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The Legend of Zelda : La malédiction des héros

Ecrit par Elincya
Chapitres 1 à 10   •   Chapitres 11 à 21   •   Chapitres 22 à 31   •   Chapitre 32 à 40
Chapitre 22 : Le véritable conte de la légende

Alors que le jour ne se lève plus, sous le poids de la nouvelle menace dans le ciel, Link ouvre lentement ses paupières. Son bras droit est bandé. Couvert par une grande feuille verte, encore fraîche et lisse, il s'efforce de se lever malgré la douleur qui cogne péniblement en lui.

- Mon... Monsieur Vert ! Ne te force pas à te lever ! conseille Falgus en montant sur son ventre. Tu es encore faible !
- Fal... Falgus ? s'étonne Link, la voix exténuée. Où suis-je... ? Epona... ? Zelda... ? Où sont-elles ?
- Ta jument va bien..., rassure tout à coup une voix féminine et modulée.
Légèrement, Link se retourne avant que son regard troublé croise celui d'Impa, toujours aussi stoïque.
- Impa... Mais comment as-tu...
- Grâce à la lumière dorée... Quand j'ai reconnu le pouvoir royal utilisé par son Altesse, j'ai tout de suite accouru en passant par les bois perdus pour y accéder. Heureusement que tu avais en ta possession ces deux flacons de potion pour arrêter l'hémorragie, sinon, toi et Epona, vous seriez morts depuis bien longtemps..., explique calmement Impa malgré l'anxiété dans ses yeux.
- Et... Zelda... ? demande Link avec une immense inquiétude.
Tristement, la Sheikah baisse la tête.
- Quand je suis arrivée, je ne vous ai trouvés que vous deux...
En se remémorant les récents évènements, notamment le Comte Vadel et ses pouvoirs monstrueux, la main tremblante de l'Hylien empoigne violemment la feuille.
- Im... Impa... Cet homme... Vadel... Il a... Il a enlevé Zelda juste sous mes yeux... Je n'ai rien pu faire..., révèle-t-il, la voix désespérée en posant finalement la main sur son front. J'ai eu tellement peur... Surtout que le fragment du courage m'a... abandonné ! Et une créature a pris possession de mon corps. Je voyais tout mais je ne pouvais rien faire... J'ai même failli tuer Zelda...
Sous le choc, Impa a un mouvement de recul tandis que Falgus baisse la tête, tristement.
- Madame Bleue... Elle... Elle est toujours vivante ! J'en suis sûr ! Le bourgeon ressent encore sa vie ! rassure le petit Korogu à Link.
- Vrai... Vraiment ? Zelda est en vie... ?
- Oui ! Elle est en vie !
- Mais plus pour longtemps, enchaîne sinistrement Impa, toujours aussi réaliste. Surtout si son Altesse a encore utilisé son pouvoir... Et le comble dans cette histoire, c'est que notre seul espoir, le fragment du courage, s'est dissipé... Lorsque tu t'es confronté à cet homme, tu as sûrement laissé le désespoir et la peur t'envahir, empêchant le courage de surgir... Ton ombre au coeur néfaste en est la cause. Il a profité de ce moment pour te manipuler et prendre possession de ton corps.
- Alors c'est pour cela qu'à ce moment-là, j'ai perdu ma puissance et que cette ombre est apparue... Le fragment du courage n'a pas voulu briller à cause de ma peur et... de mon rejet...?
- Oui... Au fur et à mesure que des siècles passent, ce pouvoir, porté par tes ancêtres, a grandement faibli. Ton coeur n'arrêtait pas de saigner de douleur et a rejeté le passé de ton âme, provoquant l'apparition de ton ombre avide de pouvoir et d'assurance... Tu as été faible devant cet homme qui a réussi à te mettre à genoux, poursuit froidement Impa. Si tu avais hérité du pouvoir de tes précédentes incarnations, tu aurais pu réussir à le défaire. Mais je ne vais pas te jeter complètement la pierre bien sûr... Que tu aurais ramené la Princesse ou non, le résultat aurait été le même... Même si le fragment du courage aurait brillé sur ta main, sans la fameuse arme légendaire, détentrice du pouvoir absolu, tu aurais échoué. Surtout que toi et son Altesse avez réussi à sauver les trois esprits qui ont réussi à protéger comme il se doit ces terres...
Cependant, ces paroles n'apaisent aucunement l'âme de Link. Impuissant, il n'ose pas regarder le ciel par la fenêtre à cause de la peur qui le submerge toujours autant.
- Alors, j'ai seulement retardé l'inévitable... Sans pouvoir, sans espoir, je ne peux rien faire de plus... ? se demande-t-il, de plus en plus affolé en se crispant.
- Si... La Princesse Zelda t'a laissé un espoir : un dernier. Tends ta main, réclame Impa avec un sourire attristé.

Le regard mélancolique, l'épéiste lève la tête et reconnaît immédiatement la flûte de Zelda. Fixement, il la regarde avant de poser son regard sur la Sheikah.
- Une flûte... ? C'est une plaisanterie j'espère... Tu penses que jouer une simple mélodie va corriger le problème ? demande-t-il avec perplexité en perdant son sang-froid.
En repensant à la joie de Zelda lorsqu'elle jouait de cet instrument, il la jette au coin de la pièce, dévasté par son impuissance.
- Tu me demandes de croire à ces plaisanteries dans un moment pareil ? s'emporte-t-il avant de se lever. Cesse de me torturer inutilement à la fin ! La Déesse, les esprits des trois coins du monde, m'ont tous abandonnés ! Ils étaient les premiers à me donner de la puissance et à croire en moi en me prenant pour un héros, un maudit élu capable de braver n'importe quel danger ! Ce maudit destin m'épuise ! Être obligé de croire, de combattre en oubliant mes peurs, mes sentiments, se servir de mon corps comme d'un simple bouclier et d'une simple épée... Tout cela, je... je n'en peux plus ! Je... Je...
Tout à coup, Link lâche un cri d'effroi, pris par une quinte de toux. Sous le choc, encore souffrant, il crache des gouttes de sang. Exaspérée, tout en étant compréhensive par la réaction de l'Hylien, Impa soupire et ramasse l'instrument, intact malgré le coup, avant de répondre :
- Link... La Déesse, les esprits et... nous, nous ne te tourmentons pas. Il faut que tu te mettes en tête que, quoi qu'il se passe, tu ne seras jamais un Hylien comme les autres, tout comme c'est le cas pour son Altesse... Jamais... Tout comme la Princesse Zelda, qui a cru sans cesse à toi, tu es né pour faire régner la prospérité sur notre terre... En attendant, tu dois survivre en tant qu'élu et non vivre en tant que simple être... Comment veux-tu réussir à regagner la confiance du fragment du courage si tu n'arrives plus à croire en toi et à ce que tu dois voir ? Cette flûte est loin d'être un simple instrument de musique. Quand tu sentiras la chaleur de ton coeur, alors rejoins-nous sur la place... Mais ne tarde pas non plus... Le temps nous est compté... Regarde le ciel...

Silencieusement, Link lève enfin la tête au ciel. En sentant son coeur saigner, il pousse un cri d'épouvante.
Le ciel est rougeâtre, tandis que les nuages sont noirs : exactement comme dans ses cauchemars. Puis, en regardant la lune de sang, son regard s'horrifie. Aussi vite, il baisse la tête après avoir senti une douleur semblable à un coup de poignard dans son coeur. Sur un grand tronc en bois, se trouvant à proximité, une ombre, éclairée par la bougie, s'agrandit et prend la forme, comme si elle veut encore s'emparer malicieusement le corps de son hôte. Désespéré, Link pose la main sur son front sous les yeux d'Impa qui tente de conserver son calme malgré son tracas pour la princesse.

* * *

Au même moment, alors que la salle du trône est détruite au château d'Hyrule et que l'aura violette enveloppe le lieu, Vadel et Zelda, les mains menottées, entrent à l'intérieur après s'être téléportés. Lentement, le Comte s'approche du corps inanimé du Roi. Le rideau rouge tombé, il le jette sur le cadavre en sang pour le cacher du champ de vision de Zelda. Anéantie, la princesse détourne le regard en retenant ses larmes avec beaucoup de mal. Seuls la rancoeur et le désespoir oscillent dans ses yeux.

- Et maintenant ? Que comptez-vous faire de moi... ? demande-t-elle avec froideur.
- Vous laisser vivre pendant quelques jours, répond calmement Vadel en fixant sombrement le cadavre du roi. Après tout, le fragment du courage est nécessaire pour invoquer la Triforce...
- Comment pouvez-vous croire à la destruction elle-même... ? Comment pouvez-vous obéir aveuglément à Ganon ?
- Tant que je reste en vie, il ne détruira pas complètement le monde, proteste calmement Vadel en se retournant vers la princesse. Depuis ma naissance, Ganon ne m'a jamais quitté. Même après la mort de mes parents, de mes proches, tués de sang-froid par vos pathétiques sujets... Alors quand ma mort arrivera, peu m'importe ce qui se passera par la suite. Tout ce que je désire, c'est de pouvoir récupérer ma vie d'antan et utiliser votre corps pour faire revenir une personne à la vie.
De plus en plus bouleversée, Zelda se crispe avant de hurler :
- Alors c'est pour cela... que vous avez voulu m'épouser ? Vous avez provoqué les cicatrices d'Hyrule pour que Ganon atteigne tous les peuples ? Mais vous oubliez une chose : la maladie qui ronge mon corps est...
- Cette malédiction s'abat uniquement sur votre âme. Mais sachez que votre beauté ne me laisse pas du tout indifférent... Oh que non... Quel dommage que votre coeur bat pour ce misérable élu. Comme à chaque époque. Au moins, contrairement à vos pouvoirs, votre lien ne s'affaiblira jamais. Mais si vous voulez, en attendant qu'il arrive, je peux vous consoler et sécher vos larmes à sa place, propose Vadel en caressant la joue gauche de Zelda. J'espère qu'il ne m'en voudra pas...
Brutalement, elle lui crache des gouttes de sang à la figure en protestant ouvertement. Vadel recule. Il chasse ces gouttes avec un sourire assez froid.
- Quelle tristesse. Et moi qui vous l'ai proposé par gentillesse, déclare-t-il en lâchant un rire amusé. Mais dans tous les cas, ça se fera sûrement lorsque vous n'existerez plus dans ce monde si écoeurant.
Zelda le regarde avec froideur. Ne pouvant pas utiliser son pouvoir avec impuissance, elle ne recule pas.
Vadel rit avec amusement, le regard hautain.
- Enfermez-la et veillez à ce qu'elle se tienne tranquille, ordonne-t-il aux Yigas à l'entrée de la pièce, en récupérant son sérieux.
Silencieusement, les deux sous-fifres s'exécutent et empoignent le bras de Zelda avant de la sortir du hall. En regardant une dernière fois le corps du roi, couvert par le rideau, la jeune femme sent la tristesse l'envahir. Seul, Vadel se rend au balcon et contemple le royaume d'Hyrule sous le ciel de la mort. Puis, il regarde son alliance. Le coeur déchiré, il refuse pourtant de se détourner de son objectif qui l'a conduit à faire confiance à Ganon : celui qui l'a toujours accompagné.

* * *

De son côté, le bras droit déjà sorti du plâtre et vêtu de sa tunique verte, Link marche encore faiblement. Falgus le suit, inquiet pour ce dernier. Proche d'un arbre au fond de la forêt des Korogus, Epona se repose, allongée. Même si sa plaie a été refermée, le trajet qu'elle a dû faire jusqu'à la forêt des Korogus l'a épuisée. Avec soulagement, Link s'approche d'elle afin de lui caresser la crinière.
- Je suis désolé, Epona... Excuse-moi... Je... je n'ai pas été suffisamment prudent... J'espère que tu ne m'en veux pas..., déclare-t-il d'une voix fragile.

Pour l'apaiser, il sort finalement la flûte de sa poche. En fermant les yeux, il entame la douce mélodie : la mélodie d'Epona. Sans aucune difficulté, il parvient à la jouer sans faire la moindre fausse note. Peu à peu, les oreilles d'Epona bougent à plusieurs reprises. En lâchant un souffle, la jument ouvre les yeux et lève doucement la tête. Interrompant son geste, Link la regarde fixement, partagé entre le soulagement et la tristesse sous les yeux rassurés de Falgus. Loin d'être rancunière, Epona approche la tête dans sa direction, comme si elle désire un câlin. Attendri, Link lui caresse le museau. Même si cela n'est pas suffisant pour apaiser sa tristesse, il sent son coeur se réchauffer légèrement grâce à sa jument. Doucement, ses yeux se lèvent au ciel. Bien que les nuages le terrifient toujours, il s'efforce de garder son calme après avoir laissé parler son impuissance.

- Madame Bleue... va revenir tôt ou tard... pas vrai ? demande Falgus.
L'épéiste ne répond pas et baisse la tête. En regardant son ombre, toujours aussi grande et puissante, il baisse finalement les yeux.
- Même si je peux faire quelque chose... Zelda va... Elle va...
- Tu n'as pas le droit d'abandonner, Monsieur Vert ! réplique le petit Korogu. Si elle était à ta place, Madame Bleue n'abandonnerait pas ! Impa et le bourgeon Mojo t'attendent ! Tu dois aller les voir pour entendre la suite !

Silencieusement, Link repense à Zelda. Si elle était là, elle lui aurait dit la même chose, têtue comme elle est. Malgré son impuissance et son désespoir en ne ressentant plus sa force, il prend le risque de regarder à nouveau le ciel. Finalement, après avoir caressé à nouveau Epona, il se lève. Puis, comme convenu, il se dirige au centre du village. Alors que les Korogus entourent le petit bourgeon Mojo, l'air jovial perdu, Impa s'approche de l'élu déchu.

- Est-ce que ça va mieux ? demande-t-elle, les bras croisés. Tu es apte à écouter... ?
- Oui..., affirme calmement Link en se dirigeant vers le bourgeon Mojo. Je suis prêt à écouter.
- Bien Link, répond calmement le petit esprit de la forêt avec sérieux. Je vais te raconter ce qui se passe...
Peu étonné que le petit bourgeon parle déjà mieux, l'Hylien l'écoute d'une oreille avide.
- Depuis peu, reprend le bourgeon d'une voix sérieuse, Ganon, l'entité destructrice, s'est éveillé. Son passage a recouvert le ciel, provoquant l'éveil de la lune de sang qui a le pouvoir d'affaiblir les êtres les plus vulnérables et d'invoquer les créatures assoiffées de sang sans aucune limite : ses serviteurs, ceux qui ont toujours désiré détruire la paix de la Déesse Hylia et de ses sujets...
- La Déesse Hylia... Alors elle a vraiment existé ? demande Link en s'efforçant d'y croire.
- Et elle existe toujours. Tu as même voyagé avec elle depuis quelques temps... Elle est plus connue sous le prénom de Zelda, princesse d'Hyrule...
Les yeux écarquillés, Link dévisage le bourgeon, n'osant pas croire à ce qu'il vient d'entendre.
- Zelda... est une... déesse ? demande-t-il, la voix étranglée. C'est... c'est...
- Elle n'est nulle autre que sa réincarnation. La Zelda que tu connais n'a plus rien d'une Déesse mais son pouvoir est exactement le même. Elle a bénéficié du fragment de la sagesse... Quant à toi, tu es avant tout la réincarnation de l'âme de son chevalier depuis la nuit des temps, destiné à sauver Hyrule de la mort et à protéger tout au long de ta vie la prêtresse royale, bénie et aimée du ciel. C'est pourquoi, en tant qu'esprit, j'arrive à sentir votre vie et notamment votre douleur. Tant que la réincarnation de Ganon n'obtiendra pas le fragment du courage, elle ne pourra rien lui faire... Mais ton fragment a disparu car tu n'arrivais plus à croire et surtout, tu as eu terriblement peur de ce destin qui te torture... Tu as écouté ta part d'ombre qui ressent uniquement des sentiments néfastes comme l'égoïsme, la rancoeur, et le désespoir. C'est pour cette raison qu'il t'a infligé un tel châtiment.
Link baisse la tête, de plus en plus bouleversé avant de poursuivre :
- Et à cause de cela, Ganon s'est... éveillé...
- Non, ton impuissance n'est pas fautive... Mais même si Ganon a réussi à accéder au château d'Hyrule, là où il peut régénérer ses pouvoirs grâce à la source, ces terres, protégées pendant quelques temps par les trois esprits, seront épargnées malgré le sort inévitable qu'a justement connu la citadelle... : celui de la mort. Mais étant donné que tu as sauvé les trois dragons, ils peuvent nous protéger pendant quelques temps... Leur barrière empêche seulement quiconque d'entrer et de sortir. Mais hélas, leur pouvoir s'affaiblira au fur et à mesure. Surtout qu'ils ne parviennent pas à briser la barrière que Ganon a créée autour du château contrairement à ce qui s'est passé il y a un siècle où il était plus faible... C'est pourquoi Link, tu dois apprendre la mélodie qui te téléporte et tu dois à tout prix retrouver l'épée de légende qui te permettra de briser cette barrière et de combattre la réincarnation de Ganon. Si tu le tues, alors l'entité plongera dans un profond sommeil à nouveau...
- Une seconde ! proteste Impa en s'approchant à toute vitesse. Sans le fragment du courage, c'est impossible... Surtout que si Link accède au château avec ce fragment, c'est comme s'il se jette dans la gueule du loup. N'oublions pas que Vadel désire justement ce fragment pour accomplir son objectif.
Le bourgeon lève les yeux avant de poursuivre :
- Oh que non, ce n'est pas impossible. C'est vrai que cela sera risqué, mais dans son état actuel, Link n'a aucune chance de défaire Vadel. Le courage n'est pas un pouvoir qui doit être obtenu mais qui doit être mérité. Si le coeur de Link est pur, alors il parviendra à retrouver le courage lors de son voyage. Lorsque ce moment sera venu, il aura la force nécessaire pour devenir le porteur de l'épée de légende, tant convoitée... Chaque incarnation l'a porté... Le héros du ciel, le héros du temps, le héros du vent, le héros de la lumière et également le héros des landes... Tous ont mérité leur courage à leur façon et ont acquis l'épée de légende... Même la dernière incarnation, le héros mort pendant son combat contre Ganon...

Sous le choc, Link le fixe toujours autant en repensant soudainement à son cauchemar lorsqu'il s'est fait transpercer. Comprenant le regard horrifié de l'Hylien, le bourgeon ferme les yeux avant de poursuivre :
- La princesse Zelda d'antan, folle de chagrin d'avoir perdu le héros qu'elle a aimé, a conclu un pacte avec un esprit démoniaque : le quatrième dragon, haï par les autres à cause de sa trahison. Ainsi, elle a acquis son plein pouvoir pour défaire Ganon afin de sauver Hyrule. En contrepartie, une malédiction ronge son sang en la condamnant à une mort lente... Après avoir mis au monde son unique enfant, conçu avec celui qu'elle a tant aimé, la mort l'a emportée... La maladie dont souffre la prêtresse royale est avant tout une malédiction qui continue de couler dans son sang et ses pouvoirs. Le quatrième esprit impitoyable savoure l'essence de sa vie. C'est pourquoi il n'existe aucun remède pour la sauver de ce pacte éternel.

En tombant sur ses jambes, Link n'arrive plus à se tenir debout, de plus en plus confus. Lui qui a tant méprisé sa destinée et ses cauchemars par peur de souffrir, il se rend finalement compte de tout. Il ressent même la souffrance de sa précédente incarnation. En repensant à ses cauchemars, qui n'étaient au final que des souvenirs, il tremble de plus en plus.
- Je suis désolé d'avoir été obligé de te révéler tout cela... Mais c'est nécessaire pour que tu découvres l'espoir : le seul pouvoir qui te manque, bien plus que le courage... Et je sais que tu en es capable... Même si tu es plus fragile et que tu ne supportes pas d'être dans l'ombre de ceux qui t'ont précédé, notamment dans celui du dernier héros, tu arriveras à ne faire qu'un avec leur âme..., déclare finalement le bourgeon, choisissant de croire en lui.

Silencieusement, Link regarde la paume de sa main gauche. Bien que son aventure a très mal commencé, il repense à tous ses souvenirs : sa famille, Falgus et les Korogus, les Gorons, Azul, Miphalia, Pawel ainsi que Zelda... Il comprend également pourquoi il ressent autant de sentiments pour la princesse bien qu'il ne la connaît que depuis très peu : après tout, même si leur vie est différente, leur lien ne s'est jamais affaibli. Au contraire, il s'est renforcé et est devenu unique, tout comme ça avait été le cas pour les autres.
- Donc, quoi qu'il arrive, enchaîne Impa, inquiète. La malédiction de la princesse est...
- Oui... Elle est condamnée à mourir... Mais si l'espoir existe réellement, alors la Triforce, une fois assemblée, pourra la sauver... Seul Link pourra le découvrir.
Link regarde le bourgeon. Malgré la tristesse dans ses yeux, il veut croire à ces dernières paroles. Il se lève finalement.
- La Triforce pourra la sauver ainsi qu'Hyrule ?
- Si tu poses ta main sur ce pouvoir tant convoité par la Déesse Hylia jadis, et que tu pries de tout ton coeur, ton rêve se réalisera.
Link ferme les yeux en sentant son coeur cogner. En récupérant son air résolu malgré le choc, il demande finalement :
- Alors dans ce cas... où se trouve l'épée de la légende... ?
Le bourgeon marque un long moment de silence avant de répondre :
- Au fin fond du temple ancien, situé au coeur des bois perdus. Cependant, il peut apparaître uniquement grâce au fragment du courage ainsi que le coeur pur et vaillant de quatre prodiges, nécessaires pour ouvrir la porte d'entrée. Depuis l'ère des gardiens, les prodiges ont une place dans l'histoire parmi le héros et la princesse... Tu dois être capable de distinguer la pureté dans leur coeur, peu importe leur espèce ou même leur sang.
- Donc, si je comprends bien, il faut que je choisisse quatre personnes en tant que prodiges et prendre le risque de leur vie..., récapitule Link, soucieux.
- Si tu regagnes la confiance du fragment du courage et que tu trouves quatre prodiges au coeur vaillant alors tu y arriveras. Et justement, le premier prodige se trouve juste à tes côtés..., enchaîne le bourgeon, sûr de lui.
Avec étonnement, Link se retourne vers sa droite.
- Moi ? s'interroge Impa, étonnée sur le coup.
- Oui... Ton coeur respire l'envie de sauver son Altesse. Et pas uniquement parce qu'elle est une princesse, mais parce que tu t'es attachée à elle... Tu as toujours désiré son bien-être. Et c'est pour cela que tu as été bannie du château : c'est parce que tu t'es opposée au roi pour le mariage... Tu ne voulais pas la voir souffrir. Tu ne voulais pas la voir plonger dans une vie maussade...

Stupéfaite que le vénérable Mojo ait lu en elle comme dans un livre ouvert, Impa ne nie pas et baisse la tête avec un sourire mélancolique. Finalement, elle se retourne vers Link en essayant de récupérer son air confiant.
- Dans ce cas, si je dois t'aider à retrouver le courage en attendant que tu obtiennes l'épée de légende, capable de purifier le mal, alors je ferai tout de mon possible pour t'aider à retrouver le courage et l'espoir, déclare-t-elle avec résolution. Si la Princesse Zelda t'a proclamé chevalier, ce n'était pas pour rien. Elle croyait en toi, donc je choisis de croire en toi.

Réconforté par les paroles sûres d'Impa, Link écoute son coeur qui bat si fort. Les poings serrés, il regarde le bourgeon avant de retirer l'épée du fourreau. Instinctivement, il la lève au ciel, prêt à accepter finalement le destin malgré la peur encore présente. Silencieusement, le bourgeon le regarde, tandis qu'Impa et les Korogus sont sans voix.
- Alors si je suis obligé d'accepter, je... je le ferai... Je ferai mon possible pour écouter la voie du courage, pour faire revenir la pureté sur Hyrule et pour sauver Zelda de la mort ! déclare Link en ayant l'allure d'un épéiste brave.
Ainsi, il la range dans son fourreau et ressort la flûte après avoir senti la force d'y croire.
- Bien..., répond le bourgeon, rassuré de le voir remis. En revanche, ni moi, ni mes semblables ne connaissons le thème qui te permettra de voyager à travers Hyrule et traverser chaque barrière. Seul un être, prénommé Kaeopora, peut te l'enseigner : le hibou de la sagesse.
- Le légendaire Kaeopora ? Celui qui n'écoute que celles et ceux qui arrivent à appeler les animaux ? s'étonne Impa avec perplexité. Mais ni moi, ni Link ne pouvons le retrouver. Nous ne pouvons pas appeler un animal... Personne ne sait où il se trouve.
- Vous ne connaissez personne qui est capable d'appeler les animaux ? demande Mina avec inquiétude, proche de son fils.
Link se plonge ainsi dans un moment de réflexion en fermant les yeux. Puis, il se remémore peu à peu un oiseau bleu, évoqué par Malon. Finalement, il lève la tête après avoir eu une idée.
- Oui... Je crois connaître une personne dotée d'un tel don... Oui ! Elle se trouve à l'entrée de la forêt de Firone ! Ne tardons pas ! s'exclame-t-il.
Hâtivement, il quitte le lieu.
- Li... Link ! appelle Impa en tendant sa main.
- Surtout : faites attention à vous deux et ne traînez pas davantage ! annonce le bourgeon, le regard inquiet.
Malgré l'anxiété, Impa approuve de la tête avant de suivre l'élu à toute hâte.
- Vénérable bourgeon Mojo... Vous pensez qu'ils arriveront à sauver Madame Bleue à temps... ? demande Falgus, inquiet.
- Il faut qu'ils y arrivent... Si Link gagne la confiance du fragment du courage, alors il pourra réussir... Après tout, il est le héros de l'espoir... Celui qui doit y croire.

Silencieusement, les Korogus lèvent la tête à la lune de sang qui continue de briller au ciel. Même si un sentiment de malaise parcourt leur petit corps en bois, ils ne ressentent aucune souffrance. Au contraire, ils prient de tout leur coeur.

Chapitre 23 : Le deuxième prodige   up

Sans perdre une seule seconde qui peut s'avérer précieuse, Link se précipite en direction de la forêt de Firone, à nouveau calme. Les créatures méprisantes ne le troublent plus. Avec beaucoup de mal, Impa le suit grâce à ses yeux de lynx. Finalement, les deux alliés arrivent devant la maison de la mystérieuse "Luna".

- Link, es-tu sûr que cette personne peut appeler les animaux ? s'inquiète Impa, peu essoufflée.
- Oui... Elle a déjà fait appel à un oiseau bleu pour nous livrer un message... Et puis, ce n'est pas comme si nous avions d'autres solutions, répond sérieusement Link, compréhensif devant la perplexité de la Sheikah.
Ainsi, sous les yeux intrigués de la talentueuse guerrière, l'Hylien monte rapidement les trois marches grinçantes avant de frapper à la vieille porte, toujours aussi abîmée.
- Qui est là ? demande froidement la mystérieuse Luna, la voix toujours aussi rauque.
- C'est moi Link : le... livreur de lait de la dernière fois !
- Je n'ai pas commandé de nouvelles bouteilles. Votre lait n'était pas si bon que ça ! Au lieu de traire vos vaches, mangez plutôt leurs steaks ! Allez-vous-en !
- Ecoutez-moi ! Nous avons besoin de vous ! Surtout que vous êtes la seule personne qui peut appeler les animaux. Exactement comme ça a été le cas avec cet oiseau bleu qui nous a rapporté la lettre pour la livraison...
- Besoin de moi ? interrompt aussitôt son interlocutrice, toujours derrière la porte. Je suis désolée mais je ne fais confiance à aucun être. Seuls les animaux sont mes amis. Fichez-moi le camp tout de suite si vous ne voulez pas que je vous trucide à l'aide de ma fourche !
En perdant son calme, Link donne un coup, utilisant cette fois-ci la violence pour faire raisonner son interlocutrice.
- Non ! Le sort d'Hyrule dépend de vous ! Sans vous et le légendaire Kaepora, notre monde mourra ! Tout le monde, mes proches et le peuple... Par pitié, si vous avez un coeur et que vous voulez continuer de vivre, aidez-nous ! implore-t-il, la main tremblante. Je suis prêt à m'agenouiller pour vous supplier... Je ferai tout ce que vous voudrez en échange de votre aide...

Silencieusement, Impa reste en retrait, ne sachant pas quoi ajouter. Finalement, elle baisse ses yeux rouges dans le vide. Au bout de plusieurs secondes, le verrou se lève vers le haut. Stupéfait, Link le regarde fixement avant de constater que l'hôte est désormais prête à laisser des étrangers entrer dans sa "tanière". Ses supplications ont été finalement entendues. Sans hésitation, il ouvre la porte grinçante et entre dans le salon terne et sombre. La lumière de la flamme dansante, au sein de la cheminée en brique, éclaire la salle. Le feu crépite et le vieux plancher en bois craque sous les bottes de Link. Pourtant, une agréable odeur de grenadine flotte dans les airs. Les meubles sont solides et propres, et les draps du lit bien pliés. Contrairement à l'extérieur austère de la petite demeure, l'intérieur est bien entretenu et surtout vivable.

Puis, au bout de la salle, à côté d'un fauteuil à bascule en bois, il distingue une silhouette, cachée sous une cape noire. Seuls ses yeux aux couleurs d'une émeraude éclatante et pure, oscillant entre la méfiance et la crainte, sont visibles. Le reste du visage est caché derrière une grande écharpe blanche. Intrigué par son apparence plus que douteuse, Link garde son calme, tandis qu'Impa ferme la porte derrière elle et s'approche à son tour.

- Alors comme ça, vous voulez que j'appelle Kaepora, le légendaire hibou ? demande calmement la mystérieuse hôte d'une voix féminine et bien plus humaine.
- Oui, je vous en prie : il faut à tout prix qu'il nous enseigne les mélodies pour que nous puissions voyager, de terre en terre, afin de tenter de sauver le peuple d'Hyrule, explique Link, sincère dans ses paroles prononcées avec résolution.
La mystérieuse Luna se retourne et se crispe.
- La lune de sang... Ce ciel rouge et démoniaque... Ils ont été provoqués par la réincarnation de Ganon ? demande-t-elle avec préoccupation.
- Oui. Et c'est pourquoi nous devons l'arrêter avant qu'il ne soit trop tard, affirme calmement Impa. Donc s'il vous plaît, appelez Kaeopora tout de suite. Nous n'avons pas le temps de conter encore une fois les événements récents.

Malgré l'hésitation qui fait trembler son corps, Luna baisse la tête. Finalement, elle enlève enfin sa cape. Soudainement, Link distingue deux grandes oreilles pointés en l'air, comme celles d'un renard, ainsi qu'une fourrure aussi blanche que la neige. Puis, Luna se retourne mieux, prête à montrer son apparence : celle d'une grande louve blanche, se tenant sur ses deux pattes comme une humaine. Malgré son regard inquiétant de prédatrice, la féminité et le mystère se dégagent de ses yeux verts si humains. La forme de sa poitrine est légèrement visible et ses hanches sont fines. Elle porte une chemise noire à col déboutonné ainsi qu'un pantalon gris et de grandes bottes en cuir. Stupéfaite, Impa a un mouvement de recul tandis que Link reste figé, sous le choc d'une telle apparence. Mal à l'aise d'être sous leur regard, Luna évite de les fixer.

- Alors c'est pour cela... que vous êtes resté cachée..., constate Link, la gorge nouée par l'étrange découverte.
- Est-ce que je fais vraiment peur à voir ? lui demande tout à coup Luna en prenant le courage de le fixer.
- Non, répond honnêtement l'élu déchu. C'est juste que ça m'a surpris sur le coup.
Étonnée par sa réaction, la louve baisse la tête en croisant ses bras.
- De quelle espèce fais-tu partie ? interroge Impa avec méfiance. Je n'ai jamais entendu parler d'êtres à l'apparence d'un loup et qui se tiennent debout.
- Et pourtant, ça existe... Mais au lieu de parler du pourquoi et du comment, pour la réincarnation de Ganon, que comptez-vous...
Hélas, soudainement affaiblie, elle ne finit pas sa phrase et se plaque contre le mur pour se rattraper, prise d'un soudain malaise.
- Hé ! Vous allez bien ? s'exclame Link en s'approchant.
- Ne vous approchez pas de moi ! fulmine la louve en sortant ses crocs, la respiration haletante.
Aussitôt, le jeune homme s'arrête, ayant l'impression de voir un animal chassé qui se défend désespérément.
En tentant de se reprendre, Luna pose la main sur ses yeux.
- C'est... c'est de ma faute. Je n'aurais pas dû regarder trop longtemps cette maudite lune de sang dans le ciel... Peu... peu importe ! Donc... vous... vous voulez que j'appelle Kaeopora... ? demande-t-elle, toujours aussi essoufflée.
- Oui..., affirme calmement Link. Mais votre santé...
- Je ne pense pas qu'il existe un remède... Rassurez-vous : si j'ai encore de la force pour râler à ce point, je peux encore hurler et appeler...

Malgré sa méfiance, Impa attend sagement la réponse de Link. Loin d'être indifférent en voyant la louve trembler de fièvre, l'épéiste déclare :
- Avant ça, je vais chercher une personne qui saura vous aider.
- Surtout pas ! panique Luna en donnant un coup de patte au mur avant de reculer à nouveau comme un animal vulnérable. J'appellerai ce hibou comme convenu. Je peux soulager ma plaie grâce au lait, même si c'est écoeurant... Mais ne faites pas ça ou sinon, je serai encore chassée d'ici et...
- Hors de question que je vous laisse dans cet état. Ne vous en faites pas : elle ne vous jugera pas..., rassure calmement Link avec un léger sourire. Peu importe votre apparence, vous ne devriez pas souffrir ainsi.
Silencieuse, Luna se retourne dans sa direction. Même si la crainte est présente, elle est avant tout étonnée par la bienveillance de l'Hylien.
- Que tu es têtu... Heureusement que je ne mange pas les Hyliens, sinon je n'imagine pas le goût que tu aurais, toi... Hum... Bien... Fais-vite..., accepte-t-elle finalement en le tutoyant.

Link approuve finalement de la tête avant de sortir hâtivement de la maison. Impa, toujours sur ses gardes, observe la louve en train de se crisper. N'osant pas lui adresser la parole par crainte de voir son hôte laisser éclater à nouveau son hostilité, elle scrute les alentours. Tout à coup, elle remarque, sur la table basse en bois, une petite peluche d'un loup noir un peu abîmée sous le poids du temps. Déduisant que Luna affectionne les peluches, la Sheikah ne présente plus aucune amertume. Bien au contraire, cela lui rappelle des souvenirs de l'enfance de Zelda, elle qui aimait tant les peluches. Folle d'inquiétude pour la princesse en pensant à son sort, elle quitte la maison en prenant soin de fermer la porte derrière elle. Assise sur les marches, elle pose la main sur ses yeux comme si l'envie de pleurer surgit après s'être retenue aussi longtemps.

- Oh, Princesse Zelda... J'espère que vous n'êtes pas en train de subir l'agonie..., prie-t-elle en laissant finalement échapper une larme entre ses longs doigts.
Par la fenêtre, Luna la regarde de dos, loin d'être indifférente du désespoir de la guerrière.

* * *

Au même moment, Malon se trouve dans le pré, encore vert et frais malgré le ciel inquiétant. Romani est à l'arrière de la clôture, tremblante de peur. Devant les deux soeurs, un bokoblin bleu s'apprête à les attaquer avec sa grande masse pointue. Mais la fermière, armée de sa fourche, l'élance avec hargne pour la planter avec facilité dans la tête, profitant du caractère simplet de son ennemi. En sang, la créature tombe au sol et rend rapidement son dernier soupir. Essoufflée, Malon tombe sur ses jambes.

- Malon ! s'exclame Romani en courant vers sa grande soeur. Est-ce que ça va ? Le méchant monstre ne t'a pas fait mal ?
La jeune femme reprend son souffle en posant la main sur sa bouche pour tenter de mieux se reprendre.
- Oui... Ne t'en fais pas. Au moins, j'ai réussi à repousser encore un monstre... Depuis cette lune, les gens tombent malades et ces créatures surgissent de n'importe où..., explique-t-elle, de plus en plus anxieuse.
- C'est pour cela que j'ai mal à la tête depuis ce matin... ? s'étonne Romani avec les larmes aux yeux.
Inquiète par ces paroles, Malon pose aussitôt la main sur le front de sa petite soeur : elle est fiévreuse.
La peur dans ses yeux, elle l'enlace et lui caresse le dos.
- Ne regarde plus cette lune, Romani... Lorsque nous rentrerons, Leyna va te préparer un bon sirop... Tu vas guérir aussi vite qu'une grande fille...
Romani approuve de la tête et serre sa soeur contre elle.
- Malon ! Romani ! s'exclame Link au loin.
Aussitôt, Malon et Romani se retournent. Le souffle court, le jeune homme les rejoint dans le pré.
- Link ! s'exclame Romani en accourant faiblement contre lui.
Mais soudainement, elle s'écroule au sol. Inquiet, Link s'agenouille et la soulève.
- Romani ! Que t'arrive-t-il ? s'affole-t-il en la secouant doucement.
La petite fille se jette dans les bras de Link, les larmes aux yeux.
- Tu es vite revenu ! s'exclame-t-elle. Link ! Tu es revenu !
Soulagé que Romani ne soit pas blessée, il la serre contre lui. Finalement, il se lève en regardant Malon.
- Link... Dieu merci, tu vas bien... Mais dis-moi, que se passe-t-il ? demande la jeune fermière, soucieuse. Et où est la princesse ?
- C'est... ce serait trop long à expliquer... Mais que se passe-t-il ici ?
- Depuis que cette étrange lune est apparue dans le ciel, beaucoup de personnes ont commencé à tomber malades si elles la regardent trop longtemps... Et des monstres essayent de détruire notre récolte... La situation empire de plus en plus... Donc, Leyna crée sans arrêt des remèdes pour guérir les victimes de la lune de sang et...
Lourdement, des bruits de pas résonnent et interrompent les explications de Malon. Aussitôt, Link se retourne. Peu à peu, ses yeux s'écarquillent en face du nouveau danger : un Hinox de huit mètres de haut, à la peau violette, marche lentement. Son unique oeil, situé au milieu de son front arrondi, est rouge tandis que ses crocs dépassent de sa mâchoire en sang. Affamé, il veut dévorer les vaches se trouvant dans le pré solidement clôturé.
- Oh non ! Pas les vaches ! panique Romani avec tristesse.
- Malon ! Rentre au ranch avec Romani, ordonne Link en dégainant son épée.
- Quoi ? s'exclame Malon, horrifiée. Link, tu ne peux pas faire ça ! Si tu te mesures à lui, tu vas te faire...
- Est-ce que tu vois une meilleure solution pour l'empêcher de venir ici ? Donc, fais ce que je te dis ! rétorque froidement l'élu.
Interloquée par cette réponse assez sèche, Malon baisse les yeux avec contrainte.
- Viens, Romani..., déclare-t-elle en lui prenant la main.
- Non ! On... on ne peut pas laisser, Link ! Malon, lâche-moi ! s'exclame Romani en pleurs. Link ! Link !

Tristement, Link les regarde s'éloigner avant de se retourner en face du nouveau danger qui guette, l'anxiété dans ses yeux. Sans tarder, malgré le corps aussi tremblant qu'une feuille, il se dirige vers la monstrueuse créature. Alors que l'Hinox s'apprête à entrer dans le pré, l'Hylien siffle un bon coup pour attirer son attention. Avec un regard ahuri, la créature se retourne. En remarquant Link, elle esquisse un sourire malsain, contrôlée par son féroce appétit. Link sent sa gorge se serrer et recule, n'osant pas entamer le combat. Sa poitrine lui fait mal tellement son coeur s'affole à cause de la peur. Brutalement, l'Hinox laisse tomber son bras graisseux au sol pour l'aplatir. Grâce à son agilité, l'épéiste l'esquive à temps. Malheureusement, il ne sent plus autant de puissance en lui depuis que le fragment du courage l'a abandonné. Mais en reprenant bien comme il faut sa respiration, Link accourt et grimpe sur son bras, conscient que l'oeil de son ennemi colossal est son point faible. Etonné, l'Hinox se lève et voit l'Hylien courir en direction de son visage. Maligne, la créature tente de le déchiqueter avec ses dents pointues et jaunes. En réponse, Link se sert de son épée pour se défendre. Malheureusement, l'Hinox mord la lame de l'arme en bougeant sa tête dans tous les sens. Les crampes au bras, Link finit par lâcher prise. Instinctivement, il déploie le paravoile noir pour atterrir maladroitement au sol. Mais l'Hinox, ne désirant pas lui laisser le moindre répit, exécute un balayage de la main dans sa direction. Propulsé avec violence contre un grand arbre, Link s'écroule par terre en gémissant de douleur. Étourdi par ce coup si brutal, sa vue se trouble lorsque l'Hinox s'approche de lui en croquant l'épée royale, peu résistante finalement. Désespérément, il sort son arc et tire une flèche dans la direction de son oeil pour le faire reculer. Mais l'Hinox, loin d'être idiot, protège sa pupille si fragile de sa main. Frustré, Link tique malgré la respiration haletante. Sans le fragment du courage, il se sent faible. Alors que l'Hinox avance, résolu à mettre fin à la vie de l'Hylien, il sent une soudaine douleur cogner son pied droit boueux.
L'oeil grand ouvert et les bras suspendus pendant plusieurs secondes, Link en profite pour s'emparer de son arc. Nauséeux, il s'efforce de se concentrer. En inspirant un bon coup, le regard froid, il finit par décocher la flèche. Avec brutalité, elle transperce l'oeil de l'horrible animal, la bouche grande ouverte. Hurlant de douleur, l'Hinox pose la main sur sa blessure en sang. Inconsciemment, il recule vers la grande falaise. Finalement, il tombe dans le vide, provoquant un éboulement qui l'engloutit. Essoufflé, encore à genoux, Link se tourne et remarque au loin Malon, armée de sa fourche en sang. La jeune femme laisse tomber son outil et s'approche de son ami.

- Link ! Est-ce que ça va... ? s'inquiète-t-elle en tenant son bras.
- Malon... Tu...
- Je suis désolée... Dès que j'ai raccompagné Romani au ranch, je ne pouvais pas me résoudre à te laisser seul contre cette affreuse bête...
Peu à peu, Link lui sourit tristement.
- Merci de m'avoir sauvé, Malon, remercie-t-il avec sincérité.
Les larmes aux yeux après avoir cru l'avoir perdu, Malon se blottit contre lui comme une soeur qui a besoin de se sentir rassurée. Link pose la main sur l'épaule de son amie pour la réconforter et regarde le ciel avec inquiétude, conscient que le temps joue contre lui...

* * *

Après avoir cherché Leyna sans prendre le temps de se reposer, Link retourne à la maison de Luna. Craintive à cause de la présence de cette étrangère, la louve blanche recule toujours en détournant son regard. Malgré l'apparence surprenante de son hôte, Leyna se dirige vers cette dernière sans montrer la moindre peur.
- Tendez-moi votre bras..., ordonne calmement la jeune femme avec un sourire bienveillant.

Étonnée, Luna la regarde longuement. Hésitante, elle pose son regard sur Link qui approuve de la tête. Finalement, avec appréhension, la mystérieuse louve lui tend le bras tremblant. Tout doucement, Leyna plante une seringue au milieu. En couinant de douleur comme un animal blessé, Luna ferme les yeux, les oreilles baissées pendant que le remède agit dans son sang. Peu à peu, Luna sent la douleur s'envoler. Stupéfaite, elle recule et décontracte ses pattes sans grimacer.
- Je... Je n'ai plus mal..., dit-elle, n'en revenant pas.
- Quel soulagement. Grâce à votre sang animal, vous avez guéri bien plus vite. Les animaux sont beaucoup plus résistants que les autres peuples lorsqu'ils fixent la lune de sang, explique Leyna avec un léger sourire. En tout cas, vous êtes saine et sauve. Il ne faut surtout plus regarder la lune de sang aussi longtemps.
Touchée par le geste, Luna regarde timidement les autres membres du groupe, notamment Link.
- Je... je ne sais pas quoi dire à part... merci... Je ne pensais pas qu'il existait encore de bonnes personnes dans ce monde...
- Tu as dû beaucoup souffrir du regard des autres à cause de ton apparence, non ? devine facilement Impa.
- Oui... Et surtout, depuis que ma vie a changé, j'ai... j'ai perdu tout espoir de continuer à me battre... Seuls les animaux, que j'arrivais à appeler encore et toujours, sont les seuls êtres qui s'approchent de moi, explique Luna en regardant ses pattes. Et vous...
Le coeur battant d'anxiété, elle récupère son sérieux avant d'ajouter :
- Mais tout à l'heure, vous avez mentionné la réincarnation de Ganon. Est-ce que... vous allez retrouver cet homme qui est la cause de tous ces maux... ?
- Oui, répond calmement Link. Nous devons réunir quatre prodiges pour y parvenir...
Le regard peu sûr, Luna baisse la tête en empoignant la patte.
- Des prodiges... ? Donc votre périple concerne avant tout la réincarnation de Ganon...
Avec un air déterminé, elle lève soudainement la tête avant de déclarer :
- Je viens avec vous si vous n'y voyez pas d'inconvénients.
- Venir avec nous ? s'exclame Link avec stupéfaction.
- Et pouvons-nous connaître la raison d'une telle décision de ta part ? demande Impa, encore méfiante. Notre voyage est loin d'être une classe verte.
- Depuis tant d'années, j'attendais ce moment pour venger... celui que j'aime... J'ai des comptes à régler. Donc, si vous êtes d'accord, laissez-moi devenir une alliée auprès de vous. Je sais me battre aussi vaillamment que sauvagement. Je vous en conjure... Je veux tant aller avec vous. Peu importe les risques, je n'ai plus rien à perdre et à protéger dans ce monde..., explique Luna avec résolution. Si mon pouvoir lié aux animaux, et ma dague peuvent vous servir d'arme, alors j'accepte de me battre à vos côtés et de devenir votre alliée...
Tristement, Leyna baisse les yeux en imaginant la douleur de cette dernière. Loin d'être indifférent par les intentions sincères de la louve, il n'a pas fallu longtemps à Link pour prendre sa décision.
- C'est d'accord, Luna. Je veux bien te prendre pour prodige.
- Link, tu es sûr de toi ? demande calmement Impa. Es-tu vraiment prêt à faire confiance à une inconnue ? Qui dira que la porte du temple ancien arrivera à s'ouvrir en sa présence ?
- La détermination et les paroles de Luna sont exactement les mêmes que les miennes... Donc, je veux choisir de la croire. Peu importe les fautes, le plus important est de trouver les quatre prodiges avant que la mort envoûte Hyrule une bonne fois pour toutes..., répond calmement Link.
Silencieusement, Impa baisse la tête. Comprenant les paroles de l'élu déchu, elle ne proteste pas.
- Après tout, en tant que chevalier de la Princesse, tu as le droit de nous donner des ordres. Je ne discuterai plus tes choix si tu en as la conviction. Comme je te l'ai dit : je m'efforce de te faire confiance.
- Merci Impa, remercie Link avec un léger sourire avant de se retourner vers Luna. Est-ce que ça te va Luna ? Si tu souhaites accomplir ta vengeance, serais-tu d'accord pour nous accompagner jusqu'au temple ancien ?
- Tant que cela ne nous écarte pas de notre projet en commun, alors ça me va. Je serai à votre service et prête à affronter n'importe quel risque, affirme Luna en inclinant de la tête.
Suite à l'accord entre l'élu et la louve, leur aventure est à présent toute tracée.

* * *

Un peu plus tard, de retour au ranch Lon Lon, alors que Leyna fabrique hâtivement quelques remèdes pour le groupe, Link se trouve dans le salon avec sa famille. Après avoir pris le temps de leur expliquer la situation, Malon baisse les yeux, attristée, tandis que Talon conserve son calme.

- Oh Link... Tu vas encore partir ? demande Romani, les larmes aux yeux, assise sur une chaise.
- Oui..., répond Link avec un sourire attristé en lui caressant la tête.
- Tu vas... Tu vas vite revenir ? demande la petite fille, les larmes aux yeux.
N'étant pas certain, Link ne répond pas. En inspirant un bon coup, il déclare :
- Peu importe ce qui m'arrivera ou même ce qui arrivera à Hyrule si jamais cela ne marche pas... Sachez que Malon, Romani et Talon : pendant toutes ces années, vous m'avez comblé de bonheur... Alors que j'étais abandonné, vous avez voulu m'adopter et me considérer comme un membre de votre famille. Je ne vous oublierai jamais... Tout comme je n'oublierai jamais Marine... Merci encore à vous...
- Link... S'il te plaît, ne parle pas comme si tu vas mourir. Sache que même si tu pars, cette maison restera la tienne, quoi qu'il arrive..., déclare Talon avec sérieux.
Étonné par ces paroles, le jeune homme le regarde avec calme.
- Même si tu n'as pas le même sang que nous, Marine et moi t'avons vraiment considéré comme notre fils... Et quoi que tu fasses, je serai fier de toi Link. C'est pourquoi... je...
Talon ne finit pas sa phrase et se dirige vers un grand placard. Sur la pointe des pieds, il s'empare d'une épée avec un pommeau doré avant de la tendre à Link.
- Je pense qu'il est temps pour toi d'en faire bon usage..., déclare-t-il avec un triste sourire.
Impressionné par la magnifique lame en acier, Link la regarde fixement.
- Cette épée... ? Mais...
- Lorsque nous t'avons adopté, tu étais enveloppé dans une couverture mais tu n'étais pas seul : cette épée était à tes côtés, dans le fourreau que tu portes en ce moment même... Marine a directement su que cette épée, arme royale, appartenait sûrement à tes parents. Aujourd'hui, il est temps pour toi de faire briller son éclat.
Sans voix, Link la regarde avec mélancolie avant de ranger l'arme héritée dans le fourreau. Même s'il est impossible de deviner le passé de ses parents, il lève la tête et sourit tristement à Talon.
- Talon... Merci pour tout... Merci, remercie-t-il avec un sourire attristé.
Talon le regarde fixement, tandis que Malon croise ses mains. Les larmes aux yeux, Romani n'ose pas sangloter. Elle doit s'habituer au départ de Link, bien que cela la fasse souffrir. Leyna entre dans la pièce et rejoint le groupe.
- Link... voici quatre flacons de potions. J'espère que cela sera suffisant..., annonce-t-elle en lui tendant les remèdes.
- Merci Leyna... Pour Pawel, je ferai tout pour le faire revenir à Foracalia auprès de vous... Je vous le promets...
Reconnaissante, Leyna approuve de la tête en esquissant un sourire plus timide.
- Alors dis-lui que... je l'attendrai, répond-elle en posant la main sur son ventre. Quoi qu'il arrive...
Link approuve de la tête. En regardant ses proches une dernière fois avec déchirure, il finit par sortir hâtivement de la maison, résolu à réussir à les sauver avant qu'il ne soit trop tard.
- Li... Link ! s'exclame Romani en larmes, attristée de le voir partir à nouveau.
Avec hésitation en sentant son coeur s'affoler, Malon sort de la maison et accourt. Alors qu'il se dirige vers le centre du village, elle crie :
- Link ! Attends !
L'Hylien se retourne vers son amie d'enfance. Même s'il a voulu se presser afin de terminer rapidement les au revoir déchirants, il prend le temps de l'écouter.
- Malon... Je suis désolé d'être parti aussi vite..., s'excuse-t-il en se forçant à sourire. Mais...
- Je n'ai... je n'ai pas totalement compris ce qui se passe exactement tellement tout est confus mais... je t'en prie... Quand tu auras terminé... Reviens...
Les yeux humidifiés par ses larmes, la jeune femme pose la main contre sa poitrine, comme si son coeur la fait souffrir.
- Tu vas... revenir auprès de nous ? demande Malon, la voix fragile.
- Je... je ne sais pas..., répond avec franchise Link en repensant à la mort de son incarnation, un sort qui l'attend également. Mais je veux que toi, Romani et Talon, vous viviez pour vous...
- Non ! réplique Malon en laissant échapper ses larmes. Comment peux-tu me dire ça alors que tu comptes tant à mes yeux ? Tu fais partie de ma famille ! Et moi, je ne veux plus perdre qui que ce soit depuis la mort de maman ! Donc, s'il te plaît, reste vivant, retrouve la Princesse Zelda et n'abandonne pas ou sinon, je t'en voudrai pour l'éternité ! Link ! Je... je t'...
Finalement, elle interrompt et baisse les yeux. Calmement, Link lui sourit avec tristesse en lui caressant la joue droite comme un frère qui fait ses au revoir à sa soeur.
- Je ferai tout pour cela... Merci et... au revoir Malon..., déclare-t-il d'une voix modulée.
Ainsi, il part sans se retourner, laissant sa fidèle amie et sa famille derrière. Malon ferme les yeux en croisant ses mains. En levant la tête au ciel, même si la peur crie en elle, elle veut prier pour le retour de Link...
- Au revoir, Link..., murmure-t-elle avec chagrin.

* * *

Devant la maison à l'entrée de la forêt, Impa et Luna se combattent pour s'entraîner. Agile et précise, la louve esquive facilement le katana avant d'effectuer une charge, armée de sa dague en argent, petite mais tranchante. Grâce à son arme, Impa parvient à la repousser avec facilité avant de la tournoyer fièrement pour la ranger dans son fourreau.
- Bien... Je constate que tu es tout de même apte à te battre à nos côtés, constate-t-elle en croisant les bras.
- Est-ce que tu penses que cela suffira pour vaincre Ganon... ? demande Luna, les yeux fixés sur sa dague.
Calmement, Impa ferme les yeux avant de lui répondre :
- Si la Triforce et l'épée de légende ne parviennent pas à faire disparaître Ganon, les chances seront pratiquement réduites à néant...
La patte empoignant la dague, Luna détourne son regard comme si une soudaine colère s'empare d'elle. Puis, Link finit par arriver sur les lieux. Désormais prêt, épée et bouclier équipés, arc et grappin, il déclare à la louve :
- C'est bon... Tout est prêt !

Confiante, Luna approuve de la tête en rangeant son arme. Puis, elle avance vers la plaine d'Hyrule. La fourrure flottante dans le ciel, elle inspire un bon coup avant de pousser un hurlement de toutes ses forces : un hurlement d'appel. Bien que ça soit celui d'un loup, il est avant tout mélodieux et agréable à l'écoute.
Silencieusement, Link et Impa la fixent de dos. Plusieurs secondes plus tard, un grand hibou sillonnant, aux yeux perçant et sages, apparaît après avoir volé le plus rapidement possible. Il se pose sur le toit de la maison de Luna. Calme, il tourne la tête à l'envers, révélant une autre facette plus enfantine qui trahit son air sérieux.
- Alors c'est lui... Kaepora ? s'étonne Link, surpris.
- Oui, il n'y a aucun doute, rassure Impa avec certitude.
Les yeux bleu azur, le hibou fixe longuement Link.
- Alors c'est toi : l'héritier du courage, celui qui doit apaiser le mirage...
Silencieusement, l'intéressé le regarde, sans l'affirmer. Puis, il sort la flûte pour la lui montrer.
- Je... je voudrai que tu m'apprennes le secret de cette flûte. D'après ce que le bourgeon Mojo m'a révélé, cet instrument a le pouvoir de nous faire voyager malgré les barrières, c'est bien cela ?
- C'est exact. Il vous fera voler jusqu'aux statues de prière, existant depuis des années de lumière. Votre conscience sera illuminée tandis que votre coeur deviendra vitaminé...
Les yeux posés sur la flûte, Link inspire un bon coup en levant la tête au ciel.
- Bien... Je ferai tout pour croire à la lumière. Kaeopora incline la tête. Après l'avoir tournée à nouveau, il se fige. En fermant les yeux, il commence à interpréter la mélodie en huant. Attentivement, Link l'écoute avant de souffler dans sa flûte. Calmement, Impa et Luna se tiennent à ses côtés en croyant très fort à leur objectif. Après avoir réussi à la jouer en pensant à un endroit en particulier, là où il peut trouver le troisième éventuel prodige, une lumière chaleureuse et aveuglante entoure le groupe avant de le faire voler dans le ciel sous une forme de sphère spirituelle, possédant deux ailes d'ange. Sans aucune difficulté, elle traverse la barrière avant de s'envoler en direction des terres de Lanelle sous le regard du hibou, la conscience remplie de sagesse.
- Douce Déesse Hylia... Continuez de vivre pour votre peuple avant que la mort vous aveugle... Ce jeune prodige, le coeur en péril, saura vous sauver malgré son âme fragile.
Une fois les paroles prononcées avec la foi d'y croire, Kaepora s'envole, ne laissant que des plumes sur son passage.

Chapitre 24 : Le Lynel de la mort   up

Atterrissant en face de la statue de la défunte reine Zora sur les terres de Lanelle, le groupe scrute l'endroit du regard. Aussitôt, Link constate que le lac Hylia est doré comme l'or. Dans les profondeurs du temple, Miphalia, sous les traits de l'esprit, maintient la barrière sans aucune difficulté. La limite de son incroyable pouvoir s'arrête jusqu'à l'océan, de l'autre côté des montagnes. Impa fixe avec admiration la statue de la reine Zora tandis que Luna s'approche du lac, la queue remuant et les yeux arrondis en voyant les poissons. Subitement, elle s'empare de sa dague avant d'en planter un, attirant la curiosité de ses deux alliés.

- Vous en voulez un aussi ? demande calmement Luna en leur tendant le poisson mort. C'est si bon pour la santé. On pourra en rapporter avec nous ?
- On n'a pas de temps à perdre, rappelle sévèrement Impa. Surtout que nous n'avons aucune assiette et encore moins une gamelle pour toi !
Luna grogne légèrement devant cette remarque.
- Je le sais bien ! rétorque-t-elle. Mais j'ai une faim de loup et...
- C'est pour cela que nous avons trouvé des ossements d'animaux dans la forêt alors..., se rappelle Link en fronçant du sourcil. Dire que nous avions pensé que c'était des Bokoblins.
Après avoir dévoré le poisson en une bouchée, Luna boit de l'eau et nettoie la pointe de sa dague grâce à un mouchoir.
- Mon instinct reprend le dessus. Mais je te rassure : je n'ai pas tué sauvagement ces animaux. Je les ai fait dormir avant. Après tout, j'ai un coeur moi aussi..., répond-elle d'une voix plus modulée. Contrairement à vous, les humains et hyliens...
Silencieusement, Link la fixe, de plus en plus intrigué par la nature de son interlocutrice.
- Bref ! Nous n'avons pas le temps de parler de chasse ou de cuisine, presse Impa d'une voix sèche. J'imagine que si tu nous as conduits ici, Link, c'est pour te rendre au village d'Ordiala ? Là où se trouve Pawel...
- Oui. Mais avant ça, je dois passer au domaine Zora... Peut-être que le Roi Azul pourra nous aider et que Kairi pourra nous expliquer mieux le contenu du remède que doit prendre Zelda... Même si c'est une malédiction, si nous pouvons trouver en même temps un moyen de ralentir la progression de sa maladie lorsque nous la retrouverons, alors je veux le faire, annonce Link avec détermination.
- Bien... Je respecte ta décision, approuve finalement Impa.
Seule Luna reste silencieuse en fixant le meneur du groupe, la patte posée sur la pointe de sa dague.

* * *

Au domaine Zora, Kairi se trouve dans une grande chambre. De nombreux Zoras, âgés et enfants, sont allongés dans un lit, brûlants de fièvre. La jeune Zora guérisseuse fait son possible pour les soigner en leur faisant boire un remède. Hélas, il en reste très peu dans le grand vase. Inquiète, elle baisse la tête en posant la main contre sa poitrine, ne sachant plus quoi faire.

- Dame Kairi, interpelle un Zora de garde.
- Oui ? répond la concernée en se tournant calmement dans sa direction.
- Vous êtes demandée à la salle du trône.
Hésitante, Kairi regarde ses patients, ne voulant pas les laisser à leur sort.
- Je m'occuperai d'eux pendant leur absence..., se propose le gardien, l'inquiétude dans sa voix.
- Merci...
Ainsi, la Zora s'exécute.

* * *

Peu de temps après, elle revoit à sa grande surprise Link, accompagné par Impa et Luna, cachées sous une cape. Sans tarder, l'Hylien lui explique toute la situation. Au fur et à mesure, Kairi baisse la tête en croisant les bras.

- Donc, tu veux proposer à Azul de se joindre à toi en tant que prodige ? C'est un grand honneur mais...
- Je comprends que tu sois inquiète... Mais j'ai choisi de faire confiance au Roi Azul pour le salut d'Hyrule...
Le regard accaparé par une profonde inquiétude, Kairi se force à sourire en baissant la tête.
- Il sera si heureux de l'entendre... Mais... Mais cela fait depuis hier qu'il n'est pas revenu...
- Il s'est passé quelque chose ? interroge soudainement Link avec un air soucieux.
Kairi se dirige vers le siège du trône avant de lui expliquer :
- Depuis que cette effroyable lune est apparue dans le ciel, plusieurs d'entre nous sont tombés gravement malades, brûlants de fièvre... Pour les guérir, j'ai créé des remèdes à partir des fleurs appelées Princesse de la Sérénité que nous pouvons trouver au coin d'une clairière, de l'autre côté de la grotte.

Silencieusement, Link se remémore cet endroit : c'est vrai qu'il était passé par ce petit pré avec Zelda pour atteindre le domaine Zora.
- Mais, nous commencions à en manquer... Il fallait alors chercher ces fleurs derrière le mont de la foudre... Mais hélas, un effroyable Lynel garde ces lieux.
- Un Lynel ? s'étonne Luna, les yeux écarquillés. Alors ça existe vraiment ?
- Qu'est-ce que c'est ? s'interroge Link. C'est bien la première fois que j'en entends parler...
- Les Lynels sont des gardiens de zone. Ils sont mi-humain et mi-créature. Bien qu'il soit rare d'en croiser, ils sont réputés pour leur dangerosité. Si une personne a le malheur d'en rencontrer un sur son chemin, il y a une chance sur deux pour qu'elle rencontre la mort..., explique nerveusement Impa en s'efforçant de rester impassible.
- Oui : au domaine Zora, nous étions au courant de la présence d'un tel démon... Même si le défunt Roi Sidon, le père d'Azul, a réussi à tuer un Lynel... Pour sauver notre peuple, il s'est rendu au mont de la Foudre pour abattre cette créature démoniaque afin que nous puissions enfin cueillir les fleurs pour les remèdes... Mais je... je ne peux m'empêcher de m'inquiéter pour Azul..., explique Kairi avant de laisser ses sentiments les plus forts parler à sa place. S'il vous plaît : sauvez mon fiancé ! J'ai... j'ai voulu aller le rejoindre mais les gardes m'empêchent de partir parce que s'il m'arrive un malheur, Azul n'aura plus le coeur de gouverner et...

Les larmes aux yeux, la Zora se crispe avec impuissance. Compréhensif en la voyant s'inquiéter pour la personne qu'elle aime tant, tout est déjà vu pour Link.
- Nous irons le chercher alors, se propose-t-il malgré la crainte dans ses yeux.
- Link... Tu es sûr ? demande Impa avec anxiété. N'oublie pas que face à un Lynel, nous allons peut-être nous faire tuer... Je sais que cela risque d'être cruel et crois-moi, ça me fait souffrir de dire ça, mais nous ne pouvons pas nous arrêter à chaque fois que quelqu'un souffre... On ne peut plus se permettre de choisir aussi facilement les décisions avec de telles conséquences.
- Je sais que c'est inconscient... Mais on ne peut pas laisser le peuple Zora souffrir plus longtemps. Et je veux sauver Azul non pas uniquement pour sa force mais parce qu'il est comme moi au fond..., explique Link d'une voix résolue. J'ai une dette envers lui...
- Je suis partante... Même si ça ne sera pas une simple chasse aux steaks, je veux bien prendre le risque, se propose Luna en gardant son calme.
Malgré le pour et le contre qui pèsent lourdement sur ses épaules, Impa ferme les yeux avant d'accepter :
- Très bien... Alors tentons. Mais si cela devient trop dangereux, nous devrons nous enfuir..., met en garde la Sheikah.
Link approuve de la tête et se tourne vers Kairi pour la rassurer. Cependant, Impa ne peut s'empêcher de serrer ses poings.

* * *

Après avoir obtenu des indications, Link, Luna et Impa quittent hâtivement le domaine et se dirigent vers le mont de la Foudre, se trouvant au nord-est. Ils font bien attention à ne pas regarder la lune de sang, si menaçante. Ainsi, sans hésitation, ils parcourent le sentier montant tout droit vers leur destination : là où le Lynel réside. Même si l'incertitude se lit dans ses yeux rouges maussades, Impa tente de regarder droit devant.

- Tu as l'air d'être angoissée. Est-ce que tout va bien ? demande Link à son alliée.
Étonnée que l'Hylien s'inquiète pour son état d'esprit, la Sheikah le regarde avec discernement avant de baisser la tête.
- Tu sais, quand on m'annonce qu'il faut aller combattre un Lynel, ça n'a rien de magnifique... Mais s'il faut passer par-là, alors nous n'avons pas le choix... Le peuple d'Hyrule, peu importe l'espèce, et la Princesse comptent sur nous..., dit Impa en laissant de côté sa fierté de guerrière.
Silencieusement, tout en continuant de marcher, Link la regarde fixement.
- Les Lynels sont vraiment si... puissants que ça ? l'interroge-t-il.
Hésitante, la femme aux cheveux argentés sent une tristesse s'emparer d'elle en se remémorant un souvenir douloureux.
- C'est à cause d'un Lynel que... j'ai perdu deux de mes camarades... Mes derniers camarades Sheikahs..., avoue-t-elle d'une voix froide.
Surpris, Link ne relève pas la tête.
- Les Lynels se battent avec de longues épées, capables de trancher n'importe qui sur leur chemin et sans aucune pitié... Ils manient toujours une magie élémentaire comme le feu, la foudre ou la glace... Mais celui que j'ai rencontré était un Lynel argent. Très coriace et rancunier... Et sans aucune hésitation, il a tranché le corps de mes deux alliés... Quant à moi, je me suis enfuie comme une lâche et j'ai perdu même ma raison d'exister en tant que dernière Sheikah : c'était soit la mort, soit les Yigas, ceux qui nous ont imposé de vivre avec eux en oubliant la coutume Sheikah... Mais finalement, alors que j'étais prête à renoncer à tout, une personne m'a sauvé la vie...
- Zelda... ? devine Link, de plus en plus intrigué par son alliée.
Impa esquisse un sourire plus doux avant de poursuivre :
- Plus particulièrement sa mère : la reine Emilia. Elle m'a appris l'humanité, loin des conflits et de la survie. Et après sa mort, je me suis occupée de Zelda comme si c'était ma propre fille... Même si elle a une santé fragile, elle a toujours voulu jouer avec moi ou me demander de l'accompagner à la citadelle... J'ai vécu des jours heureux jusqu'à mon exil après avoir protesté pour le mariage arrangé. J'ai toujours désiré le bonheur de la princesse... Rien que le fait de l'imaginer, souffrir et condamnée à mourir me... rend malade... La voir heureuse est mon réel bonheur. C'est pour cela que je ne voulais pas que tu t'attaches autant à elle si c'est pour que tu souffres comme moi... Mais c'était sans espoir...

Pleinement conscient de l'intention sincère d'Impa, Link esquisse un sourire attristé, s'efforçant d'être optimiste comme le lui ont appris Zelda et Pawel par le passé.
- Impa... Quoi qu'il arrive, nous arriverons à la retrouver. Même si le fragment du courage m'a abandonné, je veux toujours la retrouver.
Surprise, Impa le fixe, réconfortée par ces paroles. Finalement, elle lui adresse un sourire à la fois mélancolique et confiant.
- Je comprends mieux pourquoi elle voulait voyager avec toi. Elle est très têtue, insouciante mais... elle sait ce qu'elle fait. Tout comme nous.

Rassuré d'avoir réussi à trouver un véritable terrain d'entente avec la guerrière qui a décidé de briser sa carapace, Link sent l'optimisme l'envahir. Discrètement à l'arrière, Luna les observe avec un air mélancolique, n'osant pas encore s'intégrer complètement dans le groupe. Soudainement, une incroyable foudre tombe sur la montagne, provoquant une secousse assez impressionnante. Sur leurs gardes, Link et Impa se mettent en position de médiane, tandis que Luna sort sa dague. Au sommet de la montagne, entourée par de grands chênes, une créature imposante à la robe marron, à l'apparence d'un minotaure féroce et musclé, se tient à quatre pattes comme un cheval. De sa main droite, elle lève sa grande épée en métal au ciel. Ses deux grandes cornes paraissent tranchantes, tandis que ses yeux blancs sont inquiétants à croiser. Une grande crinière rouge entoure son grand cou. Le Lynel semble être immunisé contre la foudre : son pouvoir de prédilection. Derrière un arbre, Link, Impa et Luna prennent le temps d'observer la démarche de leur nouvel adversaire.

- In... incroyable..., s'étonne Link par le charisme de la créature.
- Oui... C'est bien lui, informe Impa, peu sereine. Le Lynel de la foudre.
- Sa viande n'a pas l'air d'être comestible... Je sens que sa chair est grillée..., enchaîne Luna après avoir utilisé son flair.
- Dommage que nous n'ayons pas pensé à rapporter une gamelle pour toi finalement, ironise la Sheikah malgré l'anxiété.
Luna sourit avec froideur avant de sortir ses crocs offensifs en fixant son adversaire.
- En revanche, aucune trace du Roi Azul... J'espère qu'il va bien..., s'inquiète Link.
- Tentons de prendre le risque... Dans tous les cas, il vaut mieux le tuer, annonce Impa en s'apprêtant à sortir son katana.
Cependant, la femme ne peut s'empêcher de trembler légèrement.
- Une seconde... J'ai une idée..., annonce Link après avoir pris le temps de réfléchir.

* * *

Calmement, le Lynel marche en regardant le ciel. Notamment la lune de sang qui captive pleinement son attention. Après avoir reniflé, il se tourne rapidement en arrière en sentant une soudaine présence dans les alentours. Méfiant, il tourne les sabots en scrutant attentivement les alentours. Cependant : aucune trace. Avec une conscience plus tranquille, le Lynel continue d'effectuer sa garde en passant à côté d'un grand rocher. Quand soudain, il sent une présence tomber sur son dos. Aussitôt paniqué, le Lynel pousse un rugissement avant de sentir une horrible douleur au dos. Link, en essayant de se tenir après avoir tenté de le dompter comme un cheval, retire l'épée avant de la planter à nouveau. Mais à cause de l'affolement de la monstrueuse créature, il perd l'équilibre et tombe brutalement au sol. Le dos en sang, le Lynel ne tombe pas sur ses pattes, bien au contraire. Rancunier, le minotaure hurle avant de s'emparer de sa fidèle grande épée. Rapidement, il accourt en tentant de le trancher en deux. Au dernier moment, Link ramasse son épée avant d'effectuer une roulade sur le côté pour l'esquiver. Le Lynel se retourne et élève son arme dans le ciel afin de recevoir la foudre. De nombreuses étincelles, prêtes à électrocuter, entourent l'épée du maître de ces lieux. En un coup sec, le Lynel brandit son arme. Hélas, Link reçoit les étincelles qui l'électrocutent. En laissant échapper un gémissement de douleur, il tombe sur ses jambes, à moitié paralysé. Alors que le Lynel fonce dans sa direction pour lui porter le coup de grâce, Impa le couvre et pare l'épée avec détermination. Malgré la peur dans ses yeux en repensant à la mort de ses deux amis, elle serre les dents. Hélas, elle commence à ressentir l'électricité parcourir son corps. De son côté, Luna s'apprête à blesser son adversaire d'un coup traître. Mais loin d'être dupe, le Lynel lui donne un coup de sabot par l'arrière, frappant le ventre de la louve. Étourdie après avoir couiné de douleur, elle hurle comme un loup au ciel.

Peu à peu, des corbeaux noirs, appelés par le hurlement, attaquent le Lynel. L'effroyable être, trop puissant, parvient à les effrayer grâce à ses grognements. Cependant, grâce à cette diversion, Impa parvient à le repousser avec beaucoup de mal avant d'agiter son katana en avant. Désirant surmonter les démons de son passé, elle croise le fer de son adversaire de grande taille. Même si elle sent la décharge surgir en elle, la guerrière parvient à surmonter la douleur en se battant avec rage. Rapidement, elle recule en arrière avant de se concentrer. Puis, elle effectue une charge très puissante en éraflant le ventre du Lynel avant de se téléporter. En hauteur, elle plante son katana dans son dos, à l'endroit où Link a commencé à transpercer. Le monstre mi-homme mi-cheval galope dans tous les sens en gémissant de douleur. Puis, il élève son épée au ciel pour invoquer la foudre une nouvelle fois. Tout à coup, Impa hurle de douleur en se prenant la décharge et s'écroule au sol. Horrifié, Link se lève.
- Impa ! s'inquiète Luna, la patte posée au ventre.

Malgré la peur qui résonne encore en lui, l'élu se lève et s'approche avec froideur. Le Lynel, comprenant que l'Hylien tremblant souhaite le défier, recule avant de tournoyer son épée en l'air. Son sabot droit se frotte à plusieurs reprises au sol. Désormais, son arme crépite d'étincelles. Au moindre contact, Link se fera électrocuter, peu importe les armes qu'il utilise. Alors qu'il esquive à nouveau la charge du Lynel, le jeune homme, la respiration accélérée, lève la tête au ciel avant de remarquer un nuage orageux. En effet, il constate que le Lynel invoque la foudre grâce à ce nuage. Désavantagé par cet atout, il réfléchit désespérément à un moyen. Puis, il se met à penser de plus en plus à la foudre et à la tempête...

Inconsciemment, l'épéiste commence à chantonner un air qui l'a marqué depuis peu de temps : le chant du vieux Guru-Guru au village de Cocorico. En écoutant son instinct, sous les yeux incompréhensifs d'Impa et de Luna, Link sort la flûte et compose aussitôt ce thème en essayant d'y croire. Ainsi, la mélodie résonne et les notes traversent les nuages hargneux. Instantanément, un vent frais souffle et le ciel gronde. Brutalement, un orage éclate et une averse se déclenche. Ahuri, le Lynel élève son épée au ciel. Cependant, la foudre, devenue incontrôlable à cause de la tempête enchaînée, n'atterrit plus sur son épée. Elle tombe droit sur un arbre. Le minotaure a perdu sa réelle puissance pour un petit temps, déboussolé. Link profite alors pour charger. Le Lynel se défend et le repousse sans aucune difficulté. Malgré l'averse et le rapport de force colossal, Link se lève en s'essuyant la joue couverte de boue. Brutalement, son adversaire à quatre sabots lui rend son coup, mais l'épéiste parvient à le parer grâce au bouclier royal.

Subitement, sa main gauche s'illumine sous les yeux ébahis d'Impa. Avec rapidité, Link recule et fait un bond de deux mètres. La foudre atterrit sur son épée au moment où il érafle le cou du Lynel qui hurle de douleur. Hélas, à cause de la charge, le jeune homme tombe sur ses genoux en sentant son corps trembler. Aussitôt, le fragment du courage disparaît. Le cou en sang, le Lynel agonise bien qu'il soit résistant. Il s'approche de Link afin de le trancher. Sans tarder, Impa accourt en protégeant l'élu et plante son katana dans le coeur de l'effroyable créature. Le regard froid, elle fixe son adversaire à présent en sang, les yeux et la bouche grande ouverte. En rendant son dernier souffle de rancune, le Lynel s'écroule au sol au moment où Impa retire son arme. La pluie continue de s'abattre sur lui. Calmement, en sentant sa conscience l'apaiser, la Sheikah plante le katana au sol et repense avec tristesse à ses deux défunts alliés. Elle lève la tête, bien que les gouttes de pluie se mélangent avec les larmes qu'elle verse. Essoufflé, Link empoigne la main gauche, complètement trempé par la pluie. Malgré le coup brutal, Luna s'approche en boitant. Les trois guerriers regardent et entourent le cadavre en sang du Lynel, sortis victorieux de ce combat éprouvant.

* * *

Au Château d'Hyrule, enfermée dans sa chambre éclairée par deux lucioles qui volent au plafond, Zelda a les mains menottées, assise sur un grand lit blanc. La pièce aux murs blancs et au parquet au sol est agréable à l'oeil. Mais contre toute attente, elle n'est pas si luxueuse que cela pour une princesse. En effet, les lierres sont accrochés aux quatre coins de la salle et de nombreuses peluches sont disposées. Seuls les meubles sont fastueux comme le lit ou l'étagère. La fenêtre barrée par une grille est cachée derrière de longs rideaux rouges. Soudainement, la porte s'ouvre. Sylves tient un plateau de salade de fruits ainsi qu'un morceau de boeuf. Avec méfiance, Zelda le fixe avant de détourner son regard.

- Princesse. J'apporte votre repas. Il faut que vous vous nourrissiez correctement. N'ayez crainte, je vous aiderai à manger, annonce calmement Sylves en posant le plateau sur la table de nuit.
Agacée, Zelda donne un coup de pied à la table, renversant ainsi le plateau. Au dernier moment, Sylves parvient à le rattraper grâce à son agilité.
- Bon, si vous n'avez pas faim, je mangerai le boeuf au moins, constate-t-il.
- Pourquoi me nourrir si c'est pour vouloir causer ma mort ? demande froidement Zelda malgré la peur dans ses yeux.
Hésitant au premier abord, Sylves la regarde droit dans les yeux.
- Le Maître a besoin de vous vivante pour réaliser son souhait le plus cher. Pour vous avouer la vérité, il ne se sentirait même pas capable de vous faire du mal contrairement à Ganon qui souhaite votre mort.
- En quoi ma mort va changer quelque chose ? demande tristement Zelda. Dans tous les cas, ça m'est égal... Que je vive ou que je meurs, Hyrule est perdu à jamais... Les morts ne reviendront pas...
Loin d'être indifférent, Sylves la fixe.
- Princesse... Peu importe ce qu'il se passera, vous ne devez pas aspirer à la mort... C'est pour cela que vous êtes dans votre chambre : pour profiter de respirer en sécurité et surtout de revivre vos souvenirs les plus précieux... Dans tous les cas, jusqu'à ce fameux jour, je m'occuperai de vous et je ne vous ferai aucun mal. Et surtout, j'essayerai de créer un remède pour vous soulager de la souffrance.

Surprise par la gentillesse malgré la froideur de Sylves, elle le fixe longuement. Ainsi, le Yiga aux cheveux argentés incline doucement la tête avant de partir. Mélancolique, Zelda pose son regard sur la toile qui se trouve en face d'elle, accrochée au mur : une toile peinte à la main. Aux côtés d'une princesse-guerrière se trouve un héros élevant son épée au sol, vêtu d'une tunique verte et d'une cape rouge. En pensant à Link, Zelda laisse couler une larme de sang. Elle s'inquiète grandement pour lui, priant pour qu'il soit toujours en vie. Alors qu'elle lève la tête, elle voit soudainement le Roi d'Hyrule sous la forme d'un être spirituel après avoir senti sa présence. Après avoir lâché un sursaut d'effroi, les yeux de la princesse s'écarquillent.

- Pè... père... ? murmure-t-elle, n'osant pas croire à ce qu'elle voit.
Le roi lui sourit avec tristesse.
- Zelda... Tu vas bien..., constate tristement ce dernier à la voix désincarnée. Même si mon corps n'est plus, mon âme demeure, bien que je ne puisse pas rester longtemps avec toi.
Mélancolique, Zelda le regarde fixement avant de poursuivre :
- Comme mère, vous venez me dire au revoir à votre tour... Je... je suis désolée, père... En tant que prêtresse royale, j'ai... j'ai échoué... Tout est de ma faute...
- Ne dis pas ça, Zelda... Au contraire : si tu n'avais pas pris la fuite et que tu avais laissé les trois esprits dans leur agonie, tout le peuple d'Hyrule aurait fini par brûler vif... C'est grâce à ton instinct et au courage du héros que les terres sont protégées pour un bon moment... Et sache que je n'ai jamais été aussi fier de toi... J'ai eu tort... Malgré mon pouvoir, c'est toi qui as réussi à protéger notre peuple...
Touchée par ces paroles, Zelda essaye de retenir ses larmes.
- Mais Link est...
- Il est vivant. N'aie crainte. Son souffle continue d'exister dans ce monde.

Désormais rassurée, Zelda lui adresse un sourire mélancolique. Bien que le Roi ne soit qu'un esprit, il s'approche avant de l'enlacer. Surprise, Zelda écarquille les yeux bien qu'elle sent le froid gagner son corps.
- Pardonne-moi... de n'avoir pas été un bon père pour toi... Pardonne-moi d'avoir été effrayé par ta maladie... Après avoir perdu Emilia, si je m'étais attaché à toi et que je te perdais, ma vie n'aurait eu plus aucun sens... Mais peu importe, l'amour d'un père finit toujours par trahir...
- Père..., murmure Zelda d'une voix fragile.
- Peu importe le temps qu'il te reste et cet oeil en sang qui te fait souffrir, tu dois continuer de vivre...
Peu à peu, le Roi commence à disparaître. Ainsi, il recule en la regardant avec bienveillance.
- Papa ! Non je t'en prie ! Ne pars pas ! supplie désespérément Zelda en se levant comme une petite fille.
- Je serai toujours dans ton coeur. Quoi qu'il arrive...

Ainsi, le roi disparaît. Tristement, Zelda baisse la tête, au bord des larmes. Aussitôt, les menottes en fer se détachent. Surprise de sentir ses mains de nouveau libres grâce au roi, la jeune femme les regarde avant de se crisper. Elle nettoie les larmes de sang, encore anéantie par le départ de son père qui l'a toujours réellement aimée. Bien que cela soit risqué, Zelda fixe la porte de sa chambre, prête à essayer de combattre Vadel et ses sous-fifres par ses propres moyens, peu importe les risques et la tristesse qu'elle s'efforce d'encaisser.

* * *

Au même moment, Link, Luna et Impa descendent le sentier dans la direction opposée. Ainsi, la pluie se dissipe.
- Ça s'est enfin calmé..., constate la louve en secouant ses poils. Dire que tu connaissais cette mélodie...
- Oui. C'était grâce à un musicien au village de Cocorico. Et pour une raison que j'ignore, cette mélodie s'est gravée dans ma mémoire, explique Link avec nostalgie.
- Quelle chance, constate Impa avec un triste sourire. Mais au moins, nous sommes toujours en vie...
- C'est surtout grâce à toi, Impa. C'est toi qui as réussi à mettre à terre le Lynel, admet l'épéiste.
Silencieusement, Impa lève la tête au ciel.
- Oui... Même si le passé ne peut pas être changé, j'ai tout de même réussi à affronter mes mauvais souvenirs.

Silencieusement, Link la fixe. Au fond, il veut tant prendre le même exemple. Malgré la peur et le stress, son alliée a réussi à surmonter et à aller de l'avant. C'est sûrement grâce à sa maturité, voire même ses expériences.
- Je... je suis désolée si j'étais inutile sur le terrain, s'excuse Luna avec impuissance.
- Ne le sois pas. Le plus important, c'est que tu sois vivante, déclare Link à la jeune louve.
Étonnée par de telles paroles, n'ayant pas l'habitude d'en entendre, Luna le regarde fixement en sentant une chaleur combler son coeur.
- Vrai... vraiment ?
- Oui, affirme calmement l'Hylien en lui rendant un léger sourire.
La louve baisse les yeux, ne sachant pas quoi répondre.
- Je confirme. Même si tu sens le chien mouillé, affirme Impa avec ironie derrière son calme.
Gênée, Luna souffle.
- Mais oui, c'est très amusant, ironise-t-elle. Ne t'en fais pas, je vais me laver et me parfumer lorsque nous reviendrons au domaine Zora.

Puis, le petit groupe arrive enfin dans un jardin très étrange. Les princesses de la sérénité sont intactes et dansent avec le vent. Aussitôt, Link s'agenouille et touche les pétales. Rassuré que Kairi puisse continuer de créer des remèdes, il sourit tristement. Luna renifle, attirée par une odeur. Après s'être approchée, elle lâche un sursaut d'effroi.

- Nom de... Link ! Impa ! Venez vite ! appelle-t-elle.
Sans tarder, les deux concernés accourent avant de voir avec horreur Azul, allongé au sol et en sang. La poitrine éraflée, le Roi Zora ne bouge plus.
- N... non ! Votre Majesté ! Réveillez-vous ! supplie Link en s'agenouillant avec épouvante.
Il le secoue doucement pour le réveiller. Hélas, il ne bouge plus. Seules les fleurs en sang continuent de danser autour de lui.

Chapitre 25 : Larmes de sang   up

Au château, un Yiga parcourt le grand couloir tapissé en rouge aussi vite qu'une ombre. Seules les chandelles, accrochées sur les murs tapissés en noir, éclairent légèrement l'allée. Les cheveux attachés à l'arrière et cachés sous un bandage blanc, ne laissant que de grandes franches pour cacher son oeil bleu uniquement, Zelda a tout l'air d'un jeune homme. La tunique Yiga comprime très fort sa poitrine tandis qu'elle porte un pantalon assez serré. Le bas de son visage est caché sous une épaisse écharpe blanche en laine. Son déguisement est parfaitement réussi. Quelques minutes plus tôt, après s'être retrouvée libre, elle a réussi tant bien que mal à assommer un garde pour lui subtiliser sa tenue. Son premier plan est avant tout d'arrêter Vadel. Prête à mourir en utilisant tout ce qu'il lui reste comme pouvoir, elle avance avec détermination. Même si au fond d'elle, la peur serre son coeur...

- Hey ! Le nouveau rouge ! interpelle une voix masculine.
Surprise, Zelda se retourne vers un grand Yiga. Ne pouvant pas s'enfuir afin de ne pas éveiller inutilement des soupçons, elle le fixe. Costaux et le visage caché, il se tient debout au fond d'un autre couloir.
- Oui ? répond froidement cette dernière d'une voix plus grave.
Le Yiga s'approche d'elle en croisant ses bras.
- Alors c'est toi le nouveau ! Je t'ai cherché partout ! C'est quoi ton nom déjà ? Vu que la mémoire et moi, ça fait deux !
Avec hésitation, Zelda réfléchit rapidement à un prénom. Au hasard, par pure intuition, elle répond :
- Sheik.
- Quel prénom bizarre ! Tes parents ont vraiment le sens de l'humour ! Hum bref ! Il faut que tu ailles au cachot pour surveiller les provisions ! Il fait trop froid pour que j'y reste ! Il faut bien que tu serves à quelque chose mon petit gars ! Allez viens !
Contrainte de le suivre pour ne pas faire surgir les soupçons, Zelda le suit sans dire un mot malgré la frustration.

* * *

Une fois descendus tout en bas du château, dans les cachots froids et lugubres, le Yiga ouvre une grande porte. Aussitôt entrés à l'intérieur, les yeux posés sur la cellule, Zelda ne peut s'empêcher d'avoir une réaction plus qu'étonnante. Derrière les barreaux rouillés, une vingtaine de personnes sont enfermées. Hommes, femmes et enfants. Des Hyliens... Tous ont l'air d'être terrifiés.

- Mais qu'est-ce... ?
- On ne t'a pas expliqué ? s'étonne tout à coup le Yiga. L'unité 3 a capturé ces humains pour qu'on les ajoute dans l'assiette du Seigneur Vadel ! Après tout, la créature est éveillée et il faut bien penser à la nourrir !
- Ces humains... sont du bétail... ? demande Zelda d'une voix étouffée, sous le choc.
- Oui ! Mais tu as dormi debout ou quoi pendant les explications ? Même si je ne pense pas que les enfants apaiseront son appétit.

Effrayée, une petite fille pleure dans les bras de sa mère. En constatant la souffrance et le sort horrible qui les attend, Zelda sert ses poings avec un profond dégoût. Hors de question pour elle de laisser cette situation perdurer encore plus longtemps. Sans hésitation, elle sort une petite épée, qu'elle avait dérobée au gardien, avant de poignarder avec violence le dos du Yiga qui hurle de douleur. La lame dans son coeur, il meurt instantanément avant de s'écrouler au sol. L'écharpe en sang, Zelda se retourne et s'empare de la clé avant d'ouvrir la cellule, sous les yeux ébahis des prisonniers.

- Mais... pourquoi vous nous avez aidés ? demande un vieil homme. Vous êtes... un... enfant du démon !
- Je n'ai pas le temps de vous expliquer ! Vous devez vous enfuir le plus loin possible du château ! Suivez-moi ! ordonne Zelda d'une voix froide, toujours sous les traits de Sheik.
Ainsi, malgré leur confusion, les Hyliens suivent "leur meneur".

* * *

Revenue dans le hall, Zelda constate avec tracas qu'un sceau est présent sur la grande double porte.
- Nous... Nous sommes coincés ! déclare une femme avec affolement.
En regardant sa main droite, bandée pour cacher la marque, Zelda la serre contre sa poitrine. Décidée de sauver par n'importe quel moyen les prisonniers en ignorant sa situation plus qu'inquiétante, elle la tend vers le sceau avant de laisser la lumière jaillir. Grâce à son pouvoir, la barrière est brisée et les doubles-portes s'ouvrent. Malheureusement, l'alerte est donnée. De nombreux corbeaux croassent et Ganon hurle dans le ciel. Ne pouvant pas s'enfuir à cause de son corps engourdi, Zelda prend la décision difficile de rester.

- Fuyez ! Je vais les retenir ! ordonne-t-elle à son peuple.
Bien qu'ils soient reconnaissants, les habitants s'enfuient aussitôt. Seule une petite fille, tenant un nounours, s'approche de Zelda.
- Monsieur... Merci... Merci d'avoir sauvé maman, mon petit frère et moi..., remercie sa jeune interlocutrice.
Attendrie, Zelda lui caresse doucement la tête.
- Tu ferais mieux de t'enfuir... Ta maman doit s'inquiéter..., lui conseille calmement cette dernière.
La petite fille s'exécute. Tristement, Zelda se lève au moment où les Yigas arrivent, armés d'un arc et de longues épées.
- Sale traître ! Comment as-tu osé libérer ces maudits déchets ? Crois-moi ! Tu serviras en tant qu'hors-d'oeuvre pour Ganon ! rétorque froidement un grand Yiga d'une voix rancunière en sortant sa longue épée.
Malgré la peur, Zelda se retourne avec une profonde rancune.
- C'est plutôt votre maudite chair qui satisfera l'appétit de Ganon ! déclare-t-elle en utilisant à nouveau son pouvoir.
Repoussés par la lumière dorée, les trois Yigas tombent sur leurs jambes. Sans aucune pitié, Zelda se dirige dans leur direction afin de mettre fin à leur vie. Hélas, en sentant son coeur cogner avec une grande violence contre sa poitrine, elle tombe sur ses jambes en gémissant de douleur. N'ayant plus la force de se lever, des larmes de sang coulent de ses yeux avec la sensation de mourir. Ressaisis, les Yigas se lèvent.
- La princesse... Bon sang ! tique l'un d'entre eux après avoir constaté les symptômes. Retenez-la !

Aussitôt, les deux autres Yigas tiennent fermement Zelda, plaquée au sol. Le grand bandage blanc tombé et les cheveux relâchés, la jeune femme a du mal à conserver son calme. La peur la gagne et la souffrance l'a fait agoniser. Précipitamment, Vadel entre dans le grand hall.
- Sei... seigneur Vadel ! s'étonne le premier Yiga. La... la prisonnière a réussi à s'enfuir derrière notre dos... Je vous en supplie... Pardonnez-nous !
- Vous avez voulu me trahir ? demande froidement Vadel en le dardant du regard. À cause de votre maudite incompétence, vous avez failli mettre mon plan en échec après autant d'années de préparation.
- Pas... pas du tout ! Je suivrai vos ordres jusqu'à ce que mon épouse et ma fille reviennent à la vie !

Tristement, Zelda tremble, toujours maintenue au sol. Vadel se dirige vers la jeune femme avant de s'agenouiller. Il la force à le regarder droit dans les yeux.
- Pauvre malheureuse. Abîmer votre santé pour quelques êtres inutiles... Soyez sans crainte : vous ne souffrirez plus pour longtemps. Enfin : tout dépend si le porteur de la Triforce du courage sortira de l'ombre.
- Votre règne ne durera pas très longtemps... Ganon... vous tuera dès qu'il n'aura plus besoin de vous..., met en garde Zelda, la voix à la fois fragile et sombre. Je parviens à comprendre ses pensées les plus secrètes... Ses hurlements ne trompent pas la compréhension et la sagesse...
Vadel lui sourit froidement en lui caressant le visage.
- Ganon est le seul parent qui me reste... Il a été le seul à m'aider à survivre face aux autres personnes qui m'ont toutes considéré comme l'enfant du diable à cause de mes pouvoirs et de la lueur de mes yeux. Maintenant, c'est à eux de souffrir. Peu importe si Ganon les condamne à la mort ou non. Mais à moi, il ne fera jamais de mal.

Faiblement, Zelda n'arrive plus à garder les yeux ouverts. En pensant à Link et au sort d'Hyrule, elle perd finalement connaissance. En douceur, Vadel la porte dans ses bras. Avec un regard assombri, il se retourne vers ses sous-fifres.
- Invoquez à nouveau le sceau, ordonne-t-il.
- À vos ordres, Seigneur Vadel, répond un Yiga en s'inclinant.
Ainsi, en quittant le grand hall, Vadel parcourt un couloir très sombre. Seules les petites bougies illuminent.
En portant toujours Zelda dans ses bras, ses yeux sont rivés droit devant, oscillant entre la mélancolie et la froideur. Malgré sa puissance, le comte reste un homme brisé en repensant sans cesse à son passé néfaste.
Seule son ombre, sous la forme monstrueuse de Ganon, s'agrandit sur les murs.

* * *

Au domaine Zora, le Roi Azul, soigné à temps, est assis sur le lit, le torse encore bandé. Depuis son retour, Kairi et Impa se sont relayées à son chevet pour le soigner. Link, désormais soulagé, en a profité pour expliquer la situation.

- Alors, la Princesse Zelda est retenue captive par ce fou..., constate-t-il d'une voix tremblante. Bon sang...
- Oui..., affirme calmement Link malgré l'anxiété qui le saisit sans cesse. Je sais que le moment est plus que mal choisi mais nous avons besoin de votre sagesse et de votre puissance...
- Tu veux me demander de l'aide alors que j'ai failli mourir devant le Lynel ? Si vous n'étiez pas venus, mon peuple aurait...
- Ne dis pas de telles choses, Azul, réplique sévèrement Kairi. Contre un Lynel, un Zora n'aurait aucune chance... Même ton père a failli y laisser la vie...
- Mais il a réussi... Quant à moi, j'ai failli mourir aussi facilement... Je n'ai pas pu protéger mon peuple de la mort...
- Ne dites pas cela, votre Majesté... Vous avez fait tout ce que vous avez pu, réplique Link en baissant les yeux.
Silencieusement, Azul lève la tête au plafond, les yeux rivés sur la toile du Roi Zora accrochée.
- Les prodiges... Les élus capables de sauver le monde..., déclare soudainement le Roi Zora. Link... je viens avec toi...
Link se montre stupéfait tandis que Kairi avance dans sa direction.
- Azul ! Non... Tu n'es pas en état de combattre ! Tu as failli passer à côté de la mort ! Cette cicatrice sur ton torse restera là ! Tu ne peux pas partir ! proteste-t-elle avec affolement.
Compréhensible devant son inquiétude, Azul la fixe avec un regard mélancolique.
- Kairi... Je dois y aller... Je ne peux pas me reposer alors que notre monde souffre... Je ne veux pas que notre peuple et... toi, souffriez encore plus longtemps... Quand j'ai vu dans mon sommeil ma mère, j'ai senti un incroyable courage en moi... Je dois aller me battre aussi...

Désespérément, Kairi pose ses mains sur les épaules de son fiancé pour le raisonner.
- Voyons Azul ! Je ne veux pas te perdre... Tu ne peux pas penser sans cesse à ton rôle. Tu dois penser à toi avant tout ! Tu es un Zora ! Un être qui vit ! Pas un simple roi !
Link les fixe avec tristesse en serrant ses poings avec impuissance.
- Je ne peux pas, Kairi... Je suis désolé, mais tu ne me feras pas changer d'avis. Je sais que je dois aller aider Link et son groupe. Je ne peux pas ignorer ceci... Si tu me fais vraiment confiance, alors fais-le... Je t'en supplie.
Les larmes aux yeux, Kairi baisse la tête.
- Azul... S'il t'arrive quelque chose, je...
- Il ne lui arrivera rien. Nous serons là pour veiller sur lui, déclare soudainement Link, acceptant finalement l'aide d'Azul.
Kairi croise ses mains tremblantes.
- Alors dans ce cas, tu as intérêt à faire attention, Azul, dit-elle, les larmes aux yeux. Si tu ne reviens pas, je...
- Je reviendrai, jure Azul en se levant avec résolution. Non pas pour la couronne mais pour notre peuple, pour Miphalia qui purifie ces terres... Et surtout pour toi...

Délicatement, le roi caresse la joue de sa bien-aimée pour la rassurer. Les joues rougies, Kairi le regarde avec mélancolie. Elle pose la main contre celle du Zora qu'elle aime. Silencieusement, Link les fixe avant de détourner le regard. Il prie de toute son âme pour que les deux aimants puissent se retrouver une fois que tout sera terminé.

* * *

Dans le hall du domaine, une fois remis de ses blessures, Azul rencontre le groupe en tentant d'ignorer la douleur.
- Voici mes deux alliés, présente Link à Azul. Impa et Luna, voici le Roi Azul. Il a accepté de nous rejoindre et devenir le troisième prodige.
Calmement, Impa acquiesce de la tête avec un grand respect tandis que Luna le fixe avec avidité. En croisant le regard de la louve, Azul écarquille les yeux avant de se tourner vers Link.
- Hum... Link, je peux comprendre que tu as besoin désespérément d'alliés... Mais de là à recruter un toutou sur ses deux pattes... Surtout que je... suis allergique aux poils de chien...
- Pour la énième fois, je ne suis pas un toutou mais une louve non apprivoisée, répond Luna après avoir lâché un soupir d'exaspération.
Stupéfait de constater qu'elle sait parler, Azul a un mouvement de recul.
- Allons du calme, tempère Link avec sérieux. Nous n'avons pas le temps pour ces chamailleries.
- Je suis d'accord avec Link. Le temps nous est compté, affirme calmement Impa. Surtout que nous avons pas mal de route à faire.
- Maintenant que j'y pense : où devons-nous aller exactement ? Nous devons trouver une quatrième personne, c'est bien cela ? demande Azul en retrouvant son sérieux.
- Le village d'Ordiala. C'est là où nous devons aller. Il y a bien une quatrième personne qui peut nous rejoindre. Surtout que je veux m'assurer qu'il va bien..., répond Link malgré le tracas dans ses yeux.
Azul se plonge dans une petite phase de réflexion.
- Ne t'en fais pas, tête de poisson frais. Ce prodige est un humain, répond Luna assez rancunière.
- Ce n'est pas ce qui m'inquiète, loin de là, rassure Azul, les pensées interrompues. C'est juste que...
- Azul ! interpelle Kairi au loin.

Le groupe se retourne vers la Zora qui tient une lance ornée d'argent. La pointe, tranchante et brillante, vient d'être forgée. Avec confiance, Kairi le lui remet ainsi que des potions pour soulager la douleur du roi. Azul regarde fixement l'arme qui appartenait à sa mère. Malgré le fardeau qui pèse sur ses épaules, Azul lâche un sourire avant de l'accepter et de la tournoyer même.

- Bien ! Nous pouvons y aller. Surtout que je connais un moyen très rapide pour accéder au village d'Ordiala, annonce-t-il en récupérant son optimisme.
- Un moyen rapide ? s'étonne Impa. Dans ce cas, tentons alors.
- Attendez ! s'exclame Kairi en fixant la Sheikah. Pour la princesse Zelda, est-ce que vous connaissez le stade de sa maladie... ? J'ai besoin de le savoir...
En tentant de garder son sang-froid, Link se tourne vers cette dernière avant de lui répondre :
- Son oeil droit était devenu rouge...
Attristée par cette réponse plus que négative, Kairi pose la main contre sa poitrine.
- Alors même la potion n'a servi à rien du tout... ?
- Elle l'avait utilisée pour sauver un membre de ma famille... Je... je n'ai rien pu faire... Je...

Link ne finit pas sa phrase et détourne son regard comme si l'envie de pleurer surgit. Mais il se retient, ne désirant plus laisser une larme couler. En serrant ses poings tremblants, il sent une terrible impuissance le faire souffrir.
- Ne te reproche rien, Link. La Princesse Zelda, depuis sa tendre enfance, a toujours fait passer les autres avant elle... Mais quand ses deux yeux seront rouges... Si ça s'empire à ce point-là, nous ne pourrons plus rien faire pour ralentir sa maladie..., explique Azul avec mélancolie.
De plus en plus pâle, Link lève la tête et le fixe avec désespoir. Silencieusement, Luna l'observe avec un regard assombri comme si elle essaye de lire dans ses pensées.
- Si jamais vous la trouvez, alors Azul, je compte sur toi pour que tu fabriques le remède, conseille sagement Kairi.
- Maintenant que j'y pense, le remède est fait à partir de quoi ? s'interroge Link avec curiosité.
- D'ailes de fées, de pétales de la princesse de sérénité et d'une fleur extrêmement rare. La larme de sang. Elle est de couleur rouge. Elle ressemble énormément à la princesse de la sérénité même..., décrit la Zora.
- Oui... c'est pour cela que même si nous le voulons, nous ne pouvons pas fabriquer sans cesse ces potions..., enchaîne Azul.

Link se retourne en regardant la lune de sang, dont les effets ne semblent pas l'affecter. Il laisse parler son coeur :
- Même si... la princesse Zelda est condamnée à mourir, je... je ferai tout pour la sauver pour qu'elle puisse continuer de vivre et de contempler Hyrule. Peu importe le temps qu'il lui reste... Je veux tant qu'elle guérisse et la voir continuer de sourire jusqu'à la fin de mes jours... Je ne renoncerai pas tant que je ne la retrouverai pas...
Chacun fixe Link de dos, partageant son point de vue et comprenant tout à fait ses sentiments les plus forts.
- C'est pourquoi nous devons nous hâter. Venez avec moi, annonce Azul avec détermination.

* * *

À l'arrière du domaine Zora, Azul conduit le groupe dans une grotte, humide et assez étroite. À sa grande surprise, Link distingue un grand traîneau en bois massif, flottant sur une grande rivière.
- Un cercueil ? s'étonne Luna en penchant la tête sur la droite. Je crains que tu veuilles nous faire enterrer trop vite, mon brave...
- Oh que non, réplique Azul avant de siffler en direction de la rivière.

Au bout de plusieurs secondes, deux dragons de mer aux écailles blanches, aussi grands que les Zoras, sortent en poussant un hurlement assez rauque. Les yeux bleus et le cou long, ils paraissent cependant innocents. De nombreuses plumes couvrent leurs avant-bras, tels des cygnes. Leurs longues oreilles touchent le bas de leur cou en arrière.
- Qu'est-ce que... qu'est-ce que c'est ? s'étonne Link sous le choc.
- Des dragonicas. Les dragons de mer qui servent de moyen de transport sur les eaux douces. Ils peuvent également remonter les cascades. En utilisant ce moyen de transport nous arriverons plus rapidement à Ordiala, explique Azul avec sérieux. Cependant, le trajet sera loin d'être paisible.

Link s'approche du premier dragonica avant de lui caresser la tête, prêt à se rendre à sa prochaine destination.

Chapitre 26 : Ordiala, le village Piaf   up

Au château d'Hyrule, Vadel est assis sur le siège du trône, les yeux rivés dans le vide. La mort dans l'âme, il boit une coupe de vin avec un goût bien amer. Soudainement, il entend le hurlement de Ganon résonner péniblement dans la salle. Aussitôt, il se lève en lâchant un profond soupir. Il se retourne. L'entité maléfique, toujours sous la forme d'un spectre, le fixe avec hargne. Calmement, Vadel l'écoute, le regard perplexe.

- Pardonne-moi, Ganon... Mais ces "viandes" se sont enfuies..., lui répond-il avec froideur.
L'aura de Ganon hurle et se dirige comme une furie vers Vadel. Le comte esquisse un sourire oscillant entre l'amusement et l'anxiété.
- Toi et moi, on a vraiment du mal à s'entendre depuis quelques temps... Cela me désole... Quoi qu'il en soit, malgré ta colère, n'oublie jamais la promesse qui m'a obligé de continuer à vivre jusqu'à présent... Sans moi, tu n'existerais plus dans ce monde. Donc en attendant, tiens-toi tranquille jusqu'à ce que le porteur du courage parvienne à regagner la confiance de son fragment.

Silencieusement, les yeux rougeâtres de Ganon fixent le comte. Ainsi, il quitte la salle du trône, tel un coup de vent, prêt à voler autour du château. Froidement, Vadel lève la tête au ciel, ses cheveux noirs bercés par le vent de la mort. Peu à peu, de violents souvenirs surgissent en lui : des flammes, du sang et un cercueil. Dans un excès de rage, il jette la coupe de vin à terre avant de se plaquer contre le mur pour mieux se tenir. La douleur s'empare à nouveau de lui. Tout à coup, Sylves entre et s'agenouille au milieu de la salle.

- Mon Seigneur : la Princesse Zelda a été enfermée dans le cercueil comme vous nous l'avez ordonné. Son âme est à présent endormie. Elle ne pourra plus utiliser ses pouvoirs, déclare-t-il sans regarder le nouveau roi, la tête baissée.
- Bien... tu peux disposer, Sylves, lui répond sèchement Vadel en se retournant dans sa direction. Dès que le porteur du courage arrivera, épargne-le. Seulement lui. Il me le faut vivant.

Sylves approuve de la tête avant de quitter la salle. Dans l'ombre, seuls les yeux rouges du comte s'illuminent. Une fois de plus, il se retourne vers le ciel, le regard posé sur la lune de sang.

* * *

Au même moment, sous ce même ciel menaçant, les dragonicas continuent de tirer le traîneau. Avec grâce, ils nagent en couinant. Link, assis à côté d'Azul à l'avant, regarde droit devant. Luna et Impa sont à l'arrière, bien attachées. Mal au coeur, la louve évite de regarder l'eau si ondulée. Au loin, une grande cascade s'écoule et sépare les deux grandes montagnes de Lanelle.

- Accrochez-vous bien : nous allons remonter cette cascade ! déclare vivement Azul en agitant les rênes.
- Quoi ? s'étonne Luna avec affolement, les yeux grands ouverts. Tu veux plaisanter, j'espère ?
- C'est... c'est réellement possible ? demande Link avec stupéfaction.
- Oh que oui ! répond Azul avec assurance. Allez hyaaaa !
- Non ! Laissez-moi descendre ! Je... je vais nager un peu mais par pitié, ne me faites pas endurer ça ! panique Luna, de plus en plus tremblante.

Les dragonicas hurlent et commencent à ne faire qu'un avec la cascade. Le traîneau s'élève en hauteur. Seule Luna hurle comme une louve, apeurée. Une fois sur la rivière, les deux créatures sortent de l'eau et continuent de tirer le traîneau. Essoufflée, Luna tremble en couinant comme un animal vulnérable, prête à vomir dans l'eau. Amusée un peu, Impa pose la main sur l'épaule de son amie pour la rassurer. Link remet bien sa coiffe, encore étourdi par ce qu'il vient de se passer, tandis qu'Azul esquisse un léger sourire.

- Je ne m'en lasserai jamais. Dire que je faisais souvent des courses avec les autres, annonce ce dernier d'une voix un peu plus détendue.
- Ne me demandez plus jamais de refaire ça ! Pour l'amour d'Hylia..., soupire Luna, encore apeurée.
- Tiens ! Regardez ! s'exclame Impa après avoir remarqué quelque chose au loin.
Soudainement, Link lève les yeux. Au sommet d'une petite montagne, peuplée de grands cèdres, de nombreuses maisons en bois suspendues sont présentes. Des ponts en bois les relient entre elles. Ce lieu borde en toute tranquillité.
- Le village d'Ordiala. Nous y voilà, annonce Azul avec sérieux.

* * *

Après avoir accroché le traîneau à un poteau, le petit groupe se rend en direction du village. Soudainement, devant un grand pont en bois tenu par des cordes, deux grands Piafs leur font barrage. Ils portent un casque en fer ainsi qu'une cotte de mailles.
- Halte ! s'exclame un des deux gardiens. On peut savoir qui vous... ! Oh ! Seigneur Azul ! Dame Impa...
- Nous sommes désolés pour le dérangement mais est-ce que nous pouvons voir votre chef ? demande le roi Zora en jouant de sa notoriété.
- Bien !

* * *

En montant au sommet grâce aux ponts en bois qui s'élèvent sans cesse, le groupe ne tarde pas à rencontrer le chef. Au coeur du village, Link profite de regarder l'intérieur de plusieurs maisons aux portes ouvertes : aucune trace de Pawel. En revanche, il constate avec impuissance de nombreux Piafs affaiblis, notamment des enfants, victimes de la lune de sang après y avoir posé les yeux. Au loin, une maman piaf berce son enfant en priant pour son bien-être. Attristée, Luna la regarde, comprenant tout à fait sa peur.

Une fois arrivés au sommet de la montagne, Link distingue, entre deux grands arbres aux branches majestueuses, un Piaf aux plumes bleues et blanches en train de jouer à l'accordéon : c'est exactement le même que celui qui a joué à la taverne de Cocorico. La mélodie est toujours entraînante. Après avoir senti la présence des invités, il s'interrompt et se retourne vers eux. Les yeux noisette et les deux petites plumes indiennes blanches sur sa tête, il leur sourit avec bienveillance malgré le tracas qui se lit dans ses yeux.

- Oh... tiens tiens. De nobles voyageurs ? s'étonne-t-il en tenant toujours son instrument de coeur.
- Vous êtes le chef du village ? lui demande calmement Link.
- Oui, je viens juste d'être promu depuis la mort de l'ancien chef, bien qu'il soit douloureux de l'admettre... Je me nomme Asarim en l'honneur de mon ancêtre. Chef du village... Mais ne pouvant rien faire pour soulager la douleur de mon peuple, je ne peux que jouer la mélodie en restant aveugle. Pour le moment, seule la mélodie, composée sur l'histoire des vainqueurs, soulage leur coeur, explique tristement le Piaf bleu avec impuissance.
- Ils ont été victimes de la lune de sang, constate Azul avec sérieux.
- Oui... mais pas seulement : de nombreux Piafs se sont fait enlever... Seuls un de nos soldats et un Hylien au coeur pur, un chevalier d'Hyrule, se sont rendus dans le désert pour essayer de les sauver malgré la tournure des événements.
- Un Hylien ? Vous voulez parler de Pawel ? devine aussitôt Link avec stupeur.
- Le... le désert Gerudo ? s'étonne Impa avec perplexité. Mais, les hommes ne sont pas acceptés !
- Les Gerudos ? répète l'élu.
- C'est un peuple composé uniquement de femmes indépendantes et guerrières. Si elles croisent un homme dans le désert, elles tenteront de le séduire ou même de l'enfermer pour des histoires peu innocentes, lui explique calmement Impa. Elles voient les hommes comme des outils de reproduction. Elles ne respectent que la Princesse Zelda.
- Cela veut dire qu'ils sont en danger alors ! s'inquiète aussitôt Luna.
- Oh que oui. Mais le Capitaine Pawel, après avoir eu vent que les Yigas aavient enlevés les Piafs, a décidé de sauver les nôtres, après avoir supporté la souffrance des autres... Durant son séjour, il nous a tant protégés contre les démons. Teba, le meilleur archer Piaf, s'est joint à lui pour sauver sa fille qui a été enlevée.

Avec mélancolie, Link baisse la tête.
- Nous pouvons encore le rattraper, informe Impa.
Azul tique en croisant les bras.
- En revanche, je constate la souffrance de votre peuple... Les Piafs sont aussi fragiles que nous... Si cela continue ainsi, ils...
Ne supportant plus de les voir souffrir, le Roi se plonge dans un moment de réflexion. Enfin, il déclare :
- Je retournerai au domaine Zora et je vous rapporterai le remède et la recette.
- Vous feriez ça pour nous ? s'étonne Asarim. Il existe réellement un remède ?
- Oui. En revanche, j'aurai besoin d'une deuxième personne pour m'accompagner... Donc, Link, je sais que mon caprice est peut-être égoïste mais...
- Non loin de là, rassure Link avec un sourire compréhensif. Après tout, en tant que roi sur ces terres, cette tâche vous revient.
Soulagé, Azul esquisse un sourire attristé.
- Alors dans ce cas, Luna va aider Azul, tandis que moi j'accompagnerai Link. Il vaut mieux se rendre à deux plutôt qu'en groupe, propose Impa, toujours aussi stratégique.
- Non ! proteste froidement Luna.
Aussitôt, tous se retournent vers la louve. Doucement, elle lève la tête avec un regard plus assombri.
- C'est moi qui irai avec toi, Link... Si jamais cet homme a accédé au repaire des Yigas, je dois me rendre à l'intérieur...
- Mais pourquoi ? questionne Impa, de plus en plus intriguée. Tu es consciente que les Yigas sont des êtres incapables d'éprouver la moindre pitié envers celles et ceux qui s'opposent à eux.

Luna empoigne son bras gauche en gardant son calme.
- Je veux le savoir. Je sais que c'est égoïste mais... je dois en avoir le coeur net et savoir si l'être que j'aime est encore en vie..., poursuit-elle.
- Il a été... emmené par les Yigas alors, constate tristement Link.
La louve approuve de la tête. N'osant pas refuser devant l'inquiétude de son amie, il ne faut pas longtemps à l'Hylien pour se décider.
- Très bien Luna : tu viens avec moi. Donc, votre Majesté, Impa : nous nous rejoindrons ici.
- Crois-moi, Link : ça ne me fait pas plaisir qu'on se sépare ainsi. Mais si tu penses réellement que Pawel peut être le quatrième prodige et que tu peux regagner le courage grâce à lui, alors va, l'encourage Impa en lui adressant un sourire confiant. Le Roi et moi, nous nous occuperons du peuple Piaf. Nous ne prendrons aucun risque inutile.
Link approuve de la tête, à la fois rassuré mais fier de la décision noble de ses deux alliés.
- Pour accéder au désert peuplé par les Gerudos, les terres si funestes, il vous faut descendre la deuxième montagne en direction du sud-est. Surtout, faites attention à vous... et par pitié, sauvez mon peuple, Teba et le Capitaine prodige... Que la Déesse Hylia vous protège, souhaite Asarim avec un léger sourire.
- Merci beaucoup, Asarim. Partons sans tarder, annonce Link avec détermination.
Ainsi, il commence à partir en compagnie de Luna.
- De notre côté, nous allons nous rendre au domaine. Allons-y Impa, déclare Azul avec un air confiant.

Sans dire un mot, la femme guerrière approuve de la tête avant de le suivre. Seul Asarim reprend son accordéon. Malgré la tristesse, il décide de jouer à nouveau son instrument. Cette fois-ci, la mélodie est bien plus joyeuse : symbolisant l'envie d'y croire.

* * *

Au même moment, Link et Luna descendent le sentier de la montagne. Malgré la fatigue, l'épéiste continue de marcher, ne préférant pas prendre de pause. Il est conscient que le temps lui est compté. Hélas, en repensant à sa propre erreur lorsque Zelda a été enlevée, il tombe sur ses jambes. Précipitamment, Luna accourt et l'aide à se lever.

- Est-ce que ça va ? lui demande-t-elle en le tenant.
- Oui... mais nous devons continuer et...
- Pas si vite : tu dois respirer un bon coup ou sinon, tu seras littéralement crevé une fois arrivé en bas. Cela ne sert à rien de se précipiter si c'est pour se détruire la santé.

En prenant conscience des conseils avides de sagesse de son amie, Link approuve de la tête. Ainsi, il s'assoit sur un rocher en prenant le temps de reprendre son souffle. Il ouvre la gourde et boit un peu d'eau. Mais en pensant au sort de Zelda et à son échec, il baisse la tête, ayant du mal à faire taire sa tristesse.

- Quelque chose ne va pas ? s'inquiète Luna en s'approchant de ce dernier, s'efforçant d'être à son attention.
- Non, ce... ce n'est rien, répond-il d'une voix tremblante. C'est juste que je me sens tellement faible... Depuis que Vadel a enlevé Zelda sous mes yeux, je... je me fais beaucoup de soucis pour elle et pour le sort du monde... Si j'avais été plus fort et moins égoïste, mon ombre ne m'aurait pas trahi... Je sais que se plaindre ne résoudra rien mais...
Link ne finit pas sa phrase et baisse la tête, écoutant sa mélancolie.
- Mais tu as besoin d'en parler... Et tu as bien fait car cela soulage ton coeur qui continue de saigner. Mais en te libérant de ce poids, tu te sentiras un peu plus léger, explique Luna en croisant les pattes. Et ne te considère pas égoïste : il est normal d'avoir peur ou d'exprimer des sentiments forts... Quelque soit notre statut.
Réconforté par la compréhension plus que sincère de son alliée, Link lui rend un sourire attristé, les yeux baissés.
- Concernant la réincarnation de Ganon... Est-ce que tu peux me dire à quoi il ressemble ? l'interroge Luna avec un regard assombri. Cela fait si longtemps que... je ne l'ai pas revu...
- Bien sûr... Cheveux noirs mi-longs, yeux rouges comme le sang, tenue noircie digne d'un Seigneur...
Luna ferme les yeux comme si elle essaye de visualiser.
- Et donc, c'est lui qui est destiné à se marier avec la Princesse Zelda ? enchaîne-t-elle.
- Oui... mais apparemment, c'est pour autre chose encore... Pour une raison étrange, quand je l'ai vu, je n'ai pas vu de la haine en lui. Mais avant tout : de la rancoeur et la tristesse.
- De la rancoeur et... de la tristesse, murmure la louve, loin d'être insensible. Même en sachant cela, si tu es confronté à lui, est-ce que tu le... tueras ?
- Oui..., affirme Link, préférant rester franc. S'il meurt, Ganon mourra avec lui... Même si je n'ai rien pu faire pour l'en empêcher, il reste avant tout l'unique responsable de ces malheurs et je veux y mettre fin. Surtout que c'est à cause de lui que celui que tu aimes t'ait été enlevé, donc je veux t'aider à le retrouver.

Luna le regarde fixement, ne sachant pas quoi répondre. En regardant le ciel rouge, ses yeux verts s'arrondissent comme ceux d'un chat.
- Je me demande comment tu fais : alors que tu essayes de croire en l'espoir, tu arrives à accepter les décisions et les situations les plus difficiles... Chose que je... je n'arriverai sans doute jamais à faire. Je voudrais bien prendre exemple sur toi, sur Impa ou même sur Azul. Malgré la situation périlleuse, vous osez aller de l'avant et voir la vérité en face...
- Chose que j'ai comprise très tard... Mais ne t'en fais pas Luna : si nous retrouvons ton compagnon, je ferai tout pour t'aider. Tu n'as pas à avoir peur, rassure Link avec un sourire sincère malgré l'anxiété dans les yeux. Toi et ton compagnon, vous serez à nouveau réunis.
Stupéfaite, Luna le dévisage en sentant du baume au coeur. Elle se retourne, n'osant plus le regarder.
- Merci Link..., remercie-t-elle. Sincèrement, merci de tenter de me donner de l'espoir...
Rassuré, Link baisse la tête. Alors qu'il essaye de se reposer un peu en fermant les yeux, Luna regarde le ciel avant de laisser couler une larme : une larme qui signifie tant de choses.

Chapitre 27 : La Vaï   up

Après la petite pause, Link et Luna continuent leur chemin. Silencieuse, la louve est plongée dans une grande phase de réflexion, toujours étouffée par ses propres angoisses. Quant au porteur du courage déchu, il marche droit devant avec détermination. Mais une fois arrivés à côté d'un grand arbre mort, ils distinguent de grandes dunes sablées. Malgré le ciel rouge et les nuages noirs, la chaleur insoutenable est toujours présente. La lune de sang brille toujours et partage sa lueur inquiétante grâce à ses rayons. Etouffé par la température si haute, Link descend le col de sa tunique pour laisser respirer un peu son cou.

- Nous y voilà. Alors c'est ça le "désert des Gerudos", constate Luna avec sérieux.
- Oui. Dépêchons-nous, presse Link en descendant la petite colline.

Calmement, la louve fixe l'inquiétant paysage avant de suivre son ami, prête à s'y aventurer. En sentant leurs jambes engourdies péniblement dans le sable, les deux compagnons parcourent les dunes de plus en plus denses. Les vautours semblent être les seuls êtres existants de ces lieux et de nombreux crânes d'animaux sont éparpillés au sol. L'atmosphère est pessimiste et surtout très angoissante. Au loin, Link et Luna distinguent enfin une grande forteresse en pierre, forme rectangulaire. Les murs font plus de vingt mètres de hauteur. À l'entrée, deux grandes femmes à la peau bronzée aux longs bras musclés, veillent à ce qu'aucun individu n'entre. Elles portent un pantalon flottant ainsi qu'un petit haut qui comprime uniquement leur poitrine fort généreuse. Leurs cheveux, attachés en queue de cheval relevés, sont rouges comme les flammes.

- Voilà la forteresse Gerudo... Si Pawel et Teba sont à l'intérieur, il faut que j'en aie le coeur net, explique Link avec résolution.
- N'oublie pas que les Gerudos n'acceptent aucun homme, lui rappelle Luna en écoutant la voie de la prudence. Tu ne veux pas quand même te faire emprisonner ou devenir un simple instrument de reproduction pour elles.
- Si je leur explique la situation en leur disant que je suis le chevalier de la Princesse Zelda, elles vont bien finir par comprendre. Je veux seulement leur poser la question.

Ainsi, Link se dirige calmement en direction de l'entrée. Même si c'est imprudent, il ne veut plus perdre inutilement de temps à cause de ses hésitations. Aussitôt, les femmes Gerudos le dardent du regard au loin et font barrage grâce à leur lance pointue.

- Oy ! On peut savoir ce qu'un Voï comme toi fait ici ? l'interroge l'une des deux d'un ton autoritaire.
Une fois en face des deux femmes, Link se sent assez nerveux.
- Un Voï... C'est de l'alcool ? lui demande-t-il avec incompréhension.
- Inculte ! Un Voï c'est un Voï. Seules les Vaïs sont les bienvenues ici.
Rapidement, Link comprend enfin la signification et la coutume de ce peuple. Voï veut dire homme et Vaï femme.
- Hum... je m'excuse pour le dérangement. Je me présente : je suis Link, le chevalier de la Princesse Zelda. Je voudrais savoir si un homme et un Piaf se trouvent au sein de votre ville, leur explique Link en reprenant son sérieux.
- Nous capturons tous les Voïs virils et beaux que nous voyons. Désolée mais même si tu es chevalier de la Princesse, tu manques encore un peu de muscles pour devenir l'époux de l'une d'entre nous et nous enfanter, avoue la Gerudo avec moquerie, le regard hautain.
- Mais je ne suis pas ici pour me marier ou je ne sais quoi ! Mais je...
Brusquement, les deux gardiennes pointent leur lance en direction du cou de Link qui s'arrête net.
- Franchis un pas de plus et tu perdras ta tête ! menace froidement l'une des deux. Seules les Vaïs ont le droit d'entrer. C'est la coutume.
- Je suis une femme ! Enfin une Vaï. Je peux très bien entrer, se propose immédiatement Luna en s'approchant des deux Gerudos.
- Nous n'acceptons aucun animal, c'en est de même pour les femelles vu qu'elles sont insupportables quand elles sont en chaleur. En plus, ça apporte des puces.
Exaspérée d'être insultée ainsi comme un simple animal, Luna les fusille du regard en grognant très fort, les oreilles baissées et les poils à moitié hérissés.
- Du calme, Luna... Allons-nous-en. Nous avons perdu notre temps avec ces... Vaïs, dissuade Link en traînant son amie le plus loin possible.

Peu enjouée de se laisser humiliée ainsi, Luna tente de se calmer avec beaucoup de mal. Alors qu'ils se rendent à l'arrière de la forteresse à l'abri du rayon de la lune rouge, ils remarquent soudainement un Hylien, assis contre le mur. Ses cheveux sont bruns courts bien brossés, tandis que ses yeux noisette sont cachés derrière une paire de lunettes rondes. Il porte une veste violet foncé ainsi qu'un simple pantalon beige. Il semble être dépité.

- Eh ! Vous allez bien ? s'inquiète Link en s'agenouillant auprès de l'inconnu.
Doucement, l'homme à l'allure d'un savant regarde son interlocuteur.
- Oh... vous êtes un homme aussi ? Pas de chance... Je vous plains.
- Je me nomme Link. Et voici Luna. Nous essayons d'entrer à l'intérieur de la forteresse mais...
Avec curiosité, le savant l'ignore ouvertement et s'approche de la louve.
- Oh quel adorable chien. Vous l'avez bien dressé si elle marche comme un humain ! complimente-t-il avec un large sourire.
Luna grogne, ne supportant plus d'être insultée une fois de plus. Elle lui tourne le dos pour bouder silencieusement.
- Ce... ce n'est pas un animal... Mais bref. Puis-je savoir qui vous êtes ? l'interroge Link d'un ton curieux.
- Jehd. Enchanté de faire votre connaissance. Si vous êtes là, c'est parce que vous n'avez pas réussi à entrer à l'intérieur de la forteresse, pas vrai ?
- Vous avez encore des questions idiotes à poser ? Hélas non, sinon on ne serait pas là à vous causer. Ces deux gardes sont des dures à cuire, répond Luna d'un ton désagréable, toujours aussi rancunière.
- Oh... Tout comme celle que j'aime... Depuis que je suis tombé éperdument amoureux de cette magnifique Gerudo qui m'a sauvé la vie, j'essaye de conquérir son coeur... Hypnotisé par sa beauté, je l'ai suivie jusqu'ici. Mais depuis qu'elle est rentrée dans son village natal, j'ai perdu tout espoir... Non seulement, elle participera au tournoi de la Vaï la plus forte pour gagner le plus beau Voï, mais en plus, je ne peux pas entrer dans le village pour lui faire ma déclaration, leur explique Jehd avec mélancolie. Oh ! Que l'amour est cruel ! C'est une torture ! Vous êtes amoureux aussi ?
Les joues légèrement rougies, Link ne répond pas à cette question à haute voix et approuve à moitié de la tête.
- Je le suis, répond avec franchise Luna. Mais l'amour, ça ne se commande pas comme un plateau de steaks. Ça vient avec le temps. Pour séduire une femme, il faut être doux et attentionné. Pas être un obsédé qui veut la posséder comme si vous vouliez la dévorer.
- Mais le problème, c'est que je ne peux pas attendre si la fin du monde arrive... J'accepte de mourir uniquement si je lui demande sa main... Je l'aime vraiment. Je ne veux pas être avec elle pour sa beauté ou pour abuser d'elle... Mais parce qu'elle me plaît et qu'elle a touché mon petit coeur au miel. Si seulement, nous pouvions nous rendre à l'intérieur... C'est pourquoi j'ai beau regarder le plan de la forteresse : il n'existe aucun souterrain !
- Quel dommage qu'Impa ne soit pas avec nous..., soupire Luna en se grattant l'arrière de sa tête à cause des puces.
- Je ne pense pas que ce plan aurait marché... Impa est très masculine, répond Link, n'arrivant pas à imaginer la tournure que cela aurait pris.
- Il faut surtout un homme androgyne... Un petit peu comme... vous..., déclare Jedh en désignant du doigt Link, les yeux grands ouverts.
Pendant plusieurs secondes, le concerné le fixe et se désigne lui-même, n'osant pas croire à ce qu'il vient d'entendre.
- Androgyne... Mais... vous... vous plaisantez j'espère ? Je suis loin d'être féminin ! rétorque-t-il nerveusement.
- Avec une tenue de femme, cela passera sans aucun problème ! Il suffira juste de faire attention avec votre voix ! explique jovialement Jehd avec espoir.
Luna ne peut s'empêcher de s'esclaffer de rire devant la réaction ahurie de Link.
- Mais vous êtes devenus fous tous les deux ! Surtout que nous n'avons aucune tenue pour...
Sans finir sa phrase, Link voit Jehd lui tendre une tenue : un pantalon violet clair flottant, un petit haut bleu avec des motifs de fleurs en or ainsi qu'un petit voile à moitié transparent pour cacher l'arrière des cheveux et le bas du visage.
Effrayé par cette proposition, Link a un mouvement de recul, la bouche ouverte.
- Et j'ai également des bijoux ! Tout ça, je les ai achetés chez une commerçante ! Je voulais les lui offrir, mais vu qu'elle ne sort pas...
- Mais ça ne va pas ! Je...
- Link... Hum... Tu dois quand même rentrer à l'intérieur pour vérifier si Pawel et ce Piaf sont là-dedans... Dépêche-toi de te décider, le presse Luna malgré le ton de sa voix encore un peu hilare.

Gêné, Link se retourne en croisant les bras. L'idée lui déplait fortement. Mais peu à peu, il pose la main sur son front pour mieux réfléchir.
- De là à me déguiser en fille... Hum... Bon sang... je... je crois que je n'ai pas le choix... Je vais me changer..., accepte-t-il finalement, le visage aussi rouge qu'une tomate. Et ne me regardez surtout pas !
Précipitamment, il s'empare de la tenue et se cache pour se changer. Silencieusement, Luna et Jehd patientent.
- J'espère que ça marchera... Surtout que les Gerudos ont vu à quoi ressemble Link..., s'inquiète la louve en croisant ses pattes.
- Ne vous en faites pas. Même si les Gerudos sont très malignes, dès qu'elles voient une femme élégante, elles la laissent entrer sans se poser de questions ou la déshabiller pour contrôler. En tout cas, c'est la première fois que je vois une espèce de votre genre. Vous devez être l'unique spécimen de ce monde. Je voudrais bien vous étudier dans les moindres détails.
Luna baisse les yeux, mal à l'aise devant l'intérêt scientifique de Jehd. Finalement, elle lui répond :
- La seule et unique dans ce monde... Oui, mais je ne suis pas un cobaye... Après tout, autrefois, j'étais comme vous et Link. Nous ne sommes pas aussi différents.
Intrigué par cette réponse aussi soudaine, Jehd la dévisage longuement, pris par un certain doute.
- C'est... c'est bon... Je suis prêt..., annonce Link d'une voix dépitée.

Sous les yeux de Luna et de Jehd, il sort finalement de sa cachette, désormais déguisé en Gerudo. Malgré le petit voile couvrant légèrement l'arrière de ses cheveux et le fait que seul le haut de son visage est visible, Link a tout à fait l'air d'une magnifique femme mystérieuse. Le torse assez musclé, le petit haut cache bien sa virilité bien que son ventre soit nu. Il porte également un bracelet en or sur chaque poignet ainsi qu'un collier en argent autour de son cou qui glace désagréablement sa peau tiède à cause de la chaleur du désert. Il porte un pantalon court violet ainsi que des petites chaussures noires.
Surpris, Jehd se lève avec admiration, la bouche grande ouverte.

- Oh pour l'amour du ciel ! Tu es si magnifique ! Si tu étais une femme, j'aurais...
Effrayé par ce compliment plus que suspect, Link lâche un cri d'épouvante avec un regard horrifié. Sur sa défensive, il sort même son épée. En s'efforçant de récupérer son sérieux au plus vite, Jehd se racle la gorge.
- Euh... Hum ! Je veux dire : le déguisement est très réussi ! annonce-t-il, loin d'être indifférent.
- Il faut juste ajouter deux melons glaglas et ça sera plus crédible, suggère Luna avec sérieux en fixant le torse de Link.
- Vous... vous me donnez envie de m'enfouir dans le sable et m'enterrer vivant tellement que j'ai honte, leur répond Link d'une voix très gênée en croisant nerveusement ses bras. Je veux bien me déguiser en femme mais simuler une poitrine avec deux fruits froids...
- Quoi qu'il en soit, essaye d'entrer. Si jamais les choses tournent mal, je t'aiderai, le rassure Luna.
- Et si vous rencontrez une certaine "Melinda", donnez-lui cette lettre d'amour de ma part, informe Jehd en tendant une enveloppe à son interlocuteur.

Mal à l'aise, Link accepte et se dirige vers l'entrée en rangeant la lettre dans sa poche sous les yeux de la louve et du chercheur. Revenu devant les Gerudos, il avance doucement, les jambes en coton.
- Oh ! Une Vaï ? Ici ? s'étonne la première en se grattant son menton mince.
- À cette heure-ci ? enchaîne l'autre avec perplexité.
"Et voilà... Je savais que ça ne marcherait pas... Elles vont découvrir la supercherie... Après avoir perdu ma fierté en tant qu'homme, je vais sans doute perdre la vie... Elles regardent ma poitrine complètement plate... J'aurai dû écouter Luna finalement..., pense Link en tentant de rester immobile malgré son stress."
Soudainement, la Gerudo empoigne sa main gauche et examine la face dorsale. Avec soulagement, elle déclare :
- Pauvre Vaï égarée ! Ma pauvre... Parcourir un désert à cette heure ci ! Heureusement que les Yigas ne t'ont pas enlevée... Entre vite à l'intérieur et repose-toi bien surtout !
Surpris par une telle déclaration, Link approuve timidement de la tête avant d'entrer en baissant la tête.
Cependant, la deuxième Gerudo fronce les sourcils.
- C'est étrange... Elle me rappelle quelqu'un que nous avons vu récemment...
- En même temps, les Vaïs hyliennes ne sont pas réputées pour avoir une grosse poitrine, rassure l'autre avec fierté. Au moins, ce n'est pas une Yiga... Laissons-la tenter sa chance. Elle a dû entendre parler du tournoi pour conquérir le coeur du plus beau Voï !

* * *

L'intérieur du refuge Gerudo est bien plus grand que Link aurait pensé. Malgré la situation inquiétante, les femmes, seules maîtresses de ces lieux, tentent de continuer de vivre en faisant tourner leur commerce, assises sur leur tapis devant leurs marchandises. Pourtant, l'inquiétude se lit dans leur regard, bien que chaque Gerudo semble conserver son sang-froid avec beaucoup de facilité. Les maisons en pierre sont très peu espacées et ne semblent même pas avoir de toit ou de portes. Quelle étrange mode de vie. Aucune couleur joyeuse n'est présente. Malgré ce côté lugubre, les palmiers sur la grande allée sont la seule végétation à être vivace au coeur de la grande place. Sans faire attention, Link bouscule une grande Gerudo au teint mat. Les yeux bruns et les cheveux roux, elle le darde du regard.

- Tu ne peux pas faire attention ? Regarde où tu marches avant de...
Immédiatement frappée par la beauté "féminine" de Link, elle recule, toute rouge.
- Oh... hum... je suis désolée, ma jolie... Si tu as besoin de quoi que ce soit, viens à moi... Je serai là pour toi... J'habite au quartier de l'ouest, dans la toute dernière maison... Hum, à bientôt..., lui déclare-t-elle avant de partir, le visage caché par ses mains.

Ne comprenant pas ce changement de comportement, Link fait abstraction et tourne les talons. Au loin, il remarque une grande affiche collée sur le mur d'une grande structure en pierre. Il y est marqué "Tournoi de Vaïs pour le coeur d'un Voï". Intrigué, il entre à l'intérieur. Derrière le comptoir en bois, une Gerudo se trouve au guichet en train de nettoyer une lame. Cette salle fait même penser à un cachot.

- Exu... hum, se racle la gorge Link avant de prendre une voix plus aiguë.
- Sabadah, ma petite. Je peux faire quelque chose pour toi ? lui demande la Gerudo, avide à la requête de "la nouvelle venue".
- C'est ici que les Voïs sont considérés comme des lots... ?
- Oui, tu es à la bonne porte. Je vois que tu as entrepris ce pèlerinage pour séduire le coeur d'un Voï d'une beauté assez rare. Surtout que le plus beau vient de très loin : du château d'Hyrule. Un preux chevalier. Le rêve de toutes les Vaïs qui ressentent de l'attirance pour un Voï aussi viril et gracieux.
Persuadé, Link se lance :
- Alors je participe !
- Bien ! Mais tu dois savoir qu'en tant que Vaï, si tu remportes un Voï, le mariage aura lieu directement le lendemain, suivi par la nuit des noces qui évacue la pureté si tu vois ce que je veux dire. Et en tant que Vaï, il est surtout interdit de laisser un Voï lui donner des ordres. Après tout, c'est à cause de la cruauté des Voïs qui se croient supérieurs que nos ancêtres ont décidé de les chasser et de les voir comme une simple manière de reproduction. Les Voïs qui considèrent les Vaïs comme des êtres inférieurs, peu importe les raisons, ne méritent pas notre coeur ni même notre pitié. Et ni même la vie... Je préfère te le dire pour que tu ne tombes pas dans le piège.
- J'en suis conscient... Hum ! Consciente. Je suis pour l'égalité entre les femmes et les hommes, lui répond Link avec sérieux. Enfin pour les Voïs et les Vaïs.
- Bien ! Tu es la bienvenue. Ton prénom s'il te plaît ? réclame la Gerudo avant de s'emparer de son carnet.
- Lin... Lin..., gémit Link en cherchant désespérément un prénom bien féminin.
- Lin Lin ?
- Linkle !
La Gerudo écrit le prénom sur la feuille.
- Bien ! Tu peux entrer à l'intérieur ! Et surtout : bonne chance et fais attention à ne pas filer ta grippe à tout le monde !

La voix fort aiguë n'a pas été très concluante. Mais tant pis. Après avoir fermé les rideaux rouges derrière lui, Link traverse un long couloir, les murs et le sol en pierre. Arrivé devant la porte, malgré l'anxiété, il l'ouvre finalement avant de découvrir, à sa grande surprise, une arène. Le sol est sablé et des bancs en pierre entourent la place. Au milieu de la salle, sous les yeux ébahis des spectatrices, deux Gerudos, armées, s'affrontent entre elles avec rage. Celle de droite sous l'armure en argent assomme avec violence son adversaire qui ne peut rien faire pour l'éviter. Une fois écroulée à terre, la foule acclame celle qui vient de triompher. Sur le trône, une grande femme Gerudo se joint aux tonnerres d'applaudissement. Cheveux rouges attachés en chignon, les deux grandes mèches tombant sur sa poitrine généreuse, la femme est radieuse.

- Bravo ! Félicitations ! Tu as été splendide, ma merveilleuse Melinda ! complimente cette dernière. Encore un combat et tu remporteras le coeur de ce magnifique Voï qui t'attend dans les cachots ! Tu pourras enfin partir à la retraite après ça !
Pendant que les sous-fifres traînent la perdante, désormais hors-jeu, Melinda enlève son casque et esquisse un sourire fier avant de tournoyer son cimeterre. Ses cheveux sont attachés en queue de cheval et une grande mèche cache presque son oeil bleu. Gracieuse et musclée, elle lâche un sourire assuré.
- Merci, chère Fumya ! Je parviendrai à conquérir le coeur de ce magnifique chevalier ! assure-t-elle en levant son arme au plafond. Allez ! Qui veut lever l'épée contre moi ?

En constatant que Link avance vers elle, Melinda se calme et reste bouche bée. Fumya fixe le nouvel adversaire à partir de son trône, intriguée par sa démarche. Avec un regard sûr, Link sort son épée et la pointe en direction de Melinda pour la défier. Bien qu'il ait une lettre à lui remettre, il veut faire passer le combat avant. Soudainement, Melinda s'esclaffe de rire en croisant les bras.

- Mais regardez-moi cette petite Hylienne ! Planche à pain et si minuscule en plus ! Au lieu de vouloir de te battre, tu ferais mieux de faire la danse du ventre, tiens ! Tu veux vraiment te mesurer à moi ? Tu vas regretter... Je ne fais aucun cadeau ! s'exclame-t-elle en remettant son casque.
- Bien la nouvelle, laisse-moi t'expliquer les règles du jeu : si tu arrives à mettre à terre Melinda, la championne, tu seras la gagnante et tu remporteras le coeur d'un Voï, le deuxième lot ! explique Fumya en enroulant sa mèche rouge autour de son index.

Link approuve de la tête, prêt à tenter le défi. Ainsi, le combat commence. Melinda se précipite vers Link avant d'enchaîner une pluie de coups. La fausse Vaï la repousse avant de reculer. En remettant bien le voile sur sa bouche, l'épéiste pare l'attaque brutale de son adversaire. Il s'accroupit à moitié pour avoir plus d'aisance. Au dernier moment, il effectue un balayage grâce à ses jambes. Après avoir failli perdre l'équilibre, Melinda recule, épatée par la puissance de son adversaire. Rapidement, Link l'attaque avec rage. Les épées se frôlent à maintes reprises. Finalement, celle de Melinda s'envole dans les airs avant de tomber lamentablement dans le sable. Avec froideur, Link pointe son arme en direction de la gorge de la combattante. Figée, Melinda tremble, n'osant pas bouger de peur de sentir la lame toucher sa peau. Emerveillée, Fumya se lève après avoir sifflé. Elle acclame :

- Merveilleux ! Félicitations !
- Félicitations ? répète Melinda avec prétention. Cette gamine a eu seulement chaud aux fesses ! Ce n'est pas possible qu'elle gagne ! C'est moi la gagnante ! C'est moi qui ai mené tous les autres combats.
- Tout doux, Melinda ! Tu auras ton preux Voï si tu continues de battre les autres. Mais cette Vaï qui vient de remporter le deuxième lot, venue sûrement d'une contrée lointaine malgré la lune rouge, mérite amplement cet honneur.
Etonné par cette victoire plus que facile, Link ne répond pas.
- Toi, désigne Fumya, le regard posé sur la gardienne, emmène-la pour lui faire découvrir la récompense de la porte B.
Ainsi, la Gerudo approuve de la tête avant de s'incliner devant Link.
- Suivez-moi, lui annonce-t-elle.

Sans dire un mot, Link sort et jette la lettre devant Melinda. Il s'empresse de suivre la gardienne. En s'emparant de la lettre, la Gerudo le regarde partir, frustrée par sa défaite plus que cuisante. Tandis que Fumya baisse les yeux avec une profonde tristesse comme si un lourd secret l'étouffe. Emmené dans les cachots sombres au sous-sol, à l'abri des regards, Link regarde les alentours. Seule la lumière éclatante de la lune de sang traverse la fenêtre en barreau. Mais avec stupéfaction, il remarque que toutes les cellules sont vides.

- Où... sont-ils ? s'exclame-t-il en se retournant vers la Gerudo.
Mais avec effroi, il constate qu'elle n'a plus l'air d'être une simple gardienne. Les cheveux blonds mi-longs et les yeux verts, elle a tout l'air d'être une Yiga. Hormis ses franges qui tombent sur son front, elle ressemble un peu à Zelda.
- Dommage pour toi. Le Voï est à notre repaire ! Tu viendras avec nous ! Nous avons tant besoin de sang neuf pour... l'achèvement de Ganon ! hurle froidement la Yiga en sortant sa petite serpe en fer.
Aussitôt, Link recule, sur ses gardes.
- Alors c'était donc une comédie... Pathétique ! déclare-t-il avec froideur.

Étonnée d'entendre une voix aussi masculine, la Yiga écarquille les yeux avec un air ahuri. Ne supportant plus de masquer son apparence, Link déchire d'un coup sec le voile de son visage et dégaine sauvagement son épée. Sans penser aux conséquences, il l'attaque hâtivement. Apeurée par la force de l'Hylien, la Yiga a du mal à parer bien comme il faut ses attaques. Alors qu'elle lâche sa serpe, elle tombe sur ses jambes en croisant ses bras, prise d'une soudaine angoisse.

- N... non ! Ne me tuez pas ! Je... je ne veux pas mourir ! supplie-t-elle avec les larmes aux yeux. Ne me retirez pas la vie !
Malgré la pitié, loin d'être insensible, Link pointe tout de même son arme dans sa direction en tentant de rester impassible.
- Alors si tu tiens à ta vie, conduis-moi à ton repaire sans plus tarder ! Si tu le fais, je te laisserai sûrement la vie sauve ! menace froidement ce dernier.
Contrainte d'accepter, la Yiga baisse la tête.

Chapitre 28 : Le repaire des Yigas   up

Désormais vêtu de sa tunique légendaire après de nombreuses explications, Link, Luna et Jehd sont guidés par les indications de la prisonnière. Au fond d'un canyon au sud-ouest du désert, la Yiga, sous le poids de la menace, les conduit. Bien que la chaleur étouffe grandement Link et Luna, ils parviennent à lutter. Soudainement, l'Hylien s'arrête après avoir remarqué une silhouette allongée par terre un peu plus loin : un grand Piaf aux plumes blanches, armé d'un arc. Son aile droite est en sang.

- Oh non..., murmure-t-il avant d'accourir dans sa direction.
- Alors ça venait de là cette odeur de poulet grillé que j'ai senti... ? s'étonne Luna, sous le choc.
- Réveillez-vous ! supplie Link en soulevant le Piaf dans ses bras.
Jehd examine le pouls de l'inconscient avant de lui faire boire de l'eau. Peu à peu, le Piaf est pris d'une quinte de toux et ouvre lentement ses yeux bleus.
- Où... où suis-je ? demande-t-il d'une voix très affaiblie. Suis-je... mort ?
- Non. Vous êtes dans le grand canyon du désert de Gerudo... Oh bon sang mais que vous est-il arrivé ? s'inquiète Link, n'arrivant plus à conserver son calme.
- Je voulais sauver ma fille et les autres prisonniers dans le repaire des Yigas... Mais ils nous ont tendu un traquenard... Mon ami a été grièvement blessé tandis que moi, dans un dernier espoir, je me suis enfui par les airs... Mais j'ai reçu une flèche sur mon aile droite... Je... je n'ai rien pu faire...
La Yiga reste à l'écart, loin d'être indifférente par le récit du Piaf.
- Votre ami ? Vous voulez parler de Pawel ? Mais alors vous êtes Teba ! devine aussitôt Link.
- Vous le connaissez ? Bien... s'il vous plaît, si vous vous rendez au repaire, sauvez ma fille, tous ceux qui sont à l'intérieur et cet Hylien... C'est grâce à lui que... je suis vivant et qu'Ordiala a été protégé..., implore Teba, le souffle court. Je vous en... conjure...

Sur ses paroles, il perd connaissance, n'arrivant plus à lutter contre la douleur qui le fait plonger dans une mort lente.
- Ré... réveillez-vous ! panique Link en le secouant légèrement.
Mais hélas, le Piaf ne répond plus.
- Il n'est pas encore trop tard... Je vais m'occuper de lui en lieu sûr, se propose Jehd d'un ton sérieux. Vous, allez au repaire.
En reprenant son calme, Link approuve la décision de ce dernier. Avec plus de froideur, il maintient son épée en direction de la Yiga.
- Conduis-nous sans plus tarder à l'entrée du repaire. Tout de suite, ordonne-t-il froidement.
La Yiga tique et se dirige vers une grande paroi rocheuse. Le symbole, comme sur tous les murs et les rochers du désert, est même gravé à cet endroit. Derrière son dos, Link pointe son épée pour insister.
- Il y a un socle derrière cette plaque rocheuse à côté de la marque rouge..., annonce-t-elle, peu à l'aise à cause de l'arme qui la cible.
Avec perplexité, Luna utilise son flair.
- Elle a raison : j'arrive à sentir une odeur assez forte. Notamment l'odeur de la nourriture. Ce lieu est apparemment habité, confirme la louve avec assurance.

Confiant, Link hoche de la tête. Ainsi, Luna suit le procédé de la Yiga en enlevant la plaque. Elle remarque un renfoncement. Sans tarder, elle le pousse vers l'avant. Instantanément, la paroi tremble. Elle se sépare finalement en deux, dévoilant ainsi des escaliers en pierre qui mènent jusqu'en bas.

- Ici se trouve l'entrée du cachot des prisonniers... Ce n'est pas la seule entrée mais vous aurez plus de chance de passer inaperçus par-là. Mais par pitié, détachez-moi ou sinon ils vont me tuer pour ma trahison ! leur supplie la Yiga d'un ton affolé. Peu importe ce qui se passera, tout ce que je veux, c'est de continuer de vivre et de servir ma souveraine Kurna.
- Kurna... ? répète Luna, soudainement intriguée. Tu as bien dit... Kurna ?
- Oui. Elle a réussi à faire chanter la reine Fumya de livrer une personne de son peuple par semaine en échange de la protection de cette terre. Loin de la fureur incontrôlable de Ganon...
La gueule grande ouverte, le regard de Luna s'horrifie.
- Donc, elle est en vie..., constate Link avec un regard assombri.
Peu importe le temps qui a passé, il garde toujours une incroyable rancoeur envers celle qui s'en était pris à lui et à sa famille.
- Maintenant, laissez-moi partir, s'il vous plaît ! leur supplie désespérément la Yiga.

Avec hésitation, Link la regarde avec amertume. Il sait bien qu'il n'a plus le droit d'être naïf. Oui, la tuer est la meilleure solution qui soit. Mais alors qu'il s'apprête à élever l'épée pour l'achever en trahissant lâchement sa promesse, il s'arrête net au dernier moment. Mal à l'aise en voyant Zelda en elle à cause de sa ressemblance frappante avec cette dernière, il coupe finalement la corde qui a entravé la captive.

- Allez, va-t'en et ne croise plus jamais notre route. La prochaine fois, je n'hésiterai plus.
Aussitôt, après avoir regardé une dernière fois Link avec étonnement, la Yiga fuit dans la direction opposée.
- J'avais la conviction que tu allais la tuer... Tu es conscient que tu as peut-être commis une erreur fatale... Si tu la libères, qui te dit qu'elle ne va pas te poignarder dans le dos ? lui demande froidement Luna.
- Je suis désolé mais je ne ressentais pas la force de la tuer..., lui répond Link avec franchise.
Peu à peu, Luna tente de se calmer en tentant de comprendre le côté sensible de son allié. Souhaitant couper court à cette conversation, Link descend. Avec appréhension, elle le suit, armée de sa dague.

* * *

Après avoir descendu les escaliers en pierre, Link et Luna parcourent un long couloir sombre et lugubre. Quelques ossements d'animaux morts se trouvent au sol. Seuls le courant d'air et les gouttes d'eau résonnent.
Le symbole des Yigas, peint avec du sang séché, est dessiné à chaque coin.
- Quel endroit hostile... Vivement qu'on fiche le camp d'ici..., déclare Link en tenant une lanterne.
- Oui... je ne pensais pas que ce "peuple" serait aussi austère..., lui répond Luna en réprimant de frisson.
Soudainement, Link s'arrête en distinguant un grand rideau rouge au loin. En sentant le courant d'air toucher son visage, il le soulève avant d'entrer. Aussitôt, son regard s'horrifie. Aussi pâle qu'un mort, il n'ose pas avancer. Luna le rejoint également. Avec épouvante, elle pose ses pattes sur sa gueule pour se retenir d'hurler. Dans la salle, de nombreux cercueils sont suspendus contre le mur et des haches en sang sont rangées contre les murs. Au sol, quelques squelettes sont démembrés et enchaînés.

- Bo... bon sang..., murmure, Link, de plus en plus effrayé.
Luna utilise son flair, attirée par une forte odeur de viande. En ouvrant un grand couvercle, elle ferme les yeux, la tête baissée.
- Il y a également un tas de viande dans le panier..., annonce-t-elle, la mort dans l'âme. Mais ce n'est pas de la viande d'animaux... C'est... de la viande hylienne et gerudo...
Terrifié par cette révélation, Link se tourne vers son amie, n'osant pas croire à l'horreur qu'il vient d'entendre.
- De la viande... hylienne et gerudo, dis-tu ? Est-ce que ça veut dire que les Yigas sont... cannibales ?
- Non... ces viandes... sont destinées à Ganon... La réincarnation de Ganon, sous le nom de Vadel, est obligé de manger de la viande "humaine" pour satisfaire l'appétit de l'âme de l'entité, lui explique Luna, les larmes aux yeux. Il n'a pas eu le choix de commettre de telles atrocités pour survivre... Oui... il n'a pas eu le choix ! Ce n'est pas de faute...
- Lu... Luna ? l'interpelle nerveusement Link, stupéfait de constater que la louve en sait plus.

Hâtivement, après avoir entendu un bruit au loin, elle accourt. Aussitôt, Link s'apprête à la suivre. Hélas, alors que son amie s'éloigne de plus en plus vite, il tombe maladroitement sur ses jambes. Des larmes de dégoût surgissent dans ses yeux à moitié fermés comme s'il est pris d'un malaise. La main contre sa bouche pour ne pas vomir, il se lève. Ses jambes en coton traînent avec lourdeur jusqu'à la sortie de cette salle cafardeuse. Dans le long couloir, ses bruits de pas clapotent dans l'eau qui s'écoule au sol. En parcourant un grand labyrinthe de cellules, Link scrute les alentours. Hélas, il ne voit que des tristes "restes" comme des os. L'odeur de la mort empeste et le sang décore les barreaux. Ayant de plus en plus de mal à bien respirer, il continue de marcher. Soudainement, il lâche un cri d'effroi : au bout du couloir, Zelda se tient debout. Vêtue de sa tenue habituelle, l'oeil toujours aussi rouge, elle le regarde avec une tristesse accablante.

- Zel... Zelda..., reconnaît Link malgré sa confusion.
Avec un sourire attendrissant, Zelda s'approche hâtivement dans sa direction. Loin d'être dupe, l'Hylien sort tout de même son épée et la pointe vers elle. Interloquée, la jeune femme s'arrête en croisant ses mains.
- Link ? Qu'est-ce que tu fais... ? C'est moi ! Zelda ! Tu ne me reconnais plus ? lui demande-t-elle avec épouvante.
- Tu n'es qu'une Yiga... La véritable Zelda ne peut pas être ici ! rejette Link avec mépris. Cesse donc cette maudite comédie !
Apeurée par la hausse du ton de l'épéiste, Zelda pose les deux mains sur sa bouche en reculant.
- Link... slors toi aussi tu me vois comme un monstre... ? Lorsque tu m'as pris dans tes bras et pleuré pour moi, ce soir-là, c'était un mensonge ?

Horrifié, Link se remémore ce moment qu'il a partagé seul avec Zelda dans la tristesse. Le regard poignant, il la fixe, devenu plus hésitant. Peu à peu, un étrange sentiment éclate en lui et de nombreuses pensées le tourmentent comme l'envie de sentir le corps de la princesse contre lui. Les pupilles vides comme s'il est hypnotisé sous l'effet de ce monstrueux désir, il reste sur place et baisse son épée.

- C'est... c'est vraiment moi, Link. J'ai réussi à m'échapper de Vadel... Je... j'ai eu si peur... Mais maintenant que je t'ai retrouvé, nous pourrons passer les derniers jours tous les deux, loin de cette destinée qui nous torture. Je veux... passer mes derniers jours à tes côtés.

Sensuellement, Zelda s'approche, les yeux remplis de larmes. Chaque pas augmente le désir inhabituel de l'Hylien, immobile comme un pantin aux fils cassés. Une fois près de lui, elle s'apprête à poser ses lèvres contre les siennes pour l'embrasser avec tendresse. Alors que Link, plaqué contre le mur, est sur le point de recevoir ce baiser, ses yeux s'écarquillent après avoir senti un violent pincement au coeur qui le fait sortir de cette envie bestiale. Au dernier moment, sa main gauche la repousse. Sur ses gardes, devenu enfin lucide, il fixe avec une profonde haine l'imposteur. Cette fois-ci, Zelda montre un regard plus froid.

- Bien essayé, mais tes pouvoirs de séduction ne marchent plus sur moi. Mon coeur ne se laisse pas tromper, lui révèle Link d'un ton sec.
- Je vois que tu es plus fort que je l'aurais pensé. Quel dommage... Je m'étais doutée que ça ne serait pas facile de tromper le porteur du courage... Parce que oui, sache que le courage résonne toujours en toi ! lui déclare la fausse Zelda en tendant un monocle de couleur violet.

À travers, Link parvient à enfin découvrir la véritable apparence de l'imposteur : Kurna. Cette fois-ci, elle n'est plus habillée comme une simple Yiga. Elle porte une longue robe tunique rouge foncé légèrement décolletée à épaules nues ainsi qu'un pantalon noir serré. Ses jambes sont visibles et de grandes bottes noires les allongent. Ses cheveux sont toujours relâchés.

- Toi... Kurna ! fulmine Link, de plus en plus agressif à son égard.
Les bras croisés, Kurna lui sourit froidement.
- En tout cas, j'espère que ta famille s'est bien remise du deuil !
- Sois maudite !
- Ne me regarde pas ainsi ! Malgré ta beauté, je n'ai pas le choix de te tuer si je veux que mon voeu se réalise ! Après tout, les autres ont été incapables de le faire !
- Et le monde d'Hyrule et ton peuple, qu'en fais-tu ? Et Leyna dans tout cela ? Tu ne comprends pas que si toi et tes semblables continuez à rejoindre sa cause, vous condamnez tout le monde à la mort en croyant à Ganon ?
- Mais je m'en moque complètement de Ganon et de ce monde pathétique. Tout ce que je veux, c'est le coeur de mon Maître. Tout comme toi, tu désires le coeur de celle dont j'ai pris l'apparence il y a peu de temps. Après tout, le monocle a le pouvoir de montrer la vérité : une véritable apparence et surtout, la pensée la plus forte, lui explique calmement Kurna. Et puis, je dois t'avouer que votre adorable câlin sous ce ciel était assez touchant. Même un monstre pourrait en avoir les larmes aux yeux. Même moi, je me suis mise à jalouser la princesse pour cette affection.
Loin d'être indifférent, Link recule, prêt à combattre.
- Alors par amour pour lui, tu es prête à tuer ta véritable famille ! Leyna est prête à te pardonner si tu reviens à elle ! Tu es sa soeur !
- Leyna n'est que du passé. Je l'ai bien compris. Mais pour lui, je suis prête à faire n'importe quoi. Même s'il réalise son rêve, je briserai son souhait pour m'accaparer de lui ! Qu'en penses-tu ? C'est émotionnel comme histoire d'amour, n'est-ce pas ? lui demande Kurna avec un sourire hystérique. Malheureusement, "la viande" ne pousse pas toute seule. Mais bon, ne t'en fais pas, porteur du courage : ta patience ne va pas s'éterniser. Je ne vais pas te laisser vivre plus longtemps ! Tout comme c'est le cas pour ton cher ami qui agonise en ce moment dans une cellule.

Subitement, Kurna dégaine sa serpe qui prend aussitôt feu. En riant avec froideur, elle agite son arme afin de diriger les flammes vers son adversaire. Link esquive aussitôt. En remarquant le morceau d'un lustre en hauteur, il s'empare de son grappin pour se laisser soulever avant de tomber juste derrière Kurna, qui a été persuadée d'avoir réussi à le toucher. Alors qu'il s'apprête à la poignarder, la jeune femme se retourne et pare l'attaque. Ne sous-estimant pas la coriacité de son adversaire, Link enchaîne les coups. Brutalement, après avoir croisé le fer, les deux combattants reculent.

- Link ! s'exclame Luna en arrivant sur les lieux.
- Luna !
Sur ses gardes, la louve, le bras taché de sang, couvre Link et grogne agressivement en direction de Kurna. Surprise, la Yiga baisse la dague, la bouche grande ouverte. De plus en plus perturbée, ses yeux s'écarquillent.
- Ces... ces yeux et cette voix... Impo... impossible...
Paniquée, elle s'empare du monocle avant de le diriger droit sur la concernée. Horrifiée, elle ne voit pas qu'une simple louve mais bien plus que cela : une jeune femme hylienne. Les longs cheveux bruns et les yeux émeraude, elle la regarde avec hargne. Épouvantée, Kurna laisse tomber le monocle pour revoir la louve de ses propres yeux.
- C'est... c'est impossible... Cérès ! Tu... tu devrais être morte ! hurle Kurna en constatant l'apparence de cette dernière. Pourquoi es-tu en vie ?
Link regarde la louve avec interrogation, intrigué par ce prénom.
- Cérès ? murmure-t-il.

Sans aucune réponse, Luna se précipite pour l'attaquer. Prise au dépourvu, Kurna élance sa serpe. Les deux adversaires se battent bestialement. Malgré le feu, Luna ne flanche pas et continue de l'affronter.
En retenant son adversaire grâce à sa dague inflammable, la louve se crispe.

- Link ! Enfuis-toi vite ! Pawel se trouve dans l'aile ouest avec les autres prisonniers !
- Ne sois pas stupide ! Je... je ne peux pas t'abandonner ! objecte Link avec évidence.
- Mais tu ne peux pas abandonner Pawel et les autres ! Va ! Je la retiens ! s'exclame Luna avec sévérité.

Malgré l'hésitation, Link serre nerveusement le pommeau de son épée. En regardant une dernière fois Luna, il se hâte de traverser le long couloir, contraint de s'enfuir. Aussitôt, Kurna enflamme le bout du couloir afin d'empêcher la louve de s'enfuir. Fou d'inquiétude, Link se retourne. Pourtant, bien qu'il veuille retourner l'aider en trouvant un moyen de la rejoindre, il sait qu'il n'a pas le choix. Le temps lui est compté. Précipitamment, il ouvre la porte, prêt à entrer dans l'aile ouest à la recherche de Pawel. Dans le couloir, de nombreux cadavres de Yiga, inertes et en sang, gisent au sol. Sûrement tués par Luna. Link fait abstraction et se précipite vers une grande porte. En l'ouvrant, il entre dans un nouveau couloir rempli de cellules. Quelques Gerudos, Piafs, et voyageurs hyliens ainsi qu'un Goron sont enfermés à l'intérieur d'une pièce, derrière les barreaux. Sans hésitation, Link s'approche d'eux.

- S'il vous plaît ! Sauvez-nous ! supplie une jeune Gerudo en larmes.
Il tente d'ouvrir la cellule. Hélas, il n'a pas les clés. Avec affolement, il s'empare de son grappin afin de tirer le ressort à l'intérieur, en bas de la serrure pour trafiquer le poignet. Finalement, la porte s'ouvre. Alors que la petite foule sort précipitamment, Link scrute hâtivement les alentours afin de chercher Pawel dans le couloir. Une toute petite Piaf aux plumes violettes, les yeux noisette, remarque la détresse du "sauveur".

- Tu cherches quelqu'un, grand monsieur aux oreilles pointues ? lui demande-t-elle.
- Ah... oui... Je cherche un capitaine... Est-ce que tu sais où il se trouve ?
- Oh ! Est-ce qu'il a des cheveux verts et les mêmes oreilles que toi ? enchérit la petite Piaf, la tête penchée sur la droite.
- Oui ! C'est bien lui ! Tu sais où il se trouve ?
La Piaf se dirige en sautillant au fond du couloir avant de tendre son aile.
- Il est là-dedans... Il dort.

La gorge nouée, Link avance en sentant l'anxiété le saisir. Arrivé devant la cellule, il s'arrête avec effroi. Enchaîné contre le mur, Pawel a la tête penchée à l'avant. Inerte, le capitaine a les yeux fermés. Son armure est toute rouillée et couverte de sang et de poussière. La peur bien plus haute que le soulagement de l'avoir retrouvé après tout ce temps, Link est profondément choqué. En lâchant un léger cri de panique, il se précipite vers la cellule.

- Pa... Pawel ! s'exclame-t-il en empoignant les barreaux.
Affolé, il s'empare du grappin et tente d'ouvrir la porte à nouveau. Les mains tremblantes, il éprouve de nombreuses difficultés à débloquer le ressort. Dès que la porte s'ouvre, l'élu déchu accourt vers son maître. D'un coup d'épée, il brise avec facilité les vieilles chaînes avant de mieux plaquer le capitaine contre le mur.
- Pawel ! Réveillez-vous ! Pawel ! lui supplie Link d'une voix déchirée en le secouant.
Malheureusement, la tête de Pawel se penche vers la droite. Le regard épouvanté, Link tremble et tente de le réveiller.
- Pa... Pawel... Ouvrez... ouvre les yeux ! Je t'en prie ! s'exclame-t-il en commençant à perdre ses moyens. Tu ne peux pas me faire ça alors que je t'ai enfin retrouvé ! Pawel ! Je t'en supplie ! Tu n'as pas le droit de m'abandonner ainsi que Leyna !

La peine au coeur, la petite Piaf siffle tristement et s'approche de Link, complètement submergé par le désespoir. Les larmes aux yeux en constatant que Pawel est entre la vie et la mort, il se blottit contre lui en tremblant. Alors qu'il perd tout espoir, il sent une main lui toucher l'épaule. En se retournant, la plus jeune Gerudo du groupe, aux cheveux roux attachés en natte sur le côté, le rassure et s'agenouille auprès de Pawel avant de sortir une feuille de menthe. Elle tient la tête du capitaine en arrière pour la poser sur ses lèvres violettes. Une fois ceci fait, la Gerudo recule. Peu à peu, un faible souffle sort de la bouche de Pawel comme s'il se remet à respirer grâce à l'odeur forte de la menthe qui a soulagé instantanément ses poumons.

- Voilà... Il devrait tenir pendant un bon moment encore, annonce la jeune Gerudo avec bienveillance.
Le corps encore tremblant, Link soupire de soulagement après avoir senti une épouvantable douleur. L'idée d'avoir failli perdre celui qui a été comme un véritable père pour lui l'a terrifié. Doucement, il le soulève afin de l'aider à marcher. Sous le regard des autres prisonniers, Link tente de reprendre son assurance et déclare :
- Maintenant suivez-moi : nous sortirons d'ici quoi qu'il arrive ! Ne laissons pas les Yigas détruire notre vie plus longtemps !
- Et surtout : n'hésitons pas à leur faire payer ! poursuit la jeune Gerudo en s'emparant de son petit javelot.

En sentant l'espoir le saisir malgré la peur pour Pawel et Luna, Link lui rend un léger sourire. Ainsi, le grand groupe sort finalement du couloir. Alors que les Gerudos sont à l'avant, Link couvre l'arrière en tenant toujours Pawel, prêt à le protéger contre n'importe quel danger. Mais au loin, deux Yigas accourent.

- Les... les "viandes" saignantes s'échappent ! La gamelle de Ganon s'enfuit ! Alerte rouge ! s'exclame l'un des deux pour donner l'alerte.
Link tique et sort son épée, de nouveau contraint de se battre. Précipitamment, l'unique Goron du groupe avance et tient Pawel contre lui pendant que l'épéiste s'engage dans un nouveau combat.
- Mais en plus il est rapide ! constate le premier Yiga d'un ton ahuri.
- Eh... tu crois que nous allons mourir chez nous ? lui demande bêtement le deuxième.
- Espèce d'imbécile ! Ne parle pas de mourir. Nous sommes encore beaux et jeunes pour mourir !
- Surtout jeunes parce que beaux...
- Tu t'es regardé dans le miroir pour me dire ça ?
- Non vu que je porte un masque...

Peu distrait par leur conversation qui devient de plus en plus ridicule, Link en profite pour les attaquer. Aussitôt, les deux Yigas hurlent de peur avant de se téléporter. Mais alors que Link s'apprête à ranger son épée, encore stupéfait par la lâcheté affligeante de ses deux ennemis, un grand Yiga, de deux mètres de haut armé d'une grande hache à viande, se dirige vers lui en traînant des pieds. Impressionné mais effrayé par la musculature de son nouvel adversaire masqué, l'épéiste hylien tique en position médiane. Aussitôt, le Yiga colosse élance sa hache pour essayer de le trancher. En esquivant au dernier moment, Link est sur le point de perdre l'équilibre. Pour mieux se reprendre, il plaque son dos contre le mur. Après avoir inspiré un bon coup, il hurle en agitant son épée dans la direction de son ennemi. Hélas, le rapport de force est plus qu'énorme. Sans la Triforce du Courage, il sait qu'il ne peut pas le battre. Frustré par son impuissance en regardant Pawel, tenu par le Goron, Link concentre sa force dans ses mains. En prenant le risque, il recule pour charger. Avec rapidité, il plante l'épée dans le coeur de son ennemi. La tête levée, le Yiga gémit de douleur. Sombrement, le vainqueur retire l'épée avant de laisser son adversaire s'écrouler dans sa flaque de sang. Essoufflé, Link se tient à peine sur ses deux jambes. Hélas, les autres Yigas rappliquent. Désespérément, Link recule en restant sur ses gardes.

- Partez devant ! décrète-t-il aux prisonniers.
- Mais on ne peut pas vous laisser seul ici, réplique le Goron.

Link sent le stress le gagner. Il sait bien que seul contre une dizaine d'adversaires, c'est du suicide. Alors que les Yigas avancent dangereusement, l'épéiste conserve l'espoir avec beaucoup de mal. Soudainement, la porte au bout du couloir s'ouvre comme un coup de vent. Avec surprise, un groupe de Gerudos, armées jusqu'aux dents, entre. Les guerrières se sont infiltrées dans le repaire grâce à une autre entrée secrète. Melinda, en tête, avance.

- Me... Melinda ! s'exclame la jeune Gerudo.
- Kelia ! Enfuis-toi ! Vite ! Laisse-nous nous en occuper ! lui ordonne Melinda avant de se tourner vers son unité. Attaquez !
Comme des furies, les Gerudos combattent sauvagement les Yigas. Ainsi, les prisonniers s'enfuient par l'autre entrée. Link s'apprête à porter Pawel, mais le Goron lui déclare :
- Non ! C'est moi qui vais le porter ! Je vais le faire sortir d'ici, ne t'en fais pas. Quant à toi, fais ce que tu as à faire. Je sais que quelque chose te tracasse encore, p'tit gars.
Reconnaissant, Link lui rend un léger sourire.
- Je vous le confie. Merci.
Rapidement, il se dirige vers l'aile est : là où Luna se trouve.

* * *

Le couloir a subi les dégâts des flammes. Arrivé enfin sur les lieux, Link constate le carnage : le combat entre Kurna et la louve a été sûrement éprouvant. Soudainement, il ramasse le monocle de vérité. Il fixe l'objet, de plus en plus submergé par l'inquiétude.
- Lu... Luna ! Luna ! appelle-t-il en scrutant les alentours avec affolement.
Peu à peu, il entend des couinements de douleur. En les reconnaissant, il accourt avant d'entrer dans une cellule endommagée. Assise dans une flaque de sang, Luna est affaiblie, le bras éraflé.
- Oh Luna..., murmure tristement Link en s'agenouillant auprès d'elle.
Tout doucement, il lui caresse la tête.
- Link... Tu... tu es revenu pour moi... ? lui demande faiblement la louve, la respiration haletante. Tu n'étais pas obligé de prendre un tel risque... Après tout, je n'ai pas pu empêcher Kurna de s'enfuir... Maintenant que je connais l'horrible vérité, tu peux me laisser mourir ici... Si les prisonniers me voient, ils auront encore peur de moi comme tout à l'heure quand j'avais essayé de les sauver...
- Ne dis pas de bêtises ! Je ne pouvais pas te laisser seule ici... Les prisonniers, y compris Pawel, sont à présent libérés... Maintenant, c'est notre tour de sortir d'ici car nous devons continuer à vivre... Tu dois tenir bon, Luna, lui déclare Link avec mélancolie.

Les larmes aux yeux, Luna se blottit contre lui, réconfortée par ces paroles. Ainsi, pendant que le repaire se transforme en un bain de sang, Link et les rescapés s'enfuient le plus loin possible de ces lieux.

Chapitre 29 : La véritable histoire de la réincarnation de Ganon   up

Plusieurs heures plus tard, à la demeure de Melinda située au sud-est de la forteresse Gerudo, Link et Luna sont assis dans le salon. Encore perturbés par les récents évènements sinistres, ils tentent de retrouver leur calme. Pour les autres rescapés, ils se trouvent en ce moment même à l'unique auberge, ne pouvant malheureusement pas revenir sur leur terre natale à cause de la barrière enchanteresse des trois esprits protecteurs. Quant à Pawel, il est toujours plongé dans l'inconscience. Mais sa vie n'est plus en danger. Ses blessures ont été traitées, l'éloignant ainsi de la mort. Jehd et la Yiga, que Link a épargnés auparavant, sont également présents dans la pièce. Autour d'une table dans une salle à manger terne et peu remplie, mur et sol pierreux, le groupe est plongé dans une longue discussion. Les Yigas, le repaire, les prisonnières et la trahison de la Reine Gerudo. Avec avidité, Melinda a écouté son récit. Les yeux fermés, abasourdie, elle lâche :

- Je comprends mieux...Donc c'est bel et bien vrai... La Reine Fumya s'est ralliée à la cause des Yigas... C'est de sa faute si Kelia et les autres ont été enlevés.
- Je suis désolée, Melinda... Lorsque j'ai appris l'existence récente du tournoi pour gagner le coeur de ce beau Voï, j'ai voulu participer..., s'excuse Kelia d'une voix tremblante comme si elle a peur de marcher sur des oeufs.
- Et pourtant, je t'avais interdit d'y participer avant mon départ, rappelle Melinda d'un ton autoritaire, déçue par le comportement de sa petite soeur. Lorsque j'ai appris que tu t'étais inscrite à ce concours, j'étais obligée de reprendre les armes dès mon retour. Je me disais qu'en remportant le tournoi, je t'aurais sûrement retrouvée dans ce repaire. Ce n'est pas parce que tu viens d'avoir la majorité que tu peux te permettre de décider tout et n'importe quoi... Une Vaï ne doit jamais se laisser soumettre et doit toujours écouter son coeur et la responsabilité. En tant que grande soeur, c'est à moi de t'enseigner toutes nos coutumes. Et non aux Voïs... Et encore moins ces Yigas répugnants...

Comprenant l'attitude de la Gerudo, Kelia baisse les yeux. Elle est consciente que sa naïveté a failli la conduire vigoureusement sur le chemin de la mort.
- Je regrette mon geste... Je peux comprendre que tu sois fâchée contre moi...
La pression retombée, Melinda pose une main sur sa côte droite, prise d'une soudaine crampe, et soupire avant de corriger :
- Je ne suis pas fâchée. J'étais folle d'inquiétude... Mais le plus important, c'est que nous ayons réussi à trouver leur maudit repaire... N'est-ce pas, Vicky ?
En se tournant vers la Yiga, la Gerudo la darde amèrement du regard.
- Je... je n'ai plus rien à voir avec les Yigas, proteste Vicky, honteuse de céder à la panique aussi lâchement.
- Donc, c'est grâce à elle que vous avez retrouvé le repaire, constate calmement Link en croisant les bras, encore engourdis par la fatigue.
- Oui, répond Melinda en dévisageant l'intéressé. Apparemment, elle s'est inquiétée pour toi. Lorsque j'ai rassemblé l'armée, elle est venue à notre rencontre et nous a guidés. Mais même si cette action est bonne, les erreurs ne s'effacent pas : un crime reste un crime. Le fait qu'elle se soit rachetée en trahissant les siens ne ramènera pas les morts. Oh que non... Il faut qu'elle meure pour se faire pardonner. Tout comme pour la Reine Fumya...
- Oh non ! Je vous en supplie ! s'affole Vicky en reculant, les mains croisées pour prier. Tout mais pas ça ! Si je suis rentrée chez les Yigas, c'était pour venger la mort de mes grands-parents, tués lors de la destruction du village de Fenlyr !

Melinda baisse les yeux, tandis que Luna baisse sinistrement la tête.
- Fenlyr ? répète Link, les sourcils un peu relevés. Mais d'après ce qu'on m'a raconté, ce village n'existe plus depuis vingt ans.
- Oui c'est exact, affirme Jehd en ajustant correctement ses lunettes. C'était un paisible village qui se situait au Mont Hebra. Peu de monde se rendait à Fenlyr à cause de la neige qui tombait sans cesse. Mais les villageois étaient heureux et vivaient comme un clan. Mais d'après ce que m'a raconté mon défunt père, qui était le bibliothécaire au château, le Roi d'Hyrule a eu vent qu'un être aux pouvoirs diaboliques y résidait. Le Roi n'a pas préféré prendre le moindre risque et a commencé à s'intéresser de plus en plus à ce village si discret. Et il s'est avéré que ses soupçons étaient vrais... : un enfant a bel et bien hérité des pouvoirs de l'infâme Ganon... Aujourd'hui, il est devenu un adulte.
Horrifié, Link sent son coeur palpiter avec rancoeur et peur.
- Le comte Vadel..., marmonne-t-il.
- Comte Vadel... ? Lui ? Un comte ? s'étonne Melinda en se grattant le menton mince.
- Oui, c'est bien cela... Notre chef... Enfin pour être plus exact, un des Yigas de notre clan était un comte. Et puis, Vadel a pris sa place..., confirme Vicky dans l'espoir de gagner sincèrement la confiance du groupe.
- Sûrement pour s'approcher de la famille royale... Il devait avoir un titre réputé pour demander la main de la Princesse..., enchaîne Link en tentant de faire taire ses angoisses les plus ancrées. Jehd, si vous en savez plus, dites-le-moi. Je... je veux le savoir... Fenlyr est un village qui m'a toujours intrigué depuis le début.

Luna se crispe, les oreilles baissées et les yeux plissés comme si elle veut se réfugier dans une bulle pour se couper du monde. Vicky se tourne vers le savant, de plus en plus intriguée. Jehd approuve avant de commencer :

- La réincarnation de Ganon, dès son plus jeune âge, a laissé ses pouvoirs se manifester. Il a tué de nombreux animaux et peu à peu, certains villageois dans le plus grand des secrets. Il se nourrissait de leur viande... Bien sûr, les touristes étaient au courant de ces étranges rumeurs et s'étaient mis à partager leurs connaissances dans les auberges. C'était une effroyable histoire qui a traversé la contrée d'Hyrule... Beaucoup de personnes l'ont nommé la réincarnation de Ganon : l'être diabolique qui désire la destruction et la mort sur Hyrule. Donc, le Roi n'a pas hésité une seule seconde : il a envoyé ses deux plus grands chevaliers pour l'abattre. Mais hélas...
Jehd reprend son souffle en fixant les flammes dansantes de la cheminée.
- La réincarnation de Ganon, malgré son jeune âge, était déjà beaucoup trop puissante et a réussi à se défendre sans aucune difficulté. Avant de s'enfuir, il a créé de nombreuses vagues de flammes, provoquant ainsi la mort des villageois. Assoiffé de sang, il continue de tuer des innocents dans l'ombre pour satisfaire l'appétit de "l'esprit" qui l'accompagne. C'est un monstre. Un diable.
- C'est faux ! Vous mentez ! hurle tout à coup Luna en se levant.

Les larmes aux yeux, elle serre les crocs, prise par une soudaine envie de grogner. Effarés par la perte de sang-froid de la louve blanche, tous se tournent vers elle.
- Luna..., s'étonne Link, stupéfait par la réaction émotionnelle aussi soudaine de son amie.
- Est-ce que par hasard... vous... vous avez vécu à Fenlyr ? déduit Vicky. Seriez-vous l'une des rares survivantes ?
- Je ne suis pas une survivante ! Vadel... Il... il n'a jamais voulu tuer qui que ce soit... C'est lui qui m'a protégée lorsque ce capitaine a voulu nous tuer ! Il n'a jamais mangé les êtres humains par plaisir et surtout, il n'a jamais été un monstre ! Ce sont vos histoires et... moi, qui l'avons fait devenir comme ça ! s'exclame Luna, la voix poussée dans ses sanglots.

N'arrivant plus à refouler ses larmes, la louve s'enfuit précipitamment. Bouleversé, un affreux doute envahit Link. En repensant à la conversation entre elle et Kurna, le passé de Luna devient de plus en plus clair malgré sa noirceur. Elle et Vadel étaient... proches ? La gorge nouée, il reste pétrifié comme une statue d'argile.

- Cette louve... Elle est liée avec ce Vadel ? s'étonne Melinda, les yeux grand ouverts.
Link ne répond pas et serre les poings, ne sachant plus quoi penser.
- Melinda... Nous ferions mieux de rassembler notre peuple pour expliquer toute la situation, suggère sagement Kelia. Nous ne pouvons plus laisser les nôtres dans l'ombre... Nous devons contrer la Reine Fumya qui a été obligée de commettre une telle trahison...
- Oui..., approuve Melinda avant de se tourner vers Link. En tout cas, le Voï... Hum... Link.
- Oui ?
En lui adressant un sourire sincère, la Gerudo incline de la tête.
- Merci de nous avoir sauvés... Et toi aussi, le Voï à lunettes et... Vicky.
Timidement, Jehd baisse les yeux, tandis que Vicky esquisse un sourire attristé.
- Allez viens Kelia..., annonce Melinda avant de lever.

Kelia la suit malgré la peur de la suite des événements. Puis, la petite Piaf rose entre dans la salle et se dirige vers Jehd en sautillant.
- Monsieur ! Quand est-ce que papa se réveillera ? demande-t-elle. Il ronfle de plus en plus fort !
Amusé par l'innocence de la jeune enfant aux plumes, Jehd lui sourit avec bienveillance.
- Oh mais ça veut dire qu'il va déjà mieux. Il ne va pas tarder à se réveiller.
Soulagée, la petite Piaf sourit en secouant sa tête attendrissante.
- Merci d'avoir sauvé mon papa ! J'ai hâte qu'il se réveille pour jouer avec lui !
Link se sent rassuré de revoir la petite Piaf de bonne humeur. Une attitude qu'il voudrait retrouver de sitôt. En revanche, son inquiétude pour Luna s'amplifie au fur et à mesure.

* * *

Une bonne demi-heure plus tard, alors que le silence règne dans la forteresse, Luna est assise contre un palmier en face d'un lac : l'unique oasis du village. Malgré la présence de la lune de sang au ciel, les nuages noirs la couvrent, plongeant ainsi le monde d'Hyrule dans l'obscurité.

Au loin, Link l'aperçoit après avoir passé de longues minutes à la chercher. Finalement, sans aucune hésitation, il la rejoint rapidement. En sentant sa présence grâce à son flair et son ouïe, Luna baisse la tête, les yeux rougis par la tristesse. Encore confus, Link ne s'approche pas davantage par crainte de la contrarier ou même de l'effrayer. Il plaque son dos contre le palmier, les yeux rivés sur son amie.

- Luna... Je sais ce que ça fait de vouloir défendre une personne que tu aimes tant... Surtout que tu ne défends pas aveuglément Vadel... Je le sais bien... Tu n'es plus obligée de me le cacher... C'était même toi qui m'as appris qu'il n'est jamais bon de garder de violents sentiments en nous : en silence. Quel que soit ton lien avec lui, je ne te jugerai pas. Tu peux m'en parler. Je suis venu pour ça.
De sa patte droite, Luna chasse les larmes qui commencent à humidifier ses yeux.
- Mais c'est à cause de moi que le peuple d'Hyrule souffre... Si je lui étais venue en aide jusqu'au bout, Vadel aurait continué à lutter contre Ganon... Je veux tant... lui dire que je suis vivante pour qu'il revienne à mes côtés... C'est pour cela que j'ai décidé de partir avec vous... Ce n'était même pas pour sauver Hyrule mais pour sauver celui que j'aime...

Compatissant, Link la dévisage, ne sachant pas quoi ajouter. Plus sereine, Luna lève la tête au ciel. Non pas pour hurler mais pour conter son histoire en ouvrant le livre du passé, les pages de ses souvenirs encore lisibles.

- Vadel et moi, nous nous sommes mariés lorsque j'étais encore "hylienne"... Depuis tous petits, nous avons été toujours ensemble au village Fenryl... Il aimait m'entendre chanter et appeler des animaux...
Attentivement, Link l'écoute sans l'interrompre. Luna se force à sourire malgré la mélancolie de plus en plus forte.
- Mais depuis son jeune âge, Vadel faisait tout le temps des cauchemars... Il voyait sans cesse un monstre avec de grandes cornes qui essayait de lui parler... Ses parents et moi, qui étions sa seule famille, nous n'avons pas réussi à l'aider... Des fois, il se mettait même à pleurer des larmes de sang ou à crier tellement que son ombre lui faisait peur... Les autres, enfants et adultes, le jugeaient avec hostilité. Mais nous étions là pour le soutenir... Chaque fois qu'il faisait une crise de peur, je le prenais dans mes bras et je le protégeais contre les moqueries des autres... Je le consolais même en appelant les animaux... Mais malgré tous ces moments difficiles, j'étais heureuse. Lorsque Vadel était bien, il riait souvent et il me faisait rire... Il m'apportant souvent des fleurs, il jouait avec moi et était très protecteur... Il m'avait même sauvé la vie quand j'étais sur le point de tomber d'une falaise... Oui, Vadel faisait tout pour me rendre heureuse et je l'aimais depuis ma tendre enfance : je l'ai toujours considéré comme mon merveilleux prince...

En découvrant peu à peu le passé de son ennemi, loin d'être cruel, Link essaye de l'imaginer avec beaucoup de mal.
- Mais tous ces moments se sont achevés lorsque Vadel a commencé à ressentir l'envie de manger de la viande humaine... La viande animale ne satisfaisait plus son appétit... J'ai découvert cette horrible vérité lorsqu'il a essayé de dévorer un cadavre dans sa cave : un cadavre profané. Il lui a mordu l'épaule et arraché un morceau de chair... Depuis, il a tenté tant bien que mal de calmer cet appétit féroce. J'avais terriblement peur de lui aussi mais malgré tout, je suis restée auprès de lui... Mais malheureusement, tout a changé lorsque ces deux capitaines sont arrivés à Fenryl après avoir eu vent de toutes ces rumeurs...
Tremblante, Luna se crispe avant de poursuivre :
- Le premier capitaine de cette armée venait même de ce village... Il était l'époux d'une femme que j'admirais, morte peu de temps après avoir mis au monde son enfant... Mais hélas, ce capitaine n'était pas venu uniquement pour voir son enfant mais pour tuer Vadel, considéré comme la réincarnation de Ganon à cause des rumeurs qui s'étaient propagées aux villages voisins... Mais il a finalement renoncé et a eu pitié de Vadel. C'est alors que le deuxième capitaine est arrivé. Lorsqu'il a retrouvé Vadel, il a débarqué chez lui et a massacré toute sa famille sans aucune pitié. Rempli de rage, Vadel est devenu incontrôlable et a laissé Ganon s'éveiller. Mais l'unique meurtrier, ce n'est pas lui et encore moins Ganon... Mais bel et bien ce deuxième capitaine... Je n'oublierai jamais cette horrible nuit : dans les bras de Vadel, j'ai vu le village brûler... C'est depuis cette nuit que j'ai commencé à avoir peur du monde qui m'entoure... Seuls Vadel et Ganon pouvaient être proches de moi... Même si c'était une erreur d'y avoir cru...

Finalement, Luna se lève, ne supportant plus de rester sur place.
- Vadel et moi avions fini par trouver refuge au fin fond de la montagne, loin de toute civilisation... Nous avions construit une maison et peu à peu, nous avons grandi et vécu ensemble en nous débrouillant tout seuls... Malgré le traumatisme, Vadel a commencé à refouler les pouvoirs de Ganon : pour lui mais surtout pour moi... Il ne voulait pas me faire du mal... Donc, il a essayé de se nourrir uniquement de viandes animales et il a tenté de vivre comme un être humain. Cependant, il y a trois ans, il a fait la connaissance de personnes peu bienveillantes comme Kurna qui avait le même âge que nous et... les Yigas qui semblaient être plus intéressés par Ganon que par Vadel lui-même... Mais à l'époque, ils ne nous ont posé aucun problème. Finalement, Vadel et moi avons fini par nous marier dans une église en ruine. Et plusieurs mois plus tard, je suis tombée enceinte... J'étais heureuse. Mais je l'ai perdu... Et peu de temps après, je suis tombée gravement malade et je me suis laissée aller... Mon corps était engourdi et mon coeur me faisait mal... Je n'arrivais plus bouger. Bien que Vadel fût à mes côtés, cela n'a pas été suffisant pour me sauver... Donc, désespérément, bien qu'il eût peur de se confronter au monde extérieur, il savait que pour me soigner, il me fallait un médecin... Il m'a confiée aux Yigas et s'est rendu dans le village le plus proche. Certains membres étaient gentils, mais peu à peu, j'ai fini par comprendre que Kurna me méprisait... Elle semblait même me jalouser car elle éprouvait des sentiments pour Vadel... Donc, au lieu de me donner un remède pour guérir, elle m'a fait boire du poison. Ma santé a empiré... Tout était froid... Mon sang ne circulait plus et mon coeur se figeait comme une pierre... Je n'arrivais même plus à parler, à appeler Vadel et même à pleurer... J'étais privée de toutes mes émotions... Alors que j'étais entre la vie et la mort, j'ai senti des vagues m'emmener après avoir été sûrement jetée à la mer comme un être indésirable... Et après, tout était flou...

Loin d'être indifférent, Link la fixe, les larmes aux yeux.
- Et finalement, un Goron m'a trouvée au bord d'une plage et je suis restée dans son village pendant quelques jours, bien qu'il faisait très chaud... Mais avec épouvante, j'étais sous une autre forme : celle de la louve... Cette potion ne m'a pas tuée mais m'a transformée uniquement en cette bête hideuse... Je commençais même à ressentir un horrible appétit au niveau de la viande... Folle de chagrin, je me suis enfuie et j'ai tenté d'essayer de retrouver Vadel... Mais à chaque fois que je me rendais dans un village que je ne connaissais pas, j'étais sans cesse repoussée, jugée et attaquée à cause de mon apparence... Je ne savais pas où aller et comment... Les villageois m'ont accueilli avec des cris et des fourches... Depuis, à force d'être chassée, et jugée, je suis devenue hostile et sauvage envers les autres êtres... J'écoutais ma défiance... Je ne faisais confiance qu'à Vadel bien que j'étais très inquiète pour lui... Finalement, pendant qu'il commençait à être à la tête des Yigas, j'ai fini par continuer de vivre jusqu'à ce fameux "jour"... Quand je t'ai rencontré pour la toute première fois, je t'ai... admiré...
Etonné, Link se retourne vers son amie.
- Admiré ? répète-t-il.
- Oui... Tu ressemblais tellement à ce capitaine qui avait essayé de sauver notre village. En te regardant, j'ai voulu y croire... Je voulais tenter ma chance de retrouver Vadel, d'en apprendre plus sur lui et surtout... de l'arrêter même si ma forme est monstrueuse..., conclut Luna d'une voix fragile.
- Mais Luna, si tu fais ça, tu risquerais de...
- Je sais... Il risquerait de me tuer s'il me voit ainsi... Mais peu importe les moyens, je veux essayer de le sauver de la folie de Ganon parce que je l'aime toujours. Même si j'ignore encore ce qu'il compte faire... Même si je suis un monstre hideux...

En couinant, la louve éclate soudainement en sanglots. Mal au coeur de la voir ainsi, Link s'agenouille auprès d'elle pour la soutenir. Puis, il décide finalement de sortir le monocle de vérité.
- Luna... Regarde-moi, s'il te plaît...
Avec beaucoup d'hésitation, la louve lève la tête, le regard abattu. Ainsi, l'Hylien dirige l'objet sacré dans sa direction, dévoilant aux yeux de Link sa véritable apparence. Longs cheveux bruns, grande frange et les yeux émeraude, la femme est radieuse. Elle est aussi belle et adorable que la Princesse Zelda. En contemplant sa beauté, loin d'être indifférent, Link lui sourit tristement avant de lui promettre :

- Luna... Lorsque tu reverras Vadel, je lui montrerai ta véritable apparence... C'est toi qui seras sa propre guérison... Je pense qu'en te croyante morte, Vadel a laissé Ganon s'emparer de lui et est devenu son pantin, incapable de continuer de vivre comme un simple Hylien... Il a succombé à son chagrin... Même s'il sera impossible de lui pardonner pour la souffrance qu'il a causée, tu dois aller le voir... Surtout que je comprends mieux le regard triste qu'il a eu lors de ma rencontre avec lui...

Tristement, en sentant le réconfort, la louve lui sourit, révélant ainsi le sourire de la véritable femme qui se cache en elle. En se dirigeant vers l'eau, elle lève la tête au ciel, déterminée d'aller jusqu'au bout de son objectif. Après l'avoir regardé de dos, les longs cheveux flottant dans le vent, Link baisse le monocle, décidé à faire taire la vérité pour le moment.

* * *

Durant cette "nuit", la forteresse Gerudo a été particulièrement agitée. Notamment par le témoignage de Melinda et de Kelia. La Reine Fumya, huée par son peuple, se présente sur le balcon et s'incline pour réclamer leur pardon, les larmes coulant sur son visage. Mal au coeur, Melinda baisse la tête, tandis que Kelia n'ose pas regarder la scène. La trahison de la Reine hante désormais chaque Gerudo. Remis de leurs émotions, Link et Luna assistent à la scène à partir d'une chambre. Peu à peu, Teba ouvre les yeux. En grimaçant un peu de douleur, il se tourne à sa droite.

- Papa ! se réjouit la petite Piaf, les plumes roses secouées.
Link et la louve se retournent. Les yeux écarquillés, Teba se lève faiblement. Heureux de revoir sa fille vivante, il l'enlace, les larmes aux yeux.
- Lana... Oh mon Dieu, j'ai eu tellement peur... Pardonne-moi de n'avoir pas été là plus tôt..., déclare-t-il, la voix tremblante.

Lana le sert fort contre lui et lâche un sifflement tendre, heureuse. Rassurée par ces retrouvailles, Luna ne reste pas indifférente, désirant revivre la même chose avec Vadel. Elle pose la patte sur son pendentif caché sous sa douce fourrure : aussi doux que son coeur.

Chapitre 30 : Hébra, le mont du savoir   up

La tête levée au ciel, Link se tient toujours debout en face de l'oasis. Les branches des palmiers sont agitées dans tous les sens à cause du vent nocturne. Perdu dans ses pensées, il regarde fixement la face dorsale de sa main gauche. Malheureusement, le pouvoir du fragment du courage ne veut toujours pas se manifester. Malgré tous ses efforts, la peur résonne toujours en Link. Tant qu'elle sera présente, aucune chance pour que son pouvoir prodigieux revienne en lui. En repensant à l'illusion de Zelda dont il se sentait vulnérable, Link tique en plaquant sa main gauche sur sa poitrine, gagné par la frustration et l'impuissance.

"Maintenant que je suis au courant de tout, je ne ressens même plus la force de vouloir mettre fin à la vie de Vadel... Même si c'est pour sauver Zelda et le monde... Entre le faire et vouloir le faire, la différence est plus que... cruelle... Je ne sais plus quoi faire..."
Tremblant, l'Hylien croise les bras pour tenter de se calmer.
- Link ? l'interpelle calmement une voix.
Lentement, Link se retourne avant de remarquer Pawel, déjà revêtu de son armure. Le poids de la fatigue encore présente dans ses yeux, il le fixe avec inquiétude.
- Pawel ? s'étonne Link. Tu... Vous devez vous reposer encore un peu ! Vous n'êtes pas en état pour...
- Je le sais... Mais je ne peux pas rester allongé alors que tu as besoin de moi...
Avec soulagement, Link accourt et se blottit contre lui, comme un enfant qui a besoin de se confier à un père.
- Pawel... J'ai eu tellement peur de vous avoir perdu...
En esquissant un sourire attristé, Pawel lui caresse affectueusement la tête.
- Pardonne-moi, Link... Par ma faute, tu en as énormément souffert... Merci de m'avoir sauvé et surtout, merci de m'avoir donné envie de me battre contre la mort lorsque tu m'as supplié de continuer de vivre.

Désormais remis de ses émotions, Link recule et lui rend un triste sourire.
- Pour Leyna...
- Non... Est-ce... est-ce qu'il lui est arrivé quelque chose ? s'inquiète soudainement Pawel en sentant son coeur s'affoler.
- Non, je vous rassure : elle est en sécurité à Foracalia... Même si elle était obligée d'affronter sa propre soeur...
Tristement, Pawel baisse les yeux en empoignant le bras gauche. Il savait qu'une telle situation éclaterait tôt ou tard.
- Tu es au courant qu'elle était... une Yiga... ?
- Oui, affirme Link. Mais cela ne change pas. Elle nous a énormément aidés. Quoi qu'il en soit, je vous ramène à Foracalia et...
- Pour le moment, je ne peux pas rentrer, coupe Pawel d'un ton décidé.
- Mais pourquoi ?
- Luna m'a tout expliqué lorsqu'elle était à mon chevet. Sache que peu importe les risques, je veux t'aider à acquérir cette épée légendaire en devenant un prodige si tu m'en crois véritablement capable..., lui répond Pawel avec un air confiant. Depuis le début, j'étais au courant que tu avais hérité du fragment du courage... Mais je m'étais interdit de t'avouer la vérité pour te protéger... Quand tu étais encore un enfant, tu étais très sensible et fragile. J'avais peur qu'en sachant qu'un tel pouvoir réside en toi, tu aurais tenté de l'éveiller en prenant des risques insensés... Mais à présent, tu es un jeune homme. Un adulte. Et moi, je crois en toi.
Ne sachant plus quoi penser, Link plaque son dos contre l'arbre avec un triste sourire.
- Croire en moi... ? Alors que le fragment du courage se détourne toujours de moi ? Je ne serais pas étonné que l'épée de la légende ne me reconnaisse pas comme un maître...
- Link... Réfléchis bien une minute : avant ces événements, lorsque tu te battais contre moi à chaque entraînement ou même contre des monstres, qu'est-ce que tu ressentais avant que cette douce lumière dorée te gagne ?

Devant cette question dont il connaît déjà la réponse au fond de lui, Link plonge son regard dans celui de Pawel avant de lui répondre :
- Je... je ressentais une douce chaleur semblable à un bonheur. Chaque fois que je me battais, je pensais aux personnes qui comptaient pour moi. Et aussi à mon envie... de découvrir mes origines et mes parents. Sentiment que j'ai perdu depuis mon échec : depuis que j'ai rejeté le pouvoir du fragment du courage à cause de ma peur et de ma lâcheté.
Compréhensif, Pawel s'approche de l'oasis à son tour.
- Tu veux... toujours découvrir tes origines... ? D'où tu viens et savoir qui sont tes véritables parents ?
- Oui... Je pense que je... suis prêt à découvrir la vérité... Qu'elle soit heureuse ou douloureuse, je dois le savoir...

Le regard assombri, Pawel le dévisage comme si un poids insoutenable pèse sur ses épaules frêles. En inspirant un bon coup pour purifier ses poumons encore étouffés par les douleurs qu'il a encaissées jusqu'à présent, il déclare :
- Link... Tu trouveras ces réponses au Mont Hébra : sur les lieux du village Fenlyr.
- Fenlyr... ? Mais ce village a été détruit, rappelle Link, abasourdi par une telle suggestion.
- Oui. Mais une personne vit encore là-bas. Quand j'étais enfant, je voyageais souvent avec mon père. Et c'est à cet endroit que je l'ai rencontrée... Et je pense qu'elle vit encore là-bas. Elle nous a prévenus que lorsque tu seras prêt à découvrir la vérité, tu devras la rencontrer...
- La rencontrer ? Mais alors pourquoi ne m'en avoir pas parlé avant ?
- Tu n'étais pas encore prêt... Pour t'avouer la vérité, le voyage jusqu'à Cocorico n'était pas qu'un simple coup de pouce pour la famille de Talon mais avant tout pour voir si tu étais capable de voyager en bravant les dangers sans que je ne sois là... Et je me suis dit qu'après le mariage de la Princesse Zelda avec ce comte, je t'aurai emmené jusqu'au Mont Hébra. Après tout, ce n'était pas mon intention de te cacher la vérité pour l'éternité. Mais à cause des évènements qui se sont enchaînés, je n'en ai pas eu l'occasion. Dès que j'ai su que le repaire des Yigas se trouvait au désert, je m'étais lancé dans cette quête pour sauver les Piafs et les autres personnes et aussi pour que Leyna soit enfin libérée du fardeau qui pesait sur elle...

En comprenant de mieux en mieux la situation, Link regarde son maître. Malgré la peur de découvrir la vérité, une partie de lui est résolue à accepter.
- Alors dans ce cas, j'accepte... Si jamais je vais mourir face à la réincarnation de Ganon, je veux au moins connaître la vérité..., déclare-t-il avec un triste sourire en repensant à ses cauchemars.
- Enfin, je commence à te retrouver, lui répond Pawel avec soulagement. Je savais que tu n'abandonnerais pas. Je t'emmènerai là-bas à une seule condition.
- Laquelle ?
- Que tu me tutoies désormais comme tu l'as fait pour me réveiller...
Avec un air confiant, en se rappelant de la condition de Zelda, Link hoche de la tête pour approuver, le regard plus confiant.

* * *

Au château d'Hyrule, Sylves ouvre brutalement la porte de la salle du trône.
- Seigneur Vadel ! s'exclame-t-il en accourant. Les Gerudos ont saccagé notre repaire dans le désert ! Toutes nos unités sont mortes !
Peu affecté par cette annonce, Vadel préfère regarder le ciel.
- Seigneur Vadel ! Je vous répète que...
- Et cela m'est complètement égal... Celles et ceux qui étaient là-bas n'avaient servi qu'à ramasser "la viande" pour Ganon...
- Mais toutes ces quantités sont perdues !
- Peu importe... D'abord, je veux que Ganon réalise mon rêve... Le porteur du courage ne tardera pas à venir ici. Après cela, nous satisferons tous ses caprices. En attendant, contentez-vous juste de veiller à ce que tout se passe bien ici, ordonne calmement Vadel.
Mais finalement, une deuxième personne entre dans la salle.
- Seigneur... Vadel, murmure Kurna, l'oeil gauche caché derrière un bandage.

Affaiblie, elle avance en traînant péniblement ses jambes engourdies par ses blessures. Surpris, Vadel écarquille les yeux en la revoyant vivante.
- Kurna ! s'exclame Sylves en la soutenant contre lui pour ne pas la laisser tomber au sol. Laisse-moi te soigner...
Malgré tout, elle le repousse et dévisage Vadel.
- Sei... Seigneur Vadel... Je sais que j'étais lâche d'avoir abandonné notre... repaire... Mais je vous ai apporté une petite compensation pour obtenir votre pitié... Tenez, déclare Kurna en lui tendant un coeur en sang.
Comprenant instantanément qu'il s'agit d'un organe venant d'un humain, Vadel le fixe avec malaise.
- Pardonnez-moi... Je... je ferai tout ce que vous voudrez pour me racheter... Je donnerai ma vie pour vous protéger lorsque le porteur du courage... arrivera...
- Le porteur du courage ? Est-ce lui qui a causé la destruction du repaire avec les Gerudos ? s'étonne Sylves, soucieux.
- Oui... Il devient de plus en plus fort...
- Donc, ce qui veut dire qu'il ne va pas tarder à regagner la confiance du fragment du courage..., constate Vadel en croisant les bras. Hum... Sylves.
- Oui ?
Vadel descend les marches, prêt à lui donner un nouvel ordre :
- Veille à ce que notre armée ne tue uniquement que les alliés et l'armée du porteur du courage.
- Oui ! acquiesce ce dernier avant de sortir précipitamment de la salle.
- Kurna..., interpelle calmement Vadel.
Heureuse d'entendre son prénom sortir de la bouche de son Souverain, l'intéressée lui sourit.
- Oui ?
- Peux-tu... me montrer son "apparence" ? J'ai... j'ai besoin de la revoir..., demande Vadel d'un ton mélancolique.

Avec frustration après avoir espéré autre chose, Kurna se métamorphose en Luna, abandonnant sa véritable apparence pour un temps. Malgré la beauté de ses longs cheveux bercés par le vent, son regard oscille entre la tristesse et la froideur. Il n'a fallu qu'une illusion de celle qu'il aime pour que Vadel se sente un peu plus apaisé.
- Bien... tu peux disposer Kurna, lui déclare-t-il. Je n'ai plus besoin de toi.

Après avoir repris son apparence, la jeune femme s'exécute avec un pincement au coeur. Encore une fois, elle n'a pas réussi à conquérir celui qu'elle aime tant. Une fois sortie de la salle après avoir fermé la porte, elle grimace en donnant un coup au mur pour évacuer la frustration qui éclate en elle.
- Kurna ? Tout va bien ? s'inquiète Sylves.
- Oui... mais il y a quelque chose que je dois savoir : pourquoi tu n'as pas réussi à la "tuer" ?
- Tuer qui... ?
- "Elle" ! fulmine la Yiga en reprenant l'apparence de Luna.

Effrayé, Sylves écarquille les yeux avant de répliquer :
- Qu'est... qu'est-ce que tu racontes ? Elle était morte lorsque nous l'avons jetée à la mer ! Comment veux-tu qu'elle survive ?
- Parce qu'elle a survécu sous l'apparence d'une louve ! Tu ne l'as pas tuée comme Ganon te l'a ordonné dans ton cauchemar et comme moi je t'ai conseillé de le faire ! hurle Kurna, de plus en plus gagnée par une colère noire.
Septique, Sylves se pince les lèvres.
- C'est... c'est impossible ! Serait-ce... les poils de loup qui ont provoqué cet effet secondaire... Elle devrait être morte... Mais alors si elle vit et que Seigneur Vadel le découvre, elle...
- Il ne découvrira jamais la vérité... Puisque quand elle va se ramener ici, je la tuerai. Elle et le porteur du courage... En attendant, je ne sers que d'illusion... Mais le coeur de Seigneur Vadel va m'appartenir, renouvelle la jeune femme en frisant l'hystérie.
Mal à l'aise, Sylves baisse les yeux.
- Il faut que je... dirige mes pouvoirs encore sur elle... ? murmure-t-il. Seigneur... Mais si elle est vivante et que la Triforce refuse de réaliser ce rêve...
- C'est pour cela qu'il faut à tout prix la tuer ! réaffirme Kurna avec hostilité.

Au même moment, loin de se douter de ce qui se trame sur son dos, Vadel fixe malaisément le coeur. Alors qu'il s'apprête à mordre et déchirer un morceau pour que Ganon soit repu, il s'effondre sur ses jambes, pris par une soudaine envie de vomir. Les larmes aux yeux, écoeuré à l'idée de manger un organe humain comme à chaque fois, il lève la tête au ciel pour se donner du courage. Avec beaucoup de mal, il commence à entamer son repas sordide avec supplice. Aussitôt, l'ombre de Ganon s'agrandit sur le mur et gémit en savourant monstrueusement le goût de l'organe.

* * *

De retour dans les alentours d'Ordiala, après avoir laissé le sort des Gerudos entre les mains de Melinda et permis aux Piafs de rentrer dans leur village, le petit groupe se rend en direction du Mont Hébra sans tarder. La grande montagne se trouve juste à l'est. Le paysage enneigé est rempli de mystère et le sommet ne semble pas être terrifiant. Au pied de la montagne, Luna hésite à monter. Songeuse à avancer, elle reste figée.

- Luna..., murmure Link en remarquant son hésitation. Tu es sûre que tu veux venir avec nous ?
Le coeur palpitant avec douleur contre sa poitrine, Luna se tourne vers son ami.
- Oui. Je veux quand même revoir Fenlyr dans l'état où il se trouve. Ne vous en faites pas. Allons-y ensemble.

Décidée, elle commence à monter le sentier, suivie des deux autres Hyliens. La température est froide et désagréable. Cependant, la beauté du paysage enneigé plaît énormément à Link. Couvert d'un doublet épais et beige, remis par Melinda, il continue d'avancer, les jambes à moitié enfoncées dans la neige. Luna et Pawel arrivent à supporter le froid, ayant l'habitude d'un tel climat.

- Bien. Au-delà de ce grand chêne, nous devrons passer par le chemin de gauche, indique Pawel en repensant à ses souvenirs d'enfance.
- Toi aussi, tu as vécu dans cet endroit ? lui demande Luna avec curiosité.
- Non. En revanche, mon père a connu un capitaine qui était son ami, répond Pawel avec un sourire attristé. C'est même grâce à cette personne que j'ai voulu devenir chevalier dans l'armée royale.
Silencieusement, un certain doute envahit les pensées de Luna. Intrigué par leur conversation, Link les regarde avec discernement.
- Serait-ce la même personne qui vit toujours au sein de cette montagne ?
- Non, il s'agit de quelqu'un d'autre. Mais je préfère que ça soit "elle" qui te révèle toute la vérité. Et si tu es capable de l'accepter, nous nous rendrons comme convenu dans ce temple et là, tu pourras tenter de retirer l'épée de la légende. C'est ce que m'a raconté Asarim grâce à ces chants qui évoquent la légende. Et moi, j'y crois.

Devant la certitude de Pawel, Link ne sait plus quoi penser. Il est vrai que depuis peu, il essaye de découvrir la vérité qui se cache derrière la légende tant vénérée par les peuples d'Hyrule. Plus il continue de monter, plus il s'approche de la vérité. Enfin, il s'arrête net. Des restes de maisons, en piteux état sous le poids des années, sont présents. Derrière se trouvent de nombreuses tombes. Un passage qui respire la mélancolie. En s'efforçant de rester placide, Luna s'approche de la place centrale et regarde autour d'elle. Link et Pawel restent en retrait, comprenant la tristesse de la survivante de la tragédie. Inquiet pour son amie, l'épéiste s'approche d'elle.

- C'est amusant... Mais même après toutes ces années, j'arrive à imaginer le village d'antan dans mes pensées... Même si le village est détruit, le souvenir est resté intact..., annonce Luna, les larmes aux yeux. Tu vois cette maison au bout, c'était celle de Vadel... À l'opposé, c'était la mienne...
Pawel avance à son tour et parcourt l'endroit du regard.
- Lorsque j'étais arrivé ici avec mon père, le feu s'était déjà éteint... De nombreux corps gisaient encore au sol... Tous, sauf le corps de la réincarnation de Ganon et le tien...
- Oui...
- Luna... Si cela devient trop dur pour toi, alors renonce à cette folie de vouloir affronter Vadel et...
- Non Link. Je veux tenter de l'arrêter..., réaffirme Luna avec résolution malgré la peur qui hurle en elle.
Link baisse les yeux, à court d'arguments.
- Alors te voilà revenue... Link, appelle une voix féminine.

Aussitôt, l'Hylien se retourne avant de remarquer une jeune femme d'une trentaine d'années. La peau légèrement mate et les cheveux argentés attachés en une longue natte, elle avance dans la direction du groupe. Elle porte une longue robe bleue d'hiver. Bien qu'elle ne fasse pas son âge, l'inconnue paraît sage. Un symbole Sheikah rouge est tatoué sur sa joue droite.

- Vo... vous..., murmure Luna après l'avoir reconnue.
- Dame Paya ! Dieu soit loué ! Vous vivez encore ici ! s'exclame Pawel avec soulagement.
Paya s'approche de ce dernier et lui sourit chaleureusement avant de lui déclarer :
- Tu as bien grandi, Pawel. Tu es devenu un jeune homme vraiment élégant. Ton père aurait été si fier de toi s'il apprenait que tu portes son armure.
Le capitaine esquisse un sourire attristé et baisse les yeux.
- Merci du fond du coeur d'avoir tenu ta promesse en ramenant Link ici.
- Me ramener ici... ? Comment connaissez-vous mon prénom ? demande Link à la jeune femme. Si vous savez quelque chose, dites-moi tout, je vous en conjure.
Paya dévisage longuement l'élu comme si elle essaye de déceler sa vie et ses pensées.
- Il n'y a aucun doute... Ce regard, ces cheveux dorés...
Luna écarquille les yeux, de plus en plus dubitative.
- Est-ce que vous... vous connaissez mes parents ? enchaîne Link.
- Je les ai connus... Oui..., lui répond tristement Paya.

Peu à peu, Link se fige en sentant son estomac se tordre. Pawel ferme les yeux et baisse la tête, n'osant pas l'interrompre tandis que Luna écoute attentivement la confession de la mystérieuse femme.

- Vous les avez connus... ? Mais où est-ce qu'ils sont... ? s'affole Link, la gorge nouée. Par pitié, dites-moi tout ! Je dois tout savoir !
En le regardant droit dans les yeux avec la plus grande tristesse, Paya lui déclare :
- Ils ne sont plus de ce monde depuis bien longtemps...
Le visage de Link se décompose. Horrifié, il n'ose pas croire à ce qu'il vient d'entendre. Même si au fond de lui, il connaissait la réponse, la confirmation semble encore plus l'anéantir.
- Oui... Ta mère a perdu son âme peu de temps après avoir t'avoir mis au monde. Quant à ton père, il a été tué lors cette nuit funeste...

En retenant avec beaucoup de mal son sang-froid, l'Hylien est sans voix. C'est comme si ses cordes vocales ont été paralysées par cette triste nouvelle. Comprenant sa réaction, Paya le fixe avec impuissance avant de poursuivre :

- Tu es né à Fenlyr, dans le même village que Vadel : la réincarnation de Ganon. Jusqu'au retour de ton père, Raven, capitaine de la garde royale au service du roi et de la reine, je me suis occupée de toi après la mort de ta pauvre mère. Mais avant cette funeste nuit, Raven, bien qu'il ait été dévasté par la mort de sa chère épouse, m'a demandé de te mettre en lieu sûr et de te protéger... Donc, je me suis enfuie en t'emmenant avec moi dans une grotte... Une fois les flammes péries lorsque le jour pluvieux est arrivé, il ne restait rien à part des corps... Puis, un soldat et son fils, venant de Foracalia, sont arrivés jusqu'ici dans l'espoir de revoir un proche. C'est ainsi que je leur ai demandé de t'emmener dans un endroit sûr pour que tu puisses vivre et grandir en toute sécurité comme Raven l'avait exigé. Jusqu'à sa mort, il s'est inquiété de ton sort...

Les larmes aux yeux, Link fait tout de son possible pour ne pas éclater en sanglots.
- Alors Link... Le nouveau-né que j'avais vu avec Vadel, c'était donc toi..., constate Luna, les oreilles baissées.
- Ce... cela expliquerait aussi pourquoi... je fais autant de cauchemars... J'ai réellement rencontré Vadel plus tôt que je ne l'aurai pensé... Haha...
Mal à l'aise, il s'écroule sur ses jambes, n'arrivant pas à encaisser le choc soudain.
- Link ! s'inquiète Pawel en accourant vers lui.
Le capitaine s'accroupit pour le soutenir. Les yeux de Link se rivent dans le vide.
- Pardonne-moi de t'avoir caché la vérité... Je voulais que tu le saches une fois que tu serais prêt... Que tu saches qui était exactement l'homme qui m'a donné envie de devenir chevalier car je l'admirais... Même si c'est difficile à accepter, tu dois... essayer de surmonter cette épreuve. Mais sache que ce n'est pas à cause de ta ressemblance avec Raven que je t'ai considéré comme mon fils... Mais pour ce que tu es exactement...

En ressentant de la sincérité dans les paroles de Pawel, Link essaye de se reprendre. Puis, les yeux posés sur sa main gauche, il se lève maladroitement.
- Link... Je peux comprendre ta douleur, toi qui as sans doute désiré rencontrer ceux qui t'ont donné la vie et le fardeau en tant qu'élu avec cette marque sur ta main. Mais sache qu'ils t'ont réellement aimé et qu'ils n'ont pas voulu t'abandonner. Même ta mère, malgré les risques, a voulu te garder et te mettre au monde en bonne santé. Donc, ne gâche pas tout cela et tente de retrouver le courage en te rendant dans les catacombes. Seul. Tu trouveras un objet sacré appartenant à ton père. Un objet qui te sauvera, explique Paya en gardant toujours son sérieux. Sache que cet endroit ne sera pas sans danger. Es-tu prêt à prendre ce risque ? Es-tu prêt à joindre ton serment à ton courage ?
Le coeur palpitant avec douleur, Link ferme les yeux et lève légèrement la tête au ciel avant de répondre :
- Je l'accepte. Je me rendrai au fin fond des catacombes pour trouver les dernières réponses qui me manquent...

Ainsi, le vent froid suit la voix déterminée de l'élu, prêt à passer une nouvelle épreuve : l'épreuve de son passé.

Chapitre 31 : Le Darknut légendaire   up

Au coeur du cimetière de Fenlyr, Link avance en direction de la première tombe. Bien que l'idée ne lui plaise guère de troubler le repos éternel d'un mort, il la pousse de toutes ses forces vers l'avant. Aussitôt, un mécanisme s'enclenche et la tombe finit par s'ouvrir toute seule, dévoilant ainsi un escalier menant tout droit dans les profondeurs. Le coeur palpitant de plus en plus fort contre sa poitrine, sous les yeux de Luna, Pawel et Paya, Link inspire un bon coup avant de descendre, prêt à surmonter les dangers à la quête des fragments manquants de son identité. Il allume une torche après l'avoir frottée contre le mur afin d'éclairer cet étrange endroit.

Au sous-sol, entre deux murs en pierre qui allongent un long couloir, seuls les bruits de pas de Link résonnent. Même si l'odeur de la peste flotte, il refoule son dégoût du mieux qu'il peut. Hors de question de rebrousser le chemin. Vide et sinistre, seules les toiles des araignées foisonnent. Alors que le pied du jeune Hylien touche une dalle, il entend un bruit lourd au plafond. Instinctivement, Link fait un mouvement de recul, évitant de justesse une grande hache qui fracasse le sol. Du sang séché a rouillé le fer de cet instrument de la mort. Effrayé, Link retient son souffle. S'il ne l'avait pas esquissé, son corps aurait été découpé en deux. Tranquillement, la hache remonte.

- Je... Je vois ce qu'elle a voulu dire par "sans danger"... Allez, il faut que je fasse attention où je mets les pieds si je ne veux pas que mon sang décore les murs... se dit-il avec anxiété.

En levant la tête au plafond, la torche dirigée vers cette direction, il remarque de nombreuses haches accrochées en haut, prêtes à tuer le premier insoucieux. Sur ses gardes, il avance, le froid dans le dos. Soudainement, une hache tombe derrière lui. Aussitôt toutes les autres s'apprêtent à tomber dans sa direction pour le trancher. Agile, Link se précipite, échappant à plusieurs haches. Une fois arrivé au bout du couloir, il effectue une roulade pour esquiver la toute dernière. Les jambes mal assurées, il reste agenouillé, n'arrivant plus très bien à respirer à cause du choc. Ses prouesses l'étonnent grandement.

- Co... comment ai-je réussi à anticiper tous les pièges sans l'aide du fragment du courage ?

Encore confus, Link se lève. Puis, après avoir traversé un petit couloir, il entre dans une grande salle. L'eau, liée sûrement aux égouts, est toute verte. Un aspect écoeurant qui ne donne pas envie de boire. Soudainement, il distingue une étrange silhouette immobile. Sous l'allure d'un cadavre, le visage caché derrière un simple masque en bois, l'être ne bouge toujours pas. En avançant, Link sent la puanteur insoutenable de la mort. Nauséeux, il tente de se calmer. N'ayant pas le choix que de passer devant cet "inconnu", il ne peut s'empêcher de poser sa main tremblante sur la fusée de son épée. Mais tout à coup ! Un hurlement strident et horrible résonne !

Aussitôt, le corps de Link se fige et la peur le traverse de part en part. En effet, l'être à l'apparence d'un cadavre humain, complètement amoché et sinistre, se révèle être un effroi. Une horrible créature de la mort qui jalouse les vivants. Lentement, il avance en traînant les pieds vers Link. Pétrifié, l'Hylien tente de bouger. Hélas, son corps ne l'écoute plus du tout.
"Mo... mon corps ! Il refuse de bouger !"

Brutalement, il sent l'effroi l'étreindre par l'arrière. Sans aucune pitié, elle commence à l'étrangler de toutes ses forces. Subissant la strangulation, Link n'arrive plus à respirer comme il faut. Ses yeux se lèvent au plafond et sa peau devient de plus en plus pâle. Alors qu'il sent la mort lui glacer le sang, il essaye désespérément de bouger sa main gauche, là où il tient la torche en feu. En pensant à sa survie, il finit par la lever de toutes ses forces et par diriger la flamme sur le masque de l'effroi. Instantanément, la créature le relâche et hurle. Sous le coup des hurlements, Link est figé, à genou. Encore affaibli, il pose la main sur son cou. En train de brûler vif, aussi vite qu'un bout de bois, l'effroi tombe au sol avant de se dissoudre lentement en cendres.

Désormais remis, Link se lève faiblement. Mais malheureusement, la seconde de répit ne dure pas longtemps. En effet, de nombreux squelettes, sous l'allure de moblins, se dirigent à toute vitesse dans sa direction. Inspirant un bon coup pour se ressaisir, Link s'empare de son épée avec froideur. Malgré son corps encore engourdi, il s'élance. En garde, il commence à embrocher le crâne du premier avant de le retirer de sa colonne vertébrale. Hâtivement, il agite son épée afin de s'en débarrasser. La soif de combattre revient de plus en plus. En repensant au sort de ses parents, il attaque avec rage chaque ennemi avant d'effectuer une attaque tournoyante. Alors qu'un squelette perd l'équilibre en plaquant sa colonne contre le mur, Link se précipite et tranche avec facilité le haut de son "corps" décomposé.

Une fois vainqueur de ce combat, il reprend la torche. En se tournant à sa droite, il remarque une nouvelle salle. Curieux, il décide de l'explorer. De nombreux os se trouvent au sol. Malgré la pourriture qui règne dans ces lieux, Link entre dans la pièce, fastueuse et assez étrange. En effet, le carrelage est blanc au sol tandis que de nombreux rideaux rouges sont accrochés sur les murs pierreux. Assis sur un siège à étoffe rouge, un étrange être est figé comme une statue.

L'allure chevaleresque, il porte une armure très lourde, casque et jambières noires, ainsi qu'une longue cape rouge en bon état malgré le poids du temps. Une hache de viande ainsi qu'un étrange bouclier, laqué de bleu, sont à côté de lui. Le symbole de la Triforce légendaire est gravé au coeur de la grande plaque, entourée par des bords en acier et des motifs rouges représentant une sorte d'oiseau. Subitement, après avoir posé ses yeux sur le bouclier, Link sent une grande nostalgie l'envahir. Mais alors qu'il avance, il sent une douleur lancinante au coeur. C'est comme si de nombreux pics le transpercent.

En laissant échapper un gémissement de douleur, l'épéiste s'écroule sur ses jambes en luttant désespérément contre sa souffrance. Peu à peu, il remarque que son ombre, éclairée par la flamme de sa torche, commence à s'agrandir... Avec froideur, malgré la douleur qui le torture chaque seconde, Link tente de se reprendre. La lueur rouge dans ses yeux disparaît instantanément. La flamme s'éteint, plongeant ainsi la salle dans l'obscurité. N'étant plus capable de résister, il lâche un hurlement de douleur, la voix déchirée à cause de l'agonie. Avec facilité, l'ombre prend l'apparence de Dark Link. Elle est parvenue à se matérialisée. Seuls ses yeux rouges clairvoyants sont visibles, le corps caché par l'obscurité. Encore sous l'effet de la douleur, Link lève faiblement la tête avant de constater avec horreur le retour de son alter-égo.

La voix désincarnée, Dark Link ne peut s'empêcher de rire d'une façon malsaine avant de sortir son épée, déterminé une bonne fois pour toutes à mettre fin à celui qui l'a "caché" depuis tant d'années. Mais instinctivement, Link pare au dernier moment le coup de son adversaire avant de le repousser.
Malgré le corps encore engourdi et l'obscurité, l'élu ne recule pas et ne tremble pas. Avec froideur, il fixe les yeux de sa propre ombre, celle qui l'a empêché de sauver Zelda. Frustré par l'assurance regagnée chez ce dernier, Dark Link hurle hystériquement avant de foncer dans sa direction. Pendant de nombreuses secondes, Link et son ombre se battent dans un combat à mort. Leurs épées ne cessent de se croiser, destinées à être liées. Face à face, Link et Dark Link se fixent en position de garde.

- Tu n'es qu'une ombre qui possède la force et l'assurance. Deux qualités que je ne possède pas, c'est vrai... Mais il y a une chose que tu ne possèdes pas et c'est pourquoi je dois continuer de vivre en te faisant retourner dans les ténèbres : le courage !

Après avoir prononcé ses paroles qui viennent du coeur, Link s'élance et effectue un balayage en repoussant à nouveau son ombre. Stupéfait, Dark Link s'apprête à l'attaquer bestialement. Soudainement, ses yeux rouges s'écarquillent. Une lueur dorée émane sur la face dorsale de la main de Link et éclaire finalement toute la salle. Aveuglé par la lumière, Dark Link pousse un hurlement en reculant, comme s'il en est effrayé. Sous le choc, Link regarde sa main. Il grimace soudainement de douleur en sentant une incroyable puissance le saisir : le troisième fragment revient en lui, brillant de mille éclats. La chaleur envahit instantanément le coeur de l'élu qui a enfin réussi à regagner la confiance de son pouvoir.

Link la fixe longuement, n'osant pas croire à ce qu'il vient de réaliser. Il est même heureux de revoir ce fragment qui lui a tant manqué. Avec un air confiant, il lève la tête en fixant froidement son ombre. En agitant son épée, la main droite tenant le bouclier, l'élu s'apprête à achever l'ombre qui avait empêché le courage d'éclater en lui. Reculant, Dark Link est terrifié. Soudain, en remarquant le cadavre du mystérieux chevalier, il commence à éclater de rire sous les yeux interrogatifs de Link. L'ombre se décompose hâtivement avant d'entrer dans le corps sans vie. Avec défiance, l'épéiste s'arrête net. Aussitôt, deux lueurs rouges s'éclairent à travers du heaume.

Tout à coup, le cadavre se lève et s'empare de la hache viande ainsi que du bouclier. Ainsi, il devient un Darknut avide de puissance. Malgré l'anxiété, Link ne laisse plus la peur le gagner. En position médiane, les dents serrées, il recule. Le Darknut l'imite également avant de donner le premier coup en fracassant le sol grâce à sa longue hache. De justesse, Link l'a esquissée avant de foncer dans sa direction pour l'attaquer. Hélas, après lui avoir donné plusieurs coups d'épée, l'armure imposante de son redoutable adversaire ne subit aucun dégât. Il arrive cependant à détacher la cape rouge qui tombe au sol. Aussitôt, alors que le Darknut lui donne un coup de bouclier, Link l'esquive en faisant un salto en arrière parfaitement bien maîtrisé.

Agressivement, le chevalier des temps anciens fonce dans sa direction. En profitant de sa lenteur, Link esquive en effectuant une roulade sur le côté. Aussitôt, il remarque un petit point de lumière noire au bas du dos, non protégé par l'armure. Mais loin d'être balourd, le chevalier noir se retourne et tente encore de découper son corps en morceaux. Link l'esquive. Mais de plus en plus essoufflé, les cheveux et le visage trempés de sueur, il cherche désespérément une solution. Enfin, grâce à la lumière de son fragment, il aperçoit un morceau de lustre au plafond.

Soudainement, l'épéiste sort son grappin et le tracte en direction de ce point de repère en se laissant propulser en hauteur, sous la réaction ahurie du Darknut. En se jetant sur lui, Link élance son épée et la plante violemment dans le dos de son adversaire. Le chevalier lève la tête au plafond en criant d'effroi, le corps figé. Derrière lui, Link ne bouge toujours pas et maintient son arme dans la blessure. Dark Link, à l'intérieur du Darknut pousse un hurlement de douleur avant de s'échapper du corps désormais privé de conscience. L'ombre méprisante essaye de calmer sa douleur avant de s'agenouiller devant Link comme un acte de soumission. Désespérément, il regarde les yeux de l'élu. Le regard froid, Link le fixe, marquant ainsi son autorité. Il est le vainqueur de sa propre ombre.

Contraint de ne rester que son ombre soumise à le suivre, peu importe ses décisions, Dark Link tombe au sol. Son aura se décompose et arrive jusqu'aux pieds de Link, retrouvant ainsi sa véritable place. Le fragment du courage scintille encore tout doucement. Épuisé après ce combat éprouvant, Link tombe sur ses genoux, juste auprès du Darknut, à présent inerte. En fixant le bouclier, il remarque également une étrange alliance rouillée sur l'annuaire de sa main gauche. Comprenant que ce chevalier s'était marié, le jeune Hylien ne peut s'empêcher de sentir un point au coeur. Finalement, il s'empare du bouclier. Il ne peut s'empêcher de contempler la majestueuse plaque qui l'impressionne toujours autant. Puis, il se tourne vers le mur de droite, caché derrière de longs rideaux rouges. Le fragment continue d'émaner.

Link se lève. Plus il s'approche de ce mur, plus la lumière s'intensifie comme si le symbole veut lui montrer quelque chose. Hésitant au premier abord, l'élu empoigne le rideau avant de le tirer brusquement, dévoilant ainsi un grand portrait peint à la main. Un beau chevalier, les cheveux châtain foncé et les yeux aussi purs qu'un ciel bleu, se tient debout en élevant son épée au ciel. La cape rouge flottante et l'air assuré, il ressemble énormément à Link mais en plus mûr. Sur sa main gauche, l'alliance est également présente. Juste en bas de la toile, il est marqué "Le légendaire chevalier de Fenlyr, Raven, protecteur du royaume d'Hyrule". En admirant l'oeuvre, Link sent son coeur s'affoler comme s'il vient d'obtenir la réponse qu'il cherchait tant depuis son enfance.
- Raven... ? murmure-t-il sous le choc.

Avec horreur, il se retourne vers le Darknut, éclairé par une étrange lumière qui attire toute son attention. De plus en plus bouleversé, Link voit au fur et à mesure une âme apparaître sous la forme de ce chevalier noble. Le sourire bienveillant malgré la mélancolie dans ses yeux, Raven le regarde fixement. Sans dire un mot, il lui tend la main. Terrifié de voir cet homme, Link s'approche. Peu méfiant, il la lui donne en choisissant de lui faire confiance. En entrant en contact avec le légendaire chevalier, le jeune homme revoit des images dans ses pensées... Ainsi, d'étranges souvenirs s'enchaînent.

A suivre...

Ce texte a été proposé au "Palais de Zelda" par son auteur, "Elincya". Les droits d'auteur (copyright) lui appartiennent.

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Mis à jour le 30.04.25