes... Lovio savait pertinemment que Hönir refuserait de parler de quelque sujet que ce soit. De son côté, le Gerudo appréciait de plus en plus la compagnie de Lovio mais pour rien au monde ne l'aurait montré. Leur expédition se faisait donc dans un silence absolu, interrompu par le bruit de la nature parfois.

Lovio pensait souvent à Ghyni. La jeune fille avait été punie pour avoir fugué de chez elle et il regrettait de ne pas lui avoir fait ses adieux. Le jeune homme aux cheveux violets s'inquiétait pour elle, mais pas seulement. Il était également inquiet pour une autre raison. Il avait l'impression d'être suivi. Qui que ce soit, la silhouette était petite, fine et agile. Malheureusement Lovio n'avait pas pris l'inconnu sur le fait. Alors qu'ils grimpaient toujours plus haut, Lovio se retourna d'un coup et marcha dans la direction opposée. Hönir se retourna également :

- IDIOT ! Que fais-tu ?!
- Laisse-moi faire quelque chose.
A ces mots, il fouilla un épais buisson devant lequel ils venaient de passer. Il en extirpa une petite chose aux cheveux très clairs et à la peau pâle.
- GHYNI ! Que fais-tu là ?!
- Lo... Lovio...
- Oh non, pas la gamine..., soupira Hönir.
- Je voulais juste venir avec vous...
- Sheik t'a demandé de rester au village. Tu as encore désobéi !
- Mais... ils se débrouilleront sans moi.
- Et ton père, gamine ?
Hönir s'était approché et foudroyait du regard la fillette.
- Il est bien trop vieux pour me rattraper !
- Ghyni... rentre à Toal, ordonna Lovio.
- Lovio, le village est à plus qu'une journée de marche. Tu peux pas faire ça. Je peux rester ? interrogea la Sheikah.
- On a pas d'autres solutions, soupira le jeune homme, incapable de résister à son air suppliant.
- YOUUUUUUPIIIIII !!! s'exclama la petite fille. Je vais avec Lovio au village Goron !

Lovio sourit. D'un coup, le voyage était moins pénible.
Le lendemain, les amis arrivèrent au pied du volcan. La chaleur était insoutenable, même pour Hönir. Lovio avait tenté de concocter un remède, sans succès. Son expérience ressemblait plutôt à un morceau non identifié d'animal, tout rabougri et noirâtre. Une odeur âcre s'en échappait. Finalement, Hönir sortit deux casques en pierre qu'on leur avait donnés à Toal. Il promit que les porteurs du casque ne souffriraient plus de la chaleur, du moins lorsqu'ils le porteraient. Il tendit à contrecoeur son propre casque à Ghyni. Lovio retira sa capuche et enfila le casque. Sa vision était légèrement réduite mais... c'est comme s'il était dans les plaines d'Hyrule ! Ghyni mit le casque en faisant attention à ses nattes. Le casque était bien trop grand, mais elle s'en accommoda. Hönir mit alors un linge frais sur sa tête, comme les explorateurs du désert.

Ils arrivèrent au village à la nuit tombée. La salamandre géante dont parlaient les histoires était en fait une sculpture monumentale en pierre à l'effigie de l'animal. Son ventre était la partie supérieure d'un tunnel. Après l'avoir traversé, ils atterrirent dans un endroit impossible à décrire. Je vais essayer d'en faire une description. De petits geysers de lave étaient disposés un peu partout. Les maisons, si on les considère comme telles, étaient toutes en pierre et taillées dans la roche. Parfois, il y avait des fenêtres avec de petits barreaux. Entre les bâtiments serpentaient des chemins en pierre également. Un immense lac de lave trônait au milieu de la place. De nombreux petits ponts le traversaient. Et puis, il y avait de nombreux habitants. Ils avaient un corps fier et solide, étaient plus grands que Hönir et très gros. Leurs petits visages étaient, pour la plupart, amicaux. Ils se saluaient, mangeaient des pierres ensemble, ou encore commerçaient tandis que Lovio et Ghyni observaient le spectacle.

Soudain, Hönir fut pris d'un mal assez drôle avec le recul. Son petit linge, qui n'était plus si frais après de nombreuses heures de marche, prit feu. Hönir fut au début chatouillé, puis, prenant compte de ce qu'il lui arrivait, il se mit à courir comme un dément. Lovio paniqua. Ghyni, au contraire, éclata de rire. Hönir poussa des cris de possédé et essaya de retirer le linge. Il y parvint, écrasa le morceau noirci par le feu sous son talon, mais la chaleur l'étourdit aussitôt. Lovio accourut et lui mit son casque de pierre sur la tête. Hönir reprit ses esprits, mais Lovio défaillit à son tour. Ils se passèrent ainsi le casque l'un à l'autre alors que Ghyni, elle, avait disparu dans le village. Elle revint très vite et mit un nouveau casque, plus grand et plus solide, sur la tête rousse légèrement carbonisée de Hönir. Elle venait "d'emprunter" un casque. L'instant d'après, un Goron arriva, courroucé. Il accusa la petite fille de vol. Hönir raconta en riant au Goron leur mésaventure. Ce dernier sourit et accepta contre quelques rubis de vendre le casque. Il se proposa également d'être le guide des trois compères.

Le Goron s'appelait Grogoron, référence à sa taille imposante, tant en largeur qu'en hauteur. Il leur présenta le village dans ses grandes lignes et, finalement, Hönir amena le sujet de l'alzanine. Leur guide leur expliqua que, d'après la légende, le minerai sacré serait dans le lac au milieu du village. Aucun Goron, cependant, n'était assez résistant pour y aller et vérifier. Tous les trois s'installèrent à l'auberge. Les esprits tournaient déjà sur la solution pour récupérer l'alzanine. D'après Grogoron, il faudrait avoir une armure complète pour supporter la chaleur de la lave, et cela devrait leur coûter plus du triple de ce qu'ils avaient. Pour l'obtenir, ils n'avaient pas d'autre choix que de travailler aux mines, comme la plupart des Gorons. En moins d'une semaine, ils devraient avoir réuni l'argent. Mais Lovio s'inquiétait : et si le minerai n'était pas sous le lac ? S'il était autre part ? Les questions tournèrent dans sa tête jusqu'à ce qu'il s'endorme.

Chapitre 33 : Qui tu es   up

Cela faisait déjà deux jours que tout le monde avait quitté Toal. Link et Sheik chevauchaient en direction du village de la Jeune Fille Bleue, accompagnés du loup et de la fée. Le village se trouvait à mi-chemin du domaine des Zoras. Les deux jeunes hommes ne se parlaient pas beaucoup depuis leur départ. Cela était agréable pour Link, cela le changeait des disputes incessantes de Lovio et Hönir, quoi qu'il se demandait si le fait d'avoir été séparés n'avait pas rapproché le colosse et son ami. Link se mit à sourire à cette pensée sans le vouloir.

- Qu'est-ce qui te fait sourire comme ça ? le questionna Sheik.
- Je repensais à Hönir et Lovio, je trouve qu'ils arrivent à mieux s'entendre qu'au début.
- Pourquoi ? Ils ne s'entendaient pas avant ?
Link ricana doucement et continua.
- Comme tu as pu le constater, Lovio est un peu turbulent et insouciant. Il fonce avant de réfléchir.
- Cela nous a bien sauvés face à Ganondorf, fit remarquer Sheik.
- Oui, il lui arrive d'avoir des idées de génie. Mais Hönir avait du mal au début, il ne disait rien car son amie Frambra aimait bien Lovio.
- Frambra ? Elle ne les a pas accompagnés ?
- Elle a été tuée devant nos yeux par Ganondorf. Par jalousie.
- Je suis sincèrement désolé pour vous.
- Merci, je pense que la mort de Frambra les a rapprochés.
- Je trouve qu'ils se complètent assez...
Link acquiesça d'un signe de tête. Il allait continuer quand ils s'arrêtèrent net pour faire face à une vue macabre. En contrebas se dressaient des ruines.
- Nous arrivons au village, regarde, dit Sheik.

Devant eux, se déroulait une scène de désolation. Le village avait était complètement anéanti par les troupes de Ganondorf. Des maisons avaient brulé, d'autres tenaient à peine debout. Il y avait des corps au sol, ennemis comme habitants. Link et Sheik sautèrent de leurs montures et avancèrent doucement dans les décombres. Le loup huma l'air comme pour vérifier qu'il n'y avait plus d'ennemis.

- Nous arrivons trop tard, se lamenta Link. Toutes ses vies innocentes prises au nom de quoi ?
- Ganondorf le paiera, ne t'inquiète pas pour cela... rétorqua Sheik, les poings serrés.
- Penses-tu qu'Aëline ait pu s'échapper ? demanda Link.
- Je ne sais pas... je l'espère de tout coeur, murmura Sheik.
- Enterrons tous ces corps et continuons.

Ils commencèrent par les gens du village. La tâche ne fut pas aisée, car les troupes de Ganondorf n'avaient épargné personne, peu importait l'âge. La colère, le chagrin, le dégoût... tout cela rendait Link et Sheik malades, mais ils n'abandonnèrent pas, se concentrant sur les sépultures à creuser. Dans les nombreuses victimes, ils découvrirent le corps sans vie du Sheikah parti de Toal à la recherche d'Aëline sur ordre de Sheik. Le jeune homme le connaissait bien et devinait qu'il n'avait pu rester en dehors des combats. Il était certainement mort en tentant de sauver des vies.

Après des heures à enterrer les villageois et à bruler les ennemis, Sheik sortit sa lyre et entonna un chant en hommage aux âmes parties trop tôt. Le loup hurla en même temps. Il savait que ces âmes seraient entre de bonnes mains, sa maîtresse les accompagnerait dans l'autre vie.
Link observa sans rien dire. Navi voletait toujours autour de lui, mais elle était plus calme que d'ordinaire. Cela était agréable d'avoir un compagnon de voyage comme Sheik, il avait les mêmes convictions que lui. Le chant terminé, ils se remirent en route sans un mot. Ils n'avaient pas été très loin qu'une voix les interpella.

- Qui va là ?
Les deux garçons regardèrent autour d'eux sans voir personne. Le loup grogna en direction de la voix.
- Et si vous leviez la tête ? ricana une femme.

Ils s'exécutèrent et purent voir en hauteur, installée sur un balai, une femme plus âgée qu'eux, mais plus jeune qu'Impa ne l'avait été.

- Vous êtes Aëline ? demanda Link.
- Cela se pourrait ! répondit la femme.
- Je suis Sheik, fils d'Impa, gardienne des Sheikahs et sage d'Hyrule.
- Je sais qui tu es ! Suivez-moi !

La femme fit un demi-tour avec son balai et invita les deux jeunes hommes à la suivre. Link et Sheik échangèrent un regard avant d'obtempérer. Après un bon quart d'heure, ils arrivèrent à l'orée d'un moulin, celui-ci paraissait abandonné depuis bien longtemps. Les ailes ne tournaient plus, une d'elles était même à terre. Le bâtiment possédait deux fenêtres, toutes les deux condamnées par des planches. La femme atterrit à proximité du moulin. Link et Sheik l'observaient tout en arrivant à sa hauteur. Elle sortit de sa manche un bout de bois fin et blanc comme la neige. Une baguette. Elle l'agita et prononça des mots que Sheik et Link ne comprirent pas. Puis, sous leurs yeux ébahis, le vieux moulin se transforma en une jolie maisonnette au toit de paille et entourée de petites fleurs bleues. Link s'agenouilla pour en cueillir une.

- La Princesse de la Sérénité, dit Aëline.
- La légende dit qu'elle pousse où vit la réincarnation de la Déesse, continua Sheik, un peu abasourdi.

Il ne l'était pas à cause de la magie, mais ces fleurs voulaient dire qu'il y avait bel et bien une princesse. A la vue de ces fleurs, Navi tournoyait d'excitation. Le loup s'était assis et admirait tous ces pétales bleus qui lui rappelaient son autre vie.

- Venez, entrez les garçons, nous serons mieux à l'intérieur pour parler.
La femme se tourna vers Sheik.
- A ton expression, je présume que ma chère amie n'a pas eu le temps de te parler.
La femme baissa la tête tristement. Une fois à l'intérieur, elle s'installa à table, claqua des doigts et fit apparaître des tasses et une théière.
- Je vous en prie, fit-elle en leur montrant les chaises devant eux.
Les deux hommes s'installèrent. Le loup se coucha au pied du Sheikah.
- Tu as bien grandi, Sheik. Tu es devenu un bel homme.
- Vous me connaissez ? s'étonna-t-il.
- Impa... Il lui est arrivé quelque chose, n'est-ce pas ?
- Elle a défendu deux femmes, malheureusement ses blessures étaient bien trop graves. Nous n'avons rien pu faire, lui dit doucement Link.
Il rajouta.
- Nous l'avons inhumée comme il se doit.
La sorcière fit un petit sourire et ferma les yeux. De longues secondes s'écoulèrent, puis elle reprit.
- Bien, il est temps de te raconter ton histoire, Sheik. Il y a de ça 20 ans, la femme du roi Roham tomba enceinte.
- Le fils du roi, dit Link. Nous connaissons tous l'histoire.
- Patience, Hylien, lui dit Aëline. Malheureusement, la reine mourut en couches après avoir mis au monde un adorable garçon. Il fut baptisé Gustave, comme l'un de ses aïeuls.

Link et Sheik connaissaient tous deux cette histoire et ne comprenaient pas bien où la sorcière voulait en venir. Elle prit une gorgée de thé et reposa la tasse sur la table.

- Ce que l'histoire ne dit pas, c'est que Sa Majesté a mis au monde un deuxième enfant, une fille, née cinq minutes après son frère. Le roi la prénomma Zelda.
- Impossible ! s'écria Link. Comment ont-ils pu cacher cela au peuple ?
- Le roi savait que sa fille était la réincarnation de la déesse Hylia, et pour la protéger et la préparer à sa destinée, le roi dut prendre une décision. Sa naissance resta un secret que seule une poignée de personnes connaissait et il fallut l'éloigner du château et de sa famille. On me la confia donc. Je l'ai élevée comme ma propre fille.
- C'est la fille qui s'est enfuie pour retrouver sa moitié dont vous parlez dans la lettre à Impa ? demanda Link.
Aëline fit oui de la tête. Sheik, lui, était resté muet. Il ne comprenait pas ce que cette histoire avait à voir avec lui.
- Quant au prince...
- Il est mort noyé, dit Link.
Aëline ne dit pas un mot, elle se contenta de regarder Sheik droit dans les yeux.
- Je ne suis pas le prince, si c'est ce que vous voulez me dire.
- Que sais-tu sur ton passé ? l'interrogea-t-elle.

Sheik resta sans voix. Link lui ne comprenait pas trop ce qu'il se passait.

- Le prince faisait une balade sur le lac Hylia avec une de ses nourrices, quand une bourrasque retourna la barque. Le corps du petit prince n'a jamais été retrouvé par la garde royale, dit-il à la place de son ami.
- Qui vous dit que le prince de cette histoire c'est moi ? reprit Sheik.
- Impa l'a retrouvé sur la berge en faisant une ronde autour du lac. Elle a accouru aussitôt au château. Avec le roi, ils ont découvert que le petit possédait aussi une partie de la Triforce, tout comme sa soeur jumelle. C'est ainsi que le roi prit pour la seconde fois la plus difficile des décisions et confia son bien le plus précieux à Impa.
Durant ce monologue, Sheik et Link restèrent sans voix.
- Après le départ d'Impa le roi voulut protéger son fils à sa façon et il désavoua les Sheikahs qui se cachèrent alors dans le vieux village de Toal. Impa y avait emmené l'enfant avec elle et lui donna le nom de Sheik pour que cela passe inaperçu.

Après cette étonnante découverte, Sheik avait dû sortir pour prendre l'air. Le loup l'avait accompagné. Il s'était assis sur un banc, collé contre le mur de la maisonnette. Il fixait le paysage devant lui tout en caressant la tête du loup.

- Moi, fils du roi, s'exclama-t-il. Qui peut croire en ces sornettes ?
Le loup regardait Sheik et laissa tomber sa tête légèrement sur le côté, puis il vint la poser sur la jambe du jeune homme.
- Tu n'es pas un loup comme les autres, toi.
C'est ce moment que choisit Aëline pour apparaître.
- Tu as entièrement raison, ce loup vient du royaume du Crépuscule.
Elle s'avança vers Sheik et le loup tout en parlant.
- Le royaume du Crépuscule, je n'en ai jamais entendu parler, lui dit Sheik.
Derrière la sorcière, Link observait la scène.
- C'est le loup de la Princesse Midona si je ne me trompe pas, continua-t-elle.
Le loup réagit au nom de sa maîtresse et regarda Aëline avec attention.
- C'est donc ça...
La sorcière s'agenouilla devant le loup et celui-ci lui donna la patte, comme pour lui dire qu'elle avait raison.
- Mais pourquoi la princesse t'a envoyé ici ? Enfin... c'est qu'elle doit avoir ses raisons, ajouta-t-elle avec un large sourire.

Aëline se redressa pour faire face à Sheik. Elle avait tant parlé de ce jour avec Impa, de comment révéler la vérité au jeune homme, de quoi dire ou de quoi passer sous silence. La sorcière savait que sa vieille amie avait toujours hésité à parler à son fils adoptif des véritables circonstances de l'accident sur le lac Hylia. Aëline avait décidé de respecter sa décision : il était inutile de parler au jeune homme de ce qu'il avait enduré enfant, de l'entraînement spartiate, des exigences de son père qui l'avaient mené si jeune à vouloir mettre fin à ses jours. Aujourd'hui, il avait une destinée à accomplir et le roi, s'il était toujours vivant, avait pris depuis longtemps conscience de ses erreurs.

- Mon garçon, je sais que cela ne doit pas être facile pour toi, mais nous l'avons fait pour vous protéger.
- Nous protéger de quoi ? Et si vous saviez qu'il fallait nous protéger, pourquoi n'avoir rien fait pour éviter que nous soyons en danger ?
- Car c'était la prophétie. Tu dois retrouver ta soeur maintenant.
- Comment retrouver quelqu'un que je ne connais pas ?
Link prit la première fois la parole depuis qu'ils étaient sortis de la maison.
- Le loup... Navi semblait approuver, elle recommençait à s'affoler.
- Le loup ? l'interrogea Sheik.
- Mais oui ! l'interrompit Aëline. C'est une bonne idée que tu as eue là ! Attends-moi, je reviens.
Sheik ne saisit pas de suite ce que Link avait en tête. Puis il se leva d'un bond.
- Effectivement, c'est une bonne idée que tu as eue. Par contre, il ne faut pas tarder, l'odeur n'est peut-être plus traçable pour le loup.

Link acquiesça d'un signe de tête et le loup en fit autant. La sorcière revint avec une étoffe d'une jolie couleur bleue dans les mains. Elle la tendit à Sheik qui l'examina : il y avait brodé, en tout petit dans un coin, la Triforce.

- Dépêchez-vous, ce n'est pas le moment de rêvasser, leur dit Aëline.
- Oui, ajouta Link. Elle a raison, et puis il nous faut encore nous rendre au domaine Zora.
- Vous allez chez le roi ? s'étonna Aëline.
- Oui, lui répondit Sheik, nous avons encore une quête à finir.

La sorcière retourna à l'intérieur de la maison. Link et Sheik échangèrent un regard, ne comprenant pas ce qu'il se passait. Mais deux minutes après, elle ressortit, une fiole à la main et un parchemin dans l'autre.

- Pouvez-vous donner cela au roi ? Je devais m'y rendre, mais avec la disparition de Zelda, je n'ai pas eu le temps.
- Qu'est-ce que c'est ? demanda Link.
- C'est un remède pour le jeune fils du roi, tout est expliqué dans le parchemin. Maintenant, fais renifler l'étoffe au loup et hâtez-vous. Les nuages au sommet du Mont Péril sont en train de virer au rouge, cela ne présage rien de bon.
Les deux garçons sellèrent leurs chevaux. Sheik se retourna vers la sorcière et lui dit :
- Je vous remercie de m'avoir dit la vérité sur mon passé. Ne vous inquiétez pas, nous retrouverons Zelda. Mais vous, il faut que vous vous mettiez à l'abri. Vous êtes l'un des derniers Sages encore en vie.
- Ne t'en fais pas pour moi, mon garçon, et puis Toal est protégé par le dôme si je ne m'abuse. Je vais aller mettre en garde mon ami Sahasrahla.
- Je suis désolé de vous annoncer ça, intervient Link, mais il est mort en repoussant Ganondorf de Toal. Il a dû utiliser toute sa lumière pour le faire fuir.
- Oh... je vois, continua tristement Aëline.
Un silence s'installa un moment puis elle reprit après un soupir :
- Soit... nous nous reverrons là où seuls les élus connaissent le chemin.
Elle fit un petit clin d'oeil à Link qui ne semblait pas comprendre pourquoi.
- Là-bas, le Mal n'a pas d'emprise. Allez ! En selle !

Les deux aventuriers acquiescèrent, Sheik prit l'étoffe qu'il avait mise dans sa sacoche et la tendit au loup. Celui-ci hurla et se mit à courir. Link et Skeik se mirent en selle et suivirent le loup, quand Aëline leur dit au loin avec un signe de main pour leur dire au revoir :

- Dis à Zelda que je ne suis pas fâchée.

Sheik lui fit un signe de tête pour lui dire oui et se lança au galop, suivi par Link. Celui-ci pensait encore au clin d'oeil furtif qu'avait essayé de faire la sorcière en parlant de l'endroit où ils étaient censés se retrouver.

chapitres suivants...

Ce texte a été proposé au "Palais de Zelda" par ses auteurs Caramelink/Miss Army, Nessy, Nouka et Nesumi. Les droits d'auteur (copyright) lui appartiennent.

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Mis à jour le 30.04.25