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The Legend of Zelda : La malédiction des héros

Ecrit par Elincya
Chapitres 1 à 7   •   Chapitres 8 à 14   •   Chapitres 15 à 20   •   Chapitre 21 à 22
Chapitre 15 : Le domaine Zora   up

fiction The Legend of Zelda : La malédiction des héros

Grâce à la flamme dansante au bout de la torche, née à partir des connaissances de Zelda, les deux Hyliens parviennent à s'engouffrer facilement dans les profondeurs de la mystérieuse grotte. Malgré la présence des quelques fleurs bleues, appelées couramment les fleurs silencios, l'obscurité semble être la seule souveraine de ces lieux. Nerveusement, Épona trotte derrière Link. Se sentant à l'étroit, elle ne peut s'empêcher de scruter les alentours avec crainte, la tête abaissée en soufflant.

- Tout doux, ma belle. Nous ne sommes plus très loin, rassure Zelda en lui caressant la crinière.
- Tu es sûre que c'est le bon chemin ? l'interroge Link, de plus en plus perplexe. Peut-être que la sortie est bouchée à cause des tremblements de terre.
- Espérons que non. Et puis, je trouve que cette grotte a un certain charme. C'est tellement calme... Exactement comme si on était coupé de la réalité ! lui répond vivement la princesse avec un sourire jovial.
- Tu... tu trouves ?
- Tu en as déjà visité une ?
- Oui, avec une amie. Quand nous étions jeunes, nous avions lu des histoires sur des pirates. Donc, nous avions exploré la seule grotte située au sein de la forêt de Foracalia dans l'espoir de trouver un coffre rempli de trésors !
- Oh ! Et ensuite ? enchérit Zelda en s'impatientant. Que s'est-il passé ?
- Nous étions tombés sur des chauves-souris, et nous avions pris la fuite ! lui répond joyeusement Link, gagné par la nostalgie. Bon, elles avaient failli nous mordre, mais avec le recul, cette histoire me fait bien sourire !
Zelda ricane, amusée par les récits de son ami. Mais en repensant à sa propre enfance derrière les pierres froides du château, une soudaine tristesse l'envahit.
- Tu sais, quand j'étais petite, je rêvais d'explorer des endroits abandonnés avec des amis... Mais c'était impossible...

Surpris par cette confession, Link reporte toute son attention sur elle. Comprenant immédiatement que l'enfance de la princesse a été sûrement peu palpitante, surchargée par les éducations strictes et son devoir envers le royaume, il arrête de marcher avec une idée en tête :

- Alors dans ce cas, avant que tu ne rentres au château, je te conduirai à Foracalia, si tu le souhaites ! Tu verras, c'est un charmant village ! Il y a de nombreux coins à découvrir pour se détendre et pour s'amuser !
- Pour s'amuser... ? Même en étant adulte, on peut quand même s'amuser ? s'étonne Zelda, stupéfaite.
- Bien sûr, peu importe l'âge qui avance ! Même si nous grandissons, il faut continuer de chérir la vie et de s'amuser. C'est ce que Pawel m'a toujours dit. Et il avait parfaitement raison car après une journée de travail, j'ai pris l'habitude de me rendre au coeur de la forêt pour me détendre. Mais j'imagine qu'au château, c'est tout le contraire, n'est-ce pas ?
Zelda affirme d'un signe de la tête avant d'ajouter :
- Oui. Au château, il faut toujours bien se tenir, respecter les horaires de repas, le bain, étudier le mythe d'Hylia, et j'en passe... Quand je vais rentrer là-bas, j'espère quand même que ce mariage arrangé sera annulé, même si c'est peu probable que cela se fasse... Mais dans tous les cas, même si le comte Vadel transpire la méfiance, quand je serai reine, je protégerai mon peuple... Je le jure sur mon âme...
- Mais pour le moment, tu es ici, avec moi et Épona. Ne pense pas à l'avenir, lui conseille Link, rongé aussitôt par la mélancolie. Et pour Foracalia, je n'oublierai pas ma promesse. Je ne te décevrai pas. Jamais même.
Touchée par l'attention de son ami qui lui réchauffe le coeur, Zelda acquiesce avec timidité.
- Allez, nous ferions mieux de continuer, presse Link d'une voix plus enthousiaste. C'est plutôt humide par ici...

Mais hélas, à présent hors de son champ de vision, le regard de la princesse s'assombrit lentement, tout comme la flamme de la torche qui s'amenuise au fur et à mesure que les secondes défilent. Tout au fond de son âme, elle désire tant se confier davantage à Link pour libérer ses peurs les plus secrètes. Mais en écoutant la sagesse qui vit en elle en permanence, elle prend la décision d'ignorer son envie qu'elle juge égoïste. Au bout de plusieurs secondes de marche, tout au fond de la grotte, les deux amis arrivent devant une sorte d'interrupteur rectangulaire.

- Tu sais à quoi ça sert ? interroge Link.
- Hum... j'imagine que nous pouvons appuyer, déduit la jeune femme en joignant le geste à la parole.

Puis, alors que le son d'un mécanisme retentit, le mur se sépare en deux, provoquant une légère secousse dans la grotte. Rapidement, Zelda recule tandis que Link reste sur ses gardes, prêt à dégainer son épée par crainte que de dangereux ennemis surgissent de la pénombre. Peu à peu, des escaliers raides se regroupent. Finalement, bien que la prudence sonne au fond d'eux, ils se regardent longuement avant de descendre d'un commun accord. Dans les profondeurs de cette allée, cachée aux yeux des vivants, ils arrivent devant une grande cascade, s'écoulant librement grâce aux dons généreux de Mère Nature. Sans flancher, Zelda la traverse en premier. Les cheveux à présent trempés et le corps grelottant de froid, elle joint ses mains avec émerveillement. Link la rejoint avant de laisser ses yeux parcourir l'endroit à son tour. Avec ses grands coquillages roses gisant sur le sol sablé et ses nombreuses cascades s'écoulant le long des murs, l'ambiance est avant tout maritime et paisible. Le bruit d'écoulement est loin d'être désagréable à l'écoute, bien au contraire : il est apaisant et amplifie l'atmosphère euphorique des lieux. Assoiffée, Épona boit de l'eau.

- Quel est cet endroit ? se demande Link les yeux ébahis.
- Le domaine Zora ! Nous y sommes ! annonce vivement Zelda, sur le point de sauter sur place. On a réussi !
Link observe à nouveau les alentours.
- Alors voici... le domaine Zora ?
- Halte ! s'exclame aussitôt une voix ferme au loin, brisant ainsi l'accalmie.

Trois grands gardes se dirigent dans la direction des deux Hyliens en pointant leur lance en acier. La queue de poisson à la place des cheveux, les yeux vitreux et l'écaille bleu clair, il n'y a aucun doute sur le nom de l'espèce, considérée comme étant la plus loyale du royaume d'Hyrule : les Zoras.

- Qui êtes-vous ? Et que faites-vous ici ? interroge le premier soldat d'un ton autoritaire.
Zelda avale difficilement sa salive et s'efforce de redevenir la princesse qu'elle a toujours été.
- Je suis la Princesse Zelda. Et voici mon chevalier, Link ! se présente-t-elle en affichant une mine sérieuse. Je souhaiterais une audience avec le roi Azul !
Incrédules par ces propos, les Zoras les fixent longuement.

* * *

Malgré leur perplexité, les gardes acheminent, avec une pointe de méfiance, les deux nouveaux venus à la salle du trône, située au coeur du domaine. Sur les murs, des cascades d'eau se déversent à l'entrée de la pièce royale. Stupéfaits par la beauté des lieux, Link et Zelda montent les escaliers blancs avant d'entrer à l'intérieur. Même s'il fait particulièrement humide, ils essayent de supporter cette température assez basse. Debout, à côté d'un fauteuil rouge et majestueux, un Zora à l'écaille bleue et blanche contemple la montagne de Lanelle, si lointaine. Son sommet fend le ciel orangé. Une ceinture argentée entoure son torse légèrement musclé.

- Votre Majesté ! Veuillez nous excuser pour le dérangement ! La Princesse Zelda souhaite vous rencontrer ! l'informe un garde en posant le bras droit contre son thorax en signe de respect.
- La Princesse Zelda ? répète le roi avant de se retourner d'un bloc, dévoilant ainsi ses yeux jaune doré ainsi que sa beauté si pure à Link.
Zelda le dévisage avec soulagement, puis s'incline.
- Bonjour, votre Majesté. Je suis si heureuse de vous revoir ! lui déclare-t-elle d'une voix douce.
Par politesse, Link imite son amie.
- Voyons, Zelda ! Vous n'êtes pas obligée de vous incliner ainsi devant moi ! Après tout, nous nous connaissons depuis votre enfance. Vous avez si bien grandi... La beauté de votre défunte mère vous a suivie, la complimente Azul avec sincérité. Vous êtes radieuse.
- Merci, Sire Azul. Oui, cela fait des années que nous ne vous avons pas vu au château. Je suis sincèrement désolée si mon père a décidé de fermer son coeur aux autres peuples pour les festivités.
- Et je comprends tout à fait, la rassure le roi Zora avant de remarquer la présence de Link.
Le sourire envolé, il prend soudainement un air dubitatif :
- Hum... qui est-ce ?
- Je me nomme Link, chevalier de Princesse Zelda, Sire Azul, se présente l'intéressé avec la plus grande politesse.

Cependant, Azul ne partage pas le même sentiment que son nouvel interlocuteur. Son regard montre même une grande méfiance, voire un soudain mépris.

- Link... ? répète-t-il d'un ton froid. Comme ce fameux héros qui a sauvé Hyrule il y a cent ans après avoir lâchement trahi ma mère pour son intérêt personnel ?
Soudainement interloqué par les insinuations plus que désagréables du roi Zora, Link reste figé, telle une malheureuse statue de cire.
- Aucun doute... Ces yeux, ce manque d'assurance qui se lit sur ton visage insouciant et ta manière de parler... Tu peux peut-être arriver à duper les autres peuples, mais pas moi ainsi que les rares Zoras qui vivent depuis plus de cent ans.
- Mais je n'ai rien à voir avec lui, rétorque Link, de plus en plus agacé d'être sans cesse comparé à ce dernier. Je ne vois pas de quoi vous voulez parler !
- Sire Azul... ne soyez pas dur avec Link, s'il vous plaît. C'est grâce à lui que je suis arrivée jusqu'au domaine, le défend Zelda en s'agenouillant. Ne laissez pas éclater votre courroux à son égard pour cet acte odieux qu'il n'a jamais commis...
Devant les supplices de Zelda, Azul lâche un soupir d'exaspération en détournant le regard.
- Si c'est ce que vous désirez, Princesse Zelda, je n'ai pas d'autres choix que d'accepter votre volonté, aussi sincère soit-elle. Bien, quel est exactement le motif de votre visite... ou plutôt, la raison de votre fuite du château ?

La gorge serrée, Zelda se lève avant de lui expliquer :
- Je sais bien que ma conduite a été odieuse et irrespectueuse envers mon royaume, mais personne ne prenait au sérieux mes supplications ainsi que ma méfiance. Donc, je suis partie de mon plein gré afin d'éradiquer la souffrance qui tourmente tant les trois dragons d'Hyrule. Firone et Ordinn ont récupéré leur esprit, mais Lanelle est toujours prisonnier du mal qui le ronge...
- C'est bien cela..., affirme sinistrement Azul, les yeux perdus dans le vide. Depuis qu'une odieuse créature s'est infiltrée dans le temple de l'eau, située dans les profondeurs de notre doux lac Hylia, notre esprit bien-aimé a été congelé. Mais nous, les Zoras, ne pouvons pas nous exposer à l'intérieur à cause de la barrière électrique qui entoure le temple. Nos écailles sont beaucoup trop fragiles pour supporter l'électrocution. Ainsi, l'histoire qui s'est déroulée il y a cent ans, se répète une fois de plus... C'est pourquoi, nous ne pouvons pas prendre le moindre risque. Chaque jour, je passe de longues heures sans fin pour trouver un moyen de sauver mon peuple, sans faire le moindre sacrifice. Contrairement au héros d'Hyrule, je ne sacrifie pas mes sujets comme des agneaux en les trahissant.

De plus en plus énervé par le regard hautain du roi dirigé contre lui, Link tente de contenir son calme avec difficulté.

- Est-ce qu'il existe un mécanisme capable d'arrêter l'électricité à partir de l'intérieur ? l'interroge Zelda en ignorant le malaise planant entre le Zora et le chevalier.
- Oui. Dans la première salle se trouve un mécanisme d'autodéfense que le sage utilisait pour contrer toutes les attaques malveillantes. Il y a quelques jours, lorsque le dragon a été congelé, de monstrueuses créatures se sont infiltrées dans le temple. Au dernier moment, ma soeur, Miphalia, qui est le sage de ce temple, m'a poussé à la sortie avant d'actionner pour la dernière fois ce mécanisme... Depuis ce jour, le bouclier est resté intact... ce qui signifie qu'elle a été malheureusement tuée sauvagement par ces monstres... explique tristement Azul, préférant rester réaliste. Et à présent, personne ne peut briser la barrière de l'intérieur...

Attristée par le récit du roi Zora, Zelda baisse la tête, la main contre son thorax. Plongée dans une longue réflexion, elle avance de deux pas avec une soudaine détermination.

- Alors dans ce cas, laissez-moi me rendre dans ce temple !
- Vo... vous ? s'étonne Azul, les yeux écarquillés.
- Votre Altesse ! s'exclame Link, abasourdi. C'est du suicide ! Si vous touchez cette barrière électrique, vous...
- Je suis tout à fait capable de briser cette barrière, rassure Zelda en ignorant ouvertement la protestation de Link.
Hésitant, Azul baisse la tête en croisant les bras.
- Oui, vous pouvez le faire... Mais vous courez de grands risques...
- J'en suis tout à fait consciente, mais j'arriverai à supporter le poids de mon pouvoir, insiste Zelda, ne souhaitant pas lâcher l'affaire. Donc, laissez-moi essayer ! Je veux sauver l'esprit de Lanelle et aussi retrouver votre soeur... Il n'est peut-être pas encore trop tard.

Link veut protester une nouvelle fois, mais devant la présence d'Azul, sa voix n'arrive pas à sortir. Conscient du risque, le fait d'imaginer qu'un malheur puisse arriver à Zelda l'effraie. Finalement, Azul sourit tristement avant de constater :

- Diantre, Princesse, vous êtes têtue... mais très bien, j'accepte.
À ces mots, Link fixe le roi Zora avec incompréhension, n'arrivant plus à faire taire son inquiétude.
- Votre Majesté ! l'interpelle-t-il avec froideur. Vous êtes le premier à me faire la leçon que quoiqu'il arrive, vous ne voulez sacrifier personne pour parvenir à vos fins ! Alors pourquoi acceptez-vous aussi facilement la requête insouciante de la Princesse Zelda ? En s'approchant de cette maudite barrière, elle risque de mourir !
Azul tique en le toisant :
- Tiens donc ? Tu oses douter des pouvoirs de la princesse ? Il y a des choses que tu ignores d'elle, alors ne prétends pas tout savoir. Il y a un siècle, j'ai essayé de comprendre les raisons de ta trahison si ton âme est réellement la même que celle de ce pathétique élu. Mais rien n'a pu m'expliquer tes actes odieux. Cette douleur que je ressentais s'est ravivée depuis que tu es entré dans cette pièce alors, fais bien attention à ce que tu dis. Si la princesse a le pouvoir de mettre fin à cette situation, en tant que roi, je ne peux qu'accepter sa requête. Tout comme ma défunte mère, je dois protéger mon peuple : ma fiancée, mes proches, et ma soeur si elle revient.

Link serre les dents, peu convaincu par la décision d'Azul malgré ses intentions louables. Il maintient toujours son désaccord :

- Peu importe, je m'oppose à cette idée. Le réveil du dragon de Lanelle ne justifie pas que la princesse prenne autant de risques. Et puis, c'est à moi d'encourir le risque en me rendant à l'intérieur.
Abasourdi par cette déclaration, Azul le regarde fixement, n'osant croire à ses paroles dictées avec le coeur.
- Link ! Ça suffit ! réprimande sévèrement Zelda en se retournant dans sa direction.
- Votre Altesse ! Laissez-moi m'en occuper, propose Link avec obstination. Vous n'avez pas le droit de prendre un tel risque. Vous devez continuer de vivre. Si les choses tournent mal et que vous allez...
- Link, interrompt plus sèchement la princesse. Je regrette, mais tu ne me laisses pas le choix : je t'ordonne de m'obéir sans discuter ou sans mettre en péril cette mission.

Devant la voix ferme de Zelda, Link la fixe d'un regard poignant. Avec contrainte, elle n'hésite pas à utiliser son autorité royale pour l'obliger à obéir. La gorge nouée, le jeune homme tente de répliquer, mais les mots se perdent dans sa gorge.
- Bien. Si vous voulez bien me suivre, princesse, je vous expliquerai le déroulement pour ce soir. Venez avec moi, annonce Azul en se dirigeant vers la sortie de la salle du trône.
Décidée, Zelda le suit en laissant Link derrière elle. Frustré de n'avoir pas été écouté, il pose la main contre son front, le regard soucieux. Bon sang... Je ne peux pas accepter ça... Qu'est-ce que je peux faire pour l'empêcher de prendre ce risque... ? pense Link, de plus en plus inquiet, le coeur affolé.

* * *

Les bras appuyés sur la rambarde du balcon au deuxième étage du grand domaine, au coeur d'un long couloir, Link observe longuement la grande montagne de Lanelle, le sommet atteignant presque le ciel du crépuscule. Il se mure dans son silence, encore blessé par l'autorité de Zelda. Elle lui a paru si froide, si méconnaissable. Cette facette lui déplaît grandement, lui qui s'était tant habitué à l'innocence et à la jovialité qui rayonnaient sur le visage de son amie.

- Ah vous voilà ! s'exclame soudainement une voix féminine derrière lui.
Intrigué, Link se retourne avant de remarquer une Zora à l'écaille rouge et blanche. Les yeux bleus, son regard montre de la bienveillance. Elle porte de longues boucles d'oreilles en forme de coquillage rose, ainsi qu'une robe mauve à épaules nues. Sa beauté est à la fois resplendissante et mystérieuse.

- Je... je peux faire quelque chose pour vous ? l'interroge Link, étonné qu'une Zora lui adresse la parole avec allégresse.
- Je voulais vous accueillir comme il se doit. Je me présente. Je suis la future reine Kairi, et c'est mon devoir de vous souhaiter la bienvenue, car j'imagine qu'Azul ne vous a pas très bien accueilli...
À nouveau, Link se retourne vers le paysage avant de lui répondre :
- Hum... vous pouvez le dire. Apparemment, le héros a commis une faute irréparable. Mais ça n'a pas d'importance. Ce qui compte avant tout, c'est de sauver l'esprit de Lanelle et de libérer le sage.
Kairi lève les yeux au ciel orangé avant de se joindre à Link. Ainsi, elle ajoute :
- Je suis désolée, Link... N'en veuillez pas trop à Azul. Il a eu une vie assez difficile. Je ne vous demande pas de le plaindre ou d'éprouver de la pitié à son égard bien sûr. Lorsque son père a rendu son âme il y a quelques mois, il est monté sur le trône avec contrainte. En tant que jeune roi, il éprouve des difficultés à gagner la confiance de son peuple. Notamment depuis l'incident au temple de l'eau...
- Jeune roi... ? s'interroge Link en laissant la curiosité l'envahir.
- Cent dix-ans... Mais ce n'est pas un âge mûr pour un Zora. C'est pour cela que nous ne pouvons pas encore nous marier. Il doit prouver qu'il peut être un bon roi à son peuple. C'est pourquoi, dès qu'il y a un obstacle, il brave les dangers pour le prouver et, surtout, pour recevoir la bénédiction royale aux yeux de notre peuple. C'est ce qu'il a fait lorsqu'il a su que l'esprit de Lanelle a commencé à souffrir... Miphalia aurait dû être la reine du domaine. Mais à cause du devoir de sage, la responsabilité est revenue à Azul...
- Mais alors, pourquoi il éprouve autant de mépris à mon égard ? Suis-je un obstacle aussi ?
Un peu mal à l'aise devant la question de Link, Kairi inspire un bon coup et lui répond :
- Le héros, porteur du courage, a causé la mort de notre reine il y a un siècle.

Horrifié par cette révélation qui confirme bel et bien la vérité, Link n'ose pas fixer la Zora qui s'apprête à poursuivre son récit.

- La défunte reine était une Zora exemplaire. Elle était attentionnée et partageait le pouvoir de la royauté avec le roi. Je l'admirais tant ! Elle aimait son peuple... Elle n'a pas hésité à se sacrifier en maintenant la barrière pour permettre au héros légendaire de regagner le temple...Quand il a réussi à défaire l'hideuse créature et qu'il est revenu au domaine sans la reine en annonçant la triste nouvelle, Azul hurlait de douleur en promettant au héros que quoiqu'il arrive, il le détesterait. Il ne le vénéra jamais comme les autres Zoras, qui étaient au courant de l'intention de la reine. Notamment le Roi et Miphalia qui ont réussi à supporter le deuil avec beaucoup de chagrin...
- Ce héros a fait ça... ? Mais... vous n'êtes pas en colère contre celui qui vous a pris celle que vous avez tant admirée... ? lui demande Link, la boule au ventre.
Avec mélancolie, Kairi secoue négativement la tête avant de lui répondre :
- Non car ce jour-là, lorsque le héros a écouté la colère d'Azul, j'ai remarqué un profond regret dans ses yeux. Il semblait en souffrir terriblement... un peu comme vous en ce moment. Vous êtes inquiet pour Dame Zelda mais vous ne pouvez pas l'empêcher... Tout comme Azul qui n'avait pas réussi à empêcher sa mère de commettre cet acte suicidaire.

Les mains tremblantes de Link empoignent la rambarde.
- Mais alors pourquoi il accepte finalement que Zel... hum... que Dame Zelda le fasse... ?
- Parce qu'elle n'est pas une Zora. Elle a un pouvoir qui lui permet de désactiver une barrière à tout moment. Oui, les risques sont là, mais même si Azul est inquiet pour elle, il veut prendre ce risque, car il arrive à croire en elle, lui répond Kairi avec un doux sourire.
- Croire en quelqu'un qui veut jouer avec sa vie ? Ça sera difficile pour moi de le faire... C'est peut-être très égoïste de ma part d'avoir autant peur pour elle... mais...
- Non. Ce n'est pas égoïste d'avoir peur pour une personne qui compte beaucoup pour vous. Rassurez-vous tout de suite. Moi aussi, j'ai eu terriblement peur pour Azul, au point que je l'ai empêché de traverser la barrière électrique... Même pour Miphalia à l'heure actuelle... Ce n'est pas parce que je vais devenir reine et que vous êtes la réincarnation du héros, que nous devons penser sans cesse à nos devoirs en oubliant nos sentiments. Mais s'il y a bien une chose que je souhaiterais tant vous demander : sauvez Miphalia de sa souffrance s'il est encore temps... Je vous en conjure...

Ainsi, Kairi s'incline par respect. Bien que ces paroles soient très réconfortantes, Link baisse les yeux avec un sourire attristé. Est-ce que ses précédentes incarnations ont également ressenti la même envie de respecter des promesses ? Sûrement puisque le symbole du courage ne peut être détenu que par un seul être.

* * *

Sous le ciel du crépuscule, Zelda est assise devant le petit lac, situé au fond du petit jardin à l'arrière du domaine Zora. De nombreuses colonnes entourent les lieux, couvertes de guirlandes de lierre. Dans un coin se trouve une statue majestueuse d'Hylia. De magnifiques fleurs blanches vivent à ses pieds, bénies par sa protection divine. Après qu'Azul lui ait expliqué le plan, Zelda se prépare mentalement. Il est vrai que la peur est présente. Malgré cela, elle ne veut pas flancher. Afin d'oublier son angoisse, la flûte dans les mains, elle joue la mélodie qui berce harmonieusement son coeur. Finalement, malgré l'hésitation, Link la rejoint. Peu à l'aise, il s'incline avant que Zelda remarque enfin sa présence, interrompant la petite composition.

- Votre Altesse... puis-je m'entretenir avec vous ? lui demande calmement Link.
- À condition que tu arrêtes de me vouvoyer, Link, lui répond Zelda avec un sourire nerveux. Même devant le roi Azul, tu pouvais me tutoyer.
- Je ne me permettrais pas. Je ne veux pas que... que ta royauté soit souillée à cause de moi...
Tristement, Zelda détourne le regard, les yeux rivés sur son reflet miroité dans l'eau.
- À propos de ce qui s'est passé il y a quelques heures, je tenais à m'excuser pour ma sévérité à ton égard... Je peux comprendre que tu t'inquiètes, mais ça ira... Je m'en sortirai et...
- Alors pourquoi tu ne me le dis pas droit dans les yeux si c'est vraiment le cas ? l'interroge Link sur un ton plus sec.
Silencieuse, elle ne lui répond pas.

- Je sais que je me suis montré égoïste tout à l'heure. Moi aussi, je m'inquiète pour le sort des terres de Lanelle, mais il ne faut pas que tu prennes tout sur ton dos !
- Mais pourtant, c'est ce que tu as fait pour le dragon d'Ordinn. Tu n'as pas hésité une seule seconde à y aller.
- Et je n'ai pas regretté. Oui, ça a été difficile sur le coup, lui répond avec franchise Link en repensant à l'arène du volcan. Mais j'ai réussi à survivre... Tout comme toi et moi avions réussi à nous en sortir vivants du temple de la forêt. Mais cette fois-ci, c'est beaucoup trop dangereux. Je ne peux pas te laisser encourir de tels risques. Pour t'avouer la vérité, si je m'étais douté qu'une situation de ce genre arriverait, j'aurais accepté la proposition d'Impa sans hésitation.
- Pour que je retourne au château, enfermée comme un oiseau dans une cage en épousant un homme qui m'effraie plutôt que d'essayer de sauver mon peuple... ? lui demande Zelda d'une voix tremblante comme si elle est sur le point de fondre en larmes.
- Au moins, même si cette décision aurait été triste à prendre pour toi et pour... moi, je me serais réconforté en me disant que tu serais en sécurité pendant que je m'occuperais de l'esprit de Lanelle... Après tout, j'ai compris depuis peu que, peu importe ma vie d'antan, je ne peux pas m'écarter de mon rôle pour l'instant, étant donné que le destin me l'impose de force...

Zelda se mord les lèvres avant de se retourner vers son ami !

- Alors autant que tu me laisses essayer de sauver l'esprit de Lanelle. De toute façon, tu dois respecter l'ordre que je t'ai donné ! Ne discute plus de ça, s'il te plaît ! réplique-t-elle en s'efforçant de redevenir sévère.
Link tique, ne supportant plus la carapace factice de Zelda.
- C'est vrai. Je me dois de t'obéir et de satisfaire tes caprices de princesse gâtée, peu importe les risques ou mes paroles qui ne possèdent pas les mêmes valeurs que les tiennes. Mais moi aussi, je peux me montrer aussi têtu que toi... lui répond froidement Link, le regard poignant. Et si je veux protester à tel point, c'est parce que je ne veux pas que tu meures...

Stupéfaite par ces paroles, Zelda le fixe longuement. En se rendant compte à quel point Link s'est attaché à elle au point de prononcer de telles phrases, elle sent une chaleur réchauffer son coeur. Tristement, elle esquisse un sourire en levant la tête au ciel.

- C'est en me disant ça que... cela me donne plus de courage pour réussir à briser la barrière.
Conscient que Zelda gardera sa détermination coûte que coûte, Link serre ses poings, n'arrivant plus à garder son sang-froid.
- Parfait ! Si tu veux jouer avec ta vie à ce point-là, je ne t'empêcherai plus ! Je ne vais pas passer la nuit à te convaincre ! Comme un imbécile de soldat, j'obéis aveuglément à ton testament et on n'en parle plus ! lui rétorque froidement ce dernier après avoir laissé éclater sa colère aussi facilement.

Sur ces paroles, Link tourne les talons et quitte précipitamment le jardin. Regrettant soudainement ses paroles après avoir laissé la peur parler à sa place, son regard s'assombrit. Il veut tant faire demi-tour et lui demander pardon. Mais mal à l'aise, il n'ose pas. Du moins, pour le moment. De son côté, Zelda pose la main contre le coeur, attristée par le malentendu qui s'est déroulé avec Link. Dans l'ombre, derrière une colonne en pierre, Azul a assisté à toute la scène, loin d'être indifférent.

Chapitre 16 : Le temple de l'eau   up

fiction The Legend of Zelda : La malédiction des héros

À la tombée de la nuit, alors que les rayons de la lune s'étirent sur la surface du lac Hylia, Link, Zelda et Azul fixent silencieusement l'eau trouble. Anxieuse mais calme, la princesse conserve sa détermination en avançant lentement jusqu'au bord, sans flancher. Malgré le danger dans les profondeurs du lac, les lucioles dansent sous le ciel étoilé en émettant leur lumière dorée.

- Grâce à ces lucioles qui volent au-dessus du temple, il vous sera plus facile de vous repérer. Lorsque vous verrez les lumières vous éblouir, vous devez impérativement vous arrêter à la limite pour briser la barrière... Une fois ceci fait, Link et moi entrerons à l'intérieur du temple. Quant à vous, vous remonterez à la surface..., récapitule calmement Azul en fixant la princesse de dos. Je préfère vous demander encore une fois : êtes-vous prête à prendre ce risque ?

En s'efforçant de faire taire la pénible envie de protester une nouvelle fois, Link serre ses poings, les yeux baissés. Bien qu'il ait accepté cette idée contre son gré, l'inquiétude le tourmente sans cesse. Le simple fait d'imaginer la mort de son amie le terrifie. Zelda ignore ouvertement la réaction de ce dernier, les yeux rivés sur le lac.

- Oui. Je le suis. J'y arriverai, répond-elle avec optimisme au roi Zora.

Impressionné par le courage de la princesse, Azul lui adresse un sourire mélancolique. Puis, il attache un bracelet, fabriqué à partir d'une écaille jaune, autour du poignet droit de Zelda. Malgré le froid qui la fait grimacer légèrement, une sensation douce submerge ses poumons.

- Grâce à ce bracelet, vous ne manquerez pas d'oxygène...
- Merci, le remercie la jeune princesse en fixant l'objet.
Enfin, elle se tourne vers Link. En repensant à ses dernières paroles, elle sent son coeur se pincer. Malgré tout, elle trouve le courage de lui offrir un sourire rassuré.
- Tout ira bien... Je suis solide !
Surpris que la princesse ne lui montre aucune rancoeur, Link la dévisage avec un air poignant. Il détourne son regard avant de lui répondre :
- Alors si c'est le cas... je compte sur vous pour que vous reveniez dès que ce sera terminé.

Encouragée par ces mots, Zelda acquiesce d'un signe de la tête. Ainsi, elle tourne les talons. En inspirant un bon coup, les yeux rivés sur les lucioles dansantes, elle plonge dans le lac. Instantanément, Link perd son calme et s'approche aussitôt du bord pour tenter de la repérer, tandis que le roi Zora l'observe, non insensible en constatant la fragilité de l'Hylien. Dans les profondeurs obscures, Zelda parvient à repérer le temple, illuminé par la lueur des lucioles qui volent avec insouciance au-dessus d'elle. En se référant à elles, la princesse s'approche tout doucement de ce lieu.

Mais alors qu'elle franchit la ligne limite, de nombreuses étincelles, menaçantes à son égard, commencent à se manifester. Aussitôt, elle recule en observant le danger. La main tremblante posée sur son cou pour se calmer, elle ferme ses paupières. Oui, la peur de mourir coule dans ses veines et paralyse certains membres de son corps. Mais en pensant à son devoir de protéger le monde, peu importe les risques, la princesse d'Hyrule lève la tête et tend finalement la main droite vers la barrière. Le fragment brille au moment où les étincelles touchent ses doigts. Ainsi, une incroyable lumière dorée jaillit du lac. Fou d'inquiétude, Link lâche un gémissement d'effroi, le bracelet déjà attaché à son poignet gauche.

- Nous pouvons y aller ! L'heure a sonné ! s'exclame le roi Azul avant de plonger.
En ce moment même, en fusionnant son âme avec son pouvoir, Zelda maintient la barrière à l'aide de sa main droite. Elle grimace de douleur. Alors que Link s'approche de cette dernière, Azul le retient par le bras.
- Link ! Rentre vite dans ce temple ! Une fois à l'intérieur, désactive la barrière ! Le levier se trouve à l'entrée ! Ne tarde pas ! De mon côté, je vais veiller sur la princesse ! lui ordonne Azul avec assurance.

Malgré son envie de rester auprès de Zelda, Link acquiesce. Sans tarder, il traverse le long couloir du temple en pierre. La barrière disparue, il ne rencontre aucune difficulté à pénétrer dans l'antre sacré. Puis, il remonte à la surface. Rapidement, il distingue un grand bloc de glace. Tiré dans la direction gauche, le levier du mécanisme en bois se trouve à l'intérieur. De longs câbles rouges descendent le long du mur pierreux et semblent être en conflit. Mais soudainement, les étincelles se manifestent à l'entrée. En reculant hâtivement, Link constate avec anxiété que la barrière entoure de nouveau le temple. Dépourvue de forces, Zelda s'évanouit dans les bras d'Azul qui s'éloigne le plus rapidement possible.

- Link ! l'interpelle-t-il.
- La barrière ! s'écrie Link, la voix audible grâce à l'écho. Zelda ! Elle...
- Ne t'en fais pas ! Zelda s'est seulement évanouie. Elle est vivante ! Et pour le levier ?
- Il n'y a rien à faire ! Il est bloqué par un bloc de glace ! Je n'ai rien pour le faire fondre ! réplique Link, ne parvenant pas à calmer sa frustration.
Azul tique en prenant le temps de réfléchir pendant plusieurs secondes. Finalement, même lui ne peut pas se rendre à l'intérieur.
- Rends-toi dans les tréfonds du temple, tu trouveras la flamme bleue ! Elle a le pouvoir de décongeler tout et n'importe quoi !
- D'accord.

Bien que la situation ne plaise guère à Link, il n'a pas d'autres choix que d'avancer en entrant dans le seul couloir. L'architecture, aussi vaste soit-elle, est sinistre. Seule l'eau semble apporter de la pureté. En entrant dans le hall, il remarque une fois de plus les statuettes d'Hylia, toujours accrochées au mur. Seulement, elles sont toutes congelées. Grelottant de froid, Link s'efforce de rester en mouvement, craignant de succomber à l'hypothermie. Ainsi, il avance jusqu'à ce qu'il remarque, au coeur de la seconde salle, un nouveau bloc de glace. Plus imposant mais surtout plus surprenant. Il constate avec épouvante la présence d'une Zora, prisonnière à l'intérieur. Le haut de son corps penché en arrière et les yeux clos, elle a l'allure d'une statue à la fois mélancolique et majestueuse. En effet, sa beauté est à couper le souffle. L'écaille rouge et blanche et le corps efféminé, ses mains sont croisées sur son torse comme si elle prie pour la Déesse Hylia. Même pendant son emprisonnement.

Link s'approche d'elle en la scrutant avec horreur.
La... soeur d'Azul... la pauvre..., pense-t-il, attristé par son sort.

Soudain, il entend des bruits derrière lui. Il fait volte-face. Deux statues de glace aux yeux rouges clairvoyants, imitant un diable avec deux cornes, avancent en direction de Link avant de lâcher leur souffle surpuissant glacé sur lui. Le jeune homme esquive l'attaque à temps ! Un pot se retrouve congelé. Comprenant avec impuissance ce qui est arrivé à Miphalia, il s'empare de son grappin avant de tracter la chaîne en direction de l'oeil qui semble être le membre le plus fragile de la statue sans coeur, sûrement possédée par un esprit néfaste. L'oeil frappé avec brutalité, le premier ennemi se brise en plusieurs morceaux. Alors que deuxième est sur le point de lâcher un souffle dans sa direction, Link se retourne sans tarder et effectue la même attaque. Mais au moment où la chaîne frôle fructueusement l'oeil rouge, tuant instantanément la statue, son souffle de prédilection s'échappe. Désormais, la chaîne est prisonnière dans un long bloc de glace, laissant Link interloqué.

- Malédiction ! Ce n'est pas vrai ! râle-t-il en la tenant dans ses mains malgré le froid qui le fait claquer des dents.

Il ne peut ni la tracter, ni la ranger. Son équipement le plus pratique, qu'il pouvait même utiliser avec facilité sous l'eau, est à présent inutilisable. Il agrippe la pointe de la chaîne, hors du bloc, à la boucle de sa ceinture. À présent vulnérable, l'Hylien laisse à contrecoeur Miphalia à son triste sort avant de partir à la recherche de la mystérieuse flamme bleue pour raviver de nouveau l'espoir. Une fois de plus, à sa droite, il replonge dans l'eau afin de continuer son exploration. Puis, en levant la tête au plafond, il remarque que le niveau est plus bas que d'habitude. Avec méfiance, Link remonte en inspirant profondément. Peu habitué à respirer avec le pouvoir du bracelet, il a tendance à lâcher des bulles d'oxygène à cause des effets. Trempé jusqu'aux os, il remarque au loin une nouvelle salle vide et sombre, hors de l'eau. En prenant le temps de souffler pendant quelques secondes, il gravit la paroi avant de s'y engouffrer. Une fois de plus, trois statues de glace semblent l'attendre. Agressives, elles se dirigent dans sa direction, prêtes à créer une nouvelle sculpture de glace. Link s'empare de son arc et tire à toute hâte en visant leurs yeux. Mais lorsqu'il s'apprête à décocher la flèche pour le dernier, la corde de son arme se brise.

- Roh ! Mais bon sang ! s'exclame-t-il avec un air dépité.

Sans vergogne, la statue s'approche de lui pour le congeler. N'ayant pas d'autres choix que de l'attaquer au corps à corps, Link s'empare de son épée en serrant les dents. Agressivement, le combattant accourt. Au moment où la statue lâche son souffle surpuissant, Link esquive en effectuant une roulade. Le bout de sa coiffe verte congelée, il grimace, exaspéré par cette malchance qui continue de le frapper malicieusement au mauvais moment. Grâce à sa rapidité, alors que la statue lâche encore une fois de plus son attaque dans l'espoir de le condamner à un douloureux et long trépas, Link se jette et se glisse en dessous. Une fois près de la statue, il soulève son épée en l'air en transperçant l'oeil, provoquant la mort de cette dernière. En lâchant un soupir de soulagement, au milieu des morceaux de glace, l'épéiste prend quelques secondes de répit. La pointe de sa coiffe verte congelée, il enlève finalement son couvre-chef.

D'abord le grappin, l'arc et ensuite le bonnet... J'en collectionne... pense-t-il, dépité par la malchance. Mais les yeux rivés sur l'arc, il repense à Zelda, désirant la revoir. Il sait bien que ce n'est pas en restant sur place que ça se réalisera. Calmement, il monte les escaliers aux marches raides avec la boule au ventre. Une fois au premier étage, il distingue une fontaine en pierre : la flamme bleue danse vivement. Aussitôt, Link avance. Désirant vérifier le pouvoir de la structure, il approche la chaîne de la mystérieuse flamme. Instantanément, le bloc fond grâce au premier contact. Avec un regard incrédule, il fait de même pour le bout de sa coiffe avant de la remettre sur ses cheveux blonds trempés. Sans tarder, il sort le flacon. Avec prudence, il l'agite pour récolter une partie de la flamme éternelle. Ainsi, il fait marche arrière.

* * *

De retour dans le hall, il se dirige hâtivement en direction du bloc de glace qui emprisonne Miphalia. En retenant son souffle, il ouvre le couvercle et libère la flamme qui consume avec facilité la glace. Alors que la lueur bleue brille et que la glace fond, Link recule. Libérée de son cercueil de glace, la belle Zora s'écroule au sol. Soucieux, Link accourt dans sa direction pour l'aider à se lever.

- Princesse Miphalia ! Vous allez bien ? s'inquiète-t-il.
En entendant la voix de Link, Miphalia ouvre ses yeux dorés. Affaiblie, elle le regarde avec étonnement.
- Vous... vous êtes... ? lui demande-t-elle d'une voix douce.
- Link, répond calmement son interlocuteur.
- Link... comme le héros qui a sauvé notre peuple il y a un siècle... Quelle étrange coïncidence... Même si mon corps a été endormi, ma conscience est restée éveillée... Je ne pouvais pas parler ni même pleurer... Merci... merci du fond du coeur de m'avoir sauvée, lui déclare Miphalia en lui adressant un sourire reconnaissant.
Étonné que la Zora ne l'accuse pas comme Azul, Link ne sait pas quoi lui répondre.
- A... Azul... Est-ce qu'il va bien ? lui demande-t-elle en croisant ses mains, encore engourdies par le froid.
- Oui. Votre frère et Kairi vous attendent... Ils s'inquiètent énormément pour vous, lui répond Link.
Encore sonnée, Miphalia essaye de marcher en posant la main sur son front.
- Il faut à tout prix... que j'aille voir l'esprit de Lanelle... Il a besoin de mon pouvoir de guérison...
- Non, vous devez sortir ! Je m'occuperai de lui et...
- Sans moi, vous ne pourrez pas briser le sceau que j'ai placé devant son antre. Et s'il vous plaît : n'actionnez pas le levier. Sinon Azul et Kairi rentreront ici... Je ne veux pas qu'il leur arrive malheur... Accompagnez-moi seulement jusqu'à l'esprit.

En ayant l'impression de revivre la même scène qu'avec Zelda, contraint d'obéir et de respecter, Link jure allégeance.
- Qu'il en soit ainsi, princesse Miphalia...
Reconnaissante, la Zora lui sourit. Même si elle se sent encore nauséeuse, elle se tourne à sa droite. Avec résolution, elle pose la main sur le mur en pierre. Un sceau rouge, sous la forme d'une larme, apparaît. Le mur dévoile un passage secret.
- Nous pouvons passer par-là, annonce calmement la princesse Zora.
Link acquiesce d'un signe de la tête avant de la suivre, résolu à taire la souffrance du dragon de Lanelle.

Chapitre 17 : L'esprit du passé   up

fiction The Legend of Zelda : La malédiction des héros

Link et Miphalia continuent de s'engouffrer dans le temple. Mais au fur et à mesure qu'ils descendent, une certaine force tente de les repousser avec hargne.

- Ce courant... c'est le dragon de Lanelle. Il ne veut pas que nous pénétrions dans son antre, informe Miphalia en s'arrêtant avec tracas.

Ne pouvant lâcher que des bulles, incapable de prononcer un traître mot, Link la regarde fixement de dos. Néanmoins, il décide d'avancer, prêt à maintenir son choix. Hésitante, Miphalia ferme les yeux en sentant sa gorge se nouer par une peur incessante. Décidée, elle les rouvre subitement avant de le rejoindre. Ne pouvant plus reculer, l'Hylien et la Zora continuent de descendre le long couloir en pierre assez étroit. Ainsi, ils arrivent dans une salle ressemblant à une arène. Au coeur de cette place arrondie et vaste, un dragon, aux écailles bleues et blanches, est à moitié emprisonné dans un bloc de glace. Seule sa tête se trouve à l'extérieur. La corne de gauche est brisée, tandis que ses yeux bleus traduisent une souffrance épouvantable. Sensible devant le calvaire de l'esprit, Miphalia s'approche avant de lui caresser affectueusement la tête.

- Oh Lanelle... Pardonne-moi... murmure-t-elle en laissant couler une larme. Pardonne-moi d'avoir mis autant de temps... Nous allons abréger tes souffrances...

Horrifié, Link sursaute et recule, ne s'attendant pas à une telle déclaration prononcée avec déchirure.
Abréger ses souffrances... Non !
Avec un regard incompréhensif, il s'approche de Miphalia. Elle lui adresse un triste sourire.

- Link... nous ne pouvons rien faire de plus. S'il te plaît, aide-moi à libérer son corps... Il faut tuer le parasite collé sur sa poitrine. Même si le dragon meurt, les terres de Lanelle ne vont pas mourir... Donc, je te demande de m'aider et de croire à mes paroles... Je t'en prie...

Ne voyant pas d'autres solutions alternatives, bien que l'état du dragon de Lanelle lui soit insupportable à regarder encore plus longtemps, Link accepte finalement d'un signe de la tête. Les yeux baissés, il lui remet ainsi le flacon. En fixant longuement la flamme bleue dansante à l'intérieur, Miphalia ignore l'horrible poids qui pèse sur ses épaules. En rejetant ses larmes d'un battement de paupières, elle s'approche du bloc de glace pour le faire fondre. Le corps fin à présent délivré, l'esprit de Lanelle hurle soudainement de douleur. En effet, le parasite violet s'éveille et ouvre son oeil injecté de sang. De grands tentacules sortent de ses écailles.

Épouvantée par l'agonie du dragon, Miphalia recule en croisant ses mains. Malgré la tristesse, elle les tend dans sa direction pour tenter de l'affaiblir. Une aura blanche et spirituelle l'envahit. Alors que l'esprit de Lanelle, devenu incontrôlable, s'apprête à la tuer entre ses crocs, Link s'interpose en éraflant le large museau du dragon. Le sang coulant, le dragon déchu recule en secouant frénétiquement la tête. Armé du grappin, l'Hylien sent la panique serrer son coeur. Il est loin d'être insensible devant la souffrance de Lanelle qui rugit toujours de douleur. Tout à coup, les tentacules se dirigent dans sa direction !

Aussitôt, Link tracte la chaîne en avant pour étreindre le premier tentacule levé en hauteur. Alors que Miphalia continue de prier, de plus en plus éblouie par la lumière sacrée, l'élu brandit l'épée et tranche les tentacules avec violence, un par un, causant encore plus de souffrances à l'esprit. Brutalement, l'un d'entre eux plaque violemment Link contre le mur en pierre. Sonné par ce coup à la tête, il a du mal à se ressaisir dans l'immédiat. Hâtivement, le dragon s'approche pour le dévorer. Son regard hystérique est effrayant à voir. Ne pouvant rien faire, Link ne bouge toujours pas et se sent vulnérable en pensant que sa vie touche à sa fin. Subitement, l'esprit s'arrête, figé désormais comme une statue. En ouvrant doucement les paupières, les dents serrées, Link pose désespérément ses yeux sur le dragon déchu. Lanelle se tient immobile et tente de reprendre le contrôle de sa conscience. Les yeux montrant de l'humanité, elle couine de douleur. Soudainement, un canon de lumière immobilise le corps du dragon !

- Maintenant, Link ! Abrège ses souffrances ! Il faut que tu le fasses ! hurle Miphalia, les mains tendues à l'avant.

Avec tristesse, Link descend légèrement et s'approche du parasite. Désemparé à l'idée de devoir le tuer, il ferme les yeux avant de donner le coup final. La lame de son épée transperce l'oeil avant de toucher le coeur, tuant instantanément l'esprit qui laisse couler une larme avant de lâcher un dernier hurlement de douleur. Miphalia éclate en sanglots, très affectée par la mort brutale de Lanelle, tandis que Link détourne son regard. En sentant ses mains de nouveau souillées, il tremble. Ainsi, le dragon s'écroule et se dissout une bonne fois pour toutes devant lui. Son corps se transforme en écume. Seul le parasite couvert de sang s'échappe lâchement en agonisant, devenu à présent un être insignifiant maintenant que son respectable n'y est plus. La mort dans l'âme, Link range son épée et s'approche de la Zora qui pleure à genoux.

- Link... merci.... le remercie Miphalia, la voix tremblante d'émotion. Merci de l'avoir libéré... Maintenant, ma mère va enfin pouvoir se reposer en paix dans l'au-delà...

Abasourdi par ces soudaines paroles, Link ouvre grand la bouche. Son regard s'horrifie.
Sa mère... Oh non... Ce n'est...
Tremblant en constatant qu'il a tué de ses propres mains la mère d'Azul et Miphalia, lui qui a été accusé d'avoir provoqué sa mort dans sa précédente vie, il sent une horrible douleur le saisir au coeur.
Non... C'est vraiment moi qui ai tué... sa mère...
La tête levée, le visage ruisselé par ses larmes, Miphalia lui sourit tristement, devinant avec facilité les tourments de l'Hylien.

- Oui, les sages ne servent pas qu'à protéger l'esprit. Ils sont avant tout destinés à en devenir un si ce dernier meurt. Tout comme ça a été le cas pour ma mère... Elle n'a pas été tuée à cause de cette barrière électrique.
Bouleversé par cette soudaine révélation, Link l'écoute avec stupeur.
- Il y a un siècle, un Hylien l'a accompagnée... Tout comme toi qui m'as accompagnée jusqu'ici... L'esprit de Lanelle a été accidentellement tué lors de la confrontation, poussé par sa folie meurtrière... Et, pour protéger les terres et le peuple zora de la haine de Ganon, ma mère s'est sacrifiée et est devenue l'esprit de Lanelle après avoir chanté la mélodie des sages. Cependant, sa conscience et ses souvenirs sont restés intacts. En tant que sage, j'arrivais à communiquer avec elle. Azul, dont le sang n'a pas été éveillé, ne pouvait pas comprendre. Mon père et moi lui avions caché la vérité pour qu'il ne prenne aucun risque en se rendant dans ce temple, qui est sans cesse attaqué par les créatures qui veulent atteindre la source... Exactement comme les deux autres temples. Et on a continué à lui mentir... Encore et encore...

Miphalia se lève et s'approche du milieu de la salle avant de poursuivre :

- Oui. C'était un acte odieux de notre part. Mais on l'a fait pour protéger Azul et surtout, pour lui épargner de la tristesse si ce même sort m'arrive un jour... Et finalement, c'est arrivé bien plus tôt que prévu... Lorsque je deviendrai la nouvelle dragonne de Lanelle, grâce au pouvoir de mon père dont j'ai hérité, et au sang de ma mère, je maintiendrai à vie la barrière pour que l'histoire ne se répète plus jamais. Et pour que la progéniture d'Azul et Kairi, si le sang du sage s'éveille en elle, ne connaisse pas cette triste vie, incombée par la lourde responsabilité en tant que sage. Donc, je t'en conjure Link, lorsque tu sortiras du temple, tu pourras annoncer à Azul que je suis morte et que l'esprit de Lanelle est à présent hors de danger ?

Alors les sages... sont destinés à se sacrifier ? Ce ne sont que des réceptacles ? Ils ne sont que des protecteurs et rien de... plus ? C'est trop cruel... Je ne peux pas la laisser faire une telle chose !
Révolté, Link secoue négativement la tête. Il s'approche d'elle pour protester, frustré de ne pas pouvoir sortir sa voix déchirée par la forte émotion qui s'empare de lui. Cette cruelle vérité sur les sages brise quelque chose en lui. Le dragon au premier temple n'était nul autre qu'un Korogu qui avait donné sa vie pour en devenir un. Le sage au volcan d'Ordinn s'était sacrifié, en tentant de sauver le dragon au péril de sa vie. L'esprit d'Ordinn était sûrement un proche pour lui. Un fils comme l'avait évoqué le dragon. Le schéma se répète à nouveau pour le temple de l'eau.

- Ne t'inquiète pas. Tout se passera bien, le rassure Miphalia d'une voix douce. Même si j'ai un peu peur, au moins, le fait de t'avoir vu me rappelle mon premier amour... Rien que cela, ça me donne du courage. Tu sais, le héros était loin d'être prétentieux et pitoyable... Avec moi, il... il était gentil et courageux mais il souffrait énormément... Je ne l'ai jamais oublié après toutes ces années... Jamais. J'ai beaucoup pleuré quand j'ai appris sa mort...
Surpris, Link la regarde fixement. Les larmes aux yeux, Miphalia s'approche pour lui déposer un baiser sur sa joue gauche. Elle recule aussitôt.
- Tu ferais mieux de partir. Dès que tu désactiveras la barrière pour sortir, je l'activerai de nouveau et je resterai ici à tout jamais. Sois prudent... Et surtout, merci d'avoir sauvé ma mère... Sache que tu ne l'as pas tuée... Au contraire, tu l'as sauvée. Merci du fond du coeur.

Avec beaucoup de tristesse, l'Hylien ne sait plus quoi faire. Conscient qu'il n'y a pas d'autres solutions et qu'un être ne peut être dévié de son destin, il finit par quitter la salle avec déchirement. Même s'il sent son coeur saigner, il ne se retourne pas. Seule dans la salle, Miphalia lève la tête au plafond en sortant une lame, appuyée contre la poitrine.
- Azul... Kairi... Soyez heureux... murmure-t-elle d'une voix fragile.
Pendant que Link quitte hâtivement le temple avec remords, un chant sacré résonne. Le chant de Miphalia...

* * *

Au bout de plusieurs minutes, la barrière électrique se dissipe une fois que Link a actionné le levier. Ainsi, il remonte à la surface du lac en lâchant une grosse bulle d'eau par réflexe. En sentant un rayon orangé du soleil se poser sur son visage, il ouvre les yeux en regardant autour de lui.
- Link ! s'exclame Zelda au bord.
Aussitôt, il se retourne avant de la remarquer aux côtés d'Azul. Debout sur ses jambes, la jeune femme le dévisage avec inquiétude. Soulagé de la revoir, Link la rejoint avec hâte. Silencieusement, Azul le regarde sans voix, étonné par l'accomplissement de la réincarnation du héros qu'il avait tant méprisé.
- Link ! Est-ce que tout va bien ? s'inquiète Zelda en l'aidant à remonter.
Il lui répond en hochant la tête et enlève le bracelet d'écaille qui commence sérieusement à serrer son poignet. Le sang a du mal à circuler. Calmement, il pose son regard sur Azul, ne supportant pas de faire taire l'annonce davantage.
- Votre Majesté... Votre soeur, Miphalia est... est morte... Je suis... désolé, déclare finalement Link d'une voix mélancolique en baissant la tête. Je... je n'ai pas réussi à la sauver...

Immobile, Azul essaye d'encaisser le choc le plus silencieusement possible. Il finit par se retourner comme s'il veut cacher la soudaine tristesse qui se lit sur son visage. Zelda soutient son ami, à la fois soulagée de le retrouver et attristée par la nouvelle.

- Si... si vous désirez laisser éclater votre colère envers moi, alors faites-le... Je le mérite... Après tout, mon ancêtre a bien condamné votre mère à une terrible souffrance et aujourd'hui, l'histoire s'est répétée pour moi et votre soeur..., déclare Link, prêt à subir de nouveaux reproches.

Azul ne se retourne pas et croise ses bras, les épaules tremblantes. Il lève la tête au ciel orangé, muré dans le silence. Link reste prostré au sol avec impuissance. Soudain, il pousse un cri d'effroi en sentant une chose visqueuse agripper son pied droit, venant tout droit des profondeurs du lac. Le regard horrifié, il perd l'équilibre et se fait emporter avec facilité sous les yeux écarquillés de Zelda. Azul se retourne instantanément. Au dernier moment, la princesse retient l'épéiste en empoignant ses mains, agenouillée.

- Link ! s'exclame-t-elle avec affolement, bien qu'elle a du mal à le retenir.

Link grimace de douleur. En sentant quelque chose le tirer de force vers le fond, le corps à moitié dans l'eau, il essaye de résister. Avec effroi, Zelda remarque qu'un tentacule entoure le pied de ce dernier pour tenter de le noyer. En gémissant de douleur, Link ressent à nouveau la peur qu'il avait connue avec violence à l'arène de feu lorsqu'il avait failli tomber dans le lac de lave. Effrayé en revivant ce traumatisme, il ferme les yeux, désormais incapable de lutter. Le coeur cognant contre sa poitrine, il lâche les mains de la princesse avant de se faire entraîner dans les profondeurs.

- Link ! Non ! hurle Zelda en lui tendant la main.

Désespérément, alors que Link tend la sienne vers la surface pour essayer de la rattraper, il coule à toute vitesse. Il sort son épée dans l'espoir de s'en défaire. Hélas, ne portant plus le bracelet de Zora après avoir commis la belle erreur de l'avoir enlevé trop vite, il cède à la panique en essayant de remonter à la surface. En vain. Les voies respirations inondées par l'eau, ses yeux se rivent peu à peu dans le vide de la mort avant que ses paupières se ferment pour de bon. Sa main s'ouvre avant de lâcher pour de bon sa fidèle épée qui tombe dans les profondeurs. Aussitôt, Azul nage dans sa direction. En sortant une lame, accrochée à sa ceinture, il coupe avec violence le tentacule. Le parasite hurle. Les grognements étouffés dans l'eau, il remonte comme une folle furieuse pour l'attaquer.

Sur ses gardes, en récupérant Link contre lui, le roi Zora pointe son arme en serrant ses dents. Alors que le parasite à l'oeil crevé s'apprête à l'attaquer grâce à son flair, il se fait aussitôt croquer par une créature encore plus imposante que lui. Sous le choc, Azul distingue un dragon à l'écaille rouge et blanc : l'esprit de Lanelle. En croisant son regard, le Zora se sent étrangement familier avec l'entité protectrice. Ses yeux vert émeraude lui font directement penser à ceux de Miphalia, bienveillants et protecteurs. Calmement, le sage le regarde ainsi que Link pour la dernière fois. En poussant un hurlement à la fois enchanteur et impressionnant, aussi semblable qu'un chant, l'esprit de Lanelle s'éloigne en nageant d'une façon élégante, laissant Azul stupéfait. Au même moment, à genoux, Zelda tente désespérément de les repérer. Enfin, le roi Zora remonte la surface en portant l'élu sur son dos.

- Votre Majesté ! Link ! s'inquiète-t-elle.

Le Zora fait allonger Link au sol. Le corps inanimé, l'Hylien ne bouge plus et sa tête roule sur la droite. Zelda accourt et s'agenouille à ses côtés.

- Link ! Tu m'entends ? Link ! Réponds-moi ! panique-t-elle en le secouant doucement pour tenter de le réveiller.

Hélas, aucune réponse. Puis, elle pose sa tête contre la poitrine de son ami. Avec horreur, elle constate que son coeur ne bat presque plus. Sans tarder, elle pose ses deux mains sur le thorax du jeune homme avant de commencer à lui infliger une série de massages cardiaques. Impuissant, les yeux d'Azul se ferment.

- Link ! Allez, réveille-toi ! Ouvre les yeux ! Ne me laisse pas ! supplie désespérément Zelda, les yeux remplis de larmes. Je veux que tu vives ! Link !

Après avoir senti son coeur cogner avec violence contre sa poitrine, Link lâche un gémissement de douleur, suivi d'une quinte de toux incessante. Avec beaucoup de mal, il ouvre finalement les paupières et remarque le visage ruisselé de larmes de la princesse.

- Zel... Zelda..., murmure faiblement Link.
Soulagée, Zelda reste figée. Instantanément, elle se jette dans ses bras. Surpris par un tel geste affectueux qui lui fait battre le coeur bien plus que le massage cardiaque, Link la serre doucement contre lui malgré le choc.
- Je suis désolé de t'avoir fait peur... s'excuse-t-il d'une voix douce.
Témoin de la scène, Azul lâche un sourire plus apaisé. En regardant une dernière fois le lac Hylia, il repense au dragon de Lanelle, apparu dans les profondeurs du lac, tel un miracle de la nature.
- Merci... Miphalia, murmure-t-il avec certitude.

Au même moment, la barrière du temple s'active à tout jamais, gardé par un esprit au coeur d'or qui a sacrifié son existence pour l'amour de son peuple.


Chapitre 2 de la légende :

La divine reine zora sacrifiée, l'arrogance de l'élu s'effaça pour toujours, bien que les remords le torturèrent jusqu'à la fin de ses jours. La prêtresse commença à reconnaître le véritable héros, désormais capable de guider les fédéraux. Hélas, la lune de sang, l'héritage de l'entité sacrificielle, apparut afin de consumer l'immensité du ciel.

Chapitre 18 : L'esprit du passé   up

fiction The Legend of Zelda : La malédiction des héros

Dans la chambre d'amis au domaine Zora, après s'être remis de sa mésaventure dans les profondeurs du lac Hylia, Link se tient debout, les bras appuyés sur la rambarde. La mélancolie encore présente en lui, il essaye de la faire taire du mieux qu'il peut. Conscient qu'il n'a pas eu d'autres choix que d'accepter la volonté de Miphalia, dévouée à son cruel destin, il repense au parcours du héros qui l'avait précédé. Un étrange parcours si similaire, terrifiant et triste... Soudain, il entend quelqu'un frapper à la porte, interrompant ses pensées les plus tourmentées.

- Oui ? répond Link en se retournant à peine.
Calmement, Azul entre. Étonné de constater que le roi lui rend visite en personne, lui qui s'est montré très hostile à son égard la veille, l'Hylien conserve son calme. En face de ce dernier, Azul le regarde fixement avant de s'incliner avec respect.
- Link... Pardonne-moi. Je me suis montré odieux envers toi.
Frappé par un tel respect à son égard, Link le dévisage. Loin d'être rancunier, il lui répond :
- Votre Majesté... Je peux comprendre votre souffrance... Garder cette tristesse et cette rancune pendant de nombreuses années a dû être très difficile pour vous... Mais je ne vous en veux pas du tout.

Surpris par une réaction aussi légère, Azul se lève et rejoint Link sur le balcon, le regard posé sur les montagnes enneigées de Lanelle.

- Oui, c'est sûrement très hypocrite de ma part de m'excuser ainsi... Mais lorsque mes yeux ont croisé ceux de cet étrange dragon, j'ai enfin compris le dénouement de toute cette histoire...
- Alors, pour Miphalia, vous êtes au courant ? s'étonne Link, ses mains empoignant fermement la rambarde.
- Oui... je suis parvenu à lire l'esprit de ma soeur dans ses yeux, comme si c'était un livre ouvert. Le héros n'a jamais voulu sacrifier ma mère... C'était elle qui a choisi cette voie. Mais à l'époque, je n'étais qu'un enfant capricieux et égoïste. Donc, j'ai prononcé les paroles les plus douloureuses pour le blesser par n'importe quel moyen, sans éprouver le moindre remords... Je lui ai souhaité beaucoup de souffrances et surtout la mort... Mais aujourd'hui, je regrette tant... Quand on commet un mal, on ne peut pas le réparer comme on soigne une plaie. Il faut accepter de vivre avec... Les regrets font partie de la vie, explique Azul en ouvrant son coeur. C'est pourquoi, je désire te léguer ma place de roi pour me faire pardonner.

Link le dévisage, n'osant pas croire à ce qu'il vient d'entendre.

- Votre place ? Mais je n'ai pas le profil pour !
- C'est toi qui as sauvé mon peuple. Tu es bien plus puissant et surtout... bien plus pur que moi pour cette tâche.
- Mais votre Majesté, c'est à vous de rester sur le trône. Peut-être que oui, vous éprouvez des remords. Oui, vous avez commis des erreurs, mais je suis sûr que votre bienveillance et votre autorité protégeront le peuple que vous aimez tant. Tôt ou tard, vous arriverez à devenir un roi respectable et honorable à leurs yeux. Vous allez marquer l'histoire, tout comme vos parents et Miphalia qui ont cru en vous. Votre soeur avait la conviction que vous y arriverez, lui explique Link, ne souhaitant pas lâcher l'affaire. Il faut croire au présent et non rester prisonnier dans la tristesse du passé. Uniquement vivre le présent en conservant les souvenirs les plus heureux.

Les paroles réconfortantes de Link arrachent finalement un triste sourire à Azul. En repensant à ses parents ainsi qu'à sa soeur, il contemple le ciel crépusculaire avec apaisement.
- Finalement, tu n'es pas aussi niais que tu en avais l'air, constate-t-il d'une voix modulée. Tu n'as peut-être pas le côté râleur de ton prédécesseur, mais tu as un coeur bien plus grand. Si j'avais réussi à le connaître davantage, j'aurais su qui était vraiment le véritable héros.

Rassuré d'avoir réussi à s'entendre avec le roi, Link admire la beauté mystérieuse des montagnes de Lanelle, les cheveux dans le vent. Bien que l'histoire du défunt héros l'intrigue, il préfère penser avant tout à sa vie, croyant avoir réussi à sauver le monde d'Hyrule.

* * *

Une bonne heure plus tard, le peuple des Zoras s'est réuni autour du roi. Link, Zelda et Kairi se trouvent parmi eux. Malgré le coeur qui s'affole en sentant le regard intrigué des Zoras se poser sur lui avec insistance, Azul inspire un bon coup, debout et calme. Même s'il sent l'hésitation le saisir, il reprend son assurance avant de leur déclarer à haute voix :

- Peuple Zora. Si j'ai décidé de vous réunir cette fois-ci, ce n'est point pour me lamenter ou même vous supplier. Je suis conscient qu'en tant que jeune roi, j'ai encore beaucoup de choses à apprendre. Mon mépris envers le héros qui a sauvé notre domaine il y a un siècle était incompréhensible à une certaine époque, c'est vrai... Mais en prenant enfin conscience de ses actes, même si je ne suis pas un roi aussi compétent que mon père, aussi généreux que ma mère et aussi doux que ma soeur, je veux tout de même continuer à vous protéger et devenir un roi exemplaire. Mon coeur est à présent ouvert et prêt à affronter n'importe quel courroux du mal. Émue par une déclaration aussi mûre, Kairi joint ses mains, tandis que les autres Zoras se montrent étonnés devant l'attitude à la fois calme et sincère de leur roi. Azul dégaine l'épée royale en or de son fourreau, et la lève au ciel.

- C'est pourquoi, au nom de mes proches et de mon peuple, je jure de reprendre le flambeau royal sans éprouver la moindre peur ou haine envers les démons de mon passé !
Un incroyable rayon de soleil traverse le plafond pour toucher l'épée royale du roi.
- La bénédiction royale... Celle qui désigne officiellement un roi... Elle est enfin là ! fait remarquer Kairi avec un sourire émerveillé.

Conscient de ce que cela signifie, chaque Zora s'incline avec respect devant le roi, notamment Link et Zelda. Surpris de recevoir la bénédiction royale après l'avoir tant espérée, Azul lève la tête au ciel en sentant la chaleur envahir son coeur. En entendant les voix l'acclamer, il se tourne vers Kairi. Ils s'échangent un sourire empli de tendresse. La Zora se sent fière de l'élu de son coeur et surtout si heureuse de le voir accepter une bonne fois pour toutes son destin. Partageant la joie du peuple, Link ne peut s'empêcher d'admirer longuement le roi pour qu'il développe une bonne estime. Mais alors qu'il se retourne, il constate que Zelda s'est absentée, sans le prévenir. Inquiet, il la cherche du regard avant de quitter la foule à son tour.

* * *

Au coeur du jardin du domaine, près de la fontaine, Zelda se tient debout, les yeux rivés sur l'eau. Mélancolique, elle croise ses bras avec tracas.

- Zelda ? Tout va bien ? s'inquiète Link après l'avoir rejoint rapidement.
Doucement, elle hoche la tête, sans se retourner.
- Oui... ne t'inquiète pas. C'est juste que j'ai besoin de prendre l'air. Il fait tellement beau.
En se doutant que quelque chose perturbe grandement la princesse, le regard de Link s'attriste. Il est conscient de ce que cela implique pour la princesse : son retour au château.
- Les cicatrices ont été recousues... Nous avons réussi... lui déclare-t-il d'une voix plus morne.
- Oui... c'est terminé. La puissance de la réincarnation de Ganon ne s'éveillera finalement pas... Quant à moi, je retournerai comme convenu au château : là où est ma véritable place en tant que future reine et épouse... conclut sinistrement Zelda en serrant ses poings tremblants. Ma mission... Non... notre mission est terminée pour de bon... Mais le plus important, c'est que tu es vivant...
Silencieusement, Link l'écoute.
- Tout à l'heure, j'ai eu tellement peur pour toi... Quand tes yeux étaient fermés, je pensais que tu étais parti à tout jamais... Ton réveil a été... un miracle, Link. Et sache que le fait de savoir que tu pourras regagner Foracalia en toute sécurité me rassure grandement...

Touché par ces paroles qui lui vont droit au coeur, Link décide de s'approcher. Mais au dernier moment, il s'arrête, désirant à contrecoeur garder une distance avec la princesse. Son statut de simple roturier lui impose des limites à ne pas franchir. Mais au fond de lui, il veut lui avouer ses sentiments. Même si cette aventure n'a pas été facile, il sait qu'il n'oubliera pas les instants qu'il a passés avec la jeune femme. Malgré tout, il ne veut plus continuer de faire taire les paroles que lui dicte son coeur.

- Zelda... Avant que je ne te ramène au château, n'oublie pas que j'ai une promesse à respecter : celle de t'emmener à Foracalia et te faire découvrir ces lieux. On a encore du temps à passer ensemble tous les deux. Ce n'est pas encore terminé...

Rassurée par la réaffirmation de cette promesse, elle se retourne vers son ami avec mélancolie. Longuement, elle le fixe avant de baisser la tête, les larmes aux yeux. Mais en luttant contre un mal qui la ronge intérieurement, elle pose la main sur son thorax.

- Merci, Link... Merci... Moi aussi, je le veux tant... Mais...

Tout à coup, un filet de sang coule de ses lèvres à moitié pincées. Inquiet, Link s'approche et sort un mouchoir avant de nettoyer le visage de Zelda avec bienveillance, oubliant avec facilité le statut royal de cette dernière. Malgré le tracas, il s'efforce de conserver son calme plutôt que de céder à l'affolement.
- Il n'y a pas de mais... N'oublie pas que je suis aussi têtu que toi.
Les joues rougies par cette remarque, Zelda n'ose pas le regarder droit dans les yeux.
- Que se passe-t-il ? s'inquiète l'Hylien, ne comprenant pas ce sourire timide.
- Ri... rien, bafouille-t-elle en faisant le signe d'un non de la tête. Mais avant de par... partir, je désire que tu me conduises dans les alentours du lac Hylia. Je veux prier pour le salut à la statue de la Reine de Zora pour la dernière fois : pour elle et Miphalia.
- Bien sûr, acquiesce Link avec compréhension.

* * *

Pendant que le domaine célèbre la bénédiction du nouveau roi, le chevalier accompagne comme convenu la princesse jusqu'au lac Hylia. Au pied d'une grande statue en pierre, représentant une grande Zora gracieuse aux yeux vides et armée d'une lance, Zelda s'agenouille et croise ses mains en priant de tout son coeur avec respect et admiration. Au loin, Link contemple silencieusement la statue. Il ne peut s'empêcher de ressentir de la peine, que ce soit pour la reine ou la douce Miphalia. Toutes les deux, ainsi que les autres sages, ont accepté leur malheureux destin. Mais malgré le rôle qui leur incombe depuis leur naissance, leur coeur a réellement souhaité la prospérité. Peu à peu, la vue de Link devient trouble et un mal engourdit son corps. En posant nerveusement la main sur son front, il recule en chutant sur ses jambes tremblantes, pris par une sorte de vision. Les battements s'accélèrent avec violence. Il n'arrive pas à étouffer ses gémissements de douleur.

- Link ? s'inquiète Zelda en se retournant.
Rapidement, elle accourt en s'agenouillant à ses côtés pour le soutenir.
- Link ! Que t'arrive-t-il ?

Subitement, elle constate avec épouvante que les yeux de Link deviennent rouges clairvoyants. Coupé de la réalité, Link revoit à nouveau cette étrange créature qui le poignarde avec violence, dissipant à tout jamais le souffle de sa vie. Aussitôt, la main de Zelda s'agrippe à la sienne. En posant son regard sur le fragment gauche de la Triforce, Link se calme enfin après avoir lâché un dernier gémissement de douleur. La lueur rouge disparaît et ses yeux retrouvent l'éclat de l'humanité.

- Est-ce que tout va bien ? demande calmement la princesse en lui frottant le dos pour l'aider à se ressaisir.
- O... oui... En fixant la statue, j'ai... j'ai revu la créature...
Zelda se montre déconcertée.
- Mais pour cette créature... C'est impossible... Nous avons recousu les cicatrices...
- Je l'ignore... Quoi qu'il en soit, il ne parviendra pas à ses fins... Nous avons bien réussi à éveiller les esprits... lui répond Link en se levant, bien que Zelda le soutienne pour éviter qu'il chute à nouveau. Ce n'est pas ce cauchemar qui va me faire sombrer dans le désespoir... Ce destin ridicule va bien finir par disparaître !

Malgré les paroles sèches de l'épéiste, Zelda baisse la tête avec préoccupation. Confus, ils fixent longuement la statue de la reine Zora, illuminée par le soleil qui tente de chasser les doutes les plus obscurs.

* * *

Peu de temps après, à la sortie du domaine de Zora, Link caresse le museau d'Épona. La jument souffle, attendrie par la bienveillance de l'Hylien.
- Vous êtes sûrs que vous ne voulez pas rester encore une nuit ? leur demande Kairi aux côtés d'Azul, tout en tenant un flacon.
- Oui, nous devons partir. Je dois... retrouver mon château, leur annonce Zelda en se forçant à sourire nerveusement avec contrainte.
Calmement, Link la regarde de dos, compréhensif devant son malaise.
- Je suis sûr que le roi sera heureux de vous revoir, s'imagine Azul avec un léger sourire.
- Oui. Et moi je suis persuadée que vous serez un roi exemplaire. Je vous souhaite beaucoup de bonheur, votre Majesté, Kairi.
Touchée, la Zora lui sourit et s'approche de la princesse.
- Tenez, votre Altesse. Je sais que c'est un modeste présent, mais si ça peut vous soulager de n'importe quelle douleur, ne serait-ce que pour quelques temps... lui déclare-t-elle en lui tendant le fameux flacon. Je suis désolée si c'est très peu... Après tout, " cette fleur " est si rare...
Reconnaissante, Zelda fixe le liquide rouge avec un regard assombri.
- Je te remercie, Kairi... Du fond du coeur, merci...

Malgré l'inquiétude dans ses yeux, Kairi lui sourit, tandis qu'Azul ne dissimule pas son tracas. Bien que Link soit intrigué par ce contenu, il se tourne vers le roi qui s'approche dans sa direction. Sans dire un mot, le grand Zora pose, au sol, une épée au pommeau doré, un bouclier royal en argent avec le symbole de la Triforce gravé, ainsi qu'un arc de chevalier.

- Prends soin de toi, Link, héros d'Hyrule, lui annonce Azul avec un sourire sincère, agenouillé. En tant que roi, je protégerai mon peuple et je prierai pour ta gloire. C'est pourquoi, je te remets mes armes, les mêmes qu'avait utilisées ton aïeul avant de les avoir laissées à mon père pour se racheter. Ainsi, qu'elles puissent te protéger pendant tes prochains voyages.

En esquissant un sourire, à la fois ému et étonné, Link s'empare de l'épée et la regarde longuement avec une certaine nostalgie. Oui, il a perdu la sienne dans les profondeurs abyssales. En revanche, le fait de recevoir cette arme, ainsi que le bouclier et l'arc, lui réchauffe le coeur. Reconnaissant, il s'incline devant le roi. Avec émerveillement, Zelda et Kairi assistent à l'alliance créée entre la réincarnation du héros et l'héritier du peuple Zora.

* * *

Ainsi, Link et Zelda, sur le dos d'Épona, quittent les terres de Lanelle avec un coeur plus léger. Malgré les inquiétantes visions, ils ne laissent pas la crainte les envahir. En sentant le vent de la prospérité caresser leur visage, sous un ciel crépusculaire, les deux amis regardent droit devant eux. Même si leur quête personnelle est loin d'être terminée, ils veulent savourer ce moment de liberté, ensemble.

Peu à peu, Zelda reconnaît le château au loin. Cette fois-ci, elle ne fuit pas la demeure du regard. En se retournant légèrement, Link remarque le visage de la princesse, déterminé et conscient. Cette fois-ci, c'est lui qui détourne le sien, désirant profiter des derniers moments avec Zelda. Il est à la fois heureux et inquiet de revenir à Foracalia en espérant qu'il ne sera pas recherché. Mais s'il peut revoir sa famille et surtout rassurer Leyna sur le sort de Pawel, tout en faisant découvrir de magnifiques lieux à Zelda, alors il sent un soudain bonheur le submerger. Même si le destin du héros restera gravé en lui, il espère notamment que ses cauchemars cesseront une bonne fois pour toutes. Oui, il veut oublier ce rôle et reprendre sa vie là où il l'avait laissée avec contrainte. C'est tout ce qui lui importe.

Plusieurs minutes plus tard, alors que la nuit commence à tomber, Épona continue de galoper sur la plaine, libre comme l'air. Tout à coup, Link tire les rênes en remarquant une personne allongée au sol : une jeune Hylienne aux cheveux bruns, vêtue d'une cape noire. À moitié endormie, la tête appuyée contre le dos de son ami, Zelda ouvre les yeux avant de distinguer à son tour l'inconnue avec inquiétude. Doucement, Link descend de sa jument avant d'accourir dans sa direction.

- Eh ! Vous allez bien ? demande-t-il en secouant délicatement la femme, agenouillé auprès d'elle.
Elle gémit de douleur avant de se lever, la tête baissée vers l'avant.
- Oh... merci... vous êtes si bon... J'ai eu tellement peur... lui déclare-t-elle d'une voix si étrange.

D'une manière sensuelle, comme si elle veut le séduire sans aucune gêne, elle caresse le bras gauche de Link. Méfiante sur le dos de la jument, Zelda conserve son calme. Cependant, Link, indifférent face à ce geste séducteur, remarque instantanément le symbole rouge avec l'oeil, la larme au-dessus, gravé sur la face dorsale de sa main droite : exactement le même sur le Yiga auquel il s'était confronté à Cocorico. Avec violence, il repousse la femme, comme si elle était une peste, avant de se lever, sur ses gardes. Sans hésitation, il dégaine l'épée du fourreau et la pointe dans sa direction.

- Ha ha ha ! ricane la femme en s'essuyant le menton, les yeux cachés derrière sa frange raide. Et moi qui voulais créer une histoire tragique en te poignardant dans le dos, que c'est regrettable... Oh que oui ! C'est dommage que tu ne sois pas très sensible aux charmes des femmes... De toute façon, celui qui contrecarre les plans de mon maître et qui a tué mon fidèle ami lors de cette nuit-là, mérite de mourir !

Sur ces paroles, la femme lève la tête avec un sourire hystérique, les yeux fort rouges. En se levant, une fumée l'entoure, révélant ainsi sa véritable apparence. Vêtue d'une tenue d'épéiste rouge très serrée, la silhouette assez généreuse, et le visage caché derrière un masque blanc dont le symbole des Yigas est peint, l'ennemie fait un mouvement de recul. Seuls ses longs cheveux noirs ressortent. Zelda retient Épona en la faisant reculer. Puis, la Yiga s'empare de sa grande serpe argentée, prête à trancher la peau de sa cible judicieusement choisie.

- Je ferai couler ton sang jusqu'à ce que ton coeur ne soit plus capable d'en pomper ! hurle-t-elle d'une voix stridente. Le tien et celui de la princesse !

En position de défense, les dents serrées et les sourcils froncés, Link fixe la nouvelle menace. Bien que le rythme de son coeur s'accélère, il conserve sa concentration. Il inspire un bon coup au moment où la Yiga fonce furieusement dans sa direction. En poussant un hurlement hystérique, elle agite sa serpe à plusieurs reprises. Sans grandes difficultés, Link pare tous ses coups. Cependant, il se sent pris au dépourvu à cause de la rapidité de cette dernière. Propulsée de force en arrière, la Yiga se téléporte, laissant Link ébahi.

- Link ! Derrière toi ! s'exclame Zelda après avoir aperçu une étrange lueur orangée se glisser derrière le dos du combattant.

Au dernier moment, il se retourne en parant le coup mortel de la serpe qui a failli lui trancher la gorge. Instantanément, il effectue un saut en arrière avant d'échanger de nombreux coups d'épée avec son ennemie. Sûre d'elle, la Yiga continue de rire d'une voix effrayante. Alors qu'elle recule, elle pose une sorte de carte sur le torse de Link : une carte explosive. Cela provoque une légère explosion, propulsant violemment son adversaire en arrière après avoir poussé un gémissement de douleur. Bien que la tunique l'ait protégé, il a la sensation que sa peau brûle. Alors que la Yiga s'apprête à l'achever, Zelda accourt pour le couvrir, tel un bouclier humain. L'ennemie s'arrête et rit un bon coup avant de lui déclarer :

- Voyez-vous ça ? Un parasite qui protège un autre ! On aura tout vu !

Avec froideur, Zelda tend sa main droite, faisant surgir un bouclier doré qui rejette avec violence l'assaillante. Effrayée par cette lumière aveuglante, la Yiga recule avant de se téléporter comme une lâche. Encore sonné, Link se lève, la main sur son thorax. Pendant plusieurs secondes, il fixe Zelda, toujours éblouie par la lueur dorée. Il s'approche d'elle.

- Zelda... ? l'interpelle-t-il en la voyant toujours briller.

Alors que Zelda se retourne dans sa direction, le jeune homme constate avec horreur que les yeux de son amie sont rouges. Il lâche un gémissement d'effroi, effrayé par le visage ferme de Zelda qui pleure des larmes de sang. Lorsque la lumière se dissipe, Zelda baisse la tête, ayant du mal à se tenir sur ses jambes. Elle sent une horrible douleur lui serrer le coeur. Aussitôt, Link la rattrape dans ses bras. Sous le choc, il s'agenouille en la tenant toujours contre lui.

- Zelda ! Tu m'entends ? Zelda ! Réponds-moi, je t'en prie ! supplie Link en la secouant doucement.

Malheureusement, la princesse ne bouge plus. Seul son sang continue de couler de ses yeux malgré les paupières fermées.

Chapitre 19 : La triste vérité   up

fiction The Legend of Zelda : La malédiction des héros

Au milieu de la nuit, dans une grotte à proximité du Mont Satori, Zelda est étendue au sol, couverte d'une cape noire qui la protège du froid. Sa peau est très blême tandis que ses lèvres sont violettes. Tout doucement, une nouvelle larme de sang coule de son oeil droit, marquant ainsi une trace désagréable. Sans tarder, Link nettoie avec soin le visage souffrant de son amie, le mouchoir à présent rouge. Avec impuissance, il ne la quitte pas du regard, ne sachant plus quoi faire pour apaiser ses souffrances. Désespéré, la tête baissée, il ne bouge plus.

En le sentant tracassé, Épona s'approche et souffle dans l'oreille de Link. Doucement, il lui caresse la crinière pour la rassurer. Mais en voyant Zelda gémir de douleur à nouveau, la tête roulée sur la droite, il lui serre la main pour la soutenir. Puis, une nouvelle larme de sang glisse sur sa joue. Une fois de plus, il nettoie son visage. Encore et encore...

* * *

Quelques heures plus tard, alors que le soleil n'arrive toujours pas à chasser l'obscurité nocturne, dominé par l'astre lunaire, Link finit par se réveiller après s'être assoupi au chevet de Zelda. Il n'a pas réussi à lutter contre la fatigue. Allongé à terre, couvert par cette même cape noire, il boit une gorgée d'eau pour étancher sa soif. Mais en scrutant rapidement les alentours, il constate tout à coup l'absence de la princesse.

Inquiet, il se lève maladroitement en remettant mieux sa coiffe. Puis, il sort de la grotte malgré ses jambes encore engourdies par le poids lourd du sommeil. Alors que les pétales des cerisiers en fleur virevoltent dans le ciel, il part à sa recherche. Assise sur un rocher au pied du plus grand arbre en fleur, en haut de la colline toute verte, Zelda contemple le panorama forestier. La vue est somptueuse, notamment grâce aux lucioles qui éclairent le paysage et les pétales dansants.

- Zelda... Est-ce que ça va mieux ? s'inquiète Link en s'approchant de la princesse, brisant ainsi le silence paisible.
- Tu ferais mieux de ne pas t'approcher de moi, Link... met en garde Zelda sans se retourner.
Interloqué, Link s'arrête net.
- Mais... mais pourquoi... ? s'étonne-t-il par l'étrange avertissement.
- Si je n'arrive pas à retenir mes larmes, tu auras sûrement peur de me regarder... Comme tout à l'heure... Surtout que je dois être... affreuse à voir...
Le regard poignant, Link serre ses poings avant de lui déclarer :
- Ce n'est pas monstrueux... Donc, n'aie pas peur de me regarder.

Rassurée par la voix calme de l'élu, elle se lève avant de se retourner dans sa direction. Hélas, Link constate avec effroi que l'iris droit de son amie est rouge comme le sang. La couleur mystérieuse et pacifique d'un ciel heureux n'existe plus...

- Non... Zel... Zelda... souffle Link, sous le choc.
Zelda baisse la tête en posant la main sur son oeil droit.
- Pour le moment, la couleur du sang ne veut pas partir... mais ça ne va pas tarder... J'en ai la conviction... même si cette fois-ci, ça dure plus longtemps que prévu... explique-t-elle d'une voix nerveuse.

En sentant de nombreuses questions lui brûler atrocement la langue, Link s'approche sans éprouver la moindre peur. Il ne la regarde pas comme un monstre. Seule la souffrance qu'elle endure le terrifie.

- Zelda... que t'arrive-t-il exactement ? De quoi souffres-tu ? Et depuis quand ?
- Ça n'a aucune importance. Tu n'as pas à te soucier d'un simple détail, lui répond Zelda en se forçant à sourire.
- Bien sûr que si ! rétorque Link, incapable de conserver son sang-froid. Tu crois que le fait de te voir souffrir ainsi me laisse indifférent ? Tu te trompes complètement ! Je ne suis pas en train de m'adresser à une princesse en tant qu'élu d'une légende lointaine ou chevalier de je ne sais quoi, mais en tant qu'être vivant ! Je m'adresse à une personne qui est importante à mes yeux pour ce qu'elle est !
Frappée par ces paroles, Zelda trouve le courage de le regarder droit dans les yeux avec mélancolie.
Finalement, Link se calme avant de surenchérir ses interrogations :
- Donc, que t'arrive-t-il exactement... ? Réponds-moi sincèrement, s'il te plaît... Je veux le savoir.

Hésitante au premier abord, sous l'insistance pesante de son ami, Zelda baisse la tête avant de commencer à libérer son secret :

- Pour t'avouer la vérité, personne ne sait ce que j'ai exactement... Que ça soit mon père, les plus grands docteurs du royaume ou même Kairi... Mon corps s'affaiblit de plus en plus, mais en contrepartie, je suis immunisée contre toutes sortes de poisons et dangers... D'après ce qu'on m'a dit, c'est une maladie unique en son genre et qui ne peut pas être guérie... Il n'existe aucun traitement à part les remèdes qui soulagent temporairement la douleur comme celle que Kairi m'a remise avant notre départ... Quand le Yiga a failli me tuer à l'entrée de la forêt après ma fuite, mon pouvoir s'est éveillé tout seul et ce fragment triangulaire, le pouvoir de la Triforce, est à présent gravé sur ma main droite. Mais à chaque fois que je l'utilise face à un danger, je sens une douleur lancinante en moi... Et ça empire de plus en plus. Les larmes de sang, les toux, le coeur qui bondit... Apparemment, je ne suis pas la seule à souffrir d'une telle maladie dans ma "famille". Jadis, mon arrière-grand-mère a connu les mêmes symptômes que moi et d'après ce qu'on raconte, elle est morte dans d'affreuses souffrances. Son état était si inquiétant à voir que chaque membre a eu peur pour la santé de son enfant... En constatant que j'ai hérité de la même maladie et surtout du même prénom que mon aïeul, mon père a tout fait pour se détacher de moi pour ne pas souffrir sachant que je suis condamnée à mourir. Voilà pourquoi il a organisé ce mariage arrangé : pour que je mette au monde un héritier avant ma mort... Il privilégie mon statut royal... avant mes sentiments... et ma liberté...

Sous le choc, aucun son ne sort de la bouche de Link. Avec beaucoup de mal, il continue de boire péniblement chaque parole de Zelda, prononcée avec tristesse. Son coeur cogne maladivement contre sa poitrine, comme si une aiguille le transperçait petit à petit. Il en souffre. Nerveusement, la princesse se force à sourire au ciel en retenant avec beaucoup de mal ses larmes. La beauté du paysage enchanteur ne parvient cependant pas à faire disparaître sa mélancolie à la hauteur de son émerveillement. Ainsi, elle poursuit :

- Quand j'ai senti les cicatrices d'Hyrule s'ouvrir ainsi que la souffrance des esprits gardiens de chaque terre, je n'ai pas hésité une seule seconde. Plutôt que de me marier à un homme qui ne m'inspire pas confiance et de vivre une vie riche et tranquille, j'ai préféré m'enfuir. Je me moquais pas mal de ma descendance ou de mon sang. Tout ce que je voulais, c'était pouvoir essayer de sauver chaque esprit, consciente des pouvoirs que je possède. Lorsque mon pouvoir s'est éveillé et que je sentais une incroyable puissance en moi, j'étais devenue sûre de moi et optimiste. Surtout depuis que tu m'as rejoint. Même si en contrepartie, ma santé se dégradait en m'exposant aux dangers : comme cette nuit lorsque j'ai désactivé la barrière ou quand je t'ai protégé. Mais ça m'est égal... Tout ce que je veux, c'est servir ma vie, le temps qu'il me reste pour sauver mon peuple ou même... te sauver. Je veux voir Hyrule se régénérer et non succomber à une nouvelle tristesse... Et même si c'est égoïste d'avoir ignoré mon devoir royal, je ne regrette rien. Je ne regrette pas d'avoir ignoré la voie de la sagesse même si ça a été... un acte cruel de la part d'une princesse telle que moi...
Zelda inspire profondément, à la fois délivrée du fardeau qui lui pèse tant, mais si triste.
- C'est pourquoi, je préfère que tu rompes ta promesse. Tu n'es plus obligé de te coltiner une princesse ratée et faible. Je te conseille surtout de rentrer chez toi et de reprendre ta vie, là où tu l'as laissée. Tu en as assez fait. Il est temps pour moi de revenir au château : là où se trouve ma véritable place.
- Non... proteste aussitôt Link, bouleversé par tout ce qu'il vient d'entendre. Je... je veux t'emmener là-bas, te montrer ce que c'est réellement la vie pour que tu oublies la nature de ton sang et de tes pouvoirs qui te font souffrir autant... Je... je suis sûr qu'il existe un moyen de te guérir... Il y a forcément une solution... On vit dans un monde où on peut guérir tout et n'importe quoi... Mais Zelda... Tu... tu...
Avec beaucoup de mal, il reprend son souffle avant de lui poser une question qui le terrifie grandement :
- Est-ce que cela veut dire que tu vas... mourir... ?

En esquissant un sourire mélancolique, tout en retenant ses larmes, Zelda hoche la tête. Horrifié, Link se retourne presque. Peu à peu, en repensant aux souvenirs qu'il a partagés avec son amie, il sent les larmes lui brûler les yeux. Honteux, il n'arrive plus les retenir. Il fond en larmes. Inquiète pour lui, Zelda s'approche de ce dernier. Sans dire un mot, Link l'enlace tendrement dans ses bras, désirant la sentir contre lui, la réconforter et, surtout, la soutenir. Touchée par ce geste affectueux, Zelda hésite à poser la tête sur l'épaule du jeune homme. Elle sent des larmes tomber sur son épaule : des larmes de tristesse et non de pitié. Avec mélancolie, elle le serre contre lui, se sentant protégée. Pendant de longues secondes, ils restent ainsi devant le paysage.

- Je suis désolé... s'excuse Link à demi-voix.

Bien que leur aventure soit terminée, une autre s'ensuit : celle de la vie contre la mort.

* * *

Alors que le jour se lève, Link et Zelda reprennent la route comme si rien ne s'était passé. Sans aller trop vite, Épona galope sur la plaine, bercée par la brise sauvage. Les yeux rouges, Link s'efforce de regarder droit devant, tandis que Zelda contemple le paysage avec mélancolie. Malheureusement, son oeil droit est toujours aussi rouge. Cette anomalie affecte son doux visage. Le coeur lourd de chagrin, Link la regarde, ne sachant pas quoi dire ou proposer pour la faire sourire.

Zelda va mourir... Quoi que je fasse ou que je lui dise, elle partira à tout jamais... C'est cruel et injuste... Ce n'est pas possible que même le fragment de la sagesse ne puisse pas la sauver... Qu'est-ce que je peux faire pour l'aider ?

Frustré, perdu dans ses pensées, ses mains empoignent très fort les rênes. Soudainement, alors qu'il laisse le désespoir l'envahir, il distingue, au loin, l'entrée de la forêt de Firone. Partagé entre la tristesse et le soulagement de revoir le lieu de son enfance, il tire les rênes pour faire arrêter Épona.

- Nous... nous sommes arrivés... annonce-t-il d'une voix modulée.
Zelda pose ses yeux sur le lieu, à la fois intriguée et surprise.
- C'est là-dedans que tu habites ? lui demande-t-elle, retrouvant sa curiosité habituelle.
- Oui... Le village se trouve un peu plus loin. En tout cas, tu verras : Foracalia est magnifique. Je suis sûr que cet endroit va te plaire, s'imagine Link avec le coeur plus léger.

Ainsi, il tique pour qu'Épona avance. En fixant la forêt au loin, Zelda sent son coeur palpiter. Elle remet la capuche sur sa tête. En entrant à l'intérieur, Link sent la nostalgie l'envahir. Silencieusement, il scrute les alentours. La forêt lui a terriblement manqué avec ses arbres aux branches peuplées de feuilles vertes ainsi que la vieille maison de la mystérieuse Luna, toujours aussi austère et peu entretenue. Il ne peut s'empêcher de sourire avec apaisement.

Au bout de plusieurs minutes de galop, après avoir parcouru la forêt majestueuse et vivante, l'épéiste distingue enfin l'entrée de Foracalia. Discrètement, Zelda parcourt l'endroit du regard. Comme une enfant, elle découvre ces lieux. Alors que les habitants continuent de faire vivre le village, certains d'entre eux fixent avec curiosité les deux arrivants, notamment les ferrailleurs et les vendeurs. Ils ne parviennent pas à reconnaître le visage de Link. Il faut avouer que depuis son départ, le jeune homme a bien mûri et a plus l'allure d'un voyageur plutôt que celle d'un simple livreur de lait. Il constate avec soulagement qu'aucune affiche de recherche n'est accrochée. Les soldats du village Cocorico sont-ils venus jusqu'ici ? Aucune idée.

Peut-être que c'est imprudent de revenir dans son village mais malgré tout, il veut prendre le risque. Il ne peut pas s'enfuir sans arrêt. Il le sait très bien. Inquiète que les villageois puissent remarquer son oeil droit rouge, Zelda s'efforce de le cacher sous sa capuche. Puis, Link tire les rênes. Arrivé devant le ranch Lon Lon, il prend le temps de détailler sa maison ainsi que l'étable à l'arrière. Cette époque lui paraît si lointaine. Ainsi, il se lève en aidant Zelda à descendre.

- Alors c'est ici... que tu vis ? interroge la princesse en admirant la façade chaleureuse de la demeure en pierre.
- Oui... c'est étrange... J'ai l'impression que cela fait une éternité que je ne suis pas revenu ici, lui répond allègrement Link.

Soudain, il siffle le chant d'Épona. Au bout de plusieurs secondes, la porte s'ouvre comme un coup de vent : Malon, se tenant à l'entrée, dévisage Link avec méfiance, sans dire un mot. Il lui faut plusieurs secondes pour le reconnaître. En sentant l'émotion surgir en lui, Link s'approche de son amie. Il enlève sa coiffe. Les larmes aux yeux en réalisant que c'est bel et bien Link, la fermière pose la main sur son thorax. Son coeur a eu un raté. Aussitôt, Romani sort à son tour, les yeux écarquillés.

- Li... Link ! C'est toi ! hurle jovialement la petite fille en courant vers ce dernier.
Alors que Link s'agenouille au sol, Romani se jette dans ses bras.
- Romani... Que c'est bon de te revoir ! s'exclame-t-il, heureux.
La petite fille n'arrive pas à retenir ses larmes, à la fois heureuse de le revoir mais encore marquée par son absence.
- Link ! Méchant ! Tu m'avais promis de revenir plus tôt ! Cela fait des jours que tu es parti ! Pourquoi tu n'es pas revenu avant aujourd'hui ?
- Je suis désolé, Romani... s'excuse Link avec un triste sourire en lui caressant les cheveux. Je suis là... C'est fini... Je ne partirai plus...

Loin d'être rancunière, elle le serre très fort, n'arrivant plus à arrêter ses larmes. Malon s'approche, n'en revenant pas à son tour. Elle trouve sa nouvelle tenue toute verte assez impressionnante. Doucement, le jeune homme se lève et lui sourit avec tristesse.

- Je suis désolé pour mon absence, Malon... Cela m'a pris plus de temps que prévu... s'excuse-t-il d'un ton mélancolique.
Avec soulagement, Malon se blottit contre lui, sans dire un mot. Link l'étreint avec affection, soulagé de revoir sa meilleure amie, sa soeur adoptive.
- J'ai eu tellement peur qu'un malheur se soit produit... Mais tu es revenu... s'exprime-t-elle d'une voix tremblante. Dieu merci...
- Le héros du lait est de retour, lui répond Link d'une voix apaisante pour la réconforter. C'est fini... Je suis là.

Silencieuse, en retrait, Zelda assiste aux retrouvailles. Se sentant exclue de l'univers de Link, elle n'ose pas les interrompre. Soudain, Malon et Romani remarquent la nouvelle venue. Zelda recule en remettant mieux la capuche pour cacher son oeil rouge qui la gêne sans cesse. Aussitôt, Link se retourne et s'approche de la princesse en lui tendant la main.

- N'aie pas peur... viens, l'encourage ce dernier avec un léger sourire.
Craintive comme une louve, Zelda fixe les deux soeurs. Compréhensive, Malon fait le premier pas et lui adresse un sourire bienveillant.
- Allons ! Nous ne sommes pas des fantômes ! Tu n'as pas à avoir peur de nous, ironise-t-il.
- Oui ! Eh dis, est-ce que tu aimes le lait ? lui demande Romani avec un large sourire.
- O... oui... bafouille timidement la princesse, surprise par une telle question.
- Alors ça veut dire que tu es une personne gentille ! Malon dit que si une personne adore le lait, c'est qu'elle est gentille ! lui explique vivement la petite fille.

Zelda ne peut s'empêcher d'esquisser un sourire attendrissant à Romani ainsi qu'à Malon. Reconnaissante, elle incline la tête par respect. Alors que Link retrouve enfin sa famille, le vent continue de souffler sur les arbres de Foracalia.

Chapitre 20 : Le choix   up

fiction The Legend of Zelda : La malédiction des héros

Dans le salon, installé devant une bonne tasse de thé au lait, Link retrace les événements qui se sont produits à Cocorico à Malon et à Romani. Abasourdie, la jeune fermière boit toutes ces paroles avant de récapituler :
- Mais si je comprends bien, le capitaine Pawel est...
- Oui. Il est bien vivant. En ce moment, il se trouve au village d'Ordiala, lui confirme Link, les doigts crispés sur sa tasse blanche.
Malon soupire de soulagement.
- En tout cas, je te rassure : même si les soldats sont venus ici, ils n'ont pas parlé de toi. Apparemment, ils recherchent la princesse du royaume qui s'est enfuie du château... Mais ces imbéciles ne nous ont même pas dit à quoi elle ressemble.

Pleinement concernée par cette annonce, Zelda baisse la tête, le visage toujours caché sous l'ombre de la capuche, tandis que Link s'efforce de rester impassible.

- Mais pour Leyna, quand je l'ai vue hier, elle ne semblait pas être au courant du sort du capitaine Pawel. Elle se portait bien, informe Malon d'un ton calme. Mais dire que celui que tu as tué était un autre individu qui en avait après ta vie...
- Oui, affirme Link. Ce n'était qu'un coup monté... Mais grâce à Zel... Emilia, j'ai pu apprendre la vérité.
Malon se tourne vers la concernée pour lui adresser un sourire chaleureux.
- Emilia... Merci du fond du coeur d'avoir pris soin de lui. Je t'en suis extrêmement reconnaissante. Si nous avions perdu Link, je... nous ne l'aurions pas supporté...
- C'est normal... lui répond sincèrement Zelda avec bienveillance.
- Emilia ! On peut voir ton visage ? réclame Romani, toute curieuse.
- Romani ! Sois correcte avec notre invitée ! la réprimande sévèrement Malon. Si elle ne veut pas se montrer, c'est son choix ! Sois plus respectueuse quand tu t'adresses à une adulte !
En baissant la tête, la petite fille fait la moue sous les yeux de la princesse.
- Non. Il n'y a aucun problème... Après tout, je ne peux pas rester cachée éternellement, les rassure Zelda, décidée à leur faire confiance.

Enfin, sous les yeux de Malon et de Romani, la princesse retire sa capuche, ses cheveux dorés tombant en cascade sur ses épaules minces. Son oeil droit encore rouge, elle prend le courage de regarder ses hôtes. Link sourit tristement, admiratif devant le courage de son amie.

- Oh ! Tu es aussi jolie que ma maman ! la complimente sincèrement Romani, loin d'être effrayée. Tu vois que tu n'avais pas à te cacher !
- Merci, sourit l'intéressée en caressant la tête de la petite fille.

Cependant, Malon se sent mal à l'aise en remarquant l'expression à la fois calme et mélancolique de Zelda. C'est comme si elle parvient à lire la tristesse chez sa nouvelle interlocutrice : notamment son oeil rouge.

- D'ailleurs, où est Talon ? s'interroge Link.
- Ah... en ce moment, il dort... Mais je ne sais pas, depuis ton absence, il commence à devenir peu à peu responsable, révèle Malon avec un léger sourire.
- Responsable ? C'est-à-dire ?
- Depuis ton départ, il a commencé à effectuer les livraisons de lait. Bon, il commet souvent des maladresses, surtout qu'il a déjà livré une bouteille à une personne allergique. Mais au moins, il essaye de faire des efforts. Surtout que moi et Romani l'encourageons sans cesse.
- Et papa a essayé de me raconter une histoire. Bon, c'est toujours sur les cocottes, mais ça reste amusant ! poursuit Romani d'un air jovial. Mais je préfère toujours ta façon de raconter les histoires, Link !
En constatant qu'il y a eu du changement positif durant sa longue absence, Link esquisse un sourire soulagé.
- Tant mieux ! J'ai hâte qu'il se réveille en tout cas, s'impatiente-t-il.
- Au fait, Link, il est où le bouclier que je t'ai offert ? s'étonne finalement Romani en jetant un oeil indiscret sur ses équipements.

En se rappelant l'éprouvant combat mené au coeur du volcan d'Ordinn, Link lui caresse les cheveux. Il lui sourit tristement.

- C'est grâce à lui que je suis encore en vie...
Fière de savoir que le bouclier a été utile à Link, Romani rit, sans bouder ou râler.
- En attendant, c'est à nous de picoler ! Qui veut encore du thé ? propose jovialement Malon.
- Moi ! J'en veux encore ! lui répond vivement Romani.
- Et moi donc ! ajoute Link en tendant sa tasse.

En voyant son ami très à l'aise avec sa famille, dans son propre monde, Zelda sent la mélancolie l'habiter. Au fond de son coeur, elle désire tant en faire partie.

* * *

Un peu plus tard, alors que Malon et Romani préparent leur tournée pour la livraison quotidienne de leur marchandise, Zelda se trouve dans le jardin et prend le temps de découvrir les alentours. Cette fois-ci, elle ne porte plus sa cape noire. L'odeur des arbres fruitiers l'enivre. Elle se sent apaisée et plus détendue. Link finit par la rejoindre après avoir donné un coup de main à Malon pour le chariot.

- Je vois que tu as déjà un coup de coeur pour ce jardin, constate-t-il d'une voix modulée.
L'intéressée se retourne vers lui avec bienveillance.
- Oui ! Il fait bon et c'est si agréable ! Je comprends mieux pourquoi tu as voulu m'emmener ici. Ce village est calme, paisible... Ça change beaucoup de la citadelle. Ici, tu peux vivre comme bon te semble, s'exprime Zelda en croisant ses mains, encore moites par la fatigue. Les gens qui vivent à la campagne oublient le temps qui s'écoule, ils prennent le temps de respirer et de chérir la nature.
Link la regarde longuement et inspire un bon coup pour réprimer sa tristesse. Décidé, il lui annonce :
- Et encore, tu n'as pas tout vu : il y a un endroit que je souhaite te montrer.
Intriguée, la princesse penche doucement la tête vers la droite avec un air enfantin.

* * *

Avant de quitter le village, Link profite du trajet pour se rendre à la maison de Leyna. Hélas, cette dernière semble être absente. Décidant de revenir un peu plus tard, il conduit finalement Zelda dans son coin préféré après quelques minutes de marche. Arrivé, il s'arrête au pied du grand chêne, les yeux rivés vers ce fameux paysage. Avec émerveillement, la jeune princesse avance jusqu'au bord de la falaise pour contempler la beauté de l'horizon. Le vent forestier la rejoint. Les plaines verdoyantes et les arbres, embellis par la lumière du soleil... Le panorama lui paraît aussi semblable qu'une toile splendide.

- C'est... c'est magnifique ! Même si le château n'est pas visible, Hyrule me paraît plus beau sous cet angle ! Je ne m'étais jamais rendu compte ! s'exclame-t-elle, toujours aussi enchantée. Même sur le balcon, je n'ai jamais eu une vue aussi somptueuse.
- Oui... depuis tout petit, je viens jusqu'ici. C'était la mère de Malon qui m'emmenait souvent dans cet endroit. Même après sa mort, je continue de venir ici, explique Link auprès de son amie.
- Sa mort... ? répète tristement Zelda en se tournant vers lui.
- Oui... après avoir mis au monde Romani, elle est partie à tout jamais... Je me souviens que, quand j'étais à son chevet, j'ai essayé de la réveiller mais... elle n'a plus jamais ouvert les yeux. Même si je ne suis pas son fils, elle était comme une mère pour moi... Et quand j'ai vu sa tombe la première fois, j'ai beaucoup pleuré. Je crois même que j'ai autant pleuré que Malon... C'était grâce à Pawel, mon maître d'armes, que j'ai réussi à aller de l'avant. Il m'a redonné confiance en moi grâce aux armes et peu à peu, il est devenu un véritable père à mes yeux, surtout depuis que Talon a noyé sa tristesse dans l'alcool... Hum... c'est un peu gênant d'en parler, car je n'aime pas parler de mes faiblesses mais c'est ce qui s'est produit, révèle Link en toute franchise, bien qu'il ne supporte pas sa partie sensible.

Zelda lui sourit avec tristesse avant de lui répondre :

- Ça n'a rien de honteux, Link. Quand ma mère a fini par mourir, j'ai pleuré jour et nuit... Même encore aujourd'hui, il m'arrive de penser à elle avec des yeux pleins de larmes. Mais c'est justement en pensant à elle que j'arrive à supporter ma maladie... Si elle avait été là, elle m'aurait dit de continuer de profiter la vie. Chose que je suis en train de faire... à tes côtés. Ça me rend si heureuse.
Sans voix, Link se tourne vers Zelda, à son écoute. Avec plus d'assurance, elle lève la tête vers le ciel bleu avant de poursuivre :
- Tu as tenu ta promesse... En m'emmenant dans cet endroit, je me sens revivre. C'est grâce à toi que les esprits ont été guéris et, surtout, c'est grâce à toi que je m'accroche à la vie... Si tu n'avais pas été là, je n'aurais sûrement pas tenu... J'aurais sûrement laissé ma maladie m'emporter... Merci du fond du coeur. Jusqu'à ma mort, même lorsque je reviendrai au château, je penserai sans cesse à toi, Link...

À la fois heureux et triste d'entendre de telles paroles, Link ne sait pas quoi répondre. Il commence à trembler d'émotion. Seul le vent brise le silence pesant entre les deux amis. En sentant sa gorge se serrer de plus en plus fort, il contemple silencieusement la beauté de Zelda. Envahi par des sentiments très forts, il sent son coeur palpiter avec douleur dans sa poitrine.

- Zelda... commence-t-il à déclarer avec résolution. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour t'aider à guérir... Lorsque je t'accompagnerai au château, je trouverai un remède pour te soigner.
Mais résignée, Zelda secoue négativement la tête, comme si elle s'était déjà préparée à une telle décision.
- Non, Link... ta place est ici. Tu n'as pas à partir en voyage pour moi. Tu dois avant tout continuer de vivre de ton côté. Surtout que tu as des personnes qui te sont chères ici. Et puis, je ne suis encore qu'une inconnue et...
- C'est faux, la coupe Link, le regard voilé de chagrin. Tu es devenue précieuse à mes yeux également. C'est pourquoi, il est hors de question de continuer de vivre ma vie en sachant que tu vas mourir... Même si tu vas te marier, devenir une reine et même... m'oublier si ça arrivera... je veux le faire. Dès que je trouverai le remède, je reviendrai au château et je te l'apporterai. Si j'ai respecté la promesse de t'emmener ici, alors je pourrai aussi respecter celle-ci. C'est ce qui compte le plus pour moi. Et pas... ce soi-disant passé que nous avons vécu...

Link baisse la tête en cachant la marque gravée sur sa main gauche comme s'il veut tenter de l'oublier. Bien qu'il croit à la légende, il veut penser égoïstement à sa vie. Touchée par ces paroles, Zelda le regarde avec une certaine tendresse. Alors que ses larmes de sang coulent à nouveau, elle baisse la tête par réflexe. Aussitôt, Link s'approche et l'aide à nettoyer le visage avec bienveillance. Puis, les deux amis se fixent longuement, droit dans les yeux. Seuls les battements de leur coeur chantent entre eux, sans pour autant libérer la mélodie de leurs sentiments réciproques. En douceur, Zelda se blottit finalement contre son torse.

- Merci, Link... Merci... lui déclare-t-elle d'une voix modulée.
Link l'étreint contre lui, tout en oubliant son statut royal. Ne serait-ce que pour quelques secondes. En levant les yeux au ciel, il tente d'écouter son optimisme pour chasser la mélancolie.
- Allez... Nous ferons mieux de rentrer... Surtout que je suis sûr que nous aurons un bon festin ! annonce-t-il en s'efforçant de retrouver son sourire habituel.
- Oui, affirme Zelda, désormais plus rassurée.

Ainsi, les deux amis, après avoir regardé une dernière fois le paysage ensemble, quittent cet endroit avec un coeur un peu plus léger.

* * *

La nuit tombée, la pleine lune illumine le ciel. Dans la salle à manger, Zelda constate, avec surprise, de nombreux plats sur la table : de la viande rouge, des pommes de terre, de la salade, des tomates, des concombres et du bon pain. Que de la bonne nourriture ! Comme d'habitude, Talon boit un coup dans la joie et la bonne humeur.

- Alors comme ça, chère Emilia, vous avez voyagé avec Link ? l'interroge-t-il en se grattant la moustache.
- Oui ! affirme vivement Zelda en lui adressant un sourire.
Ivre, Talon porte son attention sur Link.
- Link ! Je suis si fier de toi ! Je compte sur toi pour que tu rendes heureuse cette adorable demoiselle !
Les joues rougies, Link gratte l'arrière de sa tête.
- Hum... o... oui, bredouille-t-il, tout gêné. Hum... Malon, peux-tu me passer l'assiette de steaks, s'il te plaît ! Cela fait si longtemps que je n'ai pas mangé une bonne viande !
- Tiens ! annonce Malon en s'exécutant.

Alors que le groupe dîne tranquillement avec insouciance, la fenêtre se brise dans un grand fracas, mettant fin à l'ambiance apaisante. Aussitôt, Link se lève, retrouvant son sérieux. Zelda se retourne tandis que Romani se jette dans les bras de Malon, apeurée. Avec tracas, Talon fixe la fenêtre brisée. En effet, c'est un gros caillou qui a cassé la vitre. Le responsable a dû le jeter avec une incroyable force. Sans tarder, Link ouvre la porte comme un coup de vent pour se rendre dans le jardin. Avec méfiance, il scrute rapidement les alentours en empoignant le pommeau de son épée, prêt à dégainer son arme sans crier gare. Mais une étrange odeur lui chatouille les narines. Un parfum aussi sucré qu'un abricot.
Cette odeur... ? Non...

- Link ! Que se passe-t-il ? lui demande Malon avec inquiétude.
- Malon ! Reste à l'intérieur et ne laisse surtout pas Romani sortir ! régente Link d'un ton autoritaire.

Les lèvres pincées, il se retourne à sa droite avant de dégainer enfin son épée. Aussitôt, son arme pare une autre, invisible ! Démasquée, l'ennemie recule. La Yiga de la veille ! Elle est là !

- Toi ! fulmine Link en la toisant avec une profonde haine. Alors, tu nous as donc suivis jusqu'ici ?
La Yiga rit hystériquement en tournoyant sa serpe, l'autre main posée sur sa côte gauche.
- Dommage que mon parfum m'a trahie ! Désolée pour la vitre, mais vu que je n'avais pas envie d'attendre que tu finisses de manger pour te tuer, je n'ai pas pu résister ! Si c'est pour que tu manges de la viande pour ensuite mourir deux minutes après, ça aurait été du gâchis ! L'animal aurait été mort pour rien !
Devant ces paroles écoeurantes, Link lui sourit froidement malgré l'anxiété qui lui étreint le coeur.
- C'est vrai que tu as failli m'avoir hier. Je l'admets tout à fait. Mais ce soir, je ne te laisserai plus t'enfuir ! répond-il en lui lançant un regard empli de mépris.
La Yiga lâche un rire hagard.
- Dommage que tu es la maudite réincarnation du héros, car j'avoue que tu commences à me plaire. Mais désolée : tant que tu resteras en vie, tu contrecarres mes plans pour le Maître !
- La réincarnation de Ganon, n'est-ce pas ? intervient Zelda en avançant de quelques pas.
Intriguée, la Yiga se tourne vers elle.
- Oh... on ne peut rien te cacher, chère Princesse Zelda ! Princesse de pacotille. Mais ne t'en fais pas : dès que ton adorable garde du corps mourra sous tes yeux, je m'occuperai de toi pour "qu'il" ne mette pas la main sur toi !
Sous le choc, Malon et Talon fixent la concernée, ne revenant pas de ce qu'ils viennent d'entendre.
- Emilia est la princesse Zelda ? s'étonne Malon à demi-voix.

Mais Zelda ne nie plus son véritable nom et conserve son sang-froid. Quant à Link, il agite son épée pour reprendre son combat acharné contre la Yiga. Brutalement, les deux armes se croisent avec fracas. Même si son ennemie est toujours aussi rapide et malicieuse, Link parvient à parer toutes ses attaques. Il enchaîne ses coups avec la rage de la vaincre. Le désir de protéger sa famille est plus fort que tout. Folle d'inquiétude pour ce dernier, Malon retient Romani qui n'ose pas regarder le combat. Talon tremble de peur à l'idée de voir Link perdre. Seule Zelda, confiante, assiste au combat, prête à intervenir une fois de plus si la situation tourne mal. Mais Link semble mener le combat avec détermination. Avec brutalité, il brandit l'épée à l'avant et érafle le ventre de la Yiga qui laisse tomber son arme. L'épée pointée vers la poitrine de la jeune inconnue qui s'écroule au sol, Link la regarde froidement, prêt à lui donner le coup de grâce à n'importe quel instant.

- Arf... tu... tu vas vraiment me tuer ? s'exclame-t-elle d'une voix apeurée.
Comme une lâche, elle se crispe, terrifiée par la mort si proche.
- Si je te laisse vivre, tu vas encore nous traquer comme un chasseur... lui répond Link d'un ton froid.
Résignée, la Yiga baisse la tête.
- Je n'ai pas le choix... Si tu as des raisons de protéger cette princesse, sache que moi aussi j'en ai pour vous tuer !
Hésitant, Link la dévisage longuement. Alors qu'il s'apprête à la tuer de sang-froid, sa main tremble de plus en plus.
- Link ! Non ! le supplie une voix féminine au loin.

Link lève la tête avant de se retourner. Le souffle court après avoir autant couru, Leyna se tient contre la clôture en bois après s'être introduite dans le jardin du ranch. Tous se retournent dans la direction de cette dernière. En dardant du regard la Yiga, la jeune femme aux longs cheveux argentés s'approche.

- Leyna... Alors, donc c'est vrai... tu es ici... constate cette dernière d'une voix tremblante.
Subitement, Link fixe Leyna, désormais certain. Elle appartenait bel et bien au clan des Yigas.
- Oui... lorsque j'ai senti ta présence, je me suis lancée à ta poursuite... Heureusement que je suis venue à temps, Kurna... lui explique froidement Leyna.
- Dire que tu étais dans ce village depuis le début... Alors c'est pour cela que ce capitaine s'est infiltré dans notre repaire ! constate Kurna d'une voix sèche.
Les yeux de Leyna s'écarquillent soudainement.
- Ce capitaine... ? Tu veux parler de... Pawel ? s'exclame-t-elle avec crainte.
- Tu as vraiment épousé cet homme ? De mieux en mieux ! se moque ouvertement Kurna en ricanant avec folie. Tu sais que tu es toujours considérée comme une traîtresse ? Dire que nos parents avaient placé de l'espoir en ton avenir. Tu étais la chouchoute... Mais de là à quitter notre clan pour épouser un homme aussi pathétique qui a subi ma lame, c'est vraiment le comble !
- N... mon !
Horrifiée à l'idée de ce qui est arrivé à son époux, Leyna recule.
- Leyna ! Pawel est vivant ! Ne croyez pas à ses mensonges ! Il est entre de bonnes mains ! lui révèle Link afin de détruire le plan de manipulation de la Yiga.

Avec épouvante, Leyna baisse la tête malgré le coeur qui s'affole contre sa poitrine. Les larmes aux yeux, elle trouve la force de le regarder avant de tenter de lui avouer la vérité :
- Link... je... je suis....
- Cela n'a aucune importance... Yiga ou non, vous êtes avec nous ! Et pour Pawel, il est en vie, vous pouvez me croire !
- Mais sache une chose, Leyna, poursuit froidement Kurna. Si tu souhaites revenir avec moi, je pense que notre Maître te pardonnera et acceptera que ton cher époux devienne un Yiga.
- Non ! Hors de question que Pawel devienne un monstre comme les Yigas... comme toi... et comme moi jadis... Nos parents n'ont jamais voulu faire de nous des assassins... Ils voulaient surtout que nous connaissions le bonheur et nous épargner la souffrance qu'ont connue les Sheikahs par le passé ! rétorque Leyna, les larmes aux yeux.
En sentant la tristesse résonner dans son coeur, Kurna serre la serpe.
- Toi aussi, tu comptes m'abandonner ? Après nos parents, "lui", maintenant toi... C'est intolérable ! hurle-t-elle d'une voix hystérique. Je préfère que tu sois morte plutôt que tu me dises de telles sottises !

Comme une enragée, Kurna se téléporte afin d'attaquer aussitôt Leyna. L'ancienne Yiga sort son poignard de l'arrière de sa robe-tunique beige et la repousse, n'ayant pas complètement oublié ses aptitudes en tant qu'assassin. Les deux soeurs combattent avec leur propre arme. Hélas, n'osant pas tuer sa propre chair, Leyna se défend uniquement. Brutalement, Kurna érafle sans aucun scrupule l'épaule gauche de sa soeur avant de la repousser. En gémissant de douleur, la jeune femme aux cheveux argentés se plaque contre l'arbre. Elle lâche malencontreusement son poignard. Sans aucune hésitation, Kurna s'approche, la serpe dans la main.

- Au moins, lorsque ton cher époux reviendra, il aura la surprise de te voir enterrée sous une pierre ! hurle-t-elle avant de l'attaquer.

Désespérément, Leyna se crispe, ne pouvant pas se défendre. Mais au dernier moment, Link accourt pour la protéger. Il ne doit pas laisser sa redoutable ennemie s'enfuir. Il doit l'abattre contre son gré. Finalement, après quelques échanges de coups, il plaque Kurna contre le deuxième arbre du terrain. L'éclat de son fragment se manifeste à nouveau. La respiration retenue, il lui poignarde violemment le ventre sans aucune pitié. En hurlant de douleur, le masque de Kurna finit par tomber au sol, dévoilant ainsi son visage, similaire à celui de Leyna. Seuls ses yeux sont rouges. De grandes mèches noires encadrent désormais son visage au teint blême.

Les larmes aux yeux, Leyna s'effondre auprès de Zelda et Malon qui l'aident à se relever. Romani pose les mains sur ses yeux emplis de larmes. Silencieusement, Talon la soutient contre lui. Avec froideur, Link retire brutalement l'épée du ventre de Kurna. Le sang gicle sur sa joue droite, là où se trouve sa petite cicatrice d'hier. La femme au coeur malveillant recule en portant la main sur sa plaie. Peu à peu, elle sent la mort s'emparer d'elle avant de tomber sur ses jambes, les yeux noyés de larmes. Tout à coup, elle commence à ricaner. Sur ses gardes, à la fois surpris et effrayé par cet horrible rire, Link pointe son épée dans sa direction.

- Pauvre fou... C'est au moment de leur mort que les Yigas deviennent plus puissants et qu'ils peuvent condamner une personne à mourir ! lui déclare Kurna en se tournant vers la famille de Link. Comme cette petite fille lâche qui n'ose pas regarder la scène !

Après avoir hurlé comme une folle furieuse, la Yiga se téléporte instantanément. Elle apparaît près de la maison, pour envoyer sa serpe en direction d'une Romani sans défense. Apeurée, la petite fille pousse un cri de frayeur. Instantanément, Talon la couvre afin de se prendre l'attaque à sa place. La serpe plantée dans son thorax palpitant, il hurle de douleur avant de s'écrouler au sol.

- Non ! Papa ! hurle Malon d'une voix épouvantable.
Sous le choc, Link se statufie en lâchant un cri d'effroi. Tremblante, Romani lève la tête avant de regarder le dos de son père, ne comprenant pas très bien la situation.
- Pa... Papa ! s'exclame-t-elle en larmes.
Agenouillée au sol, Kurna ne peut s'empêcher d'éclater de rire. Avec une profonde rancoeur, Leyna se retourne vers elle et la fixe. En croisant le regard froid de sa soeur, la Yiga recule avant de disparaître, tel un coup de vent.
- Papa ! Papa ! Tu m'entends ? Ouvre les yeux ! Je t'en prie ! sanglote Malon en le soulevant dans ses bras.

Leyna accourt pour les rejoindre avec affolement. Entre la vie et la mort, Talon a les yeux fermés et ne respire presque plus. Désespérément, Malon essaye de le réveiller, tandis que l'ex-Yiga, compétente dans la médecine, tente de stopper l'hémorragie externe. Hélas, en constatant avec horreur que la serpe a réussi à toucher le coeur, Leyna baisse la tête avec impuissance. Horrifié, Link se laisse tomber près de Talon. Il le secoue.

- Talon ! Tenez bon ! s'exclame-t-il d'une voix déchirée. Vous... vous ne pouvez pas partir vous aussi ! Vous n'en avez pas le droit !
Submergé par la tristesse, il essaye de retenir ses larmes. Son estomac se tord et sa poitrine le fait souffrir.
- Talon... non... murmure-t-il en posant la main sur ses yeux, pris de remords.
- Papa va bien finir par se réveiller... Il ne peut pas mourir ! Ce n'est pas possible ! panique Malon en sanglots. La déesse Hylia ne peut pas nous le prendre ! Elle nous a déjà pris maman... Elle ne peut pas encore nous prendre papa !

Désemparée devant cette famille désormais brisée, Zelda sort finalement le flacon que lui a préparé Kairi : oui, le seul remède capable de repousser une mort lente. Sans hésitation, elle s'approche avant de poser la main sur l'épaule de Link.

- Ne t'en fais pas, Link : Talon survivra... Je te le promets, rassure Zelda d'une voix modulée.
Surpris par ces paroles, Link lève la tête. Avec horreur, il finit par comprendre ce qu'elle projette de faire.
- Zelda ! Cette potion est très rare... Si tu fais ça, tu vas...
- Oui... je sais. Mais Talon en a besoin bien plus que moi. Il doit continuer de vivre avec vous.

Link détourne le regard, n'ayant pas le coeur de protester. C'est comme si un choix douloureux pèse sur ses épaules : soit Talon ou soit Zelda. Un choix bien cruel et inimaginable. Pourtant, l'Hylien ne veut perdre aucun des deux. Zelda maintient toujours sa décision et s'agenouille, à son tour, auprès de Talon. Sous les yeux attentifs de Leyna, elle ouvre le bouchon du flacon, désirant sacrifier son dernier espoir de vivre, ne serait-ce que pour quelques mois en plus.

Alors que Malon et Romani fixent la princesse avec incompréhension, Zelda fait boire tout le contenu à Talon. Une fois le flacon vidé, elle se lève et recule de quelques pas, ne pouvant rien faire de plus. Chacun fixe Talon, toujours inconscient. De longues secondes d'interrogation et de patience s'écoulent. Peu à peu, la respiration haletante, il finit par ouvrir faiblement les yeux, encore dans les vapes. Sa blessure a disparu comme par miracle. La potion l'a sauvé de la mort. Aussitôt, ses grands yeux bleus se posent sur Romani.

- Pa... papa... ? murmure la petite fille, les joues baignées de larmes.
- Ro... Romani... Tu vas bien ? Tu n'as pas eu mal ? s'inquiète Talon en lui tenant la main.

Sans lui répondre, Romani se jette dans ses bras et pleure très fort contre lui, encore effrayée par ce qui s'est produit. Surpris par ce geste auquel il n'est plus habitué depuis si longtemps, Talon la serre dans ses bras. Les larmes aux yeux, Malon s'approche de son père.

- Ne nous fais plus jamais peur comme ça, papa, déclare-t-elle, la voix poussée par ses pleurs.
- Ne pleure plus, Malon... je reste avec vous... Pendant mon inconscience, j'ai revu Marine... Et après, j'ai entendu la voix de Link qui m'a demandé de tenir bon... explique Talon en regardant Link avec un air attentionné. Alors, c'est ce que j'ai fait...

Soulagé, Link esquisse un sourire à la fois rassuré et mélancolique. Il baisse la tête en sentant son coeur se calmer peu à peu malgré la frayeur. Alors que la famille se réunit, Zelda reste en retrait. Malgré le pessimisme qui balaye tout espoir de survie en elle, elle ne regrette pas son geste, loin de là. De son côté, même si Leyna souffre d'avoir revu sa soeur, elle est avant tout heureuse de revoir Talon remis sur pied. Mais en pensant à Pawel et à Kurna, elle sent pourtant son coeur saigner. Elle lève les yeux au ciel avec désespoir, consciente que son choix l'a conduite à une telle déchirure.

* * *

Au même moment, Kurna, le ventre en sang, entre dans un vieux temple gothique. Le hall, tenu par de grandes colonnes en pierre, fait même penser à une vieille église. Seuls les vitraux brisés ainsi que les meubles rustiques détruits amplifient le côté lugubre. N'arrivant plus à se tenir debout, elle s'écroule sur le carrelage noir avant de ramper désespérément vers le siège du trône. Son allure est ralentie par son propre sang. Avec difficulté, ses yeux se posent sur un homme au teint légèrement mat. Vêtu d'une grande cape noire qui couvre sa chemise blanche, la seule couleur pure de sa tenue, il la toise avec froideur. Les cheveux noirs mi-longs et les yeux rouges comme le sang, il ne prend pas la peine de se lever pour lui venir en aide. Malgré sa beauté, il semble être sévère et impassible. Sur l'annulaire gauche, une alliance argentée luit dans l'ombre.

- Seigneur Vadel... S'il vous plaît, guérissez-moi... le supplie désespérément Kurna en état de choc.
- "Te guérir" ? Alors que tu ne m'as pas ramené la princesse et le héros comme il se doit ? rétorque froidement l'intéressé. Surtout que le temps nous est compté... Tu le sais pourtant.
- Si vous me guérissez, je réussirai ma mission... Mais abrégez mes souffrances... soignez-moi... insiste la Yiga, de plus en plus mal-en-point. Par pitié, soignez-moi...
- Abréger tes souffrances serait beaucoup trop facile... Je préfère que tu perdes le souffle justement. Si la princesse meure avant que je n'obtienne mes pouvoirs, hors de question de ressusciter comme convenu tes parents, ainsi que ton cher ami qui n'a pas réussi à mettre fin à la vie du porteur de légende lors de cette soirée... Je n'ai aucun compte à te rendre, donc je ne t'accorderai aucune faveur sentimentale.
- Seigneur Vadel... je vous en supplie ! s'exclame Kurna d'une voix larmoyante en tendant la main dans sa direction. Si vous me sauvez, je... je vais conclure le pacte avec Argota pour obtenir un grand pouvoir ! Je vous serai entièrement dévouée. Je m'occuperai de mes affaires personnelles... lorsque tout sera terminé...
Indifférent devant les supplications de Kurna, le comte Vadel lève la tête au plafond. Un étrange brouillard noir essaye de s'échapper d'une misérable cage conçue pour le retenir.
- Soit... Sylves..., appelle-t-il d'un ton calme.

Après avoir entendu clairement l'appel du comte, un jeune homme, le bas du visage caché sous une écharpe blanche, entre dans la salle. Il porte un haut d'épéiste rouge, le symbole Yiga brodé au milieu, ainsi qu'un pantalon noir serré. Un couvre-chef de gavroche noir couvre ses cheveux blancs comme neige en bataille, tandis que ses yeux rouges luisent légèrement. Aussitôt, il remarque Kurna au sol. Précipitamment, il s'approche de son alliée et pose la main sur son épaule pour la soigner. Vadel se lève avant de lui donner un nouvel ordre :

- Sylves, pendant mon absence, je compte sur toi pour que tu veilles sur "lui".
- Votre absence ? s'étonne Sylves avec interrogation, les yeux rivés sur le comte. Mais si vous quittez cette pièce, "il" risquerait de s'énerver. Surtout que vous savez bien que vous ne pouvez pas vous éloigner trop de lui...Vous risqueriez de mourir... Laissez-moi me charger de cette mission : je vous ramènerai la princesse et l'élu du courage.
- Non, Sylves. Je préfère me charger moi-même de cette affaire. Ce n'est pas dramatique si ma santé empire à cause de cet égoïste... lui répond Vadel avec un regard plus humain.

Tout à coup, un horrible hurlement retentit. Vadel sourit froidement, comme s'il est amusé par la colère de l'esprit spirituel. Il lève la tête avec un air sûr de lui.
- En attendant, tu ferais mieux de rester tranquille dans ta niche, Ganon, se moque-t-il d'une voix assombrie.
Fou de rage, le mystérieux être enchaîné lâche un hurlement épouvantable.

Chapitre bonus : Souvenir 1 - Impa et Zelda   up

Au nord de la plaine d'Hyrule. 10 ans avant.

Au sommet d'une montagne, un incroyable Lynel argent pousse un hurlement au ciel orageux. Tel un brave guerrier, il secoue son épée avec agressivité. Sa mâchoire ensanglantée laisse échapper des souffles rauques. Tout comme la jeune Impa qui a du mal à stabiliser sa respiration, prostrée au sol. Sa longue tresse blanche flotte dans le vent tempétueux. Sous ses yeux rubis, ses deux compagnons Sheikahs gisent dans leur propre flaque de sang, découpés en deux. En fixant avec horreur le Lynel qui savoure sa victoire, elle peine à retenir ses larmes. Ses dents se serrent et une rage folle irradie tout son être. Les dents serrées, la jeune fille se relève sur ses jambes mal assurées et pointe son katana dans la direction du centaure impitoyable. Pourtant, en le voyant charger dans sa direction, la tête baissée à l'avant, la peur finit par paralyser Impa. Peu importe combien elle aspire à se venger, elle perd toute confiance en elle.
- Je... je ne veux pas mourir... Non ! hurle Impa d'une voix déchirée. Je... je ne veux pas ! Pas comme ça...
Impitoyable, le Lynel galope toujours sa direction avant de lui infliger un coup mortel. En ressentant une épouvantable douleur qui semble briser son corps, la Sheikah perd connaissance, son corps chutant du haut du sommet.

* * *

Plusieurs jours plus tard...

Dans le jardin luxuriant du royaume d'Hyrule, une petite fille hylienne aux longs cheveux dorés, vêtue d'une longue petite robe bleue à épaules nues, touche les pétales de la Princesse de la Sérénité. En prenant un air attentionné, elle cueille la fleur qu'elle juge la plus belle, puis accourt en rentrant hâtivement au château.

- Princesse Zelda ! Où êtes-vous encore ? appelle sa nourrice au loin.

Zelda l'ignore et monte rapidement les escaliers pour ne pas se faire remarquer. Sur la pointe des pieds, elle se dirige vers la chambre d'amie et ouvre la porte. Sur le lit, Impa est allongée, le torse complètement bandé. Meurtrie en repensant sans cesse à ce Lynel, elle ne bouge pas. Elle ne fait plus attention au monde qui l'entoure. Alors qu'elle agonisait au pied de la montagne, un miracle l'a sauvée la mort. Ce miracle n'était nul autre que la Reine Emilia, accompagnée de sa troupe. Après s'être entretenue avec le roi Zora, la souveraine d'Hyrule avait senti une présence mourante dans les alentours. Mais pourtant, Impa n'a pas prononcé un seul mot. Son corps a peut-être survécu, mais pas son âme, complètement brisée par ce combat. Ainsi, elle n'est plus que l'ombre d'elle-même. Le visage du Lynel et le cadavre de ses deux alliés assaillent sans cesse son esprit. Curieuse, la petite Zelda avance dans sa direction.

- Madame ! Je... je vous ai rapporté une magnifique fleur ! Regardez ! s'exclame-t-elle d'une voix timide.

Elle lui tend son présent, mais Impa l'ignore. En prenant un air boudeur, les joues gonflées comme un bébé, Zelda ne désespère pas et monte sur le lit pour agiter la fleur sous le nez de la Sheikah. Les paupières de la jeune guerrière se plissent, comme si la Princesse de la Sérénité la fait sortir de ses songes les plus sombres. Impa finit par poser son regard nonchalant sur la petite Zelda.

- Bonjour Madame ! Vous allez bien ? s'exclame la petite fille.
Impa ne lui répond pas. Avec beaucoup de mal, elle se retourne de l'autre côté. Têtue, Zelda en fait de même.
- Cela ne sert à rien de vous retourner ! Vous n'êtes pas cachée !
- Fiche-moi la paix, gamine. Je veux rester seule ! tonne froidement Impa.
- Oh ! Enfin, vous me parlez ! Je suis si contente ! se réjouit Zelda avec un large sourire, non attristée par les paroles de cette dernière. Comment vous trouvez cette fleur ? Elle vous plaît ? Je peux vous en cueillir d'autres si vous voulez !
- Tu es dure de la feuille ? Je t'ai dit de me laisser tranquille. Va jouer ailleurs.
- C'est drôle ! Vous êtes comme mon papa ! Vous dites les mêmes choses que lui.
Lassée, Impa essaye de s'asseoir. Mais en sentant sa souffrance physique s'éveiller, elle grimace en laissant échapper un gémissement de douleur.
- Vous allez bien ? s'inquiète Zelda en lui tenant la main.
La Sheikah la repousse vivement en fuyant son regard. Soudainement, la nourrice de Zelda entre dans la chambre. La "mégère", les cheveux gris attachés en chignon et le dos alourdi par le poids de la vieillesse, pose ses mains sur ses hanches avec mécontentement.
- Princesse Zelda ! Enfin, je vous retrouve ! Sortez tout de suite d'ici ! ordonne-t-elle en lui empoignant le bras pour la faire sortir de la salle.
- Oh non ! Je veux rester avec la dame ! Elle n'arrête pas de pleurer ! proteste Zelda en se débattant.
- Non et non ! Je ne veux rien savoir ! Vous devez réviser vos leçons ! rétorque la vieille nourrice.

Sans voix, Impa entend la porte de sa chambre claquer comme un coup de vent.
Enfin un peu de calme... Mais cette gamine... Pourquoi elle a cru que je pleurais tout le temps ? se demande-t-elle en fixant la fleur posée sur sa couverture. En repensant à sa larme de Sheikah, peinte sur sa joue droite, elle esquisse un triste sourire.
Ah oui... Elle a dû croire que c'est une vraie larme... Si seulement ça pouvait être une vraie... Maintenant, depuis ce combat, j'ai perdu la force de pleurer... Mais peu importe : quand je vais me remettre debout, je ferai tout pour retrouver ce Lynel et le tuer le plus atrocement possible comme il a tué Astar et Kana... Oui, la vengeance est devenue ma raison de vivre...
Résolue, malgré l'incroyable colère qui brille dans ses yeux rouges, Impa effleure la Princesse de la Sérénité du bout de ses doigts. Inconsciemment, en repensant à petite Zelda, les battements de son coeur s'accélèrent, sans qu'elle ne comprenne pourquoi.

* * *

Au même moment, la nourrice retient Zelda de force dans le couloir.
- Mais lâchez-moi, vieille sorcière ! Je ne veux pas lire un livre avec vous ! peste la petite Princesse.
- Silence ! Une princesse ne doit pas parler comme une insolente. Votre père doit avoir honte que vous vous conduisiez comme une gueuse du peuple !
En guise de réponse, Zelda lui tire la langue.
- Voyons, quel est ce chahut ? s'élève une soudaine voix féminine au bout du corridor.

La vieille dame relâche la fillette avant de croiser le regard de la Reine Emilia. Ses longs cheveux dorés tombant en cascade sur ses fines épaules nues, elle porte une magnifique robe violet clair qui intensifie sa beauté. Entre ses deux longues mèches légèrement frisées, une couronne ornée cache son front pâle, prouvant ainsi son titre royal. Ses yeux bleus pétillent d'humanité.

- Maman ! Nounou me gronde pour un oui et pour un non, et ne me laisse pas voir la dame qui pleure tout le temps ! lui explique aussitôt Zelda en se blottissant contre les jambes de sa mère.
- Parce que tu l'as embêtée ! lui répond la vieille nourrice. En plus, qu'est-ce qui te fait croire que ce n'est pas une méchante personne ?
- Ce n'est pas vrai ! Elle a regardé la fleur ! Elle ne doit pas être méchante !
- Regarder la fleur ? répète la Reine Emilia avec stupéfaction en caressant la tête de sa fille.
- Oui ! En plus, même si on dirait un garçon, sa voix est jolie ! affirme vivement Zelda avec un large sourire.
Ne sachant pas quoi dire, la Reine lui rend son sourire et pose un regard rassuré sur la nounou.
- Bien ! Vous pouvez disposer ! Je crois que les leçons de Zelda peuvent attendre, ordonne-t-elle calmement.
- Mais votre Majesté, votre époux m'a ordonné d'éduquer la Princesse Zelda.
- Avez-vous oublié que j'ai autant de pouvoir que mon époux ? Cessez de discuter mes ordres, je vous prie.
Devant la réponse sèche de la Reine Emilia, la vieille dame s'incline avant de quitter les lieux en grommelant. Avec un air moqueur, Zelda croise ses mains derrière son dos.
- C'est trop marrant ! Elle a tellement peur de toi, maman ! commente-t-elle jovialement.
- Pourtant, je suis loin d'être cruelle, ironise la Reine Emilia. Écoute mon trésor, je te propose une autre activité : est-ce que ça te dirait de venir avec moi à la citadelle ?
- Bien sûr ! Mais pa... Hum... Le Roi ne sera pas fâché si je n'ai pas révisé aujourd'hui ? lui demande aussitôt Zelda, un peu nerveuse.
- Non, ma puce. Même si tu es une princesse, et que tu vas régner un jour sur Hyrule en tant que reine, tu mérites aussi de te détendre comme n'importe quel être vivant.
- Si seulement le Roi pouvait me prendre dans ses bras aussi... Nounou m'a dit que je n'arrête pas de le décevoir.
Tout à coup, Zelda est prise d'une quinte de toux. Tristement, Emilia baisse les yeux.
- Allez. Va te préparer. Je te rejoindrai dans quelques minutes dans le hall, lui annonce-t-elle.

La petite princesse approuve d'un hochement de tête avant de s'exécuter. Quant à la Reine Emilia, en reprenant son air sérieux, elle entre dans la chambre d'Impa. Méfiante, la jeune fille se tourne vers son hôte.

- Je ne vous dérange pas ? lui demande Emilia avec politesse.
Impa ne répond pas et baisse la tête comme un animal méfiant. Silencieuse, la Reine avance jusqu'au coeur de la pièce.
- Enfin, vous revenez peu à peu à vous. Je commençais à m'inquiéter, avoue-t-elle en croisant ses mains. Lorsque je vous ai trouvée au pied de cette montagne, vous étiez mourante.
- Pourquoi... vous m'avez sauvée... ? l'interroge froidement Impa.
- Est-ce que je suis obligée de vous donner une raison ? Tout ce qui compte, c'est que vous êtes vivante, et vous devez continuer de vivre.
La Sheikah tique et détourne son regard.
- Ne vous moquez pas de moi, votre Altesse ou je ne sais quoi. Mais au moins, grâce à vous, je vais pouvoir aller tuer ce Lynel et prendre ma revanche. Je vous dois bien ça.
- Tuer un Lynel à vous toute seule ? Mais c'est de la pure folie, rétorque Emilia, dubitative.
- Ce n'est pas un être vivant pur ! s'emporte aussitôt Impa en toisant la Reine, droit dans les yeux. Il mérite de mourir ! Il... il a tué mes amis de la façon la plus cruelle qui soit ! Et puis, vous êtes la Reine de ce maudit monde, non ? Pourquoi vous ne donnez point l'ordre à vos milliers soldats de tuer ces Lynels ? Pourquoi vous laissez les peuples dans la souffrance ? Pourquoi nous, les Sheikahs, sommes nées pour combattre et faire le ménage à votre place ?

Comprenant la rancoeur d'Impa, la Reine Emilia se dirige vers le balcon. Le ciel est toujours aussi clair et la nature expose la vie de chaque végétation comme de grands arbres peuplant les terres qui s'étendent à l'horizon.

- Si je peux me permettre de vous retourner la question : pourquoi avez-vous voulu suivre la coutume Sheikah au doigt et à l'oeil ? Celle de défendre le peuple d'Hyrule dans l'ombre ? Pourquoi n'avez-vous pas suivi les Yigas ? Cela aurait été beaucoup plus facile de nous haïr...
- Ne me comparez pas avec ces diables ! Je n'ai rien à voir avec les Yigas ! Je rejette leur vision satanique ! hurle Impa en laissant parler ses sentiments les plus forts. Je suis née pour protéger Hyrule ! Mais au fur et à mesure... la mort me retire tous mes compagnons et ma... famille... Celles et ceux qui ont voulu honorer notre clan, souillé et marqué par la mort depuis tant de générations.
La Reine Emilia ne répond pas tout de suite, comprenant tout à fait la souffrance de la jeune blessée.
- Et vous pensez que la mort de ce Lynel va ramener les morts ? demande-t-elle soudainement.
- Au moins, le fait de savoir que cet être abominable meurt me soulagera ! Même quand je serai morte ! Après tout, la mort peut être une bénédiction. Enfin, elle le sera surtout pour moi, car il ne... me reste rien en ce monde !
Emilia baisse les yeux, comme si Impa avait touché un point sensible.
- C'est en prononçant de telles paroles que vous souillez justement votre clan, réplique-t-elle finalement.
Envahie par la colère, la Sheikah se lève. C'en est trop ! Mais affaiblie, elle se plaque contre le mur pour se tenir sur ses jambes tremblantes.
- Comment osez-vous ? Comment osez-vous me dire ça ?! fulmine-t-elle d'une voix brisée.
La Reine Emilia se retourne dans sa direction avec un léger sourire avant de lui répondre :
- Les Sheikahs doivent apporter la vie, pas en se vouant à la vengeance.
Abasourdie par de tels propos, Impa la fixe longuement, la gorge serrée. Ces paroles, prononcées avec sincérité, résonnent en elle comme une étrange mélodie qui l'apaise.
- Vous feriez mieux de vous reposer encore un peu. Et ne pensez plus à cette maudite histoire de vengeance. Et encore moins à la mort...

Sur ses mots, Emilia quitte la chambre. Contre le mur, Impa tremble avec une incroyable impuissance. Encore endeuillée, elle pose la main sur ses yeux, prise par une soudaine envie de pleurer la mort de tous ceux qu'elle a perdus.

* * *

Deux jours plus tard, presque rétablie, Impa se rend dans le jardin royal. Vêtue d'une tunique d'épéiste bleue et d'un pantalon noir très serré, elle essaye de se changer les idées. Depuis leur dernière conversation, elle n'a plus revu la Reine Emilia. En reconnaissant les fleurs Princesse de la Sérénité, la Sheikah s'agenouille pour toucher les pétales. La pleine lune éclaire ce jardin à la fois mystérieux et euphorique. Impa ferme les yeux en adressant une prière pour ses deux défunts compagnons. Acceptant à présent leur mort si injuste, malgré le poids de son impuissance, la jeune fille reste figée telle une statue. Doucement, ses paupières s'ouvrent. Ses yeux rouges noyés de larmes, qui n'arrivent cependant pas à couler, se rivent dans le vide. Tout à coup, tout devient noir. Quelque chose l'empêche de voir : deux mains. Rapidement, Impa se retourne en arrière, sur ses gardes ! Avec stupeur, elle croise le regard de la princesse Zelda ! Joviale, la petite fille la dévisage avec bienveillance.

- Je vous ai fait peur, madame ? lui demande-t-elle, non apeurée.
Ne sachant pas quoi penser, Impa se lève en soupirant.
- Oh. Ce n'est que toi. Qu'est-ce que tu me veux encore, gamine ?
- Je ne suis pas une gamine ! Je vais avoir bientôt sept ans, donc soyez plus gentille ! réplique Zelda en faisant la moue.
- Ah oui, c'est vrai ça... Votre Altesse, votre Royauté ! Votre Grandeur ? demande Impa avec une pointe d'ironie. Désolée si le respect et moi, ça fait deux. Je ne suis pas à l'aise avec tout ça...
- Même pas ! Je ne veux pas que tu m'appelles Princesse, toi aussi.
Surprise par une réponse aussi soudaine, Impa se montre curieuse en croisant ses bras.
- Oh ? Et je peux savoir pourquoi ?
- Parce que je n'aime pas être une princesse.
- Pourtant, c'est ce que tu es. Tout comme moi, je suis avant tout une guerrière sheikah.
- Non. Avant d'être une princesse, je suis une fille. C'est maman qui me le dit tout le temps ! Et toi, avant d'être une guerrière shéikaché, tu es une madame !
Devant l'attitude et les paroles de la petite Zelda, Impa esquisse enfin un sourire amusé. Elle ricane, sans une once de moquerie.
- Oh ! Mais vous riez ! remarque Zelda, ses yeux bleus arrondis d'étonnement. Et pourquoi vous vous moquez de moi, déjà ?
Peu à peu, Impa commence à se calmer.
- C'est juste que quand j'étais petite, je n'arrivais pas à bien prononcer Sheikah. Je disais Steak Haché. Ça a beau être mon peuple, j'affirme tout à fait que c'est un nom si étrange.
Zelda penche la tête vers la gauche, toute curieuse. Finalement, elle sourit avant de lui demander :
- Vous allez arrêter de pleurer, alors ?
Stupéfaite, Impa la regarde droit dans les yeux en s'agenouillant à sa hauteur.
- Pleurer ? répète-t-elle.
Zelda pose délicatement sa main sur la joue droite de la guerrière.
- Cette larme rouge... elle coule tout le temps ? lui demande-t-elle.

Impa ne répond pas, ne sachant plus quoi penser. En repensant à l'origine de cette larme, elle lâche un triste sourire avant de répondre :

- Cette larme est le symbole du clan Sheikah. C'est loin d'être joyeux mais... pourtant, notre clan a été marqué par une accablante tristesse. Une tristesse cachée dans l'ombre... cachée aux yeux du peuple.
- C'est comme le Roi m'a dit ! enchaîne Zelda.
- Hum ?
- Il m'a dit que si j'ai envie de pleurer, je dois être dans un coin ! Que je ne dois pas montrer mes larmes rouges.
- Larmes rouges ?
- Oui. Quand je pleure, elles coulent ! Maman a envie de pleurer quand elle les voit et le Roi... ou plutôt papa, ne veut pas regarder. Pleurer est une bêtise ? l'interroge Zelda avec mélancolie.
Intriguée par son histoire, Impa ne sait pas quoi répondre sur le coup. En levant les yeux au ciel étoilé, elle finit par rassembler les bons moments.
- Pleurer n'est pas... une bêtise. C'est même un acte très humain. Un acte qui prouve que nous sommes vivants, explique Impa en repensant à sa vie. Ce n'est pas une honte ou un crime. C'est... vivant...
Longuement, Zelda la regarde, comme si elle tentait de mémoriser ces paroles. Elle lui sourit.
- Je savais que tu étais gentille, madame... Euh...
- Appelle-moi Impa.
- Appât ? répète de travers la fillette.
- Non ! Impa. Im... pa, articule la concernée.
En murmurant le nom pour s'entraîner, Zelda s'exclame :
- D'accord, Impa ! Nous sommes donc amies ?
- Ne pousse pas le bouchon trop loin, gamine. Je suis encore une inconnue et tu veux déjà qu'on soit amies ?
- Mais oui !
Les joues rougies, Impa se lève. Avec fierté, elle croise les bras.
- D'habitude, je ne supporte pas les gosses ! Mais...
Malgré sa réticence, elle soupire avant de poursuivre :
- Pour toi, je vais faire une exception à condition que tu ne m'embêtes pas tout le temps.
Heureuse, Zelda s'accole à elle.
- Merci ! Merci Appât ! remercie-t-elle. Tu resteras avec nous, hein ?
- Appelle-moi encore comme ça et je te lance comme appât dans le lac ! réplique Impa toute gênée.
Zelda rit, amusée par l'expression de sa nouvelle amie.

* * *

Depuis, tous les jours, Zelda apporte une Princesse de la Sérénité à Impa. Bien qu'elle n'arrive pas à exprimer ses émotions les plus sincères, la guerrière ne peut qu'être touchée par ce geste. En lâchant un sourire, elle admire la beauté de la fleur : une beauté similaire à la petite princesse. Souvent, elle accompagne Zelda dans le jardin et veille sur elle comme un ange gardien. La petite fille court et essaye d'attraper les pétales dansant dans le ciel. De leur côté, le Roi et la Reine sont très pris par les affaires, mais notamment par un problème bien plus grave...

* * *

Un soir, la Reine Emilia convoque Impa dans sa chambre pendant que Zelda dort à poings fermés.
Avant d'entrer dans la chambre, la jeune fille croise les regards désespérés de tous les sujets du château, y compris le Roi qui a le dos tourné. Étonnée de le voir ici, Impa met sa stupeur en veilleuse et entre finalement dans la chambre. Allongée dans son lit, pâle et les yeux rouges de tristesse, la Reine Emilia agonise.

- Votre... votre Majesté ! s'inquiète Impa en s'agenouillant à son chevet. Que vous arrive-t-il ?
Le souffle court, Emilia ouvre mieux les yeux et croise le regard d'Impa.
- Impa... c'est bien que tu sois là. Merci d'être venue... remercie-t-elle dans un souffle haché.
- Ne vous forcez pas... Vous... vous avez voulu me voir ?
Emilia approuve d'un hochement de tête avant de lui demander :
- Impa... Est-ce que vous resterez avec nous ? Vous n'allez pas partir, n'est-ce pas ?
Interloquée par une telle question, la Sheikah détourne son regard.
- Je suis restée plus longtemps que prévu, je suis désolée. Mais maintenant que ça va beaucoup mieux et que la plaie a été cicatrisée, je pense partir pour un voyage en tant que mercenaire. C'est tout ce que je peux faire de mon mieux. Si je ne peux pas me venger, alors je dois utiliser ma vie pour les autres...
- Je sais que c'est très égoïste ce que je vous demande mais s'il vous plaît : restez ici... Restez au château pour Zelda, la supplie faiblement Emilia, les larmes aux yeux.
Impa reste sans voix tant elle est impuissante face à la belle reine mourante.
- Zelda semble beaucoup vous aimer. Elle vous voit même comme une grande soeur.
- Mais voyons, votre Majesté ! Je ne peux pas rester ici ! J'aime beaucoup Zelda, oui. Elle est une adorable enfant mais c'est de vous dont elle a le plus besoin. Pas moi !
- Après ma mort, je désire tant que vous restiez pour Zelda et que vous preniez soin d'elle. Elle aura besoin de vous.
Horrifiée, Impa a un mouvement de recul.
- Après votre mort... ? répète-t-elle d'une voix sèche. Mais voyons, ne dites pas une telle chose ! Ce coup de froid va passer et...
- Je vais mourir... la coupe Emilia d'une voix larmoyante. La maladie aggrave ma santé de jour en jour... Elle me condamne depuis si longtemps... Mon époux en souffre terriblement et je ne veux pas que... ma précieuse Zelda passe ses journées à pleurer ma mort. Je veux qu'elle vive une enfance heureuse. Une vie heureuse jusqu'à la fin en évitant de penser le plus possible à la mort... Pitié, Impa... Promettez-le-moi ! Protégez et veillez sur ma fille quoi qu'il arrive. Votre lien avec elle pourra la rendre heureuse.
De plus en plus troublée, Impa serre ses poings avec une profonde mélancolie. Elle s'agenouille, la tête baissée.
- Je vous le jure... Votre Majesté... en fait le serment Impa avec le coeur lourd. Mais s'il vous plaît, ne mourrez pas...
Reconnaissante, Emilia pose la main sur la tête de la guerrière pour la caresser avec un instinct maternel.

* * *

Lorsque le soleil se lève, la Reine d'Hyrule a déjà quitté le monde... Tout le royaume pleure et regrette sa tragique disparition. Sa grâce, sa compassion et sa générosité ont disparu à tout jamais. Plusieurs heures après l'enterrement, Impa se trouve agenouillée dans la salle de trône. Le Roi, marqué par la tristesse, ne pose pas un seul regard sur elle. Sa cape noire du deuil flotte dans la brise qui s'insinue dans la pièce royale.

- Impa. Dorénavant, je vous clame comme un sujet dans cette demeure. Si vous me jurez fidélité et protection, je vous accorde le droit de devenir la nourrice de la Princesse Zelda comme il est stipulé dans le testament de la Reine Emilia... lui déclare le Roi d'une voix calme.
Impa incline de la tête, n'osant pas bouger.
- Vous veillerez à ce que la princesse apprenne ses tâches et la royauté avant sa majorité. Il n'y a plus une minute à perdre.
Tout à coup, une question brûle les lèvres de la Sheikah :
- Vous... vous allez vous occuper de la Princesse Zelda, n'est-ce pas ?
Le Roi inspire un bon coup, connaissant déjà la réponse. Il se retourne en prenant un air stoïque.
- Vous vous occuperez de cet enfant toute seule. Ce n'est pas mon devoir en tant que Roi.
Subitement, la colère gagne avec facilité Impa.
- Mais c'est votre fille ! Vous êtes son père ! Avant d'être Roi, vous êtes son père, votre Majesté ! La Reine Emilia était présente pour sa fille et vous...
- Assez ! Il suffit ! Mesurez vos paroles et exécutez mes ordres sans aucune protestation ! tonne le Roi avec sévérité en se retournant. La Princesse Zelda existe pour devenir la Reine légitime de ce royaume, et non pour vivre comme un simple être vivant !
Avec mépris, Impa serre ses dents et retient ses mots. Les paroles du Roi l'écoeurent au plus haut point.
- Vous pouvez disposer, ordonne le Roi en se retournant à nouveau.

Impa s'exécute en prenant l'allure d'un fidèle sujet. Seul, le Roi évacue ses émotions les plus fortes en se tenant debout à l'aide du siège d'Emilia.
- Zelda... sois forte et lutte contre cette maladie aussi longtemps que tu pourras... Pardonne-moi d'en avoir terriblement peur, désolé... lâche-t-il pour soulager sa peine.

En colère, Impa traverse le couloir comme un éléphant dans une boutique de porcelaines. La mort de la Reine, l'enterrement, l'audience avec le Roi... Tout est allé si vite. Mais sa préoccupation reste Zelda. Arrivée devant sa chambre, elle ouvre la porte. La pièce, remplie de peluches et de meubles fastueux bleus, est assez grande. Zelda, vêtue d'une robe noire, fixe une toile représentant le héros de la légende aux côtés d'une princesse. La Triforce est gravée juste au-dessus d'eux.

- Princesse Zelda... l'appelle doucement Impa en la rejoignant.
L'intéressée pose ses yeux sur sa nouvelle nourrice, le sourire élargi sur son visage.
- Impa ! Maman est réveillée ? lui demande-t-elle. Elle s'est bien reposée dans cette grande boîte ?
Tristement, Impa baisse les yeux. En effet, Zelda est trop jeune pour être consciente de ce qu'est réellement la mort. Pour la petite fille, la mort est seulement un long sommeil... Seulement, le réveil n'existe pas.
- J'ai vu un fantôme qui ressemble à maman tout à l'heure...
- Un fantôme ? s'étonne Impa.
- Oui... et je ne sais pas pourquoi... mais je me sens... si triste... C'est pour ça que je regarde ce grand dessin. Surtout ce héros que je rêve de rencontrer et de tomber amoureuse. Quand je le regarde, je suis moins triste...

Impa regarde à son tour la toile de la précédente légende : celle du héros d'Hyrule qui a combattu auprès de la princesse Zelda contre Ganon.

- Maman va pouvoir me conter cette histoire ce soir ? demande soudainement Zelda.
Tristement, Impa lui pose la main sur l'épaule, décidée de lui dire la vérité.
- Zelda... Ta maman... elle... elle ne se réveillera pas... elle...
- Elle est très fatiguée ? lui demande Zelda, cédant à l'inquiétude.
Impa n'ose pas poursuivre. Il est très difficile d'expliquer cette cruelle vérité à une enfant aussi jeune et sensible.
- Elle va tout le temps... dormir dans cette boîte ? enchaîne Zelda, la voix tremblante.
La nourrice Sheikah hoche douloureusement la tête. En se forçant à sourire malgré les larmes aux yeux, Zelda se retourne vers la toile.
- Elle... elle va sûrement faire des beaux rêves... et...
Aussitôt, la petite fille fond en larmes. Les yeux d'Impa s'écarquillent. Honteuse, Zelda pose ses mains sur son visage.
- Je... je suis désolée, Impa ! Je ne dois pas... pleurer mais... je me sens triste ! Je... je veux revoir maman ! Je veux... qu'elle se réveille mais si... si elle a sommeil, je dois la laisser dormir... Mais... elle... elle me manque ! Je veux... être dans ses bras !
Les larmes aux yeux, la Sheikah s'agenouille et la prend dans ses bras pour la réconforter.
- Je suis là... Je ne remplacerai pas ta maman mais je ferai tout pour que tu sois heureuse... Je t'en fais le serment, Zelda... Donc, n'aie pas peur de pleurer. Je reste avec toi... C'est une promesse.

Zelda éclate en sanglots. Longtemps, Impa écoute ses pleurs en lui caressant le dos. En sentant une larme couler sur sa marque sheikah, la guerrière se jure de protéger la Princesse, peu importe le prix de sa vie. Protéger et l'aimer avec cet instinct maternel : sa raison de vivre.

chapitres suivants...

Ce texte a été proposé au "Palais de Zelda" par son auteur, "Elincya". Les droits d'auteur (copyright) lui appartiennent.

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Mis à jour le 30.04.25