The Legend of Zelda : Song of healing
Chapitre 1 : Lin
Chapitre 2 : L'Hylien encapuchonné
Chapitre 3 : Tourments
Chapitre 4 : Les bois perdus
Chapitre 5 : You've met with a terrible fate, haven't you ?
Chapitre 6 : Dossi le musicien
Chapitre 7 : Moj le voyageur et Rudani le marchand
Chapitre 8 : Le masque de Majora
Chapitre 9 : Krai le mage noir
Chapitre 10 : Le masque de Majora
Chapitre 11 : La fleur radieuse et le chevalier ténébreux
Chapitre 12 : La fille en vert
Chapitre 13 : Le ciel taché de sang et de cendres
Chapitre 14 : L'étang des amoureux
Chapitre 15 : L'alpha du mont Satori
Chapitre 16 : La fin du voyage
Chapitre 17 : Le gang des yigas

Chapitre final : The song of healing

Note de l'autrice : Cette fanfic se base sur Zelda BOTW, TOTK, MM et OOT. Pour ceux qui n'auraient pas joué au deuxième, vous pourriez ne pas comprendre certains trucs. Si vous n'avez pas fini le jeu, certains éléments peuvent spoiler, notamment le combat final, dont j'ai repris les phases et les dialogues
Me battre ! Je dois me battre ! Je ne peux pas mourir ! Pour Hyrule ! Je dois l'anéantir ! Zelda compte sur moi. Pruh'a, Hoz, Grosailleh... Tous les habitants du royaume... Pour eux, je dois le vaincre ! Allez ! Vas-y !
En face de Link se trouvait la momie, celui que tout le monde appelait désormais le roi-démon Ganondorf. Il était assis sur un trône de racines corrompues, les yeux fermés, comme si il attendait la venue du prodige. Il les ouvrit tout à coup et dit :
- Comme c'est pathétique... Le monde qui devrait être plongé dans les ténèbres est baigné d'une détestable lumière...
Il soupira.
- Et les êtres qui le peuplent se complaisent dans la paix et la tranquillité, lâches qu'ils sont ! Au moins, par le passé, ils faisaient encore preuve de ténacité.
Sur ces mots, il leva la main, créant des miasmes. Il abattit celle-ci au sol, et, dans un tourbillon, reprit son apparence originelle, celle de Ganondorf, roi des Gerudos. Il descendit des racines, en s'adressant à Link :
- Il est temps de rendre à ce royaume l'apparence qui doit être la sienne. Je ferais régner ma loi sur le monde ! Je vais le subjuguer !
Il marqua une pause.
- Ouvre grand les yeux, le véritable roi renaît. Sois témoin de l'avènement de son monde !
Il sortit son épée de son fourreau. C'était un long katana, empli de noirceur, parcouru de diverses écritures en gerudo. Link fit de même. Le héros dégaina l'épée de légende. Celle-ci brillait de mille feux, à cause de la proximité des miasmes. Les deux combattants se firent face, observant les mouvements de l'autre, se préparant à attaquer. Ce fut l'Hylien qui prit l'initiative. Il fonça vers son ennemi. Il le frappa sur le côté, mais le Gerudo para son coup avec son sabre. Link, essayant de lui faire lâcher prise, poussa de toutes ses forces sur l'épée du roi-démon, voulant le désarmer. Malheureusement pour lui, son ennemi avait plus de force et repoussa sans mal la tentative du chevalier de prendre le dessus. Link fut violemment projeté en arrière, contre la paroi de l'arène. Il se releva et se prépara de nouveau à attaquer. Il s'élança sur Ganondorf. Celui-ci était préparé. Il allait encore parer le coup du gamin en face de lui, il en était sûr. Ce qu'il n'avait pas prévu, c'est que ce n'était qu'une feinte, le véritable coup de l'épéiste venait d'en haut, et non pas du côté, comme il l'avait laissé croire. Le roi-démon s'écarta à temps pour ne pas être coupé en deux, mais pas suffisamment pour éviter de se faire une longue entaille au niveau du torse. Il recula, surpris.
- Cette sensation m'a manqué... Mon sang bouillonne dans mes veines, et mes muscles palpitent. Chacune de mes cellules tremble sous l'aiguillon de soif inextinguible. Mon corps entier réclame davantage de pouvoir.
Il activa la pierre occulte sur son front. Une tempête de miasmes l'entoura, alors qu'il se transformait peu à peu en véritable roi-démon. Il avait les cheveux rouge sang, les yeux noirs, et des écailles sombres teintées de reflets pourpres. Ses dents étaient jaunes et pointues. Au bout de ses doigts se trouvaient des griffes. Il regarda Link de ses yeux couleur nuit.
- Allez ! Approche ! dit-il d'une voix démoniaque. Il est temps d'en finir ! Et cette fois-ci, je ne me contenterai pas de ton bras !
- C'est ce qu'on va voir ! dit Link sur un ton de défi.
Ganondorf le toisa. Sans dire un mot, il créa des doubles de lui. Le chevalier, pris au dépourvu, ne savait où frapper. Tantôt il esquivait à droite, tantôt il parait à gauche... Les coups pleuvaient de tous les côtés. Le prodige hylien ne savait plus où donner de la tête. Il esquiva in extremis un coup latéral puis fut assailli tout de suite après avec un gourdin à piques. À force d'esquiver, de parer et de contre-attaquer, l'épéiste était exténué. Alors qu'il évita de justesse la lance d'un des doubles, un autre le frappa de son gourdin à la tête. Le héros fût projeté au sol. Du sang dégoulinait de son front. Sa respiration était saccadée. Il se releva tant bien que mal mais sentit tout à coup une douleur fulgurante dans l'épaule droite. Il vit Ganondorf ranger un arc de bois. Il venait de recevoir une flèche, mais pas n'importe laquelle ; une flèche de miasmes. Il hurla de douleur et tomba par terre. Il arracha le projectile de son épaule ensanglantée. Il allait se prendre un coup d'épée fatal quand quelque chose attira l'attention des doubles du roi-démon : Riju, Babil, Sidon, Mineru et Yunobo étaient arrivés en renfort. Chacun s'occupait d'un des doubles. Leur ennemi, énervé, cria :
- Vous apprendrez que l'union ne fait pas forcément la force !
Il rappela ses doubles et envoya une onde choc qui projeta les six héros. Seul Link tenait encore debout. Les cinq autres étaient allongés contre les murs, inconscients. Le chevalier s'élança vers Ganondorf. Celui-ci esquiva sans grande difficulté et attrapa l'épéiste par le bras. Il le plaqua au sol. Le héros lâcha son arme sous la violence du coup. Il tenta de se relever, mais le roi-démon l'empêcha en le frappant du pied si fort que Link en eut le souffle coupé. Son ennemi s'apprêtait à lui porter le coup de grâce. Le prodige esquiva en roulant sur le côté. Il se jeta sur son épée et la brandit contre le démon. Celui-ci était étonné de le voir encore se relever. Il changea son katana pour une massue à pointes et attaqua par en haut. Link avait prévu le coup. Il esquiva au moment où l'arme de son ennemi s'abattait sur lui. Le temps semblait tourner au ralenti. Il se jeta sur Ganondorf, mais celui-ci esquiva. Le chevalier sentit la massue du roi-démon frapper ses côtes à pleine puissance. Si fort qu'il fut projeté contre un mur. Il entendit plusieurs craquements : il avait les côtes cassées. Puis, Ganondorf mit la pointe de son katana sous sa gorge. Une goutte de sang perlait de l'entaille peu profonde au niveau de son cou. Le roi-démon l'avait vaincu. Il prit de l'élan, s'apprêtant à trancher la tête du héros adossé au mur, quand Sidon, le meilleur ami de Link, se releva. Il sauta sur Ganondorf. Link hurla :
- Non ! Il va te tuer !
Mais son ami n'en avait rien à faire. Il faisait ça uniquement pour gagner du temps, pour que Link puisse se relever. Le roi-démon esquiva et envoya sur lui un flot de miasmes. Le prince zora tomba à terre, les yeux vides. Il était mort. Le chevalier se rua sur lui, espérant qu'il lui restait encore une once de vie, mais rien. Le Zora ne respirait plus. Atterré par la mort de son ami, le prodige sentit une goutte sur sa joue. Une larme. Profitant de cet instant de faiblesse, Ganondorf se jeta sur lui. Link eut à peine le temps d'éviter. Le roi-démon lui avait fait une profonde entaille dans le dos. La tunique de l'épéiste, autrefois d'un bleu éclatant, était devenue pourpre, tachée de sang. Il se releva péniblement. Ses blessures lui faisaient un mal de chien, mais il ne pouvait pas perdre. Tout Hyrule comptait sur lui. Il s'élança sur le démon. Ganondorf attendit que le garçon soit assez proche de lui pour lui attraper les cheveux et le frapper dans le ventre. Le chevalier tomba au sol. Il essayait de se relever, encore, mais il n'avait plus assez de force. Il tenta le tout pour le tout en s'appuyant sur son épée et se remit debout, haletant. Il se jeta une dernière fois sur son ennemi, avant de se faire stopper net. Celui-ci l'avait devancé. Le prodige cracha du sang avant de s'effondrer. Le roi-démon lui avait planté sa lame au niveau du coeur. Link le savait. C'en était fini de lui. Il regarda une dernière fois son ennemi, avant de s'évanouir dans une flaque de sang. De son sang.
"Aaah... Alors, je vais mourir ? Ghh... Non... je ne peux... pas... Je dois le tuer... Non... je n'ai pas réussi... Mes amis... Zelda... Je suis... désolé..."
* * *
Pruh'a était en train de discuter des abîmes et des découvertes récentes les concernant avec Josha, son apprentie, quand elle entendit un cri. Elle sortit de son bureau en trombe et découvrit des soldats à terre, morts. Lorsqu'elle découvrit la cause de ce massacre, elle fut horrifiée. Le roi-démon, celui-là même qu'était parti combattre Link. Avait-il... perdu ? Non, impossible, c'était le héros. Armé de la lame purificatrice, l'épée de légende, et entouré des 5 sages, il ne pouvait rien lui arriver ! Et pourtant... le démon se retourna. Quand il la vit, il dit :
- C'est toi, la cheffe de ce lieu ?
Pruh'a ne répondit rien. Il allait tous les tuer, de toute façon. Ils n'auraient aucun moyen de lui échapper.
- Je prends ça pour un oui, poursuivit-il. Votre chevalier là... Ce gamin que vous avez envoyé pour me battre... Comment s'appelait-il déjà ? Ah oui, Link... Il est mort. Je l'ai vaincu. Ce mioche n'était pas de taille face à moi.
Tout le monde était pétrifié de peur. Link... mort ? Non, ce n'était pas vrai... Ça ne pouvait être vrai... La scientifique n'y croyait pas.
- Vous voulez une preuve ? demanda Ganondorf.
Il jeta le corps inerte de Link à ses pieds. Soudain, une soldate gerudo, survivante de l'attaque, lança un champignon au sol. Celui-ci émit de la fumée grise, si dense qu'il était impossible de voir au travers. Lorsque le roi-démon rouvrit les yeux, tous avaient disparu.
- Bah ! Je ne tarderai pas à les retrouver... De toute façon, ce n'est pas comme si j'avais quoi que ce soit à craindre d'eux...
Dans la cachette souterraine, tout le monde était horrifié. Link était mort. Ils n'avaient plus aucun espoir de vaincre Ganondorf. Tout était perdu. Puis, la soldate qui avait lancé le champi fumigène s'approcha du chevalier.
- Il n'est pas mort ! cria-t-elle. Il respire encore !
- Comment ?! s'écria Pruh'a. Vite ! Il faut le soigner !
- Mais... ses blessures sont très graves, et le sanctuaire de la renaissance a été détruit... répondit Hoz, le capitaine de la garde et ami de Link.
- Non...
- Je peux vous aider, moi, si vous voulez, fit une voix caverneuse venant d'un pan de mur écroulé.
- Qui... qui êtes vous ? demanda quelqu'un. Comment pouvez-vous faire ça ?
- Je suis un dieu qui régissait autrefois la vie sur cette terre. En échange d'argent, certaines personnes me donnaient une partie de leur énergie vitale, mais je peux aussi faire le contraire... Mais Hylia n'aimait trop mes combines, alors elle m'a transformé en statue, et après avoir été placé dans un village, elle m'a mis là... Je veux bien vous aider, par contre, vu son état, va falloir aligner les biftons, parce que là... Après, comme ce gars est un ami qui est venu plusieurs fois me voir, je vous ferai un prix !
Après quelques négociations et coeurs plus tard, Link rouvrit enfin les yeux. Il était toujours blessé gravement, mais c'était tout ce que pouvait faire le dieu déchu. Le chevalier essaya de bouger, mais n'y parvient pas. Il était allongé sur un des lits de l'infirmerie. Étonné, il se demanda s'il avait rêvé de son affrontement avec Ganondorf, mais la douleur dans ses membres lui indiqua que non. Comment était-il arrivé là ? Son coup avait-il finalement réussi ? Ganondorf était-il mort ? Où étaient les sages ? Tant de questions tourbillonnaient dans sa tête. Pruh'a rentra en trombe dans la "pièce", si l'on pouvait l'appeler ainsi, qui n'était en fait qu'une partie de l'abri souterrain séparé avec un rideau. Lorsqu'elle vit Link, les yeux ouverts, bien vivant, elle lui dit :
- Tu m'as fait peur ! J'ai cru que t'étais mort, moi !
Le chevalier voulut répondre, mais aucun son ne sortait de sa bouche. Il réussit finalement à dire d'une voix rauque :
- T... t'inquiète, je suis encore... vivant...
Parler avait épuisé ses dernières forces. Il referma les yeux. Il avait mal partout. Chaque partie de son corps le faisait souffrir. Il avait perdu beaucoup de sang durant la bataille, et, même si personne ne devait s'en douter, lui, savait que, malgré les soins de la statue démoniaque, il ne survivrait pas à ses blessures. Dans un dernier soupir, il murmura quelque chose d'inaudible, avant que son souffle ne cesse, à jamais.
[20 ans plus tard]
C'est bizarre, mais des fois, j'aperçois un fantôme dans l'abri de survie... Toujours le même. C'est un Hylien, plutôt petit, avec des cheveux châtain clair et des yeux bleus. Il porte une tunique maculée de sang et déchirée par endroits. Je me demande qui est-il...
Lin était assise sur une racine de la grotte, en train de jouer de l'ocarina. Sa mélodie préférée, apprise par son père, avait, dit-on, le pouvoir de déchaîner le ciel, de provoquer des pluies torrentielles. C'était le chant des tempêtes. Elle connaissait plein d'autres mélodies, mais celle-là était sa préférée. Elle n'était jamais sortie de l'abri de survie et des grottes, et n'avait donc jamais su ce qu'était la pluie. Elle savait juste que c'était de l'eau qui tombait du ciel. Ses autres mélodies favorites étaient le chant du temps, capable de faire revenir un objet ou tout un endroit à l'état où il était quelques minutes avant. Il y avait aussi la ballade du Poisson-rêve, une chanson sans pouvoir particulier, juste magnifique, la mélodie du vent, qui pourrait apparemment contrôler la direction de celui-ci... Alors que Lin entamait le refrain de l'hymne du dieu de la terre, elle le revit. Le fantôme était là, les yeux dans le vide. Cette fois, elle prit son courage à deux mains et se décida à aller le voir. Elle s'approcha.
- Hum... heu... salut...
Le spectre la regarda, surpris que quelqu'un puisse le voir. Il ouvrit la bouche et dit :
- Attends... Tu... peux me voir ?
- Oui. À vrai dire, ça fait plusieurs années que je peux te voir...
- Plusieurs années ? Et pourquoi n'es-tu pas venu me parler avant ?
- Je croyais que j'hallucinais... Les fantômes, ça court pas les rues. En plus personne à part moi pouvais te voir.
L'esprit ne répondit rien. La jeune fille demanda :
- Et... qui es-tu ?
Le fantôme lui dit qu'il se nommait Link, qu'il était un chevalier hylien, un héros, tombé sous les coups de Ganondorf le roi-démon. Il lui raconta son périple, ses batailles, ses victoires et ses défaites. Lin fut surprise de se retrouver avec le fantôme du héros dont son père lui contait les exploits. Elle finit par lui demander pourquoi son âme était restée sur Hyrule, au lieu de retourner auprès d'Hylia. Il lui répondit :
- Il me semble que lorsqu'un esprit reste attaché à la terre, c'est parce qu'il a des regrets, une mission qu'il n'a pu accomplir. C'est ce qui est arrivé aux prodiges et à l'ancien roi d'Hyrule. Moi aussi, j'ai failli à mon devoir. Je n'ai pas pu sauver Hyrule, et je le regrette...
"Ce serait donc pour ça qu'il serait resté ici ?" pensa Lin.
- Je... je crois que j'ai lu un jour, dans un livre, qu'il existait une mélodie qui pouvait apaiser les âmes tourmentées. Le Chant de l'apaisement, je crois...
Link la dévisagea. Pour lui, la seule chose permettant aux fantômes de retourner dans la mort, était de finir ce qu'ils n'avaient pas eu le temps de faire. C'est ce qui s'était passé avec les âmes des prodiges, qui avaient des regrets, et qui sont partis, une fois le fléau vaincu, et leur mission accomplie. Il n'avait jamais entendu parler de ce soi-disant "chant de l'apaisement". Pourtant, il décida de faire confiance à cette fille. Après tout, c'était la seule à le voir, et il sentait en elle une aura différente des autres.
- Par contre, continua Lin, je ne sais pas comment la jouer. Mais mon père m'a parlé d'une bibliothèque dans le château où il y aurait des livres sur tout ! Peut-être que là-bas, il y aura quelque chose sur cette mélodie.
* * *
Lin courait. Son père, Hoz, le capitaine de la garde, lui avait interdit de se rendre à la surface, sous prétexte que c'était trop dangereux. Mais la jeune fille ne l'écouta pas. Elle se dirigeait vers la grotte menant à un passage secret qu'elle avait trouvé, étant enfant. Ce passage menait vers l'extérieur, ou, plus précisément, les geôles du château. Elle ne s'y était jamais aventurée, au vu du nombre de monstres s'y trouvant. Mais cette fois, c'était différent. Elle sentait qu'elle devait libérer l'âme du héros.
Elle tourna à gauche à un croisement. Lorsqu'elle arriva aux prisons, ce fut comme elle l'avait prédit : un carnage. Pas pour elle, pour les monstres. Ceux-ci périssaient sous sa lame affutée. Quand il ne resta plus qu'un lézalfos, celui-ci se mit à courir vers la sortie, espérant donner l'alerte et appeler du renfort. Malheureusement pour lui, Lin l'avait prévu et était plus rapide. Elle sauta en avant, en battant le passage au pauvre monstre désespéré, et, d'un geste vif, lui planta sa lame dans le coeur. Il ne restait plus une créature encore en vie. L'épéiste se retourna et s'en alla en direction de la bibliothèque. Elle ne savait pas où elle se trouvait précisément, mais son père lui avait parlé du château quelques fois. Elle se rappelait que la salle des livres était un peu en hauteur, sous les quartiers principaux. Après quelques heures de marche et d'extermination de monstres, elle la trouva enfin.
Au centre de la pièce se trouvait un immense moblin d'argent. Il semblait garder les livres. Il se retourna et attaqua la guerrière. Celle-ci esquiva de justesse sa batte avant de contre-attaquer. Le moblin l'avait prévu et sauta à temps avant de lui asséner un coup dans les côtes. Lin fut violemment projetée contre une étagère. Elle se releva péniblement avant de s'élancer vers son adversaire. Elle lança son épée sur celui-ci. Le monstre esquiva sans mal, mais ne vit pas venir la deuxième attaque. La jeune fille avait fait exprès et l'avait attiré dans un piège. Le moblin s'en rendit compte trop tard, et sa tête vola d'un coup. Il explosa dans une nuée de particules violette. Lin rangea son épée et ramassa celle qu'elle avait lancée sur le moblin. Normalement elle n'utilisait qu'une seule arme, mais quand la situation l'exigeait, elle se servait de son autre épée, sa spécialité étant le combat avec deux armes.
Elle fouilla la bibliothèque de fond en comble, mais ne trouva aucun livre, aucune section "musique" ou encore "âme" ou "esprit". Elle arrêta ses recherches. La plupart des livres étaient abîmés. Certains manquaient même sur les étagères. En fait, ceux qui manquaient étaient, pour la plupart, des bouquins de magies, de nécromancie, ou même de... Musique !? Lin commença à comprendre. Le roi-démon avait pris tout les livres qui pourraient ou auraient pu servir à lui nuire. Il les avait sûrement brûlés. De rage, l'épéiste jeta un bouquin au sol. Sur celui-ci était écrit en grosses lettres : "musiques traditionnelles d'Hyrule". Lin l'avait feuilleté, mais la page du chant de l'apaisement était arrachée. Lin allait partir, quand un énorme bruit retentit entre les murs du château, comme un éboulement...
Mais qu'est-ce que c'est que ce bruit !? On aurait dit comme si quelque chose s'écroulait ! Et... ça vient des geôles ! Oh non !
Lin se retourna en vitesse et courut vers l'endroit d'où venait le bruit d'explosion. Arrivée au passage, essoufflée, elle se retrouva face à un lynel, et... un hylien !? L'épéiste les observa. L'Hylien tenait plusieurs choux-pêteurs (1) et les balançaient contre le mur pour en faire tomber des débris et bloquer l'entrée du passage. Lin se rapprocha discrètement des deux individus.
- Bon, ça, c'est fait ! Franchement, tous se faire dégommer par une gamine, quelle honte ! Enfin, au moins, elle ne pourra plus rentrer chez elle. Avec ce qu'on leur a envoyé comme monstres de toute façon, ces renégats sont sûrement déjà tous morts !
La jeune fille écoutait, horrifiée, les paroles du garçon. Ses amis, sa famille, tous morts... Tout ça parce qu'elle était sortie de l'abri et qu'un potentiel survivant de son attaque avait cafté à un subordonné du roi démon ? Au fond d'elle, un sentiment commençait à apparaître. Pas de la tristesse ou de la peur. Non. De la haine. De la haine envers ces démons qui, pour dominer ce monde, étaient prêts à tout. À tuer. Tuer. Tuer. Ce mot se répétait en boucle dans la tête de Lin. Elle aussi, elle en avait tué des monstres. Comment pouvait-elle les haïr pour une chose qu'elle-même avait fait ? La haine laissa petit à petit place au dégout. Envers elle. Elle aussi, avait du sang sur les mains. Elle tomba par terre, avec une tête d'enterrement. De loin, adossé à un mur, Link l'observait, sans rien dire. Il n'avait pas besoin qu'elle lui explique, rien qu'à sa tête, il avait deviné ce qu'elle pensait. Lui, ne connaissait que trop bien ce sentiment, enfin, surtout le lui d'avant Ganon. Avant, devoir tuer des monstres, et même surtout des yigas, des habitants du royaume comme lui, le répugnait.
Finalement la jeune fille sortit de sa cachette et brandit ses deux lames vers les sbires de Ganondorf. Sans un bruit, elle fonça sur le garçon, prête à lui planter ses épées dans le dos. Celui-ci se retourna à temps, et para avec un bouclier de métal. Il repoussa Lin sans mal et se mit en position d'attaque. L'héroïne n'avait pas eu le temps de se préparer que son ennemi s'élança et s'apprêta à la découper en deux avec son arme. L'Hylienne réussit à esquiver, mais pas totalement ; son adversaire lui avait fait une entaille au niveau du ventre. Elle cracha une gerbe de sang, avant de tomber à terre. Elle se releva en chancelant et se remit à l'attaque. Pris au dépourvut car il ne s'attendait à ce que la fille se relève, l'Hylien était mal : Lin avait clairement le dessus. Alors qu'elle s'apprêtait à donner un coup d'épée fatal, le lynel s'interposa et donna un coup vertical. L'épéiste aux deux lames n'évita pas complètement l'attaque, et son bras gauche fut tranché net. Elle hurla de douleur et s'effondra, inconsciente. Alors que le centaure allait l'achever, une lame vint se placer entre celle du monstre et la jeune fille au sol.
- Je suis peut-être un fantôme, mais je peux tout de même me battre ! cria le héros déchu. Je ne te laisserai pas toucher à ma successeure !
- Tsk ! Alors comme ça, tu peux te matérialiser ? grogna l'Hylien encapuchonné. Ca m'arrange pas vraiment !
- A vrai dire, je ne pensais pas en être capable. Mais ce lieu est lié à ma mort, je suppose donc que je suis plus puissant ici ! répondit Link. Avant que je ne tue, enlève donc ta capuche, que je puisse voir ton visage !
- ... Non, c'est inutile... Tsk ! Je pars !
Le guerrier tourna les talons, suivi du lynel.
- Tsk ! Si seulement il n'était pas apparu ! marmonna-t-il pour lui-même. Bon, tant pis. Au moins, j'ai récupéré une info intéressante...!
Sa capuche tomba, dévoilant sa tête : des cheveux noirs comme la nuit, des yeux couleur pourpre et des traits en tous points pareils à ceux de l'ancien héros. Il rabattit vite fait son couvre-chef et disparut l'instant d'après dans une nuée violette. Sans savoir pourquoi, le fantôme tomba à terre et prononça ces mots :
- Dark Link...
Ses lèvres avaient bougé toutes seules. Il n'avait jamais vu ce gars, ça, il en était sûr ! Alors, pourquoi avait-il l'impression de le connaître ? Et pourquoi savait-il son nom ? Soudain, des images déferlaient dans sa tête : un endroit gigantesque, couvert d'eau, un arbre rabougri trônant au milieu, un combat, deux épéistes. La bataille faisait rage, mais le garçon à la tunique verte finit par l'emporter. Cependant, il tombait à terre, à cause ses blessures. Puis, une fée rose apparut et... Non ! Il devait arrêter cette vision ! Il en avait déjà eu pas mal, de son vivant, notamment lorsqu'il avait trouvé un étrange miroir sombre, mais pour le moment, il devait se contenter d'amener Lin dans un endroit sûr, dans un lieu où elle pourrait se faire soigner. Il prit la jeune fille et se décida à l'amener à la fontaine des fées la plus proche...
(1) : Oui, je sais, dans TOTK et BOTW on dit fleur bombe, mais je préfère le mot choux-pêteur.
Bon, je pense avoir bien fait de téléporter Lin à une fontaine des fées. Si seulement ce lynel et ce "Dark Link" n'avaient pas été là ! Mais d'ailleurs, qui était-il ?! Pourquoi porte-t-il mon nom ?! Comment se fait-il que je le connaisse ?! Pourquoi... pourquoi est-ce qu'il me ressemblait autant ?
Link réfléchissait à cet Hylien, qu'il avait inconsciemment nommé "Dark Link" avant d'être assailli par des images d'un combat. Déjà, il était à la botte de Ganondorf. Par contre, dans sa vision, il avait dit quelque chose, avant de mourir, mais le fantôme ne se souvenait plus quoi. Il était sûr que c'était important, mais pas moyen de s'en souvenir. Il fouillait dans sa mémoire pour retrouver, mais rien. C'était comme après son sommeil de cent ans, lorsqu'il essayait de se rappeler des prodiges ou de Zelda. Rien, aucun souvenir, juste un gros mal de crâne. De plus, il ne pouvait pas quitter le château d'Hyrule, ou ce qu'il en restait, et ses alentours, donc impossible de savoir si Lin allait bien. Il aurait voulu lui dire d'aller retirer l'épée de légende dans les bois perdus, avant qu'elle ne s'évanouisse, mais il n'était même pas certain que la lame purificatrice s'y trouvait vraiment. En attendant, il restait là, dans la bibliothèque, à feuilleter des livres, pour tromper son ennui. Soudain, un autre ectoplasme apparut dans un nuage vert.
- Bonjour, Link.
Un Zora avec des écailles d'un rouge éclatant apparut.
- Sidon ! cria l'ancien chevalier. Je suis tellement content de te revoir ! Mais... si tu es sous cette forme, alors toi aussi...
- Je ne regrette pas de t'avoir aidé Link. Même si je pensais que mon sacrifice te permettrait de vaincre le roi-démon. C'est peut-être car tu ne l'as pas vaincu que je suis resté ici...
- Désolé Sidon, par ma faute, tu es mort, comme Riju, Babil, Yunobo et sûrement beaucoup de personnes dans le royaume...
Le fantôme du prodige baissa les yeux vers le sol. Son ami posa sa main sur sur son épaule, et lui dit que ce n'était pas de sa faute mais plutôt celle du roi-démon, mais Link ne le croyait pas. Il repoussa la main du prince zora.
- Si, c'est de ma faute ! Ne me cherche pas d'excuses ! Je n'ai pas été assez fort pour le vaincre, et j'ai anéanti les espoirs de tant de gens à travers Hyrule ! Maintenant, Ganondorf domine le royaume, l'épée de légende se trouve on-ne-sait-où et celle qui devait sûrement prendre la relève en tant qu'héroïne de la lame purificatrice est probablement morte !
Link tourna le dos à l'ancien sage de l'eau et se mit à courir. Il devait s'en aller, loin. Loin de cet endroit maudit qu'étaient les ruines du château. Loin de tout ça. Il voulait reposer en paix, pas être un fantôme, pas avoir autant de regrets. Sans s'en rendre compte, il était arrivé à l'extérieur. Il pleuvait. L'esprit contempla le royaume, la plaine, la montagne, les forêts... Il reprit son chemin, puis il se stoppa net. Il ne pouvait plus avancer, comme si une barrière invisible l'en empêchait.
- Ah... c'est vrai... Un fantôme ne peut pas s'éloigner de l'endroit de sa mort... J'avais oublié... C'est bête, quand même, pour moi qui aime la liberté.
Link commença à rire. Un rire jaune, de quelqu'un à qui le destin a réservé un mauvais sort. Puis, au bout de quelques secondes, il s'arrêta.
- Sérieusement, déesses ? Après m'avoir laissé en vie face à ce gardien il y a plus de cent ans, vous me laissez à Hyrule en tant que fantôme ? Vous ne voulez vraiment pas de moi...
Le spectre s'assit sur le rebord des remparts entourant l'ancienne citadelle. Il regardait le ciel. Et ce gars... Dark Link... Lorsque j'ai lu les livres de la bibliothèque, l'un d'entre eux en faisait mention. Les légendes d'Hyrule je crois. Il ne disait pas son nom, mais... "Un sosie du héros du temps, son ombre, dans une salle inondée, un arbre se trouvant au centre" ça ne peut être que lui. Le décor décrit par ce bouquin est exactement comme celui de ma vision. Ce n'est pas un hasard. Il faut que je le revoie, que je le retrouve. Mais... comment ?
Je crois bien que j'me suis perdue... C'est tellement grand Hyrule ! Et j'ai mal aux pieds ! Pff... depuis que la grande fée a soigné mon bras, j'ai l'impression d'avoir fait que ça, marcher... En plus, je sais même pas où je suis ! Tiens ? C'est moi ou cet arbre a bougé ?!
Une semaine avait passé depuis l'affrontement de Lin avec l'Hylien, et cela faisait maintenant trois jours qu'elle errait en Hyrule, après avoir été soignée par les fées. Au final, elle s'était perdue, au beau milieu d'un bois recouvert de brume, où régnait une atmosphère plutôt... étrange, et pesante, comme si on y entrait, pour ne plus jamais en ressortir. C'est ce que ressentait l'épéiste. Les arbres aussi étaient bizarres et effrayants, avec leurs visages tordus et leurs expressions d'horreur, figées dans l'écorce. De plus certains bruits, comme des ricanements lointains, ne laissaient rien présager de bon. On aurait dit les rires d'un enfant, qui n'aurait un jour pas retrouvé son chemin. L'épais brouillard ne faisait que renforcer cette peur insurmontable de se perdre et de jamais ressortir. Pour ne plus penser à ça, la jeune fille avait sorti son ocarina, et commencé à jouer des notes lui passant par la tête, à improviser. Cela la détendait, de se concentrer sur sa musique, sur son morceau, son chant. Puis, de derrière les fourrés, sortit un être, sans visage, habillé avec de vieux vêtements, usés par le temps.
- Toi... commença-t-il. Tu... tu connais le chant de Saria ! Tu es une de ses amies ?
Lin fut surprise par la question de l'inconnu. Elle ne connaissait aucune "Saria" et avait joué ces notes au hasard, pas intentionnellement. Elle trouva d'autant plus bizarre sa réflexion suivante :
- Ah, non, c'est vrai, Saria n'est plus, depuis longtemps... Depuis combien de temps j'erre, seul, dans les bois perdus ? Je ne sais même plus... Mais, toi, fille à l'ocarina, tu connais sa chanson ! Tu veux jouer ce morceau avec moi ?
- Mais, d'abord... Qui es-tu ? Je veux bien jouer avec toi, mais, quel es ton nom ?
- Mon... nom ? Je ne sais pas, je n'en ai pas... Ici, je ne suis que "Skull Kid", l'enfant perdu, sans visage... Bon, on commence à jouer ?
FA LA SI ! FA LA SI ! FA LA SI MI RE, SI DO SI SOL MI, RE MI SOL MI !... Les notes s'enchainaient, l'un les jouait à la flûte, l'autre à l'ocarina. Ils ne s'arrêtèrent de jouer qu'une fois la nuit tombée. Même si, à travers la brume entourant les bois perdus, on ne pouvait pas la voir, la lune brillait d'une pâle lueur blanche. Le brouillard se leva un peu sur les marais Midho, au nord de la forêt, où se trouvaient Lin et le Skull Kid. On arrivait maintenant à apercevoir le visage de l'astre, qui, contrairement à l'enfant des bois, en avait un. Lorsque la joueuse d'ocarina l'aperçut, elle se glaça d'horreur. La face de la lune n'avait rien de magnifique, comme elle l'avait vu les nuits précédentes. Celle-ci n'inspirait que de la peur et de la haine, un visage crispé, dans une expression de colère, des yeux noirs, à la pupille jaune, et des dents serrées les unes contre les autres. Soudain, le flûtiste s'arrêta de jouer, pour regarder la lune, à son tour, terrifié.
- N... non ! Pas lui ! Il m'appelle ! Je...
L'enfant sans visage s'éleva dans les airs, comme contrôlé, par un étrange masque violet, orné de pointes.
- Skull Kid ?! cria Lin. Que... qu'est-ce qu'il se passe ?!
Le sol s'ouvrit en deux sous les pieds de la jeune fille, qui tomba, lentement, mais sûrement. Dans sa chute, elle eut d'étranges visions : une lune semblable à celle qu'elle venait de voir, un personnage souriant, vêtu de violet, un être fait de feuilles et de bois, des géants, des masques, un dieu démon. Puis, son dos heurta le sol. Sa vision s'arrêta. Elle était toujours dans les bois perdus. Sa chute qui lui avait paru sembler une éternité n'avait en fait duré que quelques secondes. Elle se releva, surprise.
- Ha ha ha ! Tu devrais voir ta tête ! Ha ha ha ! riait l'enfant des bois, le masque violet sur le visage.
- Skull Kid !? Mais, qu'est-ce que...
- Bon ! la coupa le sans-visage. Je m'en vais ! Peut-être, à dans trois jours !
Il s'envola, en direction de la lune, laissant Lin seule au milieu de la forêt. Puis, lentement, petit à petit, la brume s'épaissit, jusqu'à ne former qu'un énorme nuage blanc, impossible de voir au travers. L'épéiste se retrouva tout à coup à l'entrée du bois, à côté d'une torche dissipant les ténèbres du brouillard. Elle prit la torche et son courage à deux mains, et s'enfonça dans la forêt.
Encore ?! Pourquoi est-ce que je reviens toujours systématiquement à mon point de départ ?! Pourtant, j'ai réussi à rentrer dans les bois avant que Skull Kid ne soit possédé par ce masque... Tiens ? Je n'avais jamais vu ce chemin.
Lin errait dans les bois perdus, sans jamais retrouver l'endroit où elle avait vu Skull Kid la dernière fois. La brume finissait toujours par s'épaissir et la ramener à l'entrée de la forêt. Elle aurait pu s'en aller, sortir de ces bois maudits, mais non. Elle était convaincue que quelque part, au fin fond du brouillard, se trouverait ce qu'elle cherchait. Ce que c'était ? Elle n'en savait rien. Elle avait juste la conviction qu'elle devait continuer. Soudain, elle vit un énorme tronc, creux, couché sur le sol. Elle s'y engouffra, et se retrouva dans une magnifique forêt verdoyante, un arbre gigantesque la surplombant, et devant, au milieu des bosquets et des fougères, posée sur son socle de pierre et entourée de fleurs bleues à quatre pétales, trônait la légendaire épée de légende.
Lin s'approcha. Elle regarda la lame, prit une grande inspiration et empoigna le manche bleu foncé. Petit à petit, l'épée bougeait se retirait de plus en plus, jusqu'à sortir totalement de son socle, dans la main de la jeune fille. Puis, comme lorsqu'elle avait vu le masque violet, des images défilaient devant ses yeux : un Hylien, un garçon, vêtu d'une tunique verte, retirant la lame purificatrice. Lorsque sa vision se termina, elle sut ce qu'elle devait faire. Elle brandit l'épée de légende vers le ciel. Celle-ci se tint de bleu et émit une forte lumière blanche. Puis, l'arbre géant se mit à parler d'une voix caverneuse.
- Oooh ! Enfin, depuis si longtemps je t'attendais... Tu es enfin revenu, héro du temps...
- Le héros du temps ? Qui est-ce ?
- Haa... Je devais divaguer... Il a quitté ce monde depuis longtemps, je l'avais oublié...
- Serait-il... Un héros des anciennes légendes ? Pourquoi avoir cru que c'était moi ? demanda Lin.
- Je ne sais pas. Tu m'y as fait penser, c'est tout... Je suis l'arbre Mojo. Tu as retiré l'épée de légende, comme tant d'autres héros avant toi... Pars délivrer Hyrule de la tyrannie du roi-démon... Pour moi, il sera bientôt trop tard... J'ai lutté pour rester en vie jusqu'à ce qu'un nouveau héros ne vienne, mais je sens que la malédiction que m'a jetée Ganondorf se propage... Korogus, enfants de la forêt... Veillez... Veillez sur les bois perdus, et sur le socle de l'épée... Je vous les... confie...
- Que... quoi !? Vous allez mourir !? Mais... je... je ne peux pas vous aider !? demanda Lin.
- J'ai bien peur qu'il ne soit trop tard... répondit l'arbre Mojo. Des miasmes se propagent dans mes racines... Je ne peux plus... Link, héros du temps, Saria, les Kokiris... Je ne vais pas tarder à vous rejoindre...
Sur ces mots, l'arbre Mojo rendit son dernier soupir, sous les yeux des Korogus, ses enfants, les esprits des bois. Bouleversés, ils ramenèrent Lin à l'entrée des bois perdus, puis disparurent dans la brume. La jeune fille allait continuer son chemin en direction de la plaine, quand elle fut arrêtée par une voix.
- Tu as rencontré un terrible sort, n'est-ce pas ?
Un homme souriant, aux cheveux roux et portant des vêtements violets se tenait derrière Lin. Elle se retourna inspectant cet étrange personnage. Il portait un énorme sac sur son dos, couvert de masques de tous genres. Elle jurerait l'avoir déjà aperçu quelque part, mais impossible de s'en souvenir. Et puis, cette question... Un terrible sort ? Qu'est-ce que cela voulait dire ? Voulait-il parler de l'étrange masque ayant emporté Skull Kid ? Ou de la mort du protecteur de la forêt ? Mais comment pourrait-il être au courant ?
- Qui êtes vous ? demanda l'épéiste.
- Je ne suis qu'un simple marchand de masques, parcourant le monde à la recherche de perles rares, d'instants, de personnages, à cristalliser éternellement dans mes oeuvres. Tu l'as rencontré n'est-ce pas, le masque de Majora ? Un masque violet avec des pointes ?
Effectivement, Lin l'avait vu. C'était celui qui avait possédé l'enfant sans visage. Mais pourquoi lui demandait-il ça ?
- Ce masque m'appartient. On me l'a dérobé. Cet objet est maléfique, il ne fait que renforcer les sentiments négatifs de celui qui le met sur son visage. Je ne sais pourquoi, mais il semble être attiré par ce "Skull Kid". Il faut le retrouver ! Chaque seconde creuse nos tombes, scelle nos destins !
- Que veux-t-il faire ?
En guise de réponse, le vendeur de masques leva les yeux vers les cieux et observa la lune, encore visible, bien que l'aurore pointait à l'horizon. L'astre semblait d'ailleurs plus proche que le soir où l'enfant des bois avait été "possédé". Peut-être n'était-ce qu'une impression, ou peut-être que... si. La lune se rapprochait, lentement, mais sûrement, et inexorablement de la surface de la terre. Le temps semblait s'arrêter, tandis que la lune allait heurter la plaine d'Hyrule. Elle était encore assez loin de celle-ci, mais réussir à stopper sa chute relèverait du miracle.
- La lune sombre, reprit l'étrange personnage. Dans trois jours... Dans trois jours, si Skull Kid n'est pas arrêté, le monde sera détruit, nous serons tous détruits. Notre monde va plonger dans le désespoir. Toi seule peut changer le cours de l'histoire.
- Mais... comment ?! Que dois-je faire ?! Je n'ai que trois jours ?!
Avant d'avoir répondu à sa question, le vendeur de masques disparut peu à peu comme un mirage, laissant Lin seule, à réfléchir sur ce qu'elle devait faire, et sur cet étrange marchand, souriant, mais cachant une aura de... de démon... "Qui est-ce ? Qui est ce vendeur de masques ?"
Trois jours pour sauver le monde !? Impossible... Jamais je n'arriverai à stopper la chute de la lune en trois jours ! Comment je vais faire ? Raah ! Si seulement ce satané vendeur de masques m'avait donné plus d'infos... Non... Calme-toi Lin... Tiens ? Où est mon ocarina ?
Lin avait commencé à marcher en direction de la plaine après avoir rencontré l'étrange vendeur de masques. Arrêter la lune... Sérieusement !? Jamais elle n'y arrivera à temps. Alors, pour se changer les idées, elle voulait jouer de l'ocarina. Malheureusement, celui-ci semblait avoir disparu. L'épéiste avait beau regarder partout, son instrument de musique s'était évaporé. Peut-être que quelqu'un lui avait volé quand elle avait le dos tourné ? Ou alors, il était tombé sur le chemin ? Elle refit la route qu'elle avait empruntée en sens inverse, en fouillant chaque recoin, chaque herbe, mais sans rien trouver.
- Mais c'est pas possible ! Il est forcément quelque part ! Comment je vais faire sans, moi ?
Après avoir passé l'après-midi à chercher son instrument au lieu de réfléchir à un moyen d'arrêter la lune, Lin s'arrêta dans les ruines d'un vieux ranch, épuisée. Elle leva la tête en direction de la pancarte en bois à moitié détruite par le temps et rongée par la mousse, sur laquelle on pouvait encore lire :
- R... Ranch Lonlon ?
Après avoir prononcé ces mots, d'autres souvenirs ressurgirent dans la mémoire de la jeune fille : une gamine aux cheveux châtains, deux hommes moustachus, l'un dormant, l'autre travaillant en grognant, et une jument à la robe brune attirée par une mélodie que chantait la fillette. Une vision, encore. C'était déjà la troisième fois que ça lui arrivait. Peu à peu, elle recouvrait une mémoire qui n'était pas la sienne. Aucune des visions qu'elle avait reçue ne faisait référence à des lieux ou à des choses qu'elle avait vécus. Elle voyait les souvenirs d'une autre personne, de quelqu'un qu'elle ne connaissait pas. "Mais, pourquoi ? Qu'est-ce que j'ai à voir avec cette personne ?"
Lin chercha un endroit où camper dans les ruines. Il faisait presque nuit et les lueurs rougeâtres du crépuscule se reflétaient sur le visage de la lune, lui donnant un air encore plus effrayant que d'ordinaire. D'ailleurs, celle-ci s'était encore rapprochée de la plaine, prête à la heurter et la détruire si on ne l'arrêtait pas à temps. L'épéiste se dirigeait en direction de la tour du fort de guet, l'endroit sur lequel l'astre semblait se rapprocher. Après quelques minutes, l'Hylienne trouva un recoin qui paraissait assez confortable. Elle allait s'endormir, quand un cri retentit. "Eh allez ! On est jamais tranquille dans cette plaine..." Elles se leva et alla voir ce qui se passait. Des stalfos, des monstres-squelettes, s'en prenaient à un Zora de couleur bleue avec un oeil en moins. Etonnamment, le cri ne venait pas de l'homme-poisson, mais bien d'un des monstres. Le Zora borgne se débrouillait plutôt bien avec une lance, et en un rien de temps les trois squelettes qui l'entouraient avait disparu dans une explosion de fumée violette. Alors que Lin allait sortir de sa cachette, elle esquiva de justesse une lance bleue dont la pointe avait la forme d'un croissant de lune.
- Waaa ! Hé ! Arrête ! Pourquoi tu m'attaques ? lança-t-elle en direction du guerrier.
- Hum ? Une Hylienne ? Mais qu'est-ce que tu fais ici ? demanda l'homme-poisson.
- Je pourrais te retourner la question ! Elles sont pas sensés vivre au domaine zora, les poiscailles dans ton genre ?
- Je te signale que la "poiscaille" dont tu parles, elle a failli te tuer avec une lance il y a cinq secondes ! railla l'autre.
- Et t'en es fier ? T'es qui d'ailleurs ?
- Moi ? Je suis un musicien zora, je m'appelle Dossi, répondit-il. Et toi ?
- Moi c'est Lin. Je suis une, heuu... une aventurière.
- Ah ouais, d'accord... commença Dossi. Une aventurière...
- Toi aussi tu es venu par ici parce que la lune t'intrigue ? demanda Lin.
- Attends... Tu peux la voir toi aussi ? Son visage est apparu subitement, et quand j'en ai parlé aux habitants du domaine, personne ne m'a cru, et tout le monde disait que je délirais. Par contre c'est moi, ou la lune est plus proche qu'avant ?
Lin raconta tout au Zora bleu depuis le début, c'est-à-dire le moment où elle avait rencontré Skull Kid, et maintenant, en omettant volontairement de parler de l'épée de légende ou de la mort de l'arbre Mojo. Dossi avait l'air perdu : comment un simple gamin sans visage avec un masque chelou pouvait faire tomber la lune ? Ça n'avait aucun sens. Mais pourtant, il la croyait. Cette fille n'avait pas une tête de menteuse, de plus, elle aussi pouvait voir le visage de l'astre, celui que personne de son village n'avait pu voir. Il décida de lui faire confiance. Après avoir partagé, ou plutôt, avoir été OBLIGÉ de partager un poisson avec l'épéiste, qui avait vraiment l'air affamé, il s'allongea dans l'herbe, en regardant les étoiles.
- Dis... commença Lin. Qu'est-ce qu'il s'est passé en vingt ans ? Depuis que Ganondorf a pris le pouvoir ?
- Quoi !? Comment ça ? Tu ne sais rien du monde ou quoi ? Tu vivais dans une grotte ?
- Techniquement, t'as pas tort... marmonna l'Hylienne tout bas.
- Bon, alors après la défaite du héros et des sages, le roi-démon s'est rendu à la cité Gerudo, il s'est autoproclamé roi, parce que soi-disant il était leur chef il y a je sais pas combien de temps, et a commencé à conquérir Hyrule peu à peu. Il y a bien des gens qui ont essayé de résister, mais Ganondorf leur a envoyé des monstres tous plus forts les uns que les autres, il ne reste plus aucun groupe de résistance à ma connaissance, tous ont fini par capituler... raconta Dossi.
- Comment ça, "à ta connaissance" ?
- J'ai fait partie de la résistance, quand Ganondorf a commencé sa conquête d'Hyrule, répondit l'homme-poisson. Mais je me suis enfui pendant une bataille contre des lynels. C'est là que j'ai perdu mon oeil gauche...
- Tu t'es enfui !? cria Lin. Mais pourquoi t'es pas resté te battre ?! Si ça se trouve vous auriez gagné !
- J'avais pas envie de crever, tu vois ! Et puis, honnêtement, je pense pas que j'aurais pu changer les choses. De toute façon, c'est pas parce que j'ai abandonné la lutte que je suis du côté de Ganondorf ! Je le déteste, comme tout le monde, mais personne n'a le courage de se dresser contre lui, et, tout seul, je ne peux rien faire. Il a gagné la guerre, c'est tout...
S'en suivit un long silence, durant lequel ni Lin ni Dossi n'osa dire quoi que ce soit. Finalement, l'épéiste le brisa :
- Moi, j'en ai le courage... Je le tuerai de mes propres mains.
Au fond d'elle, elle ressentait de la colère, non plus que ça, de la haine envers le roi-démon, mais cette fois, c'était une haine violente, qui s'agrandissait au fur et à mesure qu'elle progressait dans sa quête, comme si ce n'était pas la sienne, mais plutôt celle d'un autre, "de celui de mes visions..."
Ce pays est vraiment étrange... Déjà, la lune a un visage heu... Comment dire ? Terrifiant ? Et depuis hier j'ai l'impression qu'elle s'est rapprochée. En plus, je n'ai encore jamais croisé personne. C'est louche. Quelque chose me dit qu'il faut pas que je m'éternise trop longtemps ici...
Moj était en train de marcher en direction de la tour au loin, à côté de l'immense château délabré. Sans savoir pourquoi, il sentait qu'il devait aller là-bas. Tout à coup, il se cogna dans quelque chose, ou plutôt, dans quelqu'un. Un homme-poisson le regardait. Le Zora se demandait qui était cet être semblant sculpté dans du bois. Puis, une fille sauta du haut d'un arbre et demanda :
- Salut ! T'es qui ? J'ai jamais entendu parler d'une quelconque espèce faite de bois et de feuilles !
- Heu... répondit Moj. Je suis un mojo. Je m'appelle Moj. Mes parents avaient beaucoup d'inspiration ! rajouta-t-il ironiquement. Je suis en voyage. Mais, dites-moi... Il y a un problème dans votre pays, non ?
- Ouais ! dit le Zora. Et pas qu'un ! Non seulement il y a un roi-démon qui tyrannise tout le monde, mais en plus la lune va tomber dans trois jours et ce sera la fin du monde, tout ça à cause d'un gamin avec un masque.
- Je ne crois pas avoir tout compris...
- En gros, on va tous mourir, lança la fille. Sauf si on arrive à stopper la lune, mais honnêtement je ne vois pas trop comment...
Le mojo en resta bouche-bée. Comment ça, la fin du monde ?! Ses mauvais pressentiments étaient donc vrais finalement. Il aurait mieux fait de ne jamais se rendre dans cette contrée maudite... Il n'aurait jamais le temps de retourner dans son monde avant la chute de l'étrange lune. Finalement, il décida d'accompagner la fille et le Zora, qui s'appelaient respectivement Lin et Dossi. Le groupe se mit en marche vers la tour du fort de guet, l'endroit le plus haut des alentours. Ils passèrent toute la journée à avancer, avant d'enfin arriver au fort de guet, endroit dont le père de Lin lui avait beaucoup parlé.
Devant la tour se tenait un Goron. "C'est étrange, pensa Lin, les Gorons vivent au nord, dans la montagne de la mort... Que fait-il ici ?" Le mangeur de cailloux se retourna.
- Hum ? D'autres gens ? Vous aussi, vous avez vu la tête de la lune ? Moi j'essaye d'ouvrir c'te porte depuis une heure, mais rien à faire, elle bouge pas ! J'crois faut un truc antique pour ouvrir, ou quequ'chose dans le genre... Sinon, j'm'appelle Rudani.
- T'as essayé de la défoncer ? demanda Dossi.
- Tu crois vraiment qu' j'ai pas testé ? J'ai pas réussi ! répondit le Goron. Et du coup, vous répondez à ma question ou quoi ?
- Oui, on est venus pour la lune, dit l'épéiste. Si on ne l'arrête pas, dans trois... NON ! Dans UN jour c'est la fin du monde !
- Attends... QUOI- MAIS... Oh non, c'est vrai, ça fait déjà deux jours qu'on marche ! On est foutus ! cria Dossi.
Alors que le Zora se lamentait sur son sort, un objet bleu tomba de sa sacoche.
- Hé, mais ! C'est mon ocarina !
- Hein ? C'est à toi ce truc ? Je l'ai trouvé dans les herbes...
La fille ramassa l'instrument tombé par terre et se mit à jouer les notes du chant des tempêtes. Un violent orage s'abattit instantanément sur les quatre aventuriers.
- Super, on est trempés maintenant... grogna Rudani.
Dossi, lui, aimait la pluie. Il sortit sa guitare et se mit à accompagner Lin. Le Mojo en fit de même et prit un étrange objet, qu'il appelait trompette mojo. Seul le Goron ne jouait pas. Finalement, en les voyant tous faire de la musique, il prit des tambours dans son sac. Tous les quatre formaient un véritable groupe. Ils s'arrêtèrent au bout d'un moment, épuisés. Puis, Lin prit la parole.
- Je crois que je sais comment on va vaincre Skull Kid...
Je ne suis pas sûre que ça va marcher, mais c'est notre seul espoir. On doit tenter. De toute façon, ce n'est pas si on pouvait faire quoique ce soit d'autre face à cette lune démoniaque et ce masque violet...
Ça y est... Il était enfin temps, l'heure de la collision approchait à grands pas, de même pour le plan de Lin. Ils avaient enfin trouvé comment accéder au sommet de la tour du fort de guet, et non, la solution n'était pas l'escalade. En fait, Rudani, le marchand goron, avait trouvé un étrange objet, appelé "ressort", que l'épéiste n'avait jamais vu de sa vie. Cet étrange objet pouvait projeter quelqu'un en l'air, même le Goron décollait. "Ce truc a vraiment une force de dingue !" pensait Lin.
La lune était descendue bien bas, et Skull Kid, ou plutôt, le masque qui le possédait était satisfait. Jamais la gamine des bois perdus ne pourrait arrêter son plan ! La destruction du monde était en marche, et personne désormais, ne pourrait le stopper ! A moins que... Zut ! Les quatre gêneurs avaient réussi à monter en haut de la tour. Bah ! C'est pas comme si ils pouvaient faire quelque chose ! Qu'ils soient les premiers à périr écrasés par la lune, si ça les amuse !
Lin, Rudani, Dossi et Moj étaient prêts. Ils sortirent leurs instruments de musique.
- Suivez ma mélodie ! dit l'Hylienne.
Elle commença à jouer de l'ocarina, vite accompagnée par une guitare, une trompette et des tambours. Tous jouaient la mélodie des bois perdus, celle que l'on entendait autrefois, paraît-il, dans un mythique lieu, le bosquet sacré, cette mélodie appelée le chant de Saria.
Skull Kid s'arrêta. Cette chanson... Tellement... Tellement de souvenirs revenaient en lui. Saria, les Kokiris, cette musique qu'elle lui avait apprise, les journées passées à la jouer à la flûte, seul, dans les bois perdus, cette musique qui résonnait partout dans la forêt, jusqu'à l'entrée des bois, le garçon à la tunique verte et sa fée qui lui avait donné ce masque de monstre, pour qu'il ait enfin un visage... Tous ces bons moments passés dans la forêt lui revinrent en mémoire, de même que sa rencontre avec les fées Taya et Taël.
- Non... Arrêtez... Saria... Pourquoi ?!
Sa conscience avait repris le dessus. Il arracha le masque à pointes de son visage et le balança par terre.
- Moi... Tout ce que je voulais... C'était les retrouver... dit-il.
Tous étaient ébahis. Le plan de Lin avait réussi. Même elle n'y croyait pas. Ça avait marché ! Ça... avait... marché !!! Le monde n'avait plus à craindre la chute de la lune sans personne pour la commander ! C'était fini !
Enfin, non, pas totalement...
Le masque de Majora, lui, n'en avait pas fini. Il ne pouvait pas échouer, pas si près du but ! Pas à cause du plan débile d'une gamine ! Non. Il voulait se délecter de la terreur des gens, les voir hurler d'effroi à l'approche de la lune, il voulait voir le roi-démon effrayé à l'idée de mourir. Il ne pouvait pas perdre. Pas tant qu'il aurait encore des forces. Il détestait perdre. Pour lui, tout ceci n'était qu'un jeu, fait de pions à sacrifier. Il s'envola. L'astre maléfique ouvrit sa bouche.
- Toi là ! fit le masque. Ce n'est pas fini ! Tu crois que tu peux m'avoir aussi facilement ?! Je ne perdrai pas. Laisse-moi réfléchir... Je sais ! On va jouer au loup !
Quoi ?! Mais qu'est-ce que ça voulait dire ? Jouer au loup ? Tout ceci ne serait donc qu'un jeu pour lui ? Lin accepta. En échange, Majora lui donna un étrange masque. L'épéiste, méfiante, le mit tout de même sur son visage. Une fois celui-ci mis, elle se transforma en un dieu démon, comme celui qu'elle avait vu dans une vision. Elle sentait une incroyable puissance en elle. Le masque violet devait vraiment la sous-estimer pour lui donner un atout pareil ! Elle s'élança à sa poursuite, à l'intérieur de la lune.
L'intérieur de l'astre était étrange. Elle qui s'attendait à voir un endroit sombre, morbide, fut étonnée de se trouver dans une vaste prairie avec un ciel bleu. Un enfant portant le masque de Majora était assis au pied d'un arbre. Il se leva.
- Bon. On joue maintenant ? Commençons.
Le masque se transforma. Il tenta quelques attaques envers la déesse-démone, mais avec son nouveau pouvoir, elle évita sans aucun problème tous ces coups, avant de le frapper de son épée longue.
- A... aaargh ! Eh c'est pas du jeu ! cria le masque de Majora.
- C'est toi qui m'as donné cette puissance, tu n'aurais sans doute pas dû... rétorqua l'épéiste.
- Je n'ai pas fini ! Il me reste des cartes en main !
- Non, la partie est finie.
Lin chargea avec son arme et lança sa plus forte attaque qu'elle connaissait, l'attaque tourbillon. Le monstre se rechangea en masque, inoffensif.
- Ha ! J'ai perdu la partie, mais toi aussi ! J'ai été vaincu, mais la lune va continuer de tomber... Telles furent les dernières paroles du masque de Majora.
Puis, l'étrange vendeur au sourire figé apparut. Il récupéra le masque de Majora, et avant de disparaître lança ces paroles :
- Jeune fille, tu es à la recherche d'une musique, n'est-ce pas ? Je vais te donner un indice : Renverse les bois et tu trouveras l'apaisement. Et, un conseil, ne tarde pas trop, joue le chant du temps, avant que la lune ne s'écrase... Adieu...
Quoi ? Mais que voulait-il dire ? Renverse les bois ? Ça n'a aucun sens ! Par contre, le vendeur n'avait pas tort concernant la lune. Elle ne s'arrêtait toujours pas. Le Mojo, le Zora et le Goron se demandaient quoi faire, quand l'Hylienne leur raconta ce que lui avait dit le marchand. Jouer le chant du temps, revenir à avant que l'astre ne commence à chuter. Cependant, ça signifierait perdre tous leurs souvenirs depuis ce moment-là, mais qu'importe, c'était ça, ou le monde était détruit. Il allait commencer à jouer, quand Skull Kid, toujours à terre, leur demanda s'il pouvait jouer avec eux aussi.
- Si tu veux, répondirent-ils.
Alors, les notes du chant du temps s'enchainaient, et à la fin du morceau, tout revint comme il y avait trois jours. Lin se trouvait dans les bois perdus, en compagnie de Skull Kid. Cependant, ni l'un ni l'autre n'avait oublié ce qui s'était passé pendant ce laps de temps. Ils se regardèrent, puis se mirent à faire de la musique, et on les entendit jouer ainsi, jusqu'à la forêt korogu, jusqu'à la fin de la nuit.
Récapitulons : j'ai récupéré l'épée de légende, des infos sur où pourrait potentiellement se trouver le roi démon et j'ai sauvé le monde. Tout ça en trois jours... Ouah mais je suis trop balèze en fait ! Faudrait qu'je raconte tout ça à Link. Mais d'abord, je vais aller voir ce charmant village !
Charmant village, charmant village... Bon, c'était pas trop ça. Il tenait plus du village fantôme. Des légumes écrasés se trouvaient par terre, une toile teinte était à moitié déchirée et des espèces de champignons en lambeaux gisaient sur le sol. A l'entrée, on pouvait voir un panneau rapiécé, illisible. C'est clair qu'il ne ressemblait en rien à ce qu'il avait été vingt années plus tôt... Sûrement des monstres qui l'avaient ravagé.
Lin explora le village. Il y avait des moulins, une ferme, une école... Tout ça pratiquement détruit. Seule une maison, un peu à l'écart semblait être intacte. Enfin, intacte, pas vraiment, mais par rapport aux autres... Il y avait seulement un peu de lierre qui recouvrait son côté gauche, et le reste était presque en parfait état. Peut-être une fissure ou deux, mais rien de grave. Les monstres l'avaient épargnée.
L'épéiste entra. A l'intérieur, il y avait un grand cercle dessiné sur le sol, avec plusieurs symboles à l'intérieur. Des feuilles étaient étalées par terre et plusieurs livres étaient ouverts ou abimés. Un peu comme si quelqu'un avait tenté une expérience.
- Hum... Heu... Il y a quelqu'un ? demanda Lin, peu rassurée.
- Attaque Pougrinfy !
La jeune fille se retourna. Elle vit un chat lui sauter au visage puis tomba par terre. Elle enleva le félin de sa tête et regarda en direction de là d'où venait l'ordre. Un Hylien aux cheveux blonds presque blancs et aux yeux verts se trouvait en haut des escaliers. Il allait s'enfuir quand Lin, plus rapide, l'attrapa par le col.
- Pourquoi tu m'as attaquée !? Je t'ai rien fait !
- Dé... désolé, je croyais que tu étais un des leurs... répondit l'autre.
- Un des leurs ? demanda Lin, étonnée.
- Oui, un sbire de Ganondorf quoi ! Depuis qu'il est au pouvoir, il a interdit tout sortilège de magie noire...
- Pourquoi tu continues d'en faire alors ? Et juste, pourquoi t'as commencé à en faire en fait ?
- Mes sorts réussissent à éloigner les monstres. Et puis, de base je savais pas que les bouquins de cette maison c'était que des livres de magie, alors je les ai lus. C'était dans une autre langue, mais j'ai réussi à traduire, et ben... Tu vois, le village, il est désert hein ? Bah, c'est ma faute... En fait, j'ai testé une incantation et les villageois se sont transformés en ombres... Mais j'ai pas fait exprès hein ! Du coup, depuis, j'essaie de trouver un moyen de les faire revenir...
"C'est donc ça tous ces dessins sur le sol ?" pensa Lin.
- Et j'ai trouvé ! continua le mage. Il faut faire ce pentacle inversé, avec une fleur radieuse à chaque point, là tu vois ?! dit-il en montrant à Lin un cahier avec d'étranges symboles dessinés. Le problème, c'est qu'on trouve plus de plantes du soleil, Ganondorf les a toutes arrachées...
Effectivement, c'était un problème. Le seul moyen de potentiellement en trouver aurait été de se rendre sur une île dans le ciel, mais ils ne savaient pas voler ! Ils ne pouvaient pas non plus activer les tours de guet pour se propulser, et ils n'étaient pas des Piafs... Puis, Lin se rappela de quelque chose.
- Je sais où en trouver ! s'écria-t-elle.
Elle en avait aperçu quelques-unes sur des vestiges tombés du ciel dans la forêt korogu. Le problème, c'est qu'y retourner signifierait faire un détour considérable de son objectif et elle n'était même pas sûre de pouvoir aller dans les bois perdus sans se perdre. Si seulement elle pouvait se téléporter... "Malheureusement, c'est impossible, ça n'existe pas la téléportation..."
- Tu sais où en trouver !?
- Oui.
- Tu peux m'y emmener s'te plaît ? demanda le mage noir.
- Le truc, c'est que... Bah c'est dans les bois perdus, donc je suis pas sûre de retrouver le chemin...
- Pas grave ! On cherchera ! Et puis, c'est ça où faut trouver un moyen d'aller sur une île céleste, et aux dernières nouvelles, les Hyliens n'ont pas d'ailes... Au fait, je m'appelle Krai, et Toi ?
- Moi, c'est Lin.
- Enchanté, Lin, répondit Krai en souriant.
- Alors ? demanda une voix caverneuse. Tu as retrouvé sa trace ?
- Non, pas encore, mais je...
Il sentit un poing s'abattre sur sa joue. Il tomba par terre.
- Je suis entouré d'incapables ou quoi ?! le coupa la voix. Tu n'es même pas fichu de retrouver la trace d'une gamine !
- Mais elle peut être n'importe où ! répondit l'autre. Hyrule est vaste, je ne peux pas être partout à la fois !
- Une semaine ! Je te donne une semaine pour la retrouver, sinon...
* * *
Tsk ! La mission d'il y a quelques jours est un échec ! Cette fille s'en est sortie ! J'pensais pas qu'y pouvait se matérialiser l'autre ! Bon, ça doit pas durer très longtemps, mais quand même... Quoique, le vioque du plateau a bien tenu cents ans... Enfin... je n'aurais jamais dû m'enfuir, car là, je risque la mort ! En même temps, qu'est-ce que j'aurais pu faire contre lui, je peux pas le tuer une deuxième fois !
Dark Link errait dans la plaine, dans l'espoir de mettre la main sur la fille qu'il cherchait. Son nom... Comment s'appelait-elle déjà ? Ah oui, Lin, c'est vrai... Il avait UNE semaine pour la retrouver, une seule ! Comment il allait faire ?! Jamais il n'y arriverait à temps... Il était fichu. "Bon, réfléchissons... Vu la blessure que lui a faite le lynel, elle n'a sûrement pas pu guérir en huit jours, elle est donc probablement au château..." pensa-t-il.
L'ombre se dirigeait vers l'ancienne citadelle d'Hyrule. Il passa l'énorme porte en fer et s'avança sur le chemin qui menait au château. Une fois arrivé, il fouilla chaque pièce de fond en comble, mais rien. Pas une trace de la fille... Comment ça se faisait ? Elle n'avait pas pu guérir aussi vite ! Dark Link s'assit contre un mur. Il était exténué, déjà d'avoir marché toute la nuit et toute la matinée, et en plus d'avoir passé son après-midi à fouiller les salles du palais. Il détestait cet endroit. Comment son alter-ego avait pu vivre ici il y avait plus de 100 ans !? Ce château était sombre, et être enfermé entre ces murs de pierre ne réjouissait pas vraiment le monstre. Peut-être que l'autre aussi n'aimait pas ce palais ? Ce serait ironique, vu qu'il ne peut plus le quitter, désormais.
Dark Link se leva. Il s'était endormi sans s'en rendre compte, et le soleil était déjà assez haut dans le ciel. Il courut en direction des pièces où il n'avait pas cherché. Il ouvrit la porte de la bibliothèque, et se retrouva nez à nez avec... Non... pas lui ! Il pouvait être autre part ?! Ah, non, c'est vrai, il ne pouvait pas... L'autre avait l'air surpris de le voir ici. Il ne s'attendait sûrement pas à ce que son ombre ne revienne.
- Mais... que... que fais-tu ici ?! demanda le fantôme de Link.
- Où est la fille ?! cria Dark Link.
- Lin ? Je ne sais pas, t'as qu'à chercher, même si à mon avis tu perds ton temps, vu qu'elle n'est plus ici, répondit le spectre.
- Comment ?! Mais elle n'a pas pu soigner son bras en une semaine !
- Elle, non, mais une grande fée, si... rétorqua l'ancien héros en montrant la tablette Pru'ha d'un air moqueur.
- Que... ! Non... c'est pas possible ! Où l'as-tu envoyée ?! hurla l'ombre en agrippant le fantôme par le col. Réponds !
- Tu crois me faire peur ? Je suis déjà mort, tu ne peux pas me tuer une seconde fois ! Je ne te dirai rien. Bientôt, Lin va détruire Ganondorf, tu n'y peux rien. Elle est l'héroïne qui prendra ma relève et qui sauvera Hyrule, le nargua l'esprit. D'ailleurs, pourquoi tu ne l'aiderais pas ?
Link reçut un violent coup de poing dans le ventre. Il avait beau être mort, ce n'était pas pour autant qu'il ne ressentait pas la douleur. Il tomba au sol.
- Jamais je ne trahirai Ganondorf ! répliqua son alter-égo.
- P... pourquoi ? Nous sommes pourtant... la même personne... demanda l'esprit.
- Pas vraiment... J'ai plutôt été créé à partir de ton côté sombre. Ne fais pas genre "je ne suis pas maléfique", on a tous une part de ténèbres en nous, même si elle est plus ou moins enfouie.
- Dans ce cas, ça devrait être pareil pour la lumière... Je suis sûr qu'il y a du bon en toi ! Aide-nous à vaincre Ganondorf !
- Non. Où est la fille ? redemanda son double sombre.
- Sûrement là où tu ne veux pas qu'elle soit ! répondit le héros déchu.
- Quoi ?! Tu... tu veux dire... Non ! Tsk !
Dark Link tourna les talons et courut vers la sortie. Vite, il fallait se dépêcher ! Non... Il était sûrement trop tard... Cette gamine avait déjà dû retirer l'épée de légende de son socle... Maintenant il en était presque sûr, qu'il la retrouve d'ici une semaine, ou non, dans les deux cas, il allait mourir...
Pas moyen de retrouver cette fichue forêt korogu ! Sérieux... Pourquoi je lui ai dit que j'allais l'aider l'autre, là ?... J'en ai ma claque ! Je vais pas aider tous les péquenots que j'croise quand même ! Puis il me saoule avec ses trucs de magie. C'est bizarre. En fait, je crois que je commence à comprendre pourquoi Ganondorf l'a interdite. Je suis pas d'accord avec lui hein ! C'est juste que c'est un peu flippant...
Depuis combien de temps étaient-ils perdus ? Ils ne le savaient même pas... Lin était une héroïne, elle aurait dû facilement retrouver la forêt non ?! Ça l'énervait. Et cette brume... Même après être venue plusieurs fois, cet endroit la faisait toujours autant flipper. Elle avait beau savoir que la musique provenant du coeur de la forêt était celle de Skull Kid, et qu'elle ne pouvait pas se perdre complètement à l'intérieur car la brume les ramenait à chaque fois à l'entrée des bois, ça n'atténuait en rien la peur qu'elle éprouvait au fond d'elle. Cette fois, plus encore que les autres, elle était terrifiée, mais ne savait pas pourquoi.
Un bruit.
Comme une lame qui glisse le long d'un fourreau.
L'herbe humide qui craquait.
Des pas qui se rapprochaient.
Une ombre le long d'un arbre.
Un éclair gris dans la brume blanche.
Lin dégaina à temps. En face d'elle, celui dont le lynel avait précédemment tranché le bras, celui qui, elle s'en apercevait maintenant, ressemblait comme deux gouttes d'eau au précédent héros.
Celui-là que, avant qu'elle ne s'évanouisse, le fantôme avait appelé Dark Link.
- Pas mal pour une gamine, dit l'ombre.
- Hum... C... c'est qui celui-là ? demanda Krai, perdu.
- Fuis ! cria Lin. Tu n'as rien à voir avec lui !
- Désolé, mais... je n'ai pas pour habitude de laisser des témoins. Et puis, ce garçon est sur la liste de ceux à éliminer ! répondit Dark Link en fonçant sur le mage noir, prêt à le trancher en deux.
Celui-ci sortit en hâte un carnet rempli de dessins et l'ouvrit à une page au milieu. Il récita quelque chose d'incompréhensible et un bouclier transparent se forma entre lui et la lame de l'ombre.
- Tsk ! Je me doutais que ce serait pas si facile d'éliminer un mage. Bah ! Il me suffit de te priver de ton carnet ! lança Dark Link.
Il s'élançait pour désarmer son adversaire, quand une épée vint se placer en travers de son chemin.
- Fuis Krai ! Il est trop fort pour toi ! Puis je vais pas te protéger tout le temps, tu seras qu'un poids mort ! cria Lin.
- Sympa... répondit son compagnon avant de s'enfuir au coeur de la forêt.
- Tsk ! Tu ne t'en tireras pas comme ça !
Le chevalier sombre courut à la poursuite du magicien, avant de se faire stopper par un coup d'épée latéral, qu'il évita de justesse.
- Tu veux te battre gamine !? lança-t-il.
Sans attendre de réponse, il fendit l'air avec sa lame, prêt à en découdre. Lin sortit sa deuxième épée, l'épée de légende.
Le combat faisait rage, au coeur de la forêt. Pendant longtemps, les deux adversaires furent au même niveau, mais l'ombre prit le dessus. Contrairement à l'Hylienne, lui, ne ressentait pas, ou peu, la fatigue. L'héroïne était acculée à un arbre. Dark Link allait lui porter un coup qu'elle n'aurait pu éviter, quand une lame d'air, littéralement, manqua de peu sa tête. Il se retourna, surpris. Qui était ce nouvel ennemi !? De quel droit osait-il l'interrompre alors qu'il allait achever sa cible !? La réponse vint directement. Krai sortit de la brume, son livre à la main, les yeux dans le vague. L'incantation qu'il venait de réciter lui permettait de contrôler le vent. Il pouvait en faire ce qu'il voulait. Une bourrasque souffla tout à coup, éparpillant les nuages de brouillard. Déstabilisé, l'alter-ego du fantôme chancela. Lin profita de cet instant pour se relever et planter ses lames dans le dos de son ennemi. Le chevalier sombre tomba à terre. Une flaque de sang se formait peu à peu autour de lui. Il toussa. Ça y est. Il allait mourir.
Mourir.
Mourir..
Mourir...
Non...
Il le savait, que de toute façon, il allait se faire tuer à un moment où à un autre, que ce soit par cette gamine, ou par Ganondorf. Il pensait que de le savoir lui ferait accepter sa mort, ce moment fatidique, mais finalement... Ha ! S'il avait su, non, s'il avait voulu, il aurait fait autre chose, plutôt que de suivre les ordres du roi-démon. D'ailleurs, il n'aimait pas Ganondorf. Certes, c'était celui qui l'avait créé, à partir du héros, mais lui, tout ce qu'il attendait, c'était la mort de ce tyran. Pas pour rendre à Hyrule sa liberté, non. Pour s'emparer du trône. Il comptait prendre le pouvoir à la mort de Ganondorf, mais finalement, il aura été tué avant... Il avait mal joué son coup, et était maintenant échec et mat.
Enfin... Quitte à perdre, autant en emporter d'autres dans sa chute...
- Hé, gamine... dit l'ombre d'une voix rauque. Tu cherches les fleurs radieuses n'est-ce pas ?... Ghh... Tiens, prends-la... Je ne sais pas si ça suffira mais...
Il sortit de sa sacoche, d'une main tremblante, une fleur jaune, qu'il avait cueillie, et gardée en cachette. Si Ganondorf l'avait appris, il aurait été foutu. Il l'avait gardée car il l'avait trouvée jolie, mais si avant sa mort, elle pouvait servir à quelqu'un... Alors il lui donnerait.
- Dark Link ?! Mais pourquoi...
Il avait de plus en plus de mal à respirer, et un filet de sang s'échappait de sa bouche. Dans un ultime soupir, il répondit :
- Tu sais, je n'aimais pas Ganondorf... Urgh... Je vais mourir, mais alors... si je peux l'entraîner avec moi... Haa... je le ferai...
Il s'arrêta.
- Au fait, reprit-il, si tu recroises un jour le héros... Dis-lui... Dis-lui que nous ne... serons plus jamais... ensemble...
On est de retour au village ! Enfin ! On a toutes les fleurs radieuses qu'il nous faut ! Je vais pouvoir faire mon pentacle et les villageois seront libérés ! On n'aura pas fait tout ce chemin pour rien, finalement. Elle m'aura bien aidé, Lin.
Ça y est, Krai venait de finir de tracer d'étranges symboles sur le cercle déjà dessiné sur le sol de sa maison. Il récita une incantation dans ce qu'il semblait être de l'hyrulien ancien, et un éclair blanc apparut au centre du pentacle. Lin regardait, impassible en apparence, mais terrifiée à l'intérieur. Et si ça ne marchait pas et qu'elle se retrouvait transformée en ombre, comme les villageois !? La magie noire était quelque chose, quand même, de terrifiant.
Une gigantesque ombre apparut sur le sol, recrachant une tornade d'âmes hurlantes dans le ciel. Celles-ci se dispersèrent et chacune retourna au lieu de sa "mort", ou plutôt, où elle avait été transformée en cette ombre maléfique, qui diminuait à vue d'oeil, jusqu'à devenir une sphère noire. Quelques secondes après son évolution, enfin, sa dévolution, elle disparut, retournant dans le néant.
- Qu... C'était quoi ce truc !? hurla Lin.
- L'ombre qui avait absorbé les âmes, répondit Krai. Mais j'ai réussi à les lui reprendre.
L'héroïne en resta bouche-bée. La magie noire était VRAIMENT effrayante. Ah c'est sûr que là, plus jamais elle ne traiterait le mage de "poids mort" ! En fait, il aurait peut-être pu tenir tête à Dark Link, finalement. D'ailleurs, s'il n'avait pas été là, elle ne serait sûrement plus de ce monde.
Dehors, les villageois coururent vers la maison de Krai, qui aurait apparemment appartenu avant à un ancien héros. Ils avaient enfin été libérés de cette ombre, et c'était, certes grâce au garçon, mais également à cause de lui. Ils allaient rentrer chez le mage, quand la porte s'ouvrit à la volée. Quelqu'un se la prit dans la figure.
- Ha ! Mince, désolée, je vous avais pas vus ! fit une voix.
- Aargh... Pas grave, j'ai juste mal...
- Mais, où est Krai ? Il ne vit plus ici ? demanda un villageois.
- À vrai dire, si, mais il s'est barré à l'instant, de peur que vous ne le haïssiez... répondit la fille.
- Mouais, en même temps il a pas tort... marmonna une voix.
- Bon. Et bien, tu lui diras qu'il est banni du village. Il ne reviendra plus ici, dit un autre.
- Je pense que de toute façon, il n'en avait pas l'intention.
Sur ces mots, elle partit en direction de l'étang qui se trouvait en contrebas de la maison, et une fois arrivée en bas, elle s'élança vers l'endroit où se trouvait il y avait plus de vingt ans l'ancienne tour d'Elimith.
Arrivée aux ruines d'un ancien ranch, enfin, elle supposait que c'en était un, recouvert par la végétation, elle retrouva son ami Krai. Ils allaient partir, en direction du désert Gerudo, quand ils entendirent un bruit provenant de la cabane abandonnée. Ils se retournèrent, Lin prête à dégainer et Krai, la main sur son livre de sorts, pensant que c'était sûrement un monstre égaré, mais ce qui en sortit n'était ni un bokoblin, ni un moblin ou un quelconque lézalfos.
Une fille apparut sur le pas de la porte. Elle avait un gilet vert à manche courtes et à capuche, une courte jupe rouge, des gants et des bottes marrons qui remontaient au-dessus de ses genoux.
- Heu... t'es qui toi ? Ce ranch est pas censé être abandonné ? demanda Krai.
- Si, c'est juste que j'ai passé la nuit ici. Je suis en route vers le désert pour délivrer le monde de Ganondorf ! répondit l'inconnue.
- Ah... Tu crois que tu as une chance de le vaincre ? Même le héros est mort face à lui.
- Et vous alors ? Je vous ai entendu parler du désert tout à l'heure !
- Hum... Alors, comment dire... commencèrent les deux amis. Nous c'est pas pareil. Lin c'est la successeure du héros, et moi, je suis un sorcier, continua Krai.
- Qu... c'est pas possible ! Je suis la réincarnation du héros ! Ma mamie me le disait tout le temps ! rétorqua la fille.
Tous les trois se regardèrent. Attends... Il ne pouvait pas y avoir deux héroïnes en même temps, si ? Puis, Lin avait déjà récupéré l'épée de légende ! Ça ne pouvait pas être possible !
- Au fait, d'où viens-tu ? demanda le mage noir. Les seuls villages survivant sur le chemin du désert sont Elimith et Cocorico. Mais tu ne viens pas d'Elimith, je ne t'y ai jamais vue.
- Non, je viens d'Ecaraille. Ma famille y a fui quand Ganondorf a pris le pouvoir, répondit-elle.
- Ecaraille !? Mais... t'as fait le chemin inverse que celui pour aller chez les Gerudos ! cria Krai.
L'inconnue leur répondit que, pourtant, sa boussole lui avait indiqué ce chemin, et que la carte menait jusqu'ici. Le sorcier lui prit le plan des mains et rétorqua que, effectivement, quand on la tient à l'envers, c'est sûr qu'on va pas dans la bonne direction.
Après que Krai ait expliqué à la soi-disant héroïne comment tenir une carte, les trois voyageurs firent connaissance. La fille en vert s'appelait en fait Linkle, et maniait les arbalètes comme personne. Elle était persuadée être la réincarnation du héros car c'était ce que sa grand mère lui répétait.
Lin et Krai réfléchirent un moment, puis conclurent qu'ils pourraient laisser Linkle les accompagner. Elle avait l'air assez forte, et de toute façon, s'ils ne l'aidaient pas, elle ne trouverait JAMAIS le désert, au vu de son sens de l'orientation proche de zéro. Ils l'annoncèrent à la tireuse, qui fut ravie. Elle n'allait pas faire sa quête seule finalement !
Cependant, le soleil commençait à décliner dans le ciel, et la teinte auparavant bleu clair de celui-ci laissa place aux lueurs orangées du crépuscule. Un peu trop orangé d'ailleurs... Non... même... rouge. Rouge avec des nuages pourpres recouvrant peu à peu le ciel, rouge. Rouge, c'était la couleur de la lune. Krai commença à avoir des doutes, puis des particules violettes se mirent à voleter dans l'air. Il hurla :
- La lune de sang !!!
La lune de sang !? Mon père m'en avait parlé, mais je pensais pas qu'un jour je la verrais de mes yeux ! Enfin, après le visage que j'ai vu sur elle quand skull kid s'est fait posséder par le masque de majora, une lune rouge, c'est rien. Mais Krai a l'air terrifié lui... Bah, après c'est qu'un trouillard !
Lin, Krai et Linkle se mirent en position de combat : si c'était bien la lune de sang, alors il fallait s'attendre à ce que des monstres apparaissent jusqu'au lever du jour. Lorsque la couleur rouge du ciel attint son paroxysme, des moblins et bokoblins apparurent devant les trois voyageurs.
Lin volait entre ses ennemis et les découpait tous un à un, tandis que des éclairs tombaient du ciel grâce aux sorts de Krai. À l'arrière, Linkle les couvrait avec ses arbalètes. À eux trois, on aurait pu penser qu'ils étaient invincibles : aucun monstre ne leur résistait, tous périssaient sous leurs coups. Ils allaient achever un dernier chef boko, quand un rugissement se fit entendre.
Un lynel se dirigeait vers les trois Hyliens, en faisant tournoyer son épée du dieu bestial au-dessus de sa tête, signe qu'il allait attaquer. Lin esquiva in extremis et Krai se protégea avec un mur de lumière. Il regarda son amie et ils coururent en direction de la cabane. Linkle fit de même. Ils barricadèrent la porte en poussant contre elle des tonneaux et meubles usés, en espérant que ça tienne le temps qu'ils trouvent un plan. Vaincre un Lynel, c'est pas rien ! Ils décidèrent finalement de passer le reste de la nuit à l'intérieur. Après tout, peut-être que, par chance, le monstre finirait par partir !
Bon, la chance, fallait pas trop compter dessus, ou du moins pour les trois aventuriers ; la foudre que Krai avait fait tomber avec ses sortilèges avait frappé quelques arbres, et des flammes étaient apparues dans les ruines. Le Lynel les regardait. Il devrait fuir, pour éviter de brûler vif, mais il remarqua que la maison dans laquelle se trouvaient ses ennemis était en bois. Du bois et du feu... Il ramassa un bâton au sol sur lequel se dessinaient de petites flammèches, et le balança sur la cabane.
À l'intérieur de celle-ci, Lin, Krai et Linkle commencèrent à sentir une odeur de brûlé. Du... feu !? Mais comment !? Aucun monstre n'avait de baguette de feu ou d'épée des flammes ! Puis ils se souvinrent des éclairs de Krai. Il ne fallait pas rester là, la cabane était en bois, elle allait vite brûler à son tour. C'est à ce moment là qu'une branche enflammée fut projetée sur leur refuge. Les trois amis sortirent de la maison. Il fallait à tout prix arrêter cet incendie ! Sinon toute la forêt allait brûler, peut-être même le village d'Elimith !
Lin réfléchissait. Elle était convaincue qu'ils pouvaient arrêter les flammes. Elle avait bien arrêté une lune, alors un incendie... Pourtant, elle ne savait pas comment. Il y avait une rivière à côté, mais ils ne pourraient pas y accéder à cause du feu. De l'eau, il leur fallait de l'eau...
Fa la fa, fa la fa... Une mélodie, le chant des tempêtes ! Évidemment ! Elle avait le pouvoir de faire tomber la pluie, ça suffirait peut-être à éteindre l'incendie ! L'épéiste commença à jouer. FA LA FA, FA LA FA, SOL LA SOL LA SOL MI DO, DO FA LA SI DO, DO FA LA SI SOL... FA LA FA, FA LA FA, SOL LA SOL LA SOL MI DO, DO FA LA SI DO, DO FA...
Un éclair fendit le ciel. Des nuages noirs recouvrirent la lune pourpre. La pluie se mit à tomber, toujours plus fort, tandis que les notes s'enchaînaient. Au rythme de la musique, l'orage s'intensifiait. Lorsque Lin acheva finalement les dernières notes, il ne restait plus une flamme, plus une braise. Personne n'aurait pu prédire que ce chant marcherait aussi bien, personne n'aurait pu prédire qu'ils sortiraient sains et saufs de cet incendie. Personne, pas même Lin, Krai et Linkle.
Et encore moins le Lynel.
Celui-ci retourna vers la cabane où se trouvaient avant ses ennemis. Évidemment, cet orage n'était pas naturel. La fille aux cheveux longs jouait d'un étrange instrument qu'il n'avait jamais vu, et il aurait mis sa main à couper que c'était ce qui provoquait cette tempête. Mécontent que son plan n'ait pas fonctionné, il sortit son arc. Il pleuvait, si une flèche électrique leur tombait dessus, ils seraient perdus. Il tira sur la fille à l'instrument.
Ayant senti le danger, Linkle se précipita sur Lin. Elle la poussa sur le côté avant de s'écarter, et la flèche électrique toucha un arbre plus loin, qui fut foudroyé instantanément. Les trois aventuriers se mirent en position de combat, prêts à en découdre. Lin s'élança sur le monstre. Les lynels ne lui rappelaient pas que des bons souvenirs : son bras, qui avait finalement été soigné par la grande fée voulait sa revanche contre un monstre de cette espèce. Elle sortit ses deux épées. Il ne fallait pas le sous-estimer, ça pourrait provoquer sa perte. L'Hylienne s'élança sur son ennemi. Les lynels ne sont pas de simples monstres, ils étaient plus intelligents que les autres et beaucoup plus forts. Le combat allait probablement être aussi rude que celui contre Dark Link, à la différence près que Lin et Krai n'étaient pas seuls : à l'arrière, Linkle envoyait une pluie de flèche en direction du centaure.
Celui-ci fonça sur le garçon. D'après lui, c'était le mage le plus dangereux. Krai n'eut pas le temps d'esquiver ou de se protéger. Ce fut Lin qui le poussa, et au moment où elle allait prendre la corne affilée du lynel dans le ventre, il s'arrêta. Une flèche lui était arrivée dans la jambe. Pas très grave, mais gênant pour bouger. Il l'arracha. C'est ce moment que choisirent Lin et Krai pour attaquer. L'un envoyait des lames d'air, l'autre fit une "attaque tourbillon". Malheureusement, aucun de leurs coups n'attint sa cible : le monstre s'était relevé et avait paré leurs attaques.
Lin essayait de faire lâcher son bouclier à son ennemi, mais elle n'eut pas assez de force. Elle fut projetée contre un arbre. La pluie qui tombait alourdissait ses mouvements. Elle se releva. À ce moment le lynel planta sa lame dans le sol après avoir rugi.
Rien ne se passa. Comment ce faisait-il que son attaque n'ai pas fonctionné !? Pourquoi son mur de flammes... Il regarda le ciel. La pluie. Cette gamine l'avait faite tomber avec son instrument magique ! Et l'autre qui n'arrêtait pas de le canarder de flèches ! Il en avait marre. Ce combat ne l'amusait plus. Il sortit son arc et tira des flèches électriques dans tous les sens. Krai se protégea avec un bouclier de lumière et Linkle se planqua derrière un arbre. Ils purent ainsi éviter les projectiles du monstre. Lin n'eut pas cette chance. Elle fut touchée au bras gauche. Elle s'effondra dans un cri de douleur après avoir senti la foudre dans son corps.
Non... Elle ne pouvait pas mourir, pas maintenant ! C'était trop tôt ! Elle n'avait pas encore vaincu Ganondorf, ni récupéré le chant de l'apaisement ! Ganondorf... Pourquoi... Pourquoi est-ce qu'elle ressentait une haine si intense envers lui ? Il lui avait tout pris : sa famille, ses amis, sa maison. Pourtant, elle avait l'impression que sa colère, non, sa haine envers lui était beaucoup plus forte. Mais pourquoi ? Ce serait lié aux visions qu'elle avait eues ? Ces souvenirs d'une personne qu'elle n'avait jamais croisée. Les paroles de l'arbre Mojo lui revinrent en mémoire : "Tu es enfin revenu, héros du temps". Le héros du temps... Si ça se trouve...
Elle n'eut pas le temps de réfléchir plus que ça. La douleur la ramena à la réalité. Ses deux amis étaient en train de combattre et ils étaient en mauvaise posture : Linkle avait reçu un coup à la tête et au bras droit, et ne pouvait donc se servir plus que d'une seule arbalète. Krai lui, peinait à tenir debout.
Dans un effort qui lui parut surhumain, Lin se releva. Elle ne pouvait pas les laisser comme ça ! Elle s'élança sur le Lynel, qui n'avait rien vu venir et s'apprêta à lui trancher la tête. Il se retourna juste avant. Il allait donner un coup qui, cette fois, serait vraiment fatal à Lin, quand il fut bloqué. Le garçon avait utilisé sa magie pour arrêter ses mouvements. L'épéiste en profita. La tête du monstre vola et disparut dans une fumée violette.
Leur combat était enfin fini, ils avaient gagné. Mais ils étaient dans un sale état. Lin tomba au sol et perdit conscience.
Ça fait trois jours qu'on marche en direction du désert. Il y a mon village, Ecaraille, pas loin. Krai a pas voulu qu'on y aille, soi-disant que ça nous faisait faire un détour... Pfff... Alors qu'il tient vraiment à aller à cet "étang des amoureux" ? Sérieusement ? Et ça, ça nous fait pas faire un détour, peut-être ?
Les trois compagnons s'étaient levés à l'aube et avaient commencé leur marche en direction de l'étang des amoureux dont parlait Krai. Ça n'enchantait pas vraiment ses deux amies, mais c'était le seul à savoir correctement lire une carte, elles étaient donc obligées de le suivre pour ne pas se perdre.
- On arrive bientôt ? demanda Lin, épuisée.
- Oui, normalement ! On a juste à grimper cette colline, répondit Krai.
- Encore de l'escalade !? s'écria Linkle. Si seulement j'avais un pouvoir qui pourrait me permettre de m'envoler, je vous attendrai en haut !
Après de longues minutes de marche, les trois amis arrivèrent enfin au sommet. L'endroit était magnifique : des fleurs roses jonchaient le sol, et au centre se trouvait une étendue d'eau en forme de coeur, au-dessus duquel voletaient quelques fées.
- C'est donc ça, l'étang des amoureux ? s'exclama Lin. C'est trop beau !
- Et encore, moi j'ai déjà vu quelque chose d'encore plus beau ! répondit Linkle. En explorant, je suis tombée sur une montagne au sommet brillant, sur laquelle il y avait un Alpha entouré de Rumys, au pied d'un cerisier en fleur. C'était magique !
- Ouah, trop cool !
- Hé les filles ! cria Krai. Venez voir, la vue est magnifique !
Les deux aventurières s'approchèrent du bord du Mont Frisette. De là, on voyait la mer, le soleil couchant à l'horizon, qui déclinait lentement, teintant le ciel d'orange et se reflétant sur l'océan. Au loin, une île perdue au milieu de l'immensité, et quelques récifs, qui faisaient comme de petites tâches noire et brunes foncées sur une toile bleue. En dessous, la plage, avec ses rochers, et ses palmiers, le sable d'une blancheur éclatante, parsemé de coquillages de toutes les couleurs. La vue était tout simplement sublime.
- C'est magnifique ! dit Lin. Il y a tellement de beaux paysages à Hyrule. Il y a quelques semaines, j'étais loin de me douter qu'un jour, je verrai tout ça !
Elle marqua une pause.
- C'est pour ça qu'il faut empêcher le roi-démon de tout détruire. Il faut préserver ces endroits magiques, ces forêts, ces lacs, ces mers, ces plaines... Tous les gens qui sont morts, les sages, l'ancien héros, les résistants, les habitants du fort de guet... Mon père... Tous ceux qu'il a tués, ils ne seront pas morts en vain. Je protégerai ce monde. Non. Nous protégerons ce monde ! Nous reprendrons Hyrule à ce tyran, j'en ai fait la promesse ! Plus personne ne doit mourir, plus aucun paysage ne doit être dévasté par sa faute ! Il ne touchera pas plus à ce monde, je le jure.
- On est d'accord ! s'écria Krai.
- C'est pour ça qu'on va au désert, répondit Linkle. C'est pour botter les fesses de Ganondorf et l'empêcher de détruire la nature ! Et de tuer les gens aussi.
Les trois amis échangèrent un regard et un sourire. Tous trois pensaient la même chose. Ils se retournèrent et regardèrent en direction du désert. "Tu ne perds rien pour attendre, Ganondorf. On va te détruire, et te reprendre Hyrule. Tu vas voir..."
Encore... Encore cette impression que quelqu'un pensait à sa place. Lin en avait marre. Cette impression... Avait-elle un lien avec les visions qu'elle avait eues ? Ou avec le fait que l'arbre Mojo l'avait appelée "héros du temps" avant de mourir ? Toujours était-il que ces pensées ne lui appartenaient pas. C'était comme si quelqu'un avec une haine incommensurable envers Ganondorf était entré dans sa tête. Elle y avait déjà réfléchi, mais là, ça devenait sérieux ! Elle devait trouver un moyen de l'arrêter. Et ces visions... Elle n'en avait plus eues depuis qu'elle était avec Krai et Linkle, mais quand apparaîtrait la prochaine ? Elle ne le savait pas. Enfin. Ce n'était pas le moment de penser à ça.
- Et on va par où, maintenant ? demanda-t-elle.
- On va descendre par le chemin jusqu'à la plage d'Araiso, puis on continuera vers la baie de Martha et on longera la mer jusqu'au Val Souris, on passera par la plaine Tetra et le bosquet du Gondrin, on ira à la tourbière de Tonpècle, la prairie d'Obaba puis on prendra le chemin inondé, et on arrivera au désert Gerudo, répondit Krai.
- Pourquoi on ne passe pas par les chemins ? ce serait plus simple ! rétorqua Linkle.
- Tu tiens vraiment à ce que Ganondorf retrouve notre trace ? Ce sera plus facile de lui échapper en passant par les endroits moins fréquentés.
- Il a pas tort, dit Lin. On installe le campement ? La nuit commence à tomber, et on va pas se mettre à marcher à cette heure. En plus je suis crevée !
Les aventuriers rangèrent leur carte. Ils firent un feu et s'installèrent autour, en faisant griller des champignons trouvés un peu plus tôt. Ils allèrent dormir, quand Krai, pâle, s'effondra sous les yeux des deux guerrières.
Mais... pourquoi ?! Une attaque ennemie ?! Non, il n'y avait personne... Mais alors, quoi ? Pourquoi s'était-il effondré ? La fatigue ? Non, c'était étrange. Linkle fut la première à comprendre. Elle regarda dans la sacoche où ils avaient rangé leurs provisions et sortit un livre sur les plantes. Du poison ! Krai avait avalé un champignon vénéneux nommé champik. Ses heures étaient comptées !
Lin et Linkle étaient paniquées ! Mais quelle idée il avait eue, Krai, de manger un champignon toxique ?! Qu'est-ce qu'elles devaient faire ?! Lin eut soudain l'idée de regarder à la page du livre où était la description du champik, pour voir si le remède n'y était pas indiqué. Heureusement pour le mage noir, il y était inscrit ! Linkle le lut à voix haute :
- Il faut une princesse de la sérénité, mélangée avec un... hum... viscère de bokoblin... Eurk ! Et une feuille korogu. Pour les deux derniers, ça va, mais pour la fleur... ça va être chaud de trouver ça !
- Commençons d'abord par trouver le viscère et la feuille, on verra après pour la princesse, répondit Lin.
Les deux aventurières se mirent en marche, à la recherche d'un camp de bokoblins dans les environs, après avoir ramassé des feuilles korogus par terre. Elles tombèrent finalement sur un campement de monstres, un peu plus loin, en bas du mont. Il fallait faire vite, Krai n'aurait pas une deuxième chance, il fallait le sauver. L'épéiste s'élança sur les bokoblins, tandis que l'archère les canardait de flèches.
Les monstres eurent vite fait de se disperser dans tous les sens, à cause de la panique provoquée par l'attaque surprise des deux Hyliennes. Elles les éliminèrent sans aucun mal et ils explosèrent dans une fumée violette.
- Eurk... un viscère... commença Linkle. Ce truc bouge encore ! C'est dégueu !
- Pour le coup, t'as pas totalement tort... répondit Lin. Enfin, on en a besoin donc...
L'héroïne prit un des organes violets gisant sur le sol et le mit dans sa sacoche. Il ne leur manquait plus qu'une princesse de la sérénité, mais de là à réussir à en trouver avant que Krai ne meure, ça allait être compliqué.
Jusqu'à ce que Linkle se rappela de quelque chose qu'avait dit sa grand-mère : "Dans certains endroits, la princesse Zelda, la dirigeante du royaume avant la chute du héros et l'ère du roi-démon, avait disposé des fleurs bleues, nommées princesses de la sérénité, en mémoire d'une guerre qu'il y avait eu quelques années auparavant."
- Il suffit de trouver une stèle ! s'écria la fille aux arbalètes. Si je me souviens bien, la plus proche est à la muraille d'Elimith.
- Elimith ?! Mais on a mis trois jours pour venir de là-bas jusqu'ici ! Krai va clamser avant qu'on ait pu lui ramener le remède !
Effectivement, c'était un problème... Comment allaient-elles faire !? Peut-être qu'on pouvait la remplacer par autre chose ? Après tout, ce bouquin avait l'air d'avoir plus de cent ans, peut-être qu'un nouvel antidote avait été découvert depuis ?
Non, ce serait trop risqué de la remplacer par une autre plante. Les deux aventurières se creusaient la tête pour trouver une solution. Elimith, hein ? En courant, peut-être que c'était possible de faire le chemin en moins de temps ? Non, ce sera toujours trop long... Et puis, si ça se trouvait, cette stèle avait été détruite depuis longtemps !
Elles retournèrent à l'étang des amoureux et testèrent de préparer le remède sans le dernier ingrédient, mais rien n'y faisait, ça ne changeait rien à l'état de leur ami. Elles allaient perdre espoir, quand, comme un spectre, une lumière bleu clair apparut, illuminant le point d'eau plongé dans la nuit.
"Suivez-moi."
Cette voix résonna dans la tête de Lin et de Linkle. Elles se regardèrent. Pouvaient-elles vraiment faire confiance à cette créature lumineuse ? Elles décidèrent finalement de la suivre.
La créature était entièrement bleue et ressemblait à un cheval, mais n'en était pas un. Elle avait quatre yeux jaunes sur ce qui ressemblait à une fourrure sur son visage, et deux antennes orange ressemblant à des feuilles. D'étranges motifs plus clairs parcouraient sa peau.
"Quel drôle d'animal", pensa Lin. Elle n'en avait jamais vu de pareil, mais peut-être était-ce une bête courante à la surface ? Pourtant, Linkle aussi avait l'air impressionnée.
- L'alpha du mont Satori... murmura Linkle, fascinée.
L'animal se retourna et courut en direction du bas de la colline, vers une grotte, cachée par la végétation, et s'y engouffra. Les deux amies le suivirent et débouchèrent dans une caverne couverte de mousse et de champignons luminescents. Sur des recoins creusés dans les parois se trouvaient plein de petites créatures bleues en forme de lapin.
- Ouaaah ! C'est magique ! s'exclama Lin, ce qui fit sursauter les bestioles et fait détaler certaines d'entre elles.
- Des rumys... chuchota Linkle. Si un jour on m'avait dit que je pourrais entrer dans leur grotte sans qu'ils me fuient...
"Vous avez besoin d'une princesse de la sérénité, n'est-ce pas ?" résonna la voix. "Ce sont elles, ainsi que les cerisiers, qui nous font rester en vie, nous, les esprits. Malheureusement, le roi-démon les a, tout comme les fleurs radieuses, presque toutes déracinées, puis brûlées... La dernière que nous possédons... Elle se trouve au centre de cette grotte, notre dernier refuge. Prenez-la."
- Mais, si on fait ça, vous allez tous disparaître ! s'écria Linkle.
"Pas vraiment. Nos âmes resteront ici. Vous n'avez pas à vous en faire pour nous, tant que les cerisiers sont encore là, nous ne disparaîtrons pas totalement. Et puis, vous vous battez pour Hyrule, pour cette terre sacrée, contre le roi-démon. En tant qu'esprit protecteur du royaume, je me dois de vous aider dans votre quête..."
Lin regarda ses pieds. Cette créature... cet "alpha", comme avait dit Linkle, devait-il vraiment disparaître ? N'y avait-il pas une autre solution ? Apparemment pas... Elle ne voulait plus que quiconque ne meure par la faute du roi-démon, elle l'avait dit, et pourtant, à cet instant, si elle retirait cette fleur de la terre, des dizaines d'esprits d'Hyrule allaient disparaître, et ce ne serait même pas à cause de Ganondorf, mais par sa faute, à ELLE.
Linkle regarda son amie. Elle avait l'air indécis. Devait-elle prendre cette fleur, ou pas ? Ça devait être la question qu'elle se posait. Les deux filles échangèrent un regard, puis, ensemble, se dirigèrent vers la princesse de la sérénité au centre de la grotte. Linkle se retourna brièvement pour voir l'alpha, puis ses yeux se posèrent sur la fleur. Toujours ensemble, Lin et elle prirent la fleur et la sortirent de terre, tandis que, derrière elles, les rumys et l'alpha disparaissaient peu à peu...
"L'alpha... Il a disparu, et les rumys aussi... Hyrule n'a plus d'esprits protecteurs... Enfin, au moins, Krai se remet peu à peu, c'est déjà ça... On va pouvoir reprendre la route. Et... je ne sais pas pourquoi, mais depuis notre "quête", si on peut appeler ça comme ça, à Linkle et moi, j'ai l'impression... que ça nous a rapprochés."
Deux semaines avaient passé depuis que Lin et Linkle avaient trouvé la dernière princesse de la sérénité, et que les rumys et l'Alpha avaient disparu. Aujourd'hui, ils pouvaient enfin reprendre la route.
Ils partirent en direction de la baie de Martha, qui, selon la légende, aurait été appelée ainsi car une sirène du même nom aurait vécu là. Puis ils se dirigèrent vers la plage du Clair-obscur, une magnifique étendue de sable fin, parsemée de coquillages et d'étoiles de mer, et surplombée par d'immenses falaises, dont l'ombre contrastait avec le reste des couleurs de l'endroit, d'où son nom, clair-obscur. Il y avait également plusieurs rochers formant des cercles dans l'eau, dans lesquels se trouvaient toutes sortes de coraux et de poissons tropicaux multicolores.
Après ça, ils reprirent la route passant par le bosquet du Gondrin et la plaine Tifferone, avant d'arriver à la tourbière de Tonpecle, où les attendait un imposant lynel bleu.
- Vite ! Krai, cours ! cria Lin.
- Je... Huf... J'arrive pas... A aller... Plus vite... répondit le mage noir.
Le lynel leur fonçait dessus, sa proie était pile en face de lui, et elle n'allait pas pouvoir s'échapper, vu sa lenteur. Il arma son coup, prêt à porter un coup fatal au garçon qui essayait désespérément de lui échapper, quand une flèche vint se planter dans son épaule, ce qui dévia la trajectoire de son arme. Il tourna la tête.
Qui ?! Qui avait bien pu oser le priver de sa proie ?! C'était cette fille, là-bas, avec sa capuche verte et sa robe rouge. Elle allait voir ce qu'il en coûtait, de s'en prendre à LUI, le seigneur des monstres de la plaine d'Ose !
Il galopa en direction de Linkle, qui n'avait rien vu venir, quand une main la poussa. Peu après, elle vit Lin reculer, et un instant plus tard, le lynel arriva. Furieux qu'on ait déjoué son attaque une nouvelle fois, il commença à donner des coups, imprévisibles, sans réfléchir.
- On a déjà battu un de ces monstres, on va l'avoir ! dit Linkle.
L'archère arma ses arbalètes et les pointa en direction du centaure, tandis que Krai commençait à réciter l'incantation d'un sort de feu. Lorsque la bête fut assez loin, ils lancèrent leurs deux attaques en même temps. Deux flèches d'un rouge flamboyant fendirent l'air et embrasèrent les feuilles et les herbes sèches aux pieds du monstre, créant un début d'incendie.
Ils pensaient réellement que cette attaque allait avoir raison de lui ? Ha ! Que ces gamins étaient stupides ! Il était un lynel de feu, il ne mourrait pas pour quelques petites flammèches ! Certes, l'herbe sèche allait propager l'incendie plus rapidement, mais aucun risque qu'il ne s'étende, avec l'eau de la tourbière.
Mais au fait, où était passée Lin ?
Une épée s'abattit violemment sur la tête du monstre. Une diversion ?!
Il n'eut pas le temps de se rendre compte qu'il s'était fait avoir, qu'il explosa en un nuage violet, ne laissant derrière lui que ses cornes.
- On l'a eu ! s'écria Krai.
- Ouais, et sans être au bord de la mort, cette fois ! affirma Lin.
- N'empêche que, si on galère autant sur un "simple lynel", on n'est pas vraiment prêts pour aller affronter Ganondorf... dit Linkle.
Les trois amis se regardèrent. Linkle n'avait pas totalement tort, mais il restait plusieurs jours de voyage, ils auraient le temps de s'entraîner pendant ce temps ! Ils décidèrent de reprendre la route vers la prairie d'Obaba, où ils trouvèrent des arbres gigantesques. Jamais ils n'en avaient vu d'aussi hauts !
Puis, ils décidèrent de passer par l'ancienne route principale menant au désert, désormais inondée. C'était magnifique, l'eau faisait comme de petites cascades qui glissaient sur le vieux chemin. Ils finirent de traverser l'endroit sur un radeau de fortune, constitué de quelques bouts de bois à la dérive ; une vraie rivière s'était formée. Heureusement, le courant les emmenait dans la bonne direction.
Ils arrivèrent au relais du Canyon Gerudo à l'aube, exténués.
- Hé bien ! Vous êtes trempés ! Vous n'êtes pas passés par la nouvelle route ? demanda l'aubergiste.
- Non, on voulait pas se faire repér... commença Linkle.
- On voulait voir le canyon inondé, car on nous avait dit que c'était magnifique ! la coupa Krai.
- Aaah... nan, mais je demande, parce que des fois, il y en a, des rebelles, qui passent par là-bas pour pas se faire repérer en passant par la route. J'ai pas envie qu'on m'accuse de trahison et que je meure, vous voyez, donc ceux là, ils dégagent. Sinon, c'était beau, du coup ?
- Ouais, c'était magnifique ! Il y avait de l'eau partout ! répondit Lin.
- C'est un peu le principe d'une route inondée, mais bon... Vous voulez une chambre ? Vous avez l'air épuisés.
- Oui, on veut bien, merci, dit Krai. Hum, 60 rubis, pour nous trois, non ?
- C'est ça.
Les trois aventuriers suivirent l'aubergiste, qui les mena à l'intérieur du relais. Ils choisirent chacun un lit, puis s'endormirent, en pensant au combat qui aurait lieu le lendemain, sauf Lin. "Ganondorf... A cause de toi, les gens vivent dans la peur ! Je te tuerai une seconde fois, je te tuerai autant de fois qu'il le faudra, pour qu'enfin Hyrule retrouve la paix..."
Une seconde fois ? Comment ça ? Elle ne s'était pourtant encore jamais battue contre lui, et ne savait même pas à quoi il ressemblait ! Il fallait vraiment qu'elle tire toute cette histoire au clair, car ça devenait vraiment étrange...
Enfin. Nous y voilà. Le désert Gerudo. Après des mois de voyage, j'y suis enfin arrivée. Papa, mes amis, je vais pouvoir vous venger...
Lin, Linkle et Krai se trouvaient aux portes du désert. Au loin, on distinguait le bazar Assec, et derrière, on apercevait la cité Gerudo. La fin du voyage.
Une location de morses des sables se trouvait à proximité, et Krai avait encore quelques économies. Il emprunta donc, sous la pression de ses deux amies, une bête et un traineau. Ils traversèrent le désert en un rien de temps et se retrouvèrent devant la cité Gerudo, où régnait une ambiance... pesante, de ville fantôme, comme le village d'Elimith quand les habitants étaient transformés en ombres, mais en pire.
- Je crois que je comprends pourquoi la dame des morses a fait une tête bizarre quand on a dit qu'on allait à la cité... dit Linkle.
- Au moins, il n'y a personne pour nous empêcher de passer !
Les trois aventuriers s'engouffrèrent dans la ville. A l'intérieur aussi, tout était mort. Les Gerudos avaient du déserter. Au milieu des escaliers menant au palais se trouvait un trou, menant à un véritable réseau souterrain. Ils empruntèrent un passage dans une grotte, menant à l'extérieur de la cité, dans des ruines.
Ils continuèrent leur route vers les hauteurs Gerudos, sans vraiment trop savoir où ils allaient, car la carte était brouillée, en raison de l'étrange brouillard présent dans tout le désert. Ils finirent par arriver aux montagnes, quand ils aperçurent des statues de grenouilles en pierre, masquées par un tissu avec un œil rouge et une larme à l'envers.
- Heu... j'irais pas par-là moi, si vous voulez mon avis... commença Krai.
- Pourquoi ? demandèrent Lin et Linkle.
- Par-là c'est le gang des yigas, ça se voit, cette grenouille, c'est leur signe !
- Justement ! C'est un clan de fanatiques de Ganondorf, non ? On trouvera sûrement des indices dans leur repaire !
Après avoir réussi à convaincre Krai de s'infiltrer là-bas, ce qui prit très longtemps, mais le narrateur vous fait grâce des négociations, les aventuriers se retrouvèrent devant une porte faite de rondins de bois, fermée. Impossible de passer par-là.
- C'est un signe ! Ça veut dire qu'on n'y va pas ! s'écria le mage.
- Ou alors, on peut trouver une autre entrée ? hasarda l'épéiste.
- Ouais, on fait ça ! approuva l'archère.
- Mais pourquoi vous m'écoutez jamais ? se lamenta le garçon.
Ils grimpèrent à la falaise à côté et se retrouvèrent en haut du repaire. Ils continuèrent tout droit, jusqu'à arriver à un énorme trou en contrebas. Ils descendirent. Un abîme béant, d'où sortait une fumée de miasmes, se trouvait au milieu de l'endroit. Des lampions et lanternes rouges étaient accrochés aux parois de la falaise isolant ce lieu. Quelques membres du clan Yiga vaquaient à leurs occupations, ou mangeaient des bananes. Ils repérèrent rapidement les trois intrus et sonnèrent l'alarme.
- On est repérés ! cria Krai.
- Non, sans blague ? On avait pas remarqué, patate !
Très vite, les aventuriers furent encerclés par une dizaine de Yigas.
- Rendez-vous ! ordonna un officier.
- On va devoir se battre, là... commença Linkle.
Tous dégainèrent leurs armes, les yigas comme les voyageurs. La bataille faisait rage. Pourtant, malgré leur infériorité numérique, les trois compagnons commençaient à prendre le dessus. Alors que les trois derniers ennemis restants essayaient de rester en vie comme ils le pouvaient, la porte en bois de l'autre côté du trou s'ouvrit et une ombre en sortit.
"Ganondorf"
Ganondorf.
Ce nom résonna aux oreilles de Lin, alors même que personne ne l'avait prononcé. Elle ne comprenait même pas comment elle pouvait savoir que c'était lui, puisqu'elle ne l'avait jamais vu.
Autour d'elle tout était mort. Plus personne ne bougeait, pas même les derniers yigas encore en vie. Le Gerudo dégageait une aura de ténèbres, malfaisante, qui pétrifierait même le plus courageux des héros des légendes.
- Ainsi, vous êtes venus me défier. Pauvres fous. Que pensez-vous pouvoir faire face à moi ? demanda-t-il.
Personne n'osait répondre. Personne n'osait bouger. Personne ne regardait autre chose que le roi-démon. Celui-ci regarda Lin, puis s'exclama :
- Qu... cette épée... l'épée de légende ?! Comment est-ce possible ?! Serais-tu... Ha ! Ha ! C'est donc toi, la nouvelle "héroïne"... Je vois... Et tu viens pour te battre contre moi... Sais-tu au moins ce qui est arrivé à ton prédécesseur, qui a osé me défier ?
- Je le sais, oui. C'est lui, ou plutôt, son fantôme, qui m'envoie ! répondit l'épéiste. Et je ne commettrai pas les mêmes erreurs que lui, je te tuerai, Ganondorf !
- J'aimerais bien voir ça...
Le Gerudo dégaina son katana et se mit en garde. Lin fit de même. Elle commença à attaquer, mais l'autre esquiva et la plaqua au sol. Elle se releva avant de recevoir un coup à la tête, et s'élança encore. Elle continua d'attaquer, sans relâche, sans qu'aucun de ses coups ne parvienne à atteindre sa cible. Elle manqua de se faire transpercer le ventre par la lame du roi-démon, quand un projectile glacé l'arrêta.
- Tu vas pas te battre toute seule, quand même ! s'écria Krai.
Le mage noir ouvrit son livre à la page du milieu et récita l'incantation écrite. Des ronces sortirent du sol pour s'agripper aux chevilles de Ganondorf. Linkle en profita pour lui tirer dessus des flèches explosives qu'elle gardait en réserve.
- Intéressant... commença le roi-démon. Mais pas suffisant !
Il se libéra des plantes et frappa l'archère dans le ventre. Celle-ci toussa avant de s'effondrer au sol. Elle avait le souffle coupé.
Le tyran allait l'achever, quand un bouclier lumineux vint se placer entre lui et sa cible. Encore ce maudit magicien ! Il devait l'éliminer au plus vite, sinon il risquait de devenir gênant. Il n'eut pas le temps de se retourner qu'une lame fendit l'air dans sa direction. L'héroïne avait lancé son épée. Quelle imbécile ! Sa tentative de le tuer n'avait pas fonctionné, et en plus elle n'avait plus d'arme !
Non...
Attendez...
Cette épée, ce n'était pas...
Une lame s'abattit sur l'épaule de Ganondorf et lui trancha certaines de ses écailles, mais ne s'enfonça pas suffisamment pour lui couper le bras. Cette gamine... Elle avait deux armes ?!
Lin récupéra son épée au sol. La bataille faisait rage. Les trois aventuriers commençaient à fatiguer, ce qui n'était pas le cas du roi-démon. Celui-ci continuait d'attaquer sans leur laisser un seul instant de répit. Alors que son attaque fut repoussée une nouvelle fois par le tyran, Lin fut projetée en arrière.
Vers l'abîme.
Elle tomba.
Non ! Elle ne pouvait pas mourir ! L'histoire se finirait comme ça ?!
Elle s'accrocha à la paroi du trou. Elle sentait les miasmes sous ses doigts, c'était douloureux, mais elle devait tenir, elle ne pouvait pas mourir ! Il fallait qu'elle réussisse à grimper.
En haut, le roi-démon semblait ne même pas avoir remarqué qu'elle était tombée. C'était sa chance ! Il ne faisait plus attention à elle ! Si seulement elle réussissait à se hisser jusqu'en haut. Dans une ultime tentative, elle essaya de remonter. Elle réussit finalement et s'élança sur Ganondorf, qui n'avait rien vu venir, trop occupé à parer et contrer les attaques des deux autres.
- Attaque tournoyante ! hurla-t-elle.
Elle ne savait pas comment elle connaissait cette technique, mais ça avait marché. Le roi-démon s'était pris ses lames de plein fouet.
- Ha... Cette attaque... Je ne l'avais jamais vue, mais je la connais, comme si la mémoire de quelqu'un d'autre me parvenait... C'est celle du héros du temps... dit-il.
Encore ?! Encore ce "héros du temps" ?! Et lui aussi, aurait ces espèces de "visions" ?
Ce n'était pas vraiment le bon moment pour se poser des questions ! Ganondorf était certes blessé, mais loin d'être mort. Il changea son katana pour une lance, qu'il lança sur le mage, puis matérialisa une massue et frappa les côtes de Linkle avec violence.
Les deux amis de Lin étaient à terre. L'archère respirait encore, mais Krai, lui, ne bougeait plus du tout. L'arme avait atterri dans son ventre et un filet de sang coulait de sa bouche. Lin se précipita vers lui. Il était encore vivant, mais n'en avait probablement plus pour très longtemps. De rage, elle se jeta sur le Gerudo et lui planta ses deux lames dans le ventre. Linkle se releva faiblement, et tira des flèches électriques sur le roi-démon. Celui-ci tomba au sol, puis se releva.
- Tsss... Je vous avais peut-être sous-estimés... mais ça n'empêche que je vais tout de même gagner ce combat. Vous ne pouvez rien contre moi.
- C'est plutôt toi qui vas perdre ! s'exclama Lin. Je vais venger mon père et mes amis du fort de guet !
- Ne criez pas victoire trop vite, gamines... Il me reste encore une carte à jouer...
Il porta sa main à son front et en arracha la pierre qui s'y trouvait, avant de s'écrier :
- Je vous emmène avec moi en enfer et j'engloutirai ce monde dans les ténèbres d'une nuit sans aurore !
Il avala la gemme. Ganondorf rigolait d'un rire machiavélique, le rire de quelqu'un que plus rien ne peut plus stopper, alors qu'une épaisse fumée noire violacée l'enveloppait, le transformant petit à petit en une gigantesque créature. Les deux amies, aux côtés de Krai, évanoui, étaient horrifiées.
Une énorme masse noire se dirigea vers elles, sans qu'elles n'aient eu le temps de s'écarter.
Un monstre. Une créature ne vivant que pour détruire. Le dragon noir.
Il s'envola haut dans le ciel, emportant avec lui les trois amis.
***
Ce dragon... Elle ne l'avait jamais vu...
Ou peut-être que si ?
Elle ne savait plus...
Elle ne se souvenait plus...
Son instinct lui disait seulement qu'il était dangereux, qu'elle devait le détruire, qu'il lui avait pris des personnes qui lui étaient chères.
Quelles personnes ?
Elle ne le savait pas. Elle ne le savait plus.
Quelle importance ?
De toute façon, quand elle essayait de se rappeler, elle avait juste mal à la tête. Tout était brouillé dans son esprit.
Tout ce qu'elle savait, c'est qu'elle ne devait pas laisser ce dragon en vie. Pourquoi ?
Elle en avait l'intuition, c'était tout.
Elle s'élança. Plus vite. Encore plus vite.
Elle arrivait face au démon devenu dragon, quand celui-ci ouvrit la gueule pour la mordre.
Elle esquiva.
Quelque chose tomba.
Trois personnes.
Toujours sans savoir pourquoi, elle les rattrapa.
Son instinct lui dictait juste ce qu'elle avait à faire.
***
Lin, Linkle et Krai, toujours évanoui, furent projetés de la gueule du dragon noir. Linkle pensait qu'ils allaient s'écraser, qu'ils ne survivraient pas à leur chute, quand un corps de serpent les rattrapa.
Un autre dragon. Le dragon blanc.
Il s'éloigna du démon, mais fut vite dépassé par celui-ci, qui l'empêcha de fuir.
La gemme sur le front du dragon noir brillait de milles feux et le ciel était devenu rouge. L'air était devenu rouge. Tout était devenu rouge. Et dans cette couleur pourpre recouvrant Hyrule, on ne voyait plus que les deux reptiles, se faisant face.
Lin sauta du dos de la divinité. Son instinct lui disait de briser la pierre du démon. Elle allait atterrir sur la tête de son ennemi, quand celui-ci cracha des projectiles de miasmes. L'épéiste s'en prit un de plein fouet. Elle avait l'impression qu'on venait de lui arracher une partie de son énergie.
Elle chuta, mais le dragon blanc la rattrapa, encore, et encore, et encore, et encore.
Jamais elle ne parvenait à atteindre la tête du roi-démon. Elle commençait à perdre espoir, quand Linkle prit ses arbalètes et commença à tirer depuis le dos de leur sauveur. Mais rien ne semblait affecter, ou fêler la gemme.
Soudain, Krai rouvrit les yeux. Il avait encore mal et il avait perdu beaucoup de sang, il parvenait à peine à rester éveillé, pourtant, il se redressa, prit son livre et les flèches de Linkle, et récita une dernière incantation, avant de s'effondrer.
Les projectiles brillaient à en faire mal aux yeux. "Des flèches de lumière" pensa Linkle. Elle les prit et les tira en direction du dragon noir. Elles se plantèrent dans sa pierre. Il hurla.
Lin en profita. Elle sauta du dragon blanc et réussit pour la première fois à atterrir sur son adversaire, déstabilisé par les flèches de lumière de Linkle. Après avoir donné plusieurs coups d'épée, elle planta sa lame dans la gemme. Le monstre se redressa et rugit. L'épéiste fut projetée sur l'autre reptile des cieux.
Le roi-démon arrêta de voler et se figea tout à coup. Une gigantesque explosion retentit à travers tout le royaume, puis il disparut, ne laissant derrière lui que de la fumée violette.
Ils avaient gagné. Ils avaient gagné.
Mais à quel prix ?
***
Elle avait réussi. Elle avait détruit cet autre dragon. Il ne serait plus une menace. Une menace pour qui ? Pour quoi ? Elle n'était pas capable d'y répondre. Il ne serait plus une menace, c'était tout ce qu'elle savait.
Hyrule.
Ce nom lui revint en mémoire, pendant une fraction de seconde, puis elle l'oublia aussitôt.
Non, ce n'était pas fini.
Elle avait encore quelque chose à faire.
Sans qu'elle ne sache pourquoi, elle se dirigeait vers un bâtiment sombre, au-dessus du sol, au loin.
Pourquoi aller là-bas ? Elle ne le savait pas.
Elle ne se rappelait que d'une chose.
Link
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Le dragon sur lequel Lin, Linkle et Krai se trouvaient se dirigeait vers le château d'Hyrule. Il se rapprochait, de plus en plus.
A l'intérieur, le fantôme de Link, surpris par le bruit, se précipita au dehors. Le dragon blanc approchait. Une larme coula sur sa joue.
- Zelda...
L'ancienne princesse le regardait. Ils étaient maintenant très proches. Sur la tête du dragon se trouvaient Lin, ainsi que deux personnes qu'il ne connaissait pas. L'épéiste sauta et s'approcha de lui.
- Link... commença Lin. Je n'ai pas trouvé la partition du chant de l'apaisement... mais je pense... je pense que je sais comment le jouer...
- Merci, dit simplement le chevalier.
- Hein ?
- Vous avez vaincu le roi-démon et j'ai pu revoir Zelda. Pour ça, merci...
Lin sortit son ocarina. Le fantôme regarda une dernière fois le dragon, les larmes aux yeux, puis la musicienne commença à jouer une mélodie connue dans toute la forêt, une mélodie qu'elle avait jouée avec un certain Skull Kid. En inversant les notes.
"Renverse les bois et tu trouveras l'apaisement."
Les paroles de l'étrange vendeur de masques prenaient à présent tout leur sens.
DO SI SOL... DO SI SOL... DO SI FA MI FA... DO SI SOL... DO SI SOL... DO SI FA MI FA...
L'épéiste jouait les notes du chant de l'apaisement, tandis que, sous leurs yeux, à elle et Linkle, le fantôme du chevalier disparaissait peu à peu...
Les deux amies se regardèrent et regardèrent Krai. Il respirait encore faiblement, on pouvait encore le soigner. Lin prit le mage sur son dos et les deux filles s'en allèrent, jetant un dernier coup d'œil au dragon qui les avait aidées.
Celui-ci s'éleva dans les airs et lâcha une dernière larme.
Pour celui nommé Link.
Pour la fin de ce combat millénaire.
Pour ces trois aventuriers qui s'étaient battus au péril de leurs vies pour vaincre le roi-démon.
Une larme, une dernière, pour relater la bataille contre le roi-démon. Pour ne pas oublier cette partie de l'histoire.
Juste une larme, un dernier souvenir, qu'elle-même aura oublié d'ici quelques minutes.
Juste une larme.
[5 ans plus tard]
Salut Krai !
Ça faisait longtemps que je t'avais pas écrit ! (Faut dire que je peux pas trop t'envoyer de lettres à une adresse précise, aussi !) Comment se passe ton voyage ? Bien, j'espère ? Tu as trouvé d'autres sorts, pour compléter ton livre de magie ?
Ici, à Elimith, ça va. L'école a rouvert et Linkle est devenue prof de tir à l'arc (au départ elle voulait enseigner la géographie, mais on a décidé avec les villageois, à l'unanimité, de confier cette tâche à quelqu'un d'autre). Quant à moi, je m'entraîne toujours à l'épée, et j'ai même perfectionné ma technique à deux lames, je te montrerai quand tu rentreras.
Les derniers monstres ont fini par fuir la forêt en bas du village, et on a éliminé le lithorock avec Linkle. Sinon, tout le monde va bien et on a reçu la visite de personnes des quatre coins d'Hyrule peu après ton départ, pour fêter la fin du règne de Ganondorf.
Elimith est devenue la plaque tournante du commerce en Hyrule, et des gens de tout le pays viennent pour y acheter des marchandises ou en vendre, ou inscrire leurs enfants à l'école. Du coup, maintenant on a aussi des élèves piafs, zoras et gorons (les enfants gerudos ont déjà une école chez elles). On espère pouvoir en construire dans les autres villages !
Bon, et bien, c'est tout comme nouvelles que j'avais à te dire, je donnerai cette lettre à Terry, comme il voyage beaucoup et vient souvent à Elimith. Il m'a dit que ses prochaines destinations seront Labrynna et Holodrum, j'espère que tu le croiseras là-bas !
À bientôt, j'espère.
Lin
Je viens enfin de finir ma lettre. Depuis notre victoire contre le roi-démon, Krai est parti en voyage, seul, à la recherche de nouveaux sorts. Je ne l'ai pas revu depuis, mais je suis sûre que son périple se passe bien.
Depuis 5 ans, on s'efforce tous de reconstruire Hyrule et nous avons même bâti un nouveau village, Lynna.
Le seul mystère que je n'ai pas encore résolu, est celui de ce "héros du temps", mais je pense être sur une piste pour découvrir qui il était en réalité, et pourquoi j'ai ces visions, mais il faudrait que je vérifie ça...
A suivre...
Remerciements et note de l'autrice
merci à une de mes amies IRL pour m'avoir fait des retours positifs sur mon histoire et pour l'avoir lue (je ne dirai pas son nom, mais je pense qu'elle se reconnaîtra ;) ),
merci à mes cousines pour m'avoir fait découvrir Zelda BOTW,
merci à Akira Himekawa, les autrices des mangas Zelda pour m'avoir fait découvrir la licence,
merci à Shigeru Miyamoto pour avoir créé cette licence,
merci à @_Gloire_aux_Revalink sur wattpad pour m'avoir donné envie de faire une fanfic Zelda
et surtout, merci à VOUS, lecteurs, d'avoir lu et suivi mon histoire jusqu'au bout ! :)
Penn
Note : plusieurs fois, dans ma fanfic j'ai écrit des notes de musique, mais ce sont les notes en version si bémol, pour les instruments comme la clarinette, donc si vous jouez du piano, par exemple, ou d'un autre instrument en UT, ce ne sont pas les bonnes.
Ces textes ont été proposés au "Palais de Zelda" par son auteur, "Penn le piaf". Les droits d'auteur (copyright) lui appartiennent.