Breath of the Wild : L'Incroyable Histoire de la Forteresse d'Akkala
Chapitre 1 : En manque d'effectifs
Chapitre 2 : Un étrange conseiller
Chapitre 3 : Position stratégique
Chapitre 4 : L'idée d'une forteresse
Chapitre 5 : A la source de la Force
Chapitre 6 : Ne jamais abandonner
Chapitre 7 : Le détenteur des choix
Chapitre 8 : Retour au château
Chapitre 9 : Réflexion
Chapitre 10 : Edmondo
Chapitre 11 : Deuxième offensive des Yigas
Chapitre 12 : Une longue nuit
Chapitre 13 : Le soldat ou la Gerudo
Chapitre 14 : L'inauguration
Chapitre 15 : Le nouvel arrivant
Chapitre 16 : L'annonce
Chapitre 17 : Le voyage

Avant-propos :
Ceci est ma première Fanfiction. J'ai choisi la forteresse d'Akkalla car je trouvais qu'on n'en parlait pas assez et que c'est un lieu important comme vous allez peut-être le comprendre en lisant cette l'histoire. Pour que vous compreniez mieux l'histoire, je vous dis tout de suite qu'au début de cette fiction, la forteresse d' Akkala n'est pas encore construite. Si jamais vous trouvez dans l'histoire des prénoms censés être inventés mais qui existent déjà (je ne parle pas des personnages de la série ni de prénoms de la vie de tous les jours), je m'en excuse. Il se peut qu'il y ait des incohérences avec l'histoire originelle racontée dans Breath of the Wild et Hyrule Warriors : L'ère du Fléau. Pardon d'avance et bonne lecture !
Le petit garçon courait. Il fallait qu'il rentre avant d'être totalement trempé. Cela faisait maintenant une bonne heure que la tempête s'était levée. Mais il était trop concentré dans sa lecture pour s'en rendre compte. Heureusement, la bibliothèque du village d'Elimith n'était pas trop loin de chez lui. Il fallait qu'il marche encore un peu. Lorsqu'il poussa la porte de sa maison, il vit sa mère s'activant pour mettre le couvert, son père qui lisait le journal et son petit frère s'amusant avec un bâton, sans doute ramassé dans le bois un peu plus bas. Mais c'était son grand-père qu'il cherchait des yeux. Ce dernier était à moitié endormi dans un vieux fauteuil. Le vieux monsieur se redressa lorsqu'il vit son petit-fils s'avancer vers lui.
- Alors ? fit-il au jeune garçon.
- Toujours rien, répondit celui-ci.
- Tu finiras bien par trouver ce que tu cherches mon garçon, ne t'inquiète pas.
- J'espère que tu as raison grand-père.
L'heure du coucher arriva après un bon repas, mais le petit garçon n'arrivait pas à trouver le sommeil. Il demanda à son papi :
- Grand-père, raconte-moi une histoire !
- D'accord. Laquelle veux-tu ?
- Celle avec le chevalier servant de la princesse, le prodige Link !
- Celle-là, tu l'as entendue au moins 20 fois. Pour ce soir, je vais t'en raconter une autre.
Le jeune garçon se redressa et écouta son papi :
- Commençons par le commencement, et écoute, jeune homme, la grande et incroyable histoire de la forteresse d'Akkala...
Deux silhouettes s'avançaient dans la nuit froide et sombre de la région. Elles étaient à l'affut de passants riches à dépouiller. Par simple goût de l'argent, ces deux hommes venaient presque toutes les semaines dans la région. Comme beaucoup d'autres voleurs, ils n'agissaient pas ailleurs car ailleurs, il y avait trop de gardes. Ainsi, la région d'Akkala était celle avec le taux de vols le plus élevé du royaume. De surcroît, la région devait aussi se défendre contre les monstres qui arrivaient depuis la montagne de la mort, à l'ouest de la région. Les deux silhouettes s'arrêtèrent net et s'accroupirent dans les buissons. Un bruit venait d'arriver à leurs oreilles. Au loin, sur la route de la baie d'Akkala, un couple marchait. Les deux hommes sourirent. C'était trop facile. A eux deux, ils avaient déjà dépouillé tout un groupe de visiteurs. Alors quand les futures victimes passèrent à leur hauteur, les deux pillards leur sautèrent dessus. Le couple n'eut pas le temps de réagir que, déjà, les malfrats étaient loin, très loin, avec, en prime, un gros butin...
Le soleil se levait doucement sur Hyrule. Le brouhaha caractéristique de la citadelle commençait à se faire entendre. On entendait les marchands, qui criaient pour vanter les effets de leurs marchandises, les passants qui, faisant leur marché, commentaient aussi les derniers ragots, les enfants qui jouaient entre eux... Du côté du château, le roi se préparait à recevoir le capitaine de la petite caserne d'Akkala. Ce dernier souhaitait le voir car, selon lui, les effectifs de la caserne n'étaient pas assez gros pour contenir tous les voleurs et monstres de la région. Cela était un problème car de ce fait, de moins en moins de touristes venaient dans la région, beaucoup d'entre eux venant admirer la source de la Force. Mais le roi avait déjà pris sa décision : il était hors de question d'augmenter le nombre de soldats dans la caserne. Le royaume était en manque de chevaliers, alors augmenter les effectifs... Si lui, le roi, autorisait ce capitaine à augmenter ses effectifs, toutes les casernes et murailles du royaume voudraient faire de même ! Le roi lui dirait franchement, et tant pis si ce capitaine n'était pas content ! Soudain, un domestique l'appela :
- Votre Majesté, le capitaine de la caserne d'Akkala est arrivé !
- Bien ! Qu'il me rejoigne !
Quelques secondes plus tard, le capitaine entra :
- Votre Majesté, merci de me recevoir ! Je viens, comme vous le savez...
- Je sais très bien pourquoi vous venez ! coupa sèchement le roi, pas besoin de me le rappeler ! Et j'ai le regret de vous dire qu'il est hors de question d'augmenter les effectifs de votre caserne !
- Mais, votre Majesté...
- Il n'y a pas de "mais" qui tienne ! Les Gorons sont plus envahis que vous, et ils se défendent mieux !
- Justement, ils ont de meilleurs effectifs et...
- Assez ! J'ai eu la patience de vous accueillir, alors maintenant, merci de quitter ce château !
Mais le capitaine n'était pas un homme qui se laissait marcher sur les pieds, même face au roi. Il essaya de trouver d'autres arguments :
- Mais votre Majesté, lorsque Son altesse Zelda ira prier à la source de la Force qui se trouve en Akkala, si nous manquons d'effectifs et qu'il y a une attaque...
Il avait visé juste. Il n'eut pas le temps de finir sa phrase que le roi s'était levé d'un bond :
- Capitaine !
- Oui, votre Majesté ?
- Je vais prendre contacts avec mes conseillers et les gardes royaux pour voir si ils sont de votre avis ? Est-ce bien clair ?
- Oui, votre Majesté !
- Bien. Alors à demain !
Le capitaine était content. Il allait pouvoir défendre son idée devant les conseillers et gardes royaux du roi. Il allait réfléchir à des arguments convaincants. Mais quand il pensa aux huit heures de route qu'il devait faire, son sourire disparut. Il n'avait pas dormi de la nuit pour être à l'aube au château, et voilà qu'il devrait faire le même chemin le lendemain. Il soupira. S'il n'avait pas cet entrainement à superviser en fin d'après-midi... Qu'importe ! Ces deux jours sans dormir lui serviront d'entraînement ! Et il galopa gaiement tout le reste du trajet...
Le lendemain, dix heures sonnaient à l'église de la citadelle quand le capitaine de la caserne d'Akkala se présenta aux portes du château :
- Sa Majesté le roi vous attend dans les quartiers principaux, dit un garde à l'entrée.
- Bien, dit-il au garde, J'espère qu'il m'écoutera un peu plus qu'hier, chuchota-t-il pour lui-même.
Le capitaine marcha jusqu'aux dits quartiers et entra.
- Bonjour, mon capitaine, dit le roi.
- Bonjour votre Majesté, répondit le capitaine.
- Bien, reprit le roi, je crois que nous sommes tous réunis à présent, continua-t-il en parcourant la salle du regard. Nous allons pouvoir commencer la réunion. Capitaine, pouvez-vous expliquer à ces messieurs pourquoi nous sommes ensemble aujourd'hui ?
- Bien, votre Majesté. Bonjour à tous ! Si nous sommes réunis aujourd'hui, c'est parce qu'hier, j'ai demandé à Sa Majesté le Roi d'augmenter les effectifs de la caserne d'Akkala. Akkala est de plus en plus attaqué ces derniers temps, si on ne fait rien, la région pourrait bien tomber aux mains des voleurs et des monstres.
- C'est évidemment un problème, dit un garde royal, Akkala a beau ne pas être la région la plus populaire du royaume, si elle tombe aux griffes de l'ennemi, cela pourrait devenir très grave.
- Tout à fait, renchérit un conseiller. Imaginez, Sire, que les pillards y établissent leur quartier général et qu'ils envahissent la région d'Ordinn. Bien sûr je ne critique point la défense des Gorons mais...
- Ou alors, coupa un autre conseiller, qu'est-ce qui se passerait si son Altesse Zelda se faisait attaquer lorsqu'elle ira prier ?
Le capitaine d'Akkala sourit discrètement. Pour l'instant, tout le monde était de son côté.
- Je vois, dit le roi, En somme, vous êtes tous de son côté, n'est-ce pas ?
- Pas moi Sire.
Celui qui venait de dire ces mots sortit de l'ombre. C'était Ulric Le Serpent. La cour le surnommait comme ça car il était aussi méchant et détestable qu'un serpent.
- Dois-je vous rappeler, à vous, les conseillers royaux qu'on manque de soldats ? Et vous voulez augmenter les effectifs dans une caserne, qui, de plus, ne sert à rien ? continua Ulric. Eh bien, le royaume est tombé bien bas.
- Je vous interdis de dire que ce royaume est mal dirigé, monseigneur Ulric ! cria un garde.
- Voyons, Ulric, soyez raisonnable, toutes les casernes du royaume sont utiles, dit un conseiller.
- Soit. Comme vous voulez. Mais je ne participerai pas une seconde de plus à cette réunion dont l'assemblée est composée d'incapables ! dit Ulric en sortant de la salle.
Tout le monde le regarda sortir de la salle. Sortir d'une assemblée de cette manière, c'était scandaleux ! S'ensuivit un long silence que le roi brisa.
- Bien. Je crois que vous êtes tous d'accord pour dire qu'on peut augmenter les effectifs de la caserne d'Akkala ? dit-il.
- Oui, votre Majesté ! dirent les conseillers, les gardes royaux et le capitaine d'Akkala.
- A ce sujet votre Majesté, dit ce dernier, il faudrait agrandir les locaux pour accueillir plus de chevaliers.
- Nous verrons cela demain, mon capitaine. Pour le moment, je pense que nous avons assez parlé pour aujourd'hui, répondit le roi.
En voyant la mine déconfite du capitaine, le roi rigola :
- Ne vous inquiétez pas mon capitaine, vous n'aurez pas à refaire tout le trajet ! Je vous ai réservé une chambre dans le quartier des gardes. Quant aux hommes sous vos ordres, vous n'aurez qu'à leur envoyer un message par pigeon royal pour les prévenir !
- Merci Votre Majesté !
- Sur ce, (il se tourna vers l'assemblée). A demain !
Tout le monde quitta la salle. Les gardes proposèrent d'aller déjeuner tandis que les conseillers se dirigèrent vers leurs bureaux. Le capitaine descendit à l'accueil du château pour demander son numéro de chambre. Il passa devant le quartier des scientifiques et les entendit rigoler gaiement. Eux, au moins, ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient sans se soucier des histoires d'effectifs ! Il se demanda pourquoi cet Ulric ne voulait pas agrandir la caserne. Certes, le royaume manquait de chevaliers, mais cela pouvait toujours s'arranger... Qu'est-ce qu'il avait dit aussi ? Ah oui ! Il avait dit que la caserne ne servait à rien ! N'importe quoi ! En passant devant la salle d'armes, il vit Ulric s'entraîner devant un râtelier d'armes. Un conseiller dans la salle d'armes ? Etrange...
Le soir venu, il s'allongea sur son lit (qui était infiniment plus confortable que le lit de la caserne). Il laissa son esprit vagabonder dans ses souvenirs de la journée. Mais il ne put s'empêcher de penser à Ulric Le Serpent et à son comportement étrange. Etrange ? Après tout, il fait ce qu'il veut ! Mais le capitaine sentait qu'il n'avait pas fini d'entendre parler de lui...
Tôt le lendemain, le capitaine se leva, s'habilla et sortit sur la place de la citadelle. Il chercha longtemps un restaurant qui faisait de la brioche d'Akkala mais n'en trouva point. En désespoir de cause, il alla prendre son petit déjeuner chez le meilleur crêpier de la ville. Il commanda une crêpe au miel Enduro pour se donner des forces. Puis, pour passer le temps, il alla s'entrainer. En arrivant à la salle d'armes, il se rappela l'étrange comportement du conseiller. Il s'entraina une petite heure puis se dirigea vers les quartiers principaux, comme la veille. En arrivant, il salua les conseillers et les gardes du royaux puis s'installa à sa place. Le roi avait pris place dans les balcons royaux, surplombant la salle.
- Bonjour ! dit le roi. Vous êtes presque tous venus ! Nous allons pouvoir discuter d'une éventuelle deuxième caserne ainsi que d'éventuels recrutements !
Les hommes discutèrent trois heures durant. Il fut décidé de créer une deuxième caserne et de recruter des chevaliers d'autres casernes pour combler le manque d'effectifs. Le capitaine était aux anges. Vint le moment où ils devaient décider de l'emplacement de la future caserne.
- Je pense qu'il faudrait placer la future caserne en hauteur, pour que les soldats puissent voir l'ennemi arriver de loin ! dit un garde.
- Mais non voyons ! renchérit un autre garde. Il faut la placer sur le seul chemin d'accès à la région ! Comme ça, les chevaliers pourront contrôler tous les passants !
- Enfin, ne dites pas de bêtises ! dit un troisième garde. Les voleurs et les monstres pourront très bien arriver depuis Ordinn !
- Tout à fait d'accord ! acquiesça le capitaine. Pour moi, la meilleure position serait sur une des deux îles au milieu du lac d'Akkala !
- Là, je ne suis pas d'accord avec vous ! dit un conseiller. Si les malfrats ou les monstres détruisent les trois ponts qui traversent le lac, vous serez coincés sur l'île !
- Le mieux, ce serait de placer la nouvelle caserne en hauteur ! renchérit le premier garde qui ne voulait pas abandonner son idée. Par exemple, la placer sur le pic d'Akkala !
- Excellente idée ! cria le capitaine, c'est une position stratégique !
- Je sais, répondit le garde, c'est bien pour ça que j'ai proposé l'idée !
- En effet, construire la caserne sur le petit pic d'Akkala est une bonne idée, dit un conseiller.
- Tout à fait ! firent les gardes.
- Bien, bien, fit le roi, Je vois que vous vous êtes mis d'accord. Je vais prendre contact avec l'architecte royal pour commencer la réalisation des plans. La réunion est terminée !
Exactement comme la veille, les conseillers et les gardes sortirent en discutant. Le capitaine se dirigeait vers la sortie quand le roi l'appela :
- Mon capitaine ?
- Oui, votre Majesté ?
- Demain, ma fille, la Princesse Zelda, ira prier pour la première fois hors du château, à la source de la Force. Pour l'accompagner, j'avais prévu une escorte de deux gardes. Malheureusement, l'un de ces gardes doit rester chez lui pour s'occuper de son fils, très malade. Il vient de perdre sa femme, alors... je lui ai accordé ce congé. J'aimerais que vous le remplaciez.
- D'accord ! Mais pourquoi ne pas le remplacer par un autre garde royal ?
Pour poser cette question au souverain d'Hyrule, il en fallait, du cran ! Peu de chevaliers avait un tel courage...
- Mes gardes royaux sont tous occupés, répondit le roi qui ne manifesta aucun signe de colère.
- Bien, votre Majesté. Alors, je serai là.
- Bien. Alors, au revoir mon capitaine !
- Au revoir, Votre Majesté !
Et le capitaine sortit de la salle. Pour son déjeuner, il choisit des boulettes de poisson Robusto avec une sauce du village Ecaraille dans un bar spécialisé dans les plats du bord de mer. Puis, comme le matin, il alla s'entraîner. Il était fier que le roi l'ait choisi, lui, un simple capitaine, pour protéger la Princesse. En rentrant dans sa chambre, il vit que ses soldats lui avaient écrit :
Cher capitaine,
Suite à votre lettre qui nous disait que vous étiez retenu au château pour une durée indéterminée car vous réfléchissez avec le roi pour un l'élargissement des effectifs, nous nous sommes mis d'accord pour vous envoyer un stock de brioches d'Akkala, faites par Gérard. Malgré le grand manque d'effectifs, nous avons arrêté trois voleurs et tué une dizaine de monstres. Nous espérons que vous vous portez bien depuis trois jours. Nous avons aussi reçu une lettre des scientifiques du village Cocorico qui nous ont dit que les nouvelles flèches explosives seraient bientôt prêtes.
Avec tout notre soutien,
Vos soldats de la caserne d'Akkala
En ouvrant le colis, le capitaine vit une vingtaine de brioches. Il était sidéré par l'affection que lui portaient ses soldats. Il dévora deux brioches puis écrivit une lettre pour remercier ses soldats et leur expliqua qu'il passerait dans la région le lendemain. Ensuite, il s'endormit sur son lit.
A 7 heures le lendemain, le capitaine était prêt, assis sur un des deux chevaux du carrosse royal. Il attendait le général de la garde royale, qui devait l'accompagner pour ce voyage. Le rendez-vous avait été fixé à 7h30 mais le capitaine avait préféré être en avance. Pour son petit déjeuner, il avait mangé une brioche d'Akkala, ce qu'il faisait qu'il ne lui en restait plus que dix-sept. A 7h30 pile, le général de la garde arriva accompagné du roi et de la princesse. La petite, âgée de 4 ans, était un peu effrayée par le monde dans la citadelle. Cette sortie était sa première hors du château, et la pauvre avait perdu sa mère seulement quelques mois auparavant.
- Bonjour mon capitaine ! dit le roi.
- Bonjour Votre Majesté ! répondit le capitaine.
- Je vous présente le général de la garde royale, continua le roi en montrant l'homme à côté de lui.
Les deux chevaliers se serrèrent la main. La princesse monta à bord du carrosse tandis que le général enfourcha le deuxième cheval. Le capitaine vérifia la provision de nourriture pour pouvoir manger et les rubis pour pouvoir dormir dans un relais. Puis le carrosse partit en direction du nord-est. Durant tout le voyage, les deux hommes n'échangèrent pas un mot. Le capitaine s'étonna de ce silence, mais cela ne le dérangeait nullement. Il se rendit compte que ce silence avait même plutôt un effet apaisant. Au bout de quelques heures de voyage, au pied de la montagne de la mort, les soldats arrêtèrent l'attelage pour faire une pause pique-nique. La princesse découvrit pour la première fois un paysage volcanique, et fut impressionnée à la vue de l'immense montagne. Le capitaine commençait tout juste à défaire les sandwichs quand la petite fille l'appela :
- Regarde monsieur ! Tout là-haut, il y a la Créature Divine Vah'Rudania ! Un jour, je la verrai de mes propres yeux, c'est ma maman qui me l'a dit !
Le capitaine fut ému en écoutant les paroles de la princesse. Le fléau Ganon ressuscitera dans quelques années et la fillette l'ignorait. Elle préférait étudier les reliques plutôt que prier. De l'avis du capitaine, à quatre ans, les enfants devaient s'amuser plutôt que prier. Le général rentra de sa reconnaissance, puis le petit groupe mangea un petit peu et repartit en direction d'Akkala. Le carrosse longea la grande falaise du domaine Zora puis redescendit vers la caserne. Le capitaine ordonna un nouvel arrêt et marcha vers ses soldats qui s'entrainaient à l'épée.
- Capitaine, vous voilà ! dirent les épéistes en interrompant leur entraînement, nous ne vous attendions pas de sitôt !
- Nous nous sommes très peu arrêtés, répondit le capitaine, nous voulions arriver au plus vite à la source de la Force.
- D'accord mon capitaine.
- Bien. Des nouvelles ?
- A ce propos, fit un soldat, nous avons reçu ce matin une lettre de Sa Majesté le Roi. C'est au sujet de la nouvelle caserne...
- Montrez-moi la lettre je vous prie...
Le soldat lui tendit le bout de papier :
Mon cher capitaine
J'ai vu l'architecte royal ce matin après votre départ, et vu le type de terrain du pic d'Akkala, il penserait plutôt à construire une forteresse. Merci de me donner votre réponse dans les plus brefs délais.
Sa Majesté Le Roi
Une forteresse ? Pour défendre Akkala ? Le capitaine avait toutes les peines du monde à contenir son immense joie. Tout était parti d'une demande d'élargissement du personnel de la caserne d'Akkala et cela devenait un gros chantier avec la construction d'une forteresse. Il écrivit rapidement une lettre au roi pour lui dire qu'il était entièrement d'accord. Il allait pouvoir exploiter pleinement son talent. En cet instant précis, il n'imaginait pas une seule seconde les événements qui allaient suivre...
Après une demi-heure à voir le capitaine discuter avec ses soldats, le général de la garde royale se sentit impatient d'aller à la source de la Force.
- Excusez-moi mon capitaine, mais quand est-ce que nous reprenons la route ? questionna le général.
- Tout de suite, mon général. Excusez-moi pour cette pause.
Les soldats de la caserne regardèrent le carrosse s'en aller. Le véhicule se dirigea vers la plaine d'Ordrane puis s'immobilisa à l'entrée de la source. Le capitaine et le général aidèrent la princesse à descendre les marches de l'attelage puis l'escortèrent jusqu'à la statue de la déesse Hylia. Le roi leur avait demandé de la laisser prier trois heures. Ensuite seulement ils pourraient aller dormir. La princesse s'agenouilla dans l'eau glacée et commença à prier. Une heure passa sans aucun incident lorsque soudain, le général entendit un bruit derrière lui. Il se retourna brusquement, mais ne vit rien.
- Ça alors, fit alors une voix impossible à localiser, il y a seulement deux gardes pour protéger la princesse ? Je pensais que le roi aurait été beaucoup plus prévoyant que ça !
La princesse semblait étonnée par la voix. En voyant l'expression des deux gardes, elle comprit alors que le propriétaire de cette voix n'avait pas des intentions sympathiques. Le capitaine et le général, eux, contrairement à la petite fille, comprirent tout de suite à qui appartenait la voix.
- Yigas ! cria le général, montrez-vous !
Des ricanements suivirent ses paroles. Dans une fumée orange, apparut alors une vingtaine de bonhommes en costumes rouges et noirs.
- Tiens, tiens, fit un Yiga, ce bon vieux général de la garde royale. Comme on se retrouve ! Sais-tu, que, par ta faute, la moitié de notre gang est en prison ou au cimetière ? Mais cette fois, c'est terminé ! Nous allons tuer l'héritière du sang royal, ainsi que toi, par la même occasion !
- Hors de question ! s'énerva le général, essayez pour voir !
Deux Yigas s'élancèrent vers le général, tandis que deux autres s'élancèrent vers le capitaine. CLANNGG ! firent les lames en s'entrechoquant. Le général se débarrassa rapidement de ses ennemis.
2 Yigas morts
Le capitaine eut un peu plus de mal, mais il finit par assommer les deux méchants.
4 Yigas morts
Tout en combattant, les deux hommes se rapprochèrent de la princesse. Ils étaient prêts à tout pour protéger la petite fille. En chemin, ils éliminèrent encore trois Yigas.
7 Yigas morts
Le capitaine enchaînait les mouvements avec son épée, espérant tenir les Yigas éloignés. La princesse, terrorisée, se tenait dernière lui. Il ne voulait pas faire de cette bataille une boucherie, de peur de choquer la princesse. Mais quand un des trois Yigas qui se tenaient en face lui entailla le bras, aveuglé par la douleur, il envoya son ennemi dans l'autre monde.
8 Yigas morts
Un peu plus loin, le général se battait avec colère. Il était enragé de voir que le gang avait osé lancer une attaque contre la princesse dans un lieu de culte de la déesse Hylia. Les quatre Yigas qu'il affrontait ne firent pas long feu.
12 Yigas morts
Mais malheureusement pour eux, de nouveaux Yigas apparurent. Malgré leurs forces physiques impressionnantes, les deux chevaliers sentirent le désespoir venir. Ils n'allaient plus pouvoir tenir très longtemps. Il leur fallait des renforts de toute urgence. Sinon, la princesse d'Hyrule risquait d'y laisser la vie...
Le combat faisait rage. Les Yigas étaient déterminés à tuer la princesse tandis que le capitaine et le général faisaient tout pour la défendre. Les épées et les serpes coupe-gorges s'entrechoquaient. La nuit commençait à tomber et l'eau de la source devenait de plus en plus froide. Les deux combattants au service du roi sentirent leurs forces faiblir. Mais soudain, alors que le général et le capitaine pensaient que tout était perdu, douze chevaux pénétrèrent en galopant dans la source. Les douze chevaux des douze soldats de la caserne d'Akkala.
- Les renforts arrivent, mon capitaine ! dit un soldat sur un cheval.
Le capitaine hocha la tête et se tourna vers le général :
- Une bataille n'est pas perdue... commença-t-il.
- ... Tant qu'elle n'est pas terminée ! cria le général.
Tous deux se tournèrent vers leurs ennemis.
- EN AVANT ! cria le capitaine.
La bataille reprit, mais cette fois la détermination avait changé de camp. Les soldats avaient apporté du courage au capitaine et au général, tandis que les Yigas semblaient moins rassurés par un combat 14 contre 18. Les quatorze soldats se battaient avec tant d'ardeur que les "serviteurs de Ganon" ne tardèrent pas à reculer. Le capitaine avait demandé à un de ses soldats de veiller sur la princesse, et de la tenir à l'écart du combat pour éviter qu'elle ne se fasse enlever. Le général affrontait deux Yigas, tandis que le capitaine faisait face à trois ennemis en même temps.
Tout en se battant, le capitaine se rappela son entraînement pour devenir chevalier. Il devait sans cesse répéter les mêmes mouvements jusqu'à l'épuisement. Les entraîneurs lui disaient que c'était pour son bien. Que quand il serait chevalier, il verrait bien pire. Que c'était son devoir de protéger la famille royale. Il se rappela les combats d'entrainement contre ses camarades, la nourriture du camp...
8 ans plus tôt
- Toi là ! fit le maître d'entraînement à un écuyer. Une fois ta formation terminée, tu voudras opérer à quel poste ?
L'écuyer s'approcha. C'était le portrait craché du capitaine, avec huit ans de moins.
- Je voudrais devenir capitaine, Monsieur ! dit le jeune.
- Capitaine ? Vraiment ? Alors fais-moi cent pompes ! Exécution !
Le jeune écuyer n'avait pas le choix. Il fit les cent pompes dans la boue, au milieu du vent et du froid. Il avait choisi le camp d'entraînement de la chaine d'Hébra, pour tester sa résistance au froid. Cela faisait déjà quelques mois qu'il avait commencé son entraînement, et il en venait à se dire qu'il avait fait un mauvais choix. Sa mère était morte à sa naissance et il ne lui restait plus que son père. Ce dernier était bûcheron au village de Cocorico, et ce n'était pas un métier très prestigieux : il était extrêmement pauvre car c'était très mal payé. Du coup, son père vivait dans une simple tente, à l'entrée du village. Lui, le futur capitaine, avait toujours vécu au relais des Monts Géminés. Depuis son plus jeune âge, il était fasciné par ces montagnes. De plus, le gérant était très gentil avec lui. Le jeune écuyer s'amusait beaucoup avec le fils du gérant, un petit garçon de trois ans prénommé Gachane. Gachane était un petit garçon sage et timide, tout le contraire de son frère Nagache. Lorsqu'il eut fini les cent pompes, l'instructeur lui ordonna d'enlever son armure, et de ne garder que ses protections. Il allait rester là une heure. Avant de partir l'instructeur lui dit cette phrase, qui aujourd'hui encore résonne dans la tête du capitaine :
- Il ne faut jamais abandonner ! Si tu veux devenir chevalier, il ne faut jamais abandonner !
Et le capitaine avait tenu. Difficilement, certes, mais il avait tenu quand même. A la fin de l'exercice, le capitaine était en hypothermie, il avait l'impression que des milliards d'aiguilles lui transperçaient la peau. Lorsque son supplice fut terminé, il n'alla pas dormir, mais il passa à côté de la cheminée du camp. Le lendemain, le capitaine n'avait aucune force, résultat de "l'épreuve du froid", comme il l'avait surnommée, et de la nuit blanche qu'il avait passée. En voyant son état, l'instructeur lui donna un jour de congé, et le félicita pour son exploit.
8 ans plus tard
Lorsque le capitaine se remémora ce passage de son enfance, une soudaine détermination apparut en lui. Il envoya valser quatre Yigas contre des piliers. Ces derniers furent tués sur le coup.
16 Yigas morts
Il ne restait désormais dans la bataille que douze Yigas contre douze soldats. L'avantage tournait clairement pour les soldats. Mais soudain, l'officier Yiga qui, jusqu'à maintenant n'avait pas participé à la bataille, cria d'une voix forte :
- Stop ! Soldats d'Hyrule, ennemis du Seigneur Ganon, arrêtez de tuer mes Yigas, sinon, je fais supprimer votre chère petite princesse, ainsi que la statue de la maudite déesse Hylia !
Le combat s'arrêta. Les soldats se retournèrent, imaginant le pire. A l'entrée de la source, deux Yigas maintenaient le soldat chargé de surveiller la princesse, tandis qu'un autre Yiga avait une serpe coupe-gorges sur le cou de la princesse. Le capitaine sentit son épée glisser entre ses doigts. Elle tomba dans l'eau et coula au fond de la source.
- Sage décision, murmura l'officier Yiga...
Non... Ce n'était pas possible... Comment le capitaine avait-il pu se laisser avoir ? Il ne pouvait pas laisser la princesse de son royaume mourir sous ses yeux ! Mais au moindre geste suspect, les Yigas n'hésiteraient pas à supprimer la princesse. En tournant la tête, il vit que le général était aussi inquiet que lui. Les soldats de la caserne d'Akkala étaient accablés. Tous, tous avaient la conviction qu'ils avaient perdu la partie.
De leur côté, les Yigas jubilaient. Ils avaient enfin réussi à mettre la main sur la princesse du royaume ! Ils n'en revenaient pas ! Et en bonus, ils pouvaient tuer tout un régiment de soldats, ainsi que le capitaine d'Akkala et le général de la garde royale. Ils allaient enfin pouvoir avoir une promotion digne de ce nom. Après tant d'années au service du Grand Kohga et de Ganon, leurs efforts portaient leurs fruits. Mais leur joie allait être de courte durée...
Pendant ce temps, au château d'Hyrule
Le roi trépignait d'impatience. Le général et le capitaine étaient censés lui envoyer un pigeon royal lorsque que la séance de prière de la princesse était terminée. Or, il n'avait rien reçu depuis une heure, heure à laquelle le temps de prière était fini. Cela ne ressemblait guère au général. Quant au capitaine, il ne le connaissait pas très bien, mais il n'aurait pas pu oublier une telle chose. Il s'était passé quelque chose de grave, le roi en était persuadé. Comme il était en plein conseil des ministres, il convoqua donc Impa, la magistrate adjointe du royaume, pour envoyer un message à sa place.
- Votre Majesté ! dit cette dernière en entrant dans les quartiers principaux, vous m'avez appelée ?
- Oui ma chère Impa, répondit le roi, je n'ai plus de nouvelles de l'escorte chargée de la surveillance de ma fille. Il s'est surement passé quelque chose de grave. J'aimerais que vous demandiez aux soldats de la caserne d'Akkala de leur porter secours.
- Bien, Votre Majesté !
La jeune magistrate alla donc dans son bureau pour envoyer un message à la caserne d'Akkala. Quarante-cinq minutes passèrent et elle ne reçut aucune réponse. Cela était étonnant. La région avait beau être éloignée, un pigeon royal mettait à peine un quart d'heure pour faire la liaison. Le roi avait raison, il s'était passé quelque chose de grave. Au début, malgré son haut statut hiérarchique, elle avait douté des informations de Sa Majesté. Elle pensait qu'il exagérait un peu. Il redoutait toujours une attaque, et elle commençait à avoir l'habitude des fausses alertes.
Mais cette fois-ci, elle en était certaine. Il s'était passé quelque chose de grave. Elle descendit aux écuries et enfourcha sa monture. Elle sortit du château au triple galop et fonça à la source de la Force. Mais Impa savait qu'elle ne serait pas sur place avant six heures de route. Même si les pur-sang royaux étaient infiniment plus rapides que les chevaux trainant en Hyrule, ils ne pouvaient pas aller à la vitesse de la lumière.
A la source de la Force
Plus personne ne bougeait. Les Yigas souriaient doucement derrière leurs masques. Leur coup avait réussi. Les membres du gang s'avançaient doucement vers la princesse. Cette dernière semblait sur le point de s'évanouir. Elle tremblait de tous ses membres. Mais, alors que les bonhommes en costume rouge et noir s'avançaient vers l'héritière du trône royal, la petite se retourna et martela de ses petits poings l'abdomen de son agresseur. Lorsque les Yigas sautèrent sur elle, elle se baissa, effectua une roulade sur la pierre humide et plongea dans l'eau glacée.
Le capitaine parait les coups avec son bouclier, mais ce dernier allait bientôt se briser. Son épée avait sombré dans les profondeurs de la source, et il n'avait pas d'arc. Il allait bientôt mourir. Seul un miracle pouvait le sortir de cette situation. Et le miracle vint. Le Yiga qui l'affrontait s'écroula. La stupéfaction se lisait dans les yeux du capitaine lorsqu'il découvrit l'identité de son sauveur. La princesse se tenait devant lui, avec dans les mains sa propre épée, trois fois trop grande pour elle.
- Votre Altesse, bégaya le chef de la caserne d'Akkala, mais... mais...
- Ne vous inquiétez pas monsieur ! coupa la petite, je vais vous rendre votre épée !
Le capitaine, toujours abasourdi, reprit son épée. Puis il se rendit compte que la princesse venait de lui sauver la vie.
- Merci, Votre Altesse ! cria-t-il. Mais maintenant, il faut vous mettre à l'abri !
Au moment où il prononça ses mots, l'officier Yiga, ivre de rage, frappa la statue représentant la déesse à l'aide de son sabre tranche-vent. Etonnamment, malgré la solidité de l'arme, elle se fracassa contre la pierre. Il n'y avait même pas une égratignure sur la statue. Alors, les serviteurs de Ganon se regardèrent, stupéfaits. Vu que leur officier n'avait plus d'armes, certains se retirèrent dans une fumée orange. A cet instant, une étrange colonne de lumière dorée s'éleva depuis la source dans la nuit d'Akkala. Quelques Yigas disparurent dans des hurlements de douleurs.
- Tant pis, lâcha l'officier, nous reviendrons avec plus d'effectifs, la prochaine fois. Quant à votre emploi du temps, notre sous-fifre intégré en tant que conseiller au château fera le reste !
Et les derniers membres du gang disparurent avant de souffrir davantage. Ainsi s'acheva la première bataille de mon histoire. La bataille de la source de la Force. La mystérieuse colonne de lumière s'élargit brusquement et aveugla tout le monde. Lorsque que le capitaine reprit conscience, il faisait nuit noire. Seule la colonne de lumière (qui s'était amincie) permettait de voir juste assez pour ne pas se noyer dans l'eau glacée de la source. C'est alors que le capitaine repéra un symbole géant fait de lumière sur le sol. Il recula, stupéfait.
- Incroyable, murmura-t-il, incroyable...
Il se retourna vers ses soldats et vers le général. Ils avaient disparu. Il regarda avec une légère appréhension le symbole de lumière dorée. La Triforce. Le pouvoir du sceau et de la destinée. Il remarqua que la source était dans un sale état. Les piliers étaient à moitié écroulés. L'eau était sale. Comme s'il s'était passé beaucoup de temps après la bataille. Comme si elle avait été attaquée puis détruite. Incompréhensible. Alors il vit la statue de la déesse. Un étrange halo de lumière doré l'entourait. Soudain, il entendit une voix :
- Capitaine ! Capitaine !
Il chercha longtemps la provenance de la voix avant de comprendre qu'elle venait de la statue de pierre.
- Capitaine ! répéta la voix, le royaume court un danger comme il n'en a jamais connu. Les Créatures Divines et les gardiens ne suffiront pas à arrêter Ganon. Seule la future forteresse d'Akkala en construction peut arrêter la catastrophe. Vous seul pouvez faire les bons choix. Vous seul pouvez sauver le royaume. Aider le héros et la princesse. Faites les bons choix capitaine... Adieu...
Les dires de la déesse s'achevèrent ici. Le capitaine restait abasourdi. Alors, une trainée de lumière rouge sortit de la statue et monta dans le ciel sombre. Lorsque le chef de la caserne d'Akkala reprit ses esprits, la source était redevenue comme avant. Propre. Bien entretenue. Les piliers en très bon état. Étonnant.
Il retrouva ses soldats et le général à la sortie de la plaine d'Ordrane. On aurait dit qu'ils étaient jusqu'à maintenant en transe. Le groupe de chevaliers se dirigea vers le relais de l'est d'Akkala sans un bruit. Les paroles de la déesse résonnaient encore dans la tête du capitaine... "Toi seul peux faire les choix... choix... Aide le héros... La Triforce..." Le général, à peine arrivé, écrivit une brève lettre au roi pour le rassurer. Pendant ce temps, le chef de la caserne paya les lits pour lui, le général et la princesse, tandis que les soldats retournèrent à la caserne, au sud de la région. Soudain, alors qu'il était allongé sur son lit, une phrase lui revint en mémoire :
- ... notre conseiller infiltré au château...
Les Yigas ! Les Yigas ont un sous-fifre infiltré en tant que conseiller au château ! Il fallait absolument avertir le roi au plus vite ! Un conseiller infiltré au château... Le capitaine réfléchissait à l'identité de la personne lorsque la réponse s'imposa dans son esprit : Ulric le Serpent. Il voulut se lever pour écrire au roi, mais la fatigue prit le dessus et le capitaine s'endormit. A partir de maintenant, c'était à lui de faire les bons choix...
Dans un endroit inconnu
Il faisait sombre. Il avançait dans un étroit couloir. Il fallait qu'il réussisse. C'était la dernière pièce de son plan. Au bout d'une trentaine de mètres, il trouva une porte. Il la poussa puis franchit la pièce au pas de course. Dans la salle suivante, au centre, était posé un objet rond, entouré d'une énergie rouge et noire. Un sourire s'étala sur ses lèvres. Il allait pouvoir terminer son oeuvre. Il avait des envies de meurtre.
Au relais de l'est d'Akkala, le lendemain matin
Le capitaine fut réveillé par le joyeux chant des oiseaux. Aucun nuage ne viendrait cacher la lumière naturelle du soleil. Il trouva une jeune femme en grande conversation avec le général. Lorsqu'il s'approcha pour leur dire bonjour, il remarqua un oeil dessiné sur le front de la fille. Son sang ne fit qu'un tour. Il prit son épée posée à côté de son lit et s'élança vers les deux jeunes gens.
- Traître ! hurla-t-il au général sans cesser de courir, je t'ai fait confiance !
Le général, bien qu'un peu hébété au début, comprit vite pourquoi son camarade se comportait ainsi.
- Non capitaine ! Calmez-vous ! Cette dame n'est pas une Yiga ! C'est une Sheikah ! Un peuple au service de la déesse Hylia et de la famille royale depuis des années ! cria le général en direction du chef de la caserne d'Akkala.
Ce dernier prit alors conscience de son erreur. La femme n'avait rien d'une Yiga. Il l'étudia attentivement : elle portait un grand chapeau sur son dos, elle avait de longs cheveux blancs, et son oeil dessiné sur son front était inversé par rapport aux membres du gang. Les serviteurs de Ganon avaient un oeil qui pointait vers le bas, et celui de la jeune fille pointait vers le haut. Le capitaine connaissait bien les Sheikahs, car ils venaient souvent à Cocorico pour voir son père. Mais il n'avait jamais fait attention à l'orientation de leur symbole.
- Mon capitaine, continua le général, voici dame Impa, la magistrate adjointe du royaume.
Impa, après avoir pris conscience de l'état d'esprit du capitaine, qui avait frôlé la mort à plusieurs reprises la veille, lui pardonna sa tentative d'attaque. L'Hylien et la Sheikah se serrèrent la main. Réveillée par le bruit, la jeune princesse marcha vers les adultes. Elle ne fut point effrayée par la Sheikah : Impa était également sa nourrice.
- Bonjour Votre Altesse, comment allez-vous ? demanda le capitaine.
- Très bien, merci Monsieur !
Impa adressa un signe de la main à Zelda avant de se retourner vers les deux chevaliers.
- Donc, si je comprends bien, dit la magistrate adjointe, vous vous êtes fait attaquer par le gang des Yigas, hier, à la source de la Force ?
- C'est cela même, Dame Impa ! répondit le général.
Pendant que les adultes discutaient de l'événement de la veille, la jeune héritière du trône s'était approchée du sanctuaire de Katsu'Tosa. C'était la première fois qu'elle voyait un sanctuaire en vrai. Elle l'étudiait sous toutes les coutures, de l'entrée principale jusqu'aux moindres détails, comme les marches ou les inscriptions sheikahs gravées dans la pierre. Elle étudia longuement le terminal de contrôle, le même où, cent treize ans plus tard, le héros insérerait la tablette sheikah.
- Comment ça marche ? murmura la princesse.
Elle passa lentement ses doigts sur le rond étrange qui devait servir à la téléportation. La princesse, passionnée par les reliques, passait énormément de temps dans la bibliothèque du château à lire des livres sur le sujet. Elle connaissait donc la plupart des secrets sur les reliques, et pour une petite fille de quatre ans, on pourrait appeler ça un exploit. Certains chercheurs sheikahs, dont le métier consistait à étudier ces reliques de longues journées durant, avaient été impressionnés par l'étendue des connaissances de la petite.
- Votre Altesse, cria le général, nous devons retourner au château !
La princesse soupira. De toute sa jeune existence, elle n'avait connu que les murs de pierre du château. Avec cette sortie, elle avait découvert de grands espaces, de magnifiques paysages, un volcan... et des ennemis. Beaucoup d'ennemis. Mais malgré le danger qui régnait hors de la citadelle, retourner au château signifiait pour elle perdre cette liberté. Elle avait adoré ce voyage et ne voulait pas rentrer chez elle. Le capitaine et le général, même aidés d'Impa, eurent toutes les peines du monde à la faire rentrer dans le carrosse. La petite fille regarda une dernière fois ce paysage automnal de la région d'Akkala et le carrosse s'élança.
Aux abords de la citadelle, trois gardes royaux vinrent escorter l'attelage jusqu'aux portes du château, où le roi attendait de pied ferme sa fille et les deux chevaliers. Lorsque le carrosse s'arrêta devant les deux grosses portes métalliques, les quelques badauds qui trainaient dans les parages accoururent pour regarder sortir du carrosse la future souveraine. Mais leur curiosité fut de courte durée : les gardes qui gardaient l'entrée du château s'empressèrent d'empêcher les passants d'observer la famille. Cette mesure de sécurité (empêcher le peuple d'observer les membres de la royauté) avait été votée suite au décès de la reine, trois mois plus tôt. La princesse salua son père et se fit raccompagner par Impa jusqu'à ses appartements. Pour le cas du capitaine et du général, le roi les convoqua sur le champ dans son bureau. Le retour au château et la fin du voyage signaient le début des explications...
- Yaaaahhh ! Yaaaahhhh !
Le capitaine était le seul soldat dans la salle d'armes. Un nombre incalculable de pensées se bousculaient dans sa tête. L'attaque des Yigas, les paroles de la déesse, le retour au château... Cela datait d'à peine quelques heures, mais il avait l'étrange sensation que tous les événements récents s'étaient passés il y a plusieurs jours. Et pourtant, tout s'était passé très vite, trop vite... Le capitaine arrêta son entraînement pour penser à l'entrevue avec le roi.
4 heures plus tôt
- Bien, fit le roi, vous êtes en train de me dire que vous vous êtes fait attaquer par les Yigas à la source de la Force ?
- Oui, votre Majesté ! répondit le général.
- Bien, reprit le souverain d'Hyrule, et vous affirmez que sans les soldats de la caserne d'Akkala, vous auriez perdu ?
- C'est cela même, votre Altesse, dit le capitaine.
Le roi prit du papier à lettre royal et un crayon sur son bureau puis écrivit quelques mots. Ensuite, il donna la lettre à un pigeon qui s'envola dans la nuit.
- J'ai envoyé une demande d'accélération des travaux de la caserne d'Akkala aux ouvriers, expliqua le souverain aux deux hommes assis en face de lui. J'ai bien peur que nous devions nous attendre à d'autres attaques de la part des Yigas. Plus vite sera construite notre défense, mieux ce sera.
Le capitaine et le général acquiescèrent. Leur roi avait raison. Soudain, le chef de la caserne d'Akkala bailla. Il devint tout rouge. Bailler dans le bureau du roi, il allait pouvoir dire adieu à sa carrière de chevalier ! Mais à sa grande surprise, le souverain éclata de rire :
- Mon pauvre capitaine ! Vous devez être exténué ! Vous allez pouvoir vous coucher, vous et le général, mais pas tout de suite. J'ai encore quelques questions à vous poser.
Les deux chevaliers se redressèrent. La soirée allait encore être longue...
4 heures plus tard
Le capitaine soupira. Il avait envie d'aller se coucher, mais il savait que s'il se glissait dans son lit, il ne parviendrait pas à trouver le sommeil. Il préférait s'entraîner, encore et encore... Au vu de la tâche qui l'attendait, c'était la meilleure solution selon lui. Pour protéger les élus, il fallait qu'il s'entraîne.
Il n'avait parlé à quiconque des paroles de la déesse... pas même au roi. Il avait jugé préférable de dissimuler la vérité. Il n'avait pas envie qu'on le prenne pour un fou. Malgré tout, il avait longuement envisagé d'en parler au général de la garde royale. Après tout, ils avaient vécu la même bataille, traversé le nord-est d'Hyrule sur le même attelage... peut-être que le général le comprendrait ? Mais après réflexion, le chef de la caserne d'Akkala avait pensé que le général se moquait d'un petit capitaine. La suite allait lui donnait tort...
Au même moment, dans un endroit perdu de la région Gerudo
- Comment ??!! Tu oses me dire que tu as échoué ? Tu es pitoyable ! Tu ne mérites même pas de vivre !
- Chef, s'il vous plaît, non... Je ferai ce que vous voulez !
- Il fallait y penser avant de séduire cette Gerudo et de détruire ta mission !
- Pitié ! NOOOONNN !!!
Le mystérieux chef se tourna vers d'autres serviteurs :
- Emmenez-le !
Le chef soupira. Son plan était parfait. Mais il devait faire attention aux traîtres, comme celui-ci. A ce stade de sa mission, le moindre faux pas pouvait lui être fatal. Il n'avait pas, il n'avait plus le droit à l'erreur. Son plan était terminé, mais des traîtres pouvaient encore le faire échouer. Si son plan réussissait, il aurait ce dont il avait toujours rêvé ! Il sourit. Sa main rencontra la lame tranchante de son poignard. De sombres pensées envahirent sa tête...
Château d'Hyrule, dans la salle d'armes
Le capitaine était épuisé. Il était plus d'une heure du matin. Il avait passé plus de quatre heures d'affilée à s'entraîner, inlassablement, répétant encore et toujours les mêmes mouvements. Il fit une énième pause pour boire un peu dans sa gourde. Il avait déjà été trois fois la remplir au robinet disponible à l'extérieur de la salle. Il faisait chaud, et la fatigue commençait à se faire sentir sérieusement. Il était en train d'envisager sérieusement de se mettre au lit lorsqu'il entendit un bruit. Il voulut se lever, mais, ses paupières étant lourdes, le capitaine s'endormit...
6 mois plus tard
La forteresse était terminée. Edmondo était content. Il aurait fallu 6 mois et pas moins de 1500 ouvriers pour venir à bout de ce chantier titanesque.
Edmondo était un petit maçon issu du village d'Écaraille récemment promu au rang de maçon royal (le maçon royal est le chef lors d'un chantier). Il avait eu ce poste grâce à son grand talent et sa chance. Il sourit. Ce chantier avait été l'affaire de sa vie. Dans l'après-midi, le Roi en personne accompagné de la Princesse, du capitaine de la caserne d'Akkala (et donc bientôt de la forteresse), ainsi que du général de la garde royale et d'une scientifique du village Cocorico viendraient admirer ce fort. Edmondo ne voyait pas ce que faisait une scientifique dans l'histoire mais il savait qu'il ne fallait pas décevoir ces visiteurs importants.
- Chef ! Chef ! cria un ouvrier. Le cortège de Son Altesse Royale arrivera vers 16 heures !
- Bien ! répondit Edmondo, que tout soit prêt pour leur arrivée !
- Bien chef !
Edmondo accompagna l'ouvrier jusqu'à l'entrée en passant par le pont du fort. Il distribua ses ordres aux travailleurs présents puis monta sur la terrasse où étaient entreposés les canons. De là, il admira le sud de la région. Au loin, on pouvait apercevoir le Domaine Zora. Et si on possédait une bonne vue, les jours de beau temps, on voyait le château d'Hyrule...
***
A 15h40, un carrosse tiré par un cheval, et deux chevaux montés par une scientifique sheikah et le général, se présentèrent aux portes de la nouvelle forteresse d'Akkala. Edmondo se précipita pour les accueillir.
- Bonjour, Votre Majesté ! dit-il au roi.
- Bonjour, répondit le roi, vous devez être Edmondo, le chef de ce chantier, n'est-ce pas ?
Le maçon, un peu intimidé par son interlocuteur, devient tout rouge lorsque le souverain d'Hyrule prononça son nom.
- Oui... heu... Votre Sajesté... Votre Majesté.... c'est bien moi... bégaya Edmondo.
Le roi, un peu amusé par l'embarras du maçon, sourit :
- Allons, monsieur Edmondo, calmez-vous ! Je ne vais quand même pas vous manger !
Mais cette remarque ne fit qu'aggraver le malaise du maçon.
- Oui... peut-être Votre Majesté...
- Bon, coupa le capitaine qui avait hâte de visiter la forteresse, on commence la visite quand ?
Cette question fit l'effet d'une douche froide pour Edmondo, qui reprit ces esprits.
- Oui, tout de suite Monsieur le capitaine !
Mais alors que le maçon prononçait ces mots, une fumée orange apparut derrière lui et l'instant d'après, un homme en costume rouge et noir était derrière le maçon. Le Yiga (car c'en était un) leva sa serpe, prêt à l'abattre sur le pauvre Edmondo...
Message de l'auteur : Je me suis rendu compte que je me suis trompé sur l'âge de la princesse Zelda. Ce n'est pas 4 ans, mais 6 ans. Désolé pour cette erreur !
Mais, heureusement, le capitaine réagit plus vite que les autres. Il s'élança vers le Yiga et réussit à parer le coup. Le serviteur de Ganon poussa un cri de dépit et se téléporta sur le toit de la forteresse. Le futur chef de la bâtisse se précipita vers le fort et commença à escalader la paroi. En moins de deux minutes, il fut sur le toit. Le Yiga l'attendait, prêt à se battre. Le capitaine engagea le combat par un coup d'épée latéral que le sous-fifre para aisément. Ce dernier se téléporta derrière le capitaine pour lui asséner un coup dans le dos. Le chef de la caserne d'Akkala se retourna et se protégea grâce à son bouclier. Le Yiga se téléporta à nouveau mais son coup échoua également. S'enchaîna alors un combat acharné, entre le capitaine et le serviteur de Ganon. En bas, au sol, la princesse regardait le combat, sa petite main accrochée au bras de son père.
Soudain, le capitaine dérapa et des morceaux de pierres dégringolèrent dans le vide.
- Mon toit ! s'écria Edmondo, horrifié.
Il faillit se faire assommer par une grosse pierre qu'il évita d'un cheveu, et, pris de panique, se réfugia derrière un des chevaux.
***
Le capitaine avait de plus en plus de mal à parer les coups. Le Yiga qu'il affrontait était vraiment fort. Et il maîtrisait à la perfection la téléportation. Le combat durait maintenant depuis plus d'une heure, et le futur chef de la forteresse commençait sérieusement à fatiguer. Ses mouvements devinrent plus lents, plus prévisibles... Alors que le Yiga, lui, au contraire, devenait de plus en plus rapide, assénait de plus en plus de coups...
Soudain, alors que le capitaine était au bord de la fatigue, le serviteur de Ganon lui asséna un coup latéral avec sa serpe coupe-gorge. Le chevalier, surpris, trébucha en arrière et bascula dans le vide.
***
Village d'Elimith, au même moment
- Tu feras attention, hein mon chéri ?
- Mais oui maman, ne t'inquiète pas !
- Tu seras sage et tu ne feras pas de bêtises ?
Le jeune homme soupira. Cela faisait des semaines qu'il attendait ce moment, mais avant, il devait affronter une ultime épreuve : dire au revoir à sa mère. Il respira longuement puis regarda la femme qui se tenait debout en face de lui avant de répondre d'une voix exaspérée.
- Oui maman... je ne ferai pas de bêtise, je me tiendrai bien à table, et je serai poli avec les autres soldats...
- C'est bien mon chéri ! Ton père aurait été fier de toi !
Sa mère le serra dans ses bras, et après un ultime adieu, le jeune chevalier prit la route en direction de la plaine du Cernoir, plus précisément le Relais des Géminés, où il avait prévu de passer la nuit. Il avait emporté avec lui une bourse de cent rubis, la vieille épée de son père, qui avait été chevalier dans le temps, ainsi que le bouclier en bois qu'il s'était fabriqué lui-même pour l'occasion. Le soleil commençait à décliner à l'horizon lorsqu'il passa devant le Ranch d'Elimith et il faisait nuit noire lorsqu'il arriva au relais.
- Bonsoir ! dit-il au gérant du relais, je désirerais passer la nuit ici, est-ce possible ?
- Bien sûr ! Bienvenue au relais, l'endroit idéal pour laisser sa monture ou se reposer au calme ! Je m'appelle Gachane, comme mon père et mes ancêtres, et comme mon fils, ainsi que les générations futures ! Si vous voulez réserver un lit, ce sera à l'intérieur, s'il vous plaît !
Le chevalier rentra donc dans le relais en essayant de faire le moins de bruit possible, pour éviter de déranger la plupart des Hyruliens qui dormaient déjà. Il s'adressa au gérant au comptoir pour réserver un lit.
- Voilà ! J'aimerais réserver un lit pour dormir cette nuit, il reste de la place ?
- Vous avez de la chance, il me reste un lit simple et un lit double ! Le lit simple coûte 20 rubis, et le lit double coûte le double, soit 40 rubis ! Lequel voulez-vous ?
- Le lit simple, s'il vous plaît.
Gachane encaissa les rubis puis indiqua un lit à baldaquin au jeune chevalier.
- A quelle heure voulez-vous que je vous réveille ? demanda le gérant.
- A cinq heures du matin, s'il vous plaît. Il me reste un long voyage à faire avant d'atteindre ma destination.
- Et où allez-vous ?
- A la Forteresse d'Akkala.
- Par Hylia ! Ça fait une sacrée trotte depuis Elimith ! Et à pied en plus !
Le jeune homme adressa un faible sourire à Gachane. Il avait marché longtemps sans aucune pause depuis son départ et était exténué. Il demanda poliment au gérant de le laisser s'endormir puis il se glissa sous les draps. A peine la tête posée sur l'oreiller, il s'endormit aussitôt. Demain, une autre dure journée l'attendait...
***
Heureusement, le capitaine réussit à se raccrocher d'une main à une barre de fer rouillée, qui était utilisée par les ouvriers de la forteresse pour poser les pierres des très hauts murs. Ces ouvriers se suspendaient alors dans le vide à l'aide d'une corde, et posaient les pierres de ces murs trop hauts pour qu'on puisse les atteindre depuis le sol.
Le Yiga s'avança lentement au-dessus du vide. Un rictus méprisant se devinait sous son masque. Lorsqu'il arriva à la hauteur du capitaine, il leva sa serpe bien haut, puis l'abattit sur les doigts du futur chef de la forteresse.
Chaîne d'Hébra, Nord
Tout était blanc autour de lui. Il ne savait pas, plus où il était. Il était complétement perdu. Des murmures. Il entendait des murmures autour de lui. Alors il se rappela. Et il laissa couler ses larmes. De grosses larmes. Elles tombèrent tout autour de lui, formant une véritable petite pluie. Il tomba à genoux, continuant son chagrin. Au bout d'un grand moment, il releva la tête. Les murmures s'étaient arrêtés. Il n'entendait que le vent, de grosses bourrasques soufflant sur la neige.
- Un blizzard... murmura-t-il.
Et puis il se releva. Et à cet instant, le vent s'arrêta de souffler, comme si le temps s'était arrêté. Il renifla, puis se mit en marche. Peut-être que tout n'était pas encore perdu. Peut-être qu'ils étaient encore vivants ?
- Papa ? Maman ! cria-t-il. PAPA ?! MAMANNN ?!
Rien. Personne ne lui répondit. Mais il ne perdit pas espoir. Il continua, encore et encore, inlassablement, criant, répétant les mêmes paroles. En vain. Alors il recommença à pleurer. Il commençait à avoir froid, très froid. Peut-être qu'il allait mourir lui aussi. Ce n'était pas plus mal. Comme ça, il allait pouvoir rejoindre ses parents. Il ferma les yeux et s'écroula dans la neige.
* * *
Forteresse d'Akkala, un peu plus tôt
Le capitaine regarda la lame d'argent fondre sur lui, se préparant à la chute qui l'attendait. Mais le Yiga s'arrêta net, une flèche plantée dans la gorge. Il s'écroula, puis chuta dans le vide. Le capitaine de la forteresse, à bout de force, réussit quand même à se hisser sur la barre rouillée. Mais il ne pourrait pas escalader les murs de la bâtisse avec ses bras endoloris. Il fallait qu'il trouve une solution.
* * *
Vallée de Caltice, repaire des Yigas
Assis sur son trône, il admirait la pièce autour de lui. Richement décorée, elle était solidement gardée par quatre officiers. Il sourit. Il avait à son service tout le clan. Il ne pouvait rêver mieux. Avec tout ce petit monde, il pouvait éliminer toute personne qui se mettrait en travers de son chemin.
Au centre de la pièce se trouvait un arc à double encoche, très utilisé par les Yigas. Lui n'aimait pas ce genre d'arc. Trop dur à manier, à son goût. Il soupira puis ferma les yeux. Il se concentra et fit défiler tout ce qu'il avait entrepris et accompli jusque-là. Tous ces efforts... peut-être bientôt couronnés de succès. A cette pensée, un de ses nombreux rictus se dessina sur son visage. Il était toujours perdu dans ses pensées lorsqu'un officier entra :
- Maître... L'espion est revenu.
- Bien... Faites-le entrer.
Un sous-fifre s'avança alors, un peu intimidé d'être en compagnie de ce mystérieux "maître".
- Alors ? fit-ce dernier, Raconte-moi tout.
- Il est mort, maître.
- Qui ça ? Le capitaine ? Le maçon ? Mieux... le roi ?
- Non... euh... Le Yiga... fit le sous-fifre d'une toute petite voix.
Le Maître explosa :
- Comment ?! Il est mort ?! Ah l'incapable ! Ce n'est qu'un piètre crétin ! Comment pouvons-nous ressusciter le fléau si vous n'êtes même pas capable de tuer un simple capitaine ? Enfin... tant pis ! Après tout, j'ai ce qu'il me faut... Tu peux partir.
Le Yiga se leva et commença à sortir lorsque le maître le rappela :
- Encore une chose, comment est-il mort ?
- Il s'est fait transpercer d'une flèche, maître.
- Et par qui ?
- Le maçon royal Edmondo, maître.
* * *
Forteresse d'Akkala, 2 heures plus tard
Couché dans son lit, le capitaine n'arrivait pas à s'endormir. Quelques heures plus tôt, les ouvriers de la forteresse l'avaient aidé à remonter à l'aide de cordes. En arrivant au pied de l'immense bâtisse, on l'avait informé que le maçon Edmondo avait assassiné le Yiga grâce à l'arc posé dans la calèche. Finalement, ce maçon n'était pas si trouillard. Et il savait bien tirer à l'arc.
Le capitaine était pensif. En six mois, il avait subi deux attaques de Yigas, le visant lui, et surtout la princesse. Il soupira. La pauvre petite fille avait vécu trop de choses tristes : la mort de sa mère, les attaques des Yigas, la prière dans l'eau glacée des sources... tout cela à un si jeune âge !
Il pensa à sa jeune épouse. Il espérait qu'elle allait bien. Normalement, elle était en sécurité, chez eux, au village d'Elimith. Bientôt, il allait avoir une permission d'une semaine entière ! Et il allait pouvoir la revoir, elle, et son doux sourire...
Mais pour le moment, il devait dormir. Demain matin, tôt, allait avoir lieu la cérémonie de sa nomination en tant que capitaine de la forteresse. Le roi lui avait promis l'arrivée de plusieurs soldats et chevaliers du château. En plus, des messagers avaient parcouru tout le royaume, et avaient collé de nombreuses affiches pour recruter des soldats. Akkala était certes la région la plus sauvage du royaume, mais travailler dans une forteresse n'était pas donné à tout le monde. Alors autant en profiter.
* * *
Cité Gerudo, dans une ruelle déserte
Deux silhouettes discutaient, assises par terre dans une des ruelles de la Cité Gerudo. Les deux femmes, pour éviter d'attraper froid, remontèrent leur châle par-dessus leurs épaules.
- Alors c'est d'accord ? 50 rubis, et en échange, deux lances de la garde ? demanda l'une.
- Minute ! répondit l'autre, le temps de réunir mes copines pour le coup, et en calculant les risques que j'ai de me faire prendre, ce sera 200 rubis !
- Tu plaisantes ! Ce n'est pas du tout la première fois que tu fais un coup pareil ! Pour toi, ce serait une plutôt une formalité ! Ce sera 90 rubis, pas un de plus !
Une patrouille apparut au bout de la rue, et les deux femmes cessèrent leur dispute, faisant croire qu'elle discutait de recette de cuisine. Elles saluèrent la patrouille, puis, une fois que cette dernière eut disparu, les deux Gerudo grimpèrent alors et se retrouvèrent dans un des nombreux cours d'eau sur les toits de la cité, qui servaient à alimenter celle-ci en eau. De là, au moins, elles pourraient discuter sans être dérangées.
- 90 ! C'est à peine le prix de trois armes ! Tu es une amie, et une cliente fidèle, donc je veux bien te faire un prix d'amis : 120 rubis, qu'en dis-tu ?
- 120 ! Arnaqueuse ! Tu sais pourtant que j'ai les moyens de te mettre en prison, grommela l'autre.
- Peut-être. Mais moi aussi j'en sais assez sur toi pour te dénoncer à la garde ! Alors 110 rubis, si tu veux.
- 105. Et c'est mon dernier mot.
- D'accord pour 105 rubis.
- Bien. Parfait. Je les aurais quand, ces lances ?
- Le temps de réunir tout le monde, et de faire le coup, dans trois jours.
- Bien. Je préviendrai mon supérieur. Avec ces armes, le déguisement sera parfait.
- Et en échange de ce service, j'aurai droit à l'immunité contre ton clan.
- Humm... je ne sais pas. Après tout, qu'est-ce qui me dit que tu ne pourrais pas nous faire un coup fourré, sous prétexte d'avoir l'immunité totale ?
- Je pense que je t'ai rendu assez de service, à toi et à ton clan, pour avoir un petit peu de protection, vu ce que je risque !
- Ouais. J'en parlerai au chef. En attendant, Savaasaba et sav'oor !
- Sav'oor !
Et les deux complices descendirent de leur mur. Elles se séparèrent, l'une quitta la cité pour traverser le désert en direction de la vallée de Caltice, et l'autre rentra chez elle pour aller se coucher.
Relais des Géminés, 5 heures du matin
- Monsieur, levez-vous, il est 5 heures !
Le gérant du relais des Géminés secoua le jeune homme endormi sous sa couette. Ce dernier lui avait demandé de le réveiller à 5 heures, ce qui peut paraître étonnant, mais ce garçon devait se rendre à pied à la nouvelle Forteresse d'Akkala. Et vu la longueur de ce voyage, mieux valait qu'il parte tôt.
- Monsieur, réveillez-vous, il est 5 heures ! continua le gérant.
Le jeune homme ouvrit les yeux. Il regarda autour de lui, avant de se souvenir où il était.
- Merci, monsieur ! dit-il.
- Oh, dit le gérant, il n'y a pas de quoi.
Le voyageur sortit de son lit puis commença à enfiler ses chaussures.
- Monsieur a-t-il besoin que je lui prépare quelque chose ? demanda Gachane.
- Non merci, j'ai ce qu'il me faut.
Le jeune homme regarda dehors. Il ne neigeait pas, mais une fine couche de givre s'était formée sur l'herbe durant la nuit, à cause du froid. Il enfila son doublet. Heureusement qu'il avait pensé à le prendre, sinon, il aurait été frigorifié avant d'avoir pu atteindre Cocorico. Avec ça au moins, il pourrait être un peu au chaud. Une fois qu'il eut fini de s'habiller, il prit son épée et rangea son petit bouclier en bois dans son dos. Il s'apprêtait à partir lorsque le gérant lui demanda :
- Excusez-moi, monsieur, le capitaine de la forteresse est un vieil ami. Je l'ai élevé ici, au relais, avec mes deux fils. Cela fait une dizaine d'années que je ne l'ai pas revu. S'il vous plaît, pourrez-vous lui dire de passer lorsqu'il aura une permission ?
- Bien sûr ! répondit le jeune homme, pas de problème.
- Oh ! Merci infiniment ! Que la déesse Hylia vous protège pendant votre voyage.
Les deux hommes se serrèrent la main, puis le futur soldat quitta le relais. Un léger brouillard s'était installé sur la plaine du Cernoir depuis son lever. Ce n'était vraiment pas le temps qu'il voulait pour son premier voyage. Il franchit le pont de Cocorico, puis attaqua la montée vers le village. Il ne voyait pas à trois mètres et il n'avait croisé point de monde jusqu'à présent. Vu le temps, cela était normal, mais le jeune homme pensait que certains marchands ne seraient pas inquiétés par le temps. Il arriva en haut de la côte, à l'entrée du petit canyon. Le futur soldat s'assit sur un rocher pour souffler un peu avant d'arriver au village. Il sortit sa carte d'Hyrule et observa le chemin qui lui restait à parcourir.
Une fois le village de Cocorico traversé, il devrait redescendre par la grande plaine vers la région de Lanelle. Puis il traverserait les marécages de Lanelle, avant de rejoindre la route au sud d'Ordinn. C'était beaucoup plus court que de faire tout le tour par l'ouest des marécages.
Le jeune replia sa carte, la rangea dans une des poches de son doublet puis reprit sa route. Il traversa l'étroit canyon, et dix minutes plus tard, il était arrivé à l'entrée du village. Celui-ci était désert. Le brouillard n'était toujours pas levé, et les habitants de Cocorico étaient restés cloitrés chez eux. La traversée se fit donc rapidement, le voyageur ne prit pas la peine de visiter le village. Au bout de celui-ci, sur la plaine, le brouillard s'était levé et le soleil éclairait le reste d'Hyrule. Le jeune homme, bien qu'étant pressé, prit quelques minutes pour observer le magnifique paysage. Il mangea une pomme d'un arbre voisin, puis se remit en route.
* * *
Vallée de Caltice, 8 heures plus tôt
Elle avait froid. A vrai dire, elle grelottait de froid, tellement qu'elle faisait à présent des pauses tous les 100 mètres, tellement elle tremblait. Les vêtements gerudos, qui d'ordinaire protègent du froid glacial du désert, ne parvenait plus à garder la moindre trace de chaleur, ni à empêcher le froid de rentrer. Ou plutôt, le désert connaissait une vague de froid sans précèdent depuis plusieurs jours, sans qu'on explique pourquoi.
Elle venait, une heure plus tôt, de conclure un marché avec son amie, dont la spécialité était de voler des objets en tout genre, et aussi - elle n'avait aucune honte à penser cela - d'arnaquer les gens. Maintenant, la Gerudo rentrait chez elle, au repaire des Yigas. Là-bas, au moins, elle serait au chaud. Arrivée au bout de la vallée, elle avait les lèvres violettes et gercées, et elle était frigorifiée. Un groupe de quatre personnes, en costume rouge et noir, se matérialisèrent devant elle, dans une fumée rouge.
- Alors, Mafek, comment s'est passé ta négociation ? demanda un des Yigas à la Gerudo.
Un ricanement s'empara des trois autres. Mafek, un peu énervée par leur attitude, leur cria :
- Laissez-moi passer les bouffons !
Les quatre Yigas se turent instantanément. L'un d'eux prit cependant la parole, d'une voix calme, mais froide :
- Bien. Nous allons te laisser entrer. Cependant, la prochaine fois que tu nous manques de respect comme tu viens de le faire, tu ne t'en sortiras pas aussi facilement. Si je laisse passer cet affront, c'est parce que je suis fatigué. Maintenant, déguerpis !
Mafek ne se le fit pas dire deux fois. En tant que seule Gerudo du clan, elle ne s'était pas très bien intégrée. Mais elle désirait servir l'ancien roi de son peuple, Ganon, et c'est pour cette raison qu'elle s'était engagée dans le clan. La Gerudo voulait aller se coucher directement, mais elle devait d'abord faire un récit détaillé de son escapade au maître. C'était la procédure, et elle devait la respecter, sous peine de mort. Elle marcha donc en direction de la chambre du maître, mais à l'entrée de celle-ci, un officier la rappela :
- Et, toi !
Mafrek se retourna, se demandant ce qu'elle avait fait de mal.
- Oui ? répondit la Gerudo.
- Nom, matricule, dit l'officier, et au trot.
Mafrek, étonnée d'une telle procédure, s'exécuta.
- Mafrek, Gerudo, matricule 009-546-432, répondit-elle.
- Bien. Alors, peux-tu m'expliquer pourquoi tu es en civil ?
Prise par la fatigue, Mafrek avait totalement oublié de remettre sa tenue de Yigas. Or, être en civil dans le repaire est punissable, soit de cinquante ans de cachot, soit de corvée de ramassage de baies, dans les Hauteurs Gerudo, au milieu de la neige. Mafrek n'avait aucune envie de faire cinquante ans de cachot, ou de trainer dans la neige et le froid, surtout avec la vague de basse température que subissait la région en ce moment. La Gerudo paniqua. Elle essaya de trouver une excuse, n'importe laquelle, qui pourrait la tirer d'affaire. Elle commença donc à expliquer la situation à l'officier :
- Oh ! Je suis confuse ! Excusez-moi, je suis prise par la fatigue, plus le froid dans le désert...
- C'est bon, c'est bon ! la coupa l'officier. Lui aussi était fatigué, et il n'avait nulle envie de mettre une jolie Gerudo au cachot. Allez, mettez votre tenue, et que je n'entende plus parler de vous ! continua-t-il.
Mafrek poussa un soupir de soulagement. Elle remercia chaleureusement l'officier, puis passa dans la dernière pièce avant la chambre du maître. Elle redonna son nom et son matricule aux officiers qui gardaient la pièce. Les officiers la laissèrent passer, et elle se retrouva seule, en compagnie de ce "maître".
- Bonsoir, maître, fit Mafrek en s'agenouillant devant son chef.
- Alors, raconte-moi ton entretien.
- Bien, maître. J'ai pu donc voir la meilleure voleuse de la cité. J'ai réussi à négocier deux lances de la garde gerudo, comme vous me l'avez demandé.
- Bien. Et le prix ?
La Gerudo hésita. Le maître n'aimait pas gaspiller des rubis. Pour lui, 105 rubis pour deux lances relevait du gaspillage, et il n'hésiterait pas à tuer celle qui lui a pris "ses" rubis, c'est-à-dire l'ami de Mafrek. Mais la Gerudo n'avait plus le choix.
- 105 rubis, maître, dit Mafrek d'une toute petite voix.
Elle vit alors avec horreur l'expression du maître. Ce n'était pas une mine satisfaite qu'il affichait, mais une tête de vrai fou furieux. Mafrek recula, mais le mur coulissant derrière s'était fermé. Le maître se leva et la regarda dans les yeux :
- 105 rubis !!! explosa-t-il, tout ça !!? le maître se calma légèrement, puis interrogea Mafrek, c'est tout ?
- Non, maître. Elle veut avoir l'immunité totale en cas d'attaque de la cité par le clan, dit doucement la Gerudo.
Alors ce ne fut plus une explosion de colère que hurlait le maître, mais un véritable bombardement de rage !
- Alors elle nous vole notre argent, et en plus elle veut une protection !? Ah, elle va voir, mais elle va voir ! Quand est-ce qu'on les recevra, ces lances ?
- Dans trois jours, maître.
- Bien.
Le maître réfléchit quelques instants puis reprit la parole :
- Ton amie n'aura pas une protection totale, mais elle ne risque rien en cas d'attaque de la cité, ne t'inquiète pas. Tu peux disposer.
- Merci, maître.
Mafrek se leva, salua le Maître puis sortit de la pièce. Au moment de se mettre au lit, elle eut un mauvais pressentiment. Ce genre d'intuition que l'on a lorsqu'on a l'impression que quelque chose d'horrible va se passer. La Gerudo ferma les yeux, mais n'arriva pas à s'endormir. Elle ne pouvait s'empêcher de croire que le maître lui avait menti, qu'il préparait un coup fourré. "Non, c'est impossible, pourquoi mentirait-il ?" se dit-elle. Et pourtant...
C'est sous une chaleur accablante que le roi tint son discours de l'inauguration de la forteresse. Malgré l'instant solennel qui se dégageait de l'évènement, pas grand monde n'écoutait le souverain. Certains comparaient la fournaise qui régnait sur la région à la chaleur du volcan d'Ordinn, tout proche.
Bon nombre de personnes avaient quitté la petite foule qui se tenait devant la forteresse pour se baigner dans le petit lac en contrebas du fort. Edmondo s'occupait d'ailleurs de la petite Zelda, qui lui récitait tout ce qu'elle savait sur l'eau, le domaine Zora et par extension la créature divine Vah'Rutah. Le maçon royal, qui n'y connaissait pas grand-chose dans ce domaine (son travail consistait plutôt à s'occuper des bâtiments de pierre, de bois ou de brique), hochait la tête à chaque révélation de la petite fille.
Non loin d'eux, un groupe de Zoras jouait à une partie de "Watbaga", un jeu ancestral zora, très peu connu, qui consiste à prendre une petite balle remplie d'eau et se faire des passes dans un lac. Celui qui faisait tomber la balle devait rester le plus longtemps possible sous l'eau sans respirer. Le peuple zora supportant très mal la chaleur, nous pouvons comprendre pourquoi ces derniers ont été les premiers à quitter la foule.
Les Gorons, en revanche, sont le seul peuple en Hyrule (avec les Gerudos) à supporter de telles chaleurs. L'échantillon de Gorons qui avait fait le déplacement représentait d'ailleurs une bonne partie du public écoutant le discours du roi. Suite à l'attaque de la veille, ce dernier était protégé par six soldats de la garde royale, dont le général. Le capitaine, lui, bien qu'en nage sous son armure, se tenait solennellement au pied de l'estrade. Il était de son devoir de se tenir bien droit, et de bien écouter. Cette faveur que le roi lui a faite, il ne l'avait faite à aucun autre avant lui, il en avait conscience. Cette action de construire la forteresse la plus grande, la plus imposante et la plus chère du Royaume de ces 200 dernières années et de la confier à lui, un simple capitaine d'une minuscule caserne sans grande expériences, était tout simplement, tout bonnement incroyable.
On raconte que les généraux du monde entier rêveraient d'être à sa place. Que des dizaines, que dis-je, des centaines, voire des milliers de jeunes apprentis soldats et chevaliers se sont mis en route des quatre coins du Royaume tout entier pour venir exercer à la forteresse. On racontait aussi que la forteresse était soi-disant imprenable. Cette rumeur-là, le capitaine voulait bien la croire. Il avait parlé avec Edmondo, qui lui avait répondu en disant qu'ils (le capitaine, le général et le roi) allaient faire la visite complète du fort, une fois le discours du souverain terminé.
Le capitaine avait hâte de la visite. A vrai dire, il avait même un peu peur de se perdre, dans cette immense bâtisse remplie de dédales de couloirs, de pièces de toutes les tailles qui puissent exister, de souterrains, de passages secrets, de portes dérobées...
Le roi termina son discours, qui fut applaudit par les quelques personnes encore présentes devant lui.
- A présent, continua-t-il, Je déclare officiellement la Forteresse d'Akkala opérationnelle ! Ceux d'entre vous qui n'ont pas vocation à oeuvrer dans la forteresse peuvent s'en aller. Pour les autres, vous pouvez rester ici. Mais ne touchez à rien, s'il vous plaît.
La petite foule applaudit encore, puis chacun prit la direction du seul relais de la région, situé non loin de là. "Quelle étrange région, vraiment, pour avoir construit un pareil fort !" pensaient certains. Seul, un petit Goron resta devant la forteresse. Il avait parcouru le matin même avec d'autres Gorons le chemin qui reliait son village à la nouvelle forteresse. Alors que ses semblables voulaient juste vérifier l'édifice et s'assurer que des soldats seraient prêts à venir les aider en cas de problème (et que leur fort serait assez puissant pour ça), le jeune Goron, lui, avait pris toutes ses armes et sa tenue de métal, avait dit au revoir à sa famille, et s'était mis en route dans l'espoir d'être admis comme soldat dans la forteresse. La chaleur ne le dérangeait point, ce qui fait qu'il n'avait nul besoin d'être pressé ou de se rafraichir. Il s'assit et entreprit d'admirer tous les détails de ce qui allait devenir sa nouvelle maison.
* * *
Pendant ce temps, le roi, accompagné du maçon royal Edmondo, de sa fille, la Princesse Zelda, du nouveau capitaine de la Forteresse d'Akkala et du général de la garde royale, visitait l'entièreté du nouveau fort, étant attentif à chaque détail. La princesse, quant à elle, regardait dans tous les coins, essayant de deviner si oui ou non la bâtisse était équipée de technologie sheikah. Elle en arriva à la malheureuse conclusion que, non, la forteresse n'était point aménagée avec de la technologie sheikah, ce qui déçut un peu la petite fille. Elle s'attarda longuement sur une pièce, une sorte de hall plutôt, qui était un peu étrange. Elle se trouvait alors dans un immense hall, avec une hauteur de plafond démesurée. Ce hall, en forme de grande tour, était placé au centre de la forteresse, de telle manière que chaque étage y possédait au moins un accès. Son utilité ? Elle n'en savait rien. Elle ne put réfléchir longuement à la question puisque son père la rappela à l'ordre.
- Eh bien ! s'exclama le roi, Vous avez réalisé une magnifique forteresse mon cher Edmondo ! Vous avez toute mon admiration !
- Merci, Votre Majesté ! répondit timidement le maçon. Je n'ai fait que mon modeste travail...
C'est alors que le capitaine intervient :
- Dites-moi, mon cher Edmondo, avez-vous mis en place le système de défense par canon ?
- Non, mon capitaine ! Je vous ai laissé le soin de tout mettre en place !
- Bien, c'est très aimable de votre part. Allons voir ça !
- Très bonne initiative, mon capitaine ! approuva le roi.
Le capitaine rougit timidement. Désormais, c'était à lui, et à lui seul, de prendre les décisions concernant le fort. Il allait devoir gérer des centaines d'hommes, faire face à des situations dangereuses, mettre en place des stratégies hors-normes... Mais cela ne lui faisait pas peur.
Et c'est ainsi que le petit groupe se dirigea vers la terrasse...
Il était 19 heures. Le Goron le sut en comptant le nombre de coups de la cloche. Car oui, la forteresse était équipée d'une cloche. Elle ne sonnait pas à toutes les heures, ça non, le Goron l'avait bien remarqué. Elle ne sonnait seulement qu'à des heures précises, bien qu'il n'avait pour l'instant aucune idée de ce à quoi correspondaient ces heures.
Soudain, il entendit des bruits de pas précipités puis une respiration saccadée, comme si une personne venait de courir. Le Goron se retourna et eut la surprise de tomber nez-à-nez avec un Hylien. Un Hylien qui était affublé d'un doublet, et qui arborait dans son dos une vieille épée ainsi qu'un bouclier assez simpliste, sans doute fabriqué maison.
- Bonjour, dit le jeune homme, Suis-je bien à la Forteresse d'Akkala ?
Le Goron hocha la tête, étonné que l'on puisse poser une telle question vu l'impressionnante bâtisse qui se tenait devant eux.
- Ah, si vous saviez quel long voyage j'ai accompli ! Ah, pardonnez-moi, j'en oublie de me présenter. Je me prénomme Paul !
Le Goron ne répondit pas tout de suite à la main tendue que lui présentait l'individu. A vrai dire, il ne pensait pas être avec une autre personne pour cette soirée. Mais lui aussi avait ses bonnes manières, et il serra en silence la main chaleureuse de l'Hylien. Ce dernier s'assit sur le même rocher gris que le Goron, celui-ci étant de plus en plus étonné et intimidé.
- Je viens du village d'Elimith, le même que celui de notre futur chef ! D'ailleurs, je le connais personnellement ! J'espère qu'il sera content de me voir !
Paul fit une pause. Puis il se tourna vers le Goron.
- Et toi ? Tu viens d'où ?
Le Goron sursauta à moitié, car il ne s'attendait pas à une telle question de la part du jeune homme. Il réfléchit longuement avant de répondre, puis finit par dire :
- Du Village Goron. Je m'appelle Odonk. Et je veux devenir chevalier pour servir le royaume. Mon plus grand rêve, ce serait de devenir chevalier de la garde rapprochée de Son Altesse la princesse Zelda !
Le rocher vivant regretta immédiatement ce qu'il venait de dire. L'Hylien allait forcément se moquer de lui, c'était certain ! Pourtant, Paul le regarda, puis répondit :
- Eh ben ! Je souhaite de tout cœur que tu y arrives !
Odonk le remercia d'un simple hochement de tête.
- Mais dis-moi, continua l'Hylien dont le ventre gargouillait. Ton armure, tu l'as fabriquée toi-même ?
Le Goron secoua la tête.
- C'est mon cousin. Elle a été forgée dans la lave de la Montagne de la Mort puis refroidie grâce un glaçon du Désert Gerudo. C'est l'armure de fer la plus solide du village ! cria Odonk fièrement. Elle me protège le torse ainsi que mon front.
- Eh ben toutes mes félicitations à ton cousin ! Dis-moi, n'aurais-tu pas un peu faim ?
Odonk répondit par l'affirmative. C'est vrai que depuis quelques minutes, son ventre continuait à gargouiller.
- Tiens ! continua l'Hylien en lui tendant une pomme. J'en ai cueilli des dizaines sur le chemin. En plus, elles sont excellentes !
Le Goron attrapa le fruit, puis l'examina. Chez lui, il avait toujours mangé des rochers. Cet aliment lui paraissait trop petit, trop mou. Il avait certes faim, mais il n'allait tout de même pas manger ça ! Paul comprit sa réaction.
- Oh, pardonne-moi ! s'excusa ce dernier. Tu préfèrerais sans doute qu'on la fasse cuire ? Ne bouge pas, j'ai ce qu'il faut !
L'Hylien s'éloigna sur une centaine de mètres, puis chercha quelque chose. Il arracha ensuite plusieurs branches sur des arbres voisins. Une fois son matériel en main, il rejoignit le Goron. Il sortit le silex ramassé plus tôt puis enflamma les bouts de bois. Il rajouta de l'herbe sèche pour alimenter son feu.
- Et voilà le travail ! fit-il, fièrement.
Il se tourna vers le Goron puis demanda :
- Dis-moi, est-ce que tu aurais une marmite ?
- Euh... je ne crois pas. Pourquoi ?
- Il nous faudrait un récipient pour faire cuire la pomme.
Odonk réfléchit quelques instants puis s'exclama d'une voix forte :
- Nous n'en avons point besoin ! Regarde ! Il suffit de ramasser une branche d'arbre, d'embrocher notre pomme dessus, puis de la faire cuire dans le feu !
Paul regarda son compagnon faire, légèrement impressionné.
- Au moins, j'espère qu'elle sera bonne !
- J'aime les aliments quand ils sont durs comme de la roche!
- Eh bien fais tout de même attention à ne pas la réduire en cendres !
Cette remarque de l'Hylien les fit rire tous les deux. Odonk n'était plus intimidé par ce nouvel arrivant. Au contraire, cela lui faisait déjà un ami au sein de la forteresse.
* * *
Chaîne d'Hébra, endroit précis indéterminé
Il avait froid. Très froid. Il n'avait jamais eu aussi froid de sa vie. Il ne s'était jamais senti aussi seul. Il regarda ses mains. Il constata avec effroi qu'il ne pouvait plus mouvoir ses doigts. Ces derniers étaient recouverts de glace. Et sous cette glace, il pouvait apercevoir sa paume. Rouge sang. La peau pratiquement arrachée par le froid. Cette vision d'horreur lui donna le tournis. Il n'était habillé que de simples vêtements, presque trop petits pour lui. Comment avait-il fait pour survivre dans ce froid glacial ? Nul ne le savait. Pas même lui. Il était seul. Terriblement seul. Et il avait besoin d'aide. Couché dans la neige, la peau rougie par le froid et le vent glacial caractéristique de la région, il était terriblement vulnérable. Aux portes de l'inconscience, peut-être de la mort, il vit tout de même une forme, une ombre, s'approcher vers lui. Ami ? Ennemi ? Il ne savait point.
- A l'aide... murmura-t-il avant de sombrer dans l'inconscience.
* * *
Forteresse d'Akkala, sommet
Le roi, sa fille, le général de la Garde Royale et le capitaine, futur chef de la forteresse, étaient montés tous quatre au sommet du fort. De là, ils avaient une vue sur toute la région, et même sur tout le royaume. La petite fut émerveillée. Jamais, jamais, elle n'avait eu pareil panorama. Et même de sa chambre, au château, elle ne voyait pas aussi bien. De son point de vue, le chef de la forteresse avait bien de la chance.
- Quel est votre stratégie, capitaine ? questionna le roi.
- Il y a trois plateaux construits à différents endroits et ne possédant pas la même hauteur, Votre Majesté, répondit le capitaine. Je vais donc y placer trois artilleries. L'artillerie numéro 1, la plus haute, sera capable d'anéantir toute forme d'attaque ou de menace, que ce soient des monstres, des Yigas ou des voleurs. Elle sera épaulée par l'artillerie n°2, en feu croisé, positionnée plus bas. Ainsi, ces deux postes réunis, il sera impossible à l'ennemi de tenir tête à nos canons.
- Bien, sourit le souverain. Et la dernière ?
- La dernière et troisième artillerie, la plus basse, sera placée tout à l'est. Vers le pont sud d'Akkala. Elle sera capable de dissuader les attaques venant de la mer, le temps que nos soldats se précipitent pour les anéantir. Elle servira également à empêcher les ennemis des deux premières artilleries à prendre la fuite.
- Cela me paraît juste, comme plan d'attaque et défense. Qu'en dites-vous général ?
Le général approuva en hochant la tête.
- Bien, cria le roi. Nous pouvons donc redescendre. Zelda, ma fille, suivez-nous !
La petite princesse accourut donc pour obéir à son paternel.
- Père, demanda-t-elle de sa voix enfantine. Vais-je devoir aller prier à la source, ce soir ?
Rhoam Bosphoramus Hyrule la regarda, d'un air qui se voulait attendrissant, mais que la petite avait déjà vu maintes et maintes fois.
- Ma fille, dit le souverain. Il vous faut prier le plus possible, et le plus souvent possible, si vous voulez éveiller votre pouvoir.
- Mais, père...
- Il n'y a pas de discussion ! Cela fait plus de six mois que vous dites prier, mais je ne vois toujours rien qui annonce l'arrivée du pouvoir du sceau ! Il va falloir y mettre un peu plus d'implication, ma fille !
Zelda avait les larmes aux yeux. Elle essayait, pourtant. Cela faisait six longs mois qu'elle priait sans relâche, jusqu'à cinq fois par semaine, dans l'eau glacée des sources. Elle ne comprenait pas pourquoi cela ne fonctionnait pas. Et les reproches de son paternel n'aidaient point. La petite fille suivit les trois adultes sans rien dire, mais le capitaine, en se retournant pour lui parler, pouvait voir couler des gouttes d'eau au coin des yeux de la princesse.
Lorsque le souverain sortit de la forteresse, il aperçut au loin deux garçons, un Goron et un Hylien, en train de déguster des pommes grillées. En regardant de plus près, il aperçut leur équipement et leurs armes posés à côté d'eux. Le roi sourit. Il avait en face de lui les deux premiers soldats de la forteresse.
Cinq mille. C'était le nombre de soldats et de canonniers au sein du fort. Un nombre gigantesque, à l'instar de la forteresse.
Odonk regarda au plafond. Aujourd'hui, leur maître d'armes les avait fait travailler huit heures durant, sans pause, pour tester leur endurance au combat. Le Goron était très fatigué, et il luttait de toutes ses forces contre le sommeil qui l'envahissait de plus en plus. La porte d'entrée de la chambre claqua, et le rocher se redressa vivement.
- Ah ! cria Paul. Je suis fatigué ! Ils vont finir par nous tuer, à force !
- C'est peut-être ça qu'ils cherchent ! dit Odonk, que la remarque de son ami avait fait rire.
- Rigole pas ! Je te rappelle que tu faisais une drôle de tête quand Mr Najkäk a annoncé que la semaine prochaine, on en ferait peut-être le double !
Le sourire du Goron disparut d'un coup.
- On est quand même vachement chanceux d'être les seuls à dormir dans une chambre à deux. Tous les autres sont entassés dans des petits dortoirs de dix, alors que nous, nous vivons la belle vie ! continua l'Hylien.
En effet. Pour féliciter les deux amis d'avoir été les premiers arrivés, le capitaine, désormais promu Capitaine de forteresse, leur a offert la seule chambre de deux prévue pour les soldats. C'était un grand luxe, que les deux compères bénissaient chaque jour.
- C'est vrai, confirma Odonk. De plus, on n'a pas une mauvaise vue !
L'Hylien le rejoignit à la fenêtre, par laquelle on pouvait apercevoir le soleil couchant sur la mer d'Akkala. Un spectacle que peu de soldats pouvaient se permettre d'admirer tous les soirs. Eux le contemplaient depuis maintenant 2 ans.
Deux ans.
Deux ans qu'ils étaient arrivés, ce soir-là, au pied de l'immense bâtisse. Deux ans qu'ils vivaient leur quotidien à la forteresse. Deux ans qu'ils faisaient la formation pour devenir soldat du royaume.
Un coup sourd frappé à la porte les fit sortir de leurs pensées. Paul alla ouvrir et tomba sur un membre du personnel.
- Les garçons, en bas dans 10 minutes ! Le dîner va être servi !
- Bien monsieur.
Et le gars repartit, en toquant à chaque porte du couloir. Odonk remonta sur son lit, en lâchant un soupir.
- Tu crois qu'ils vont encore nous servir la bouillie de choux et de blé ? On l'a déjà eue cinq fois ce mois-ci.
- J'en sais rien. J'aimerais bien un chutney de fruits, moi ! Cela doit bien faire des années que j'en ai pas mangé !
- Tu peux toujours rêver mon pauvre ami ! Un plat sucré-salé ?! Ici ?
- Tu as raison, Odonk. Bien. Descendons avant de nous faire tirer les oreilles !
Le rocher vivant descendit en vitesse de son lit "taille Goron" puis suivit son ami dans les couloirs, où ils croisèrent plusieurs camarades, qu'ils saluèrent joyeusement. Les deux compères descendirent le grand escalier, avant de sortir de la forteresse, et de marcher dans la plaine en direction d'une petite entrée en pierre, situé non loin du grand pont, et bien cachée dans la roche de la falaise. Ils pénétrèrent alors dans une immense salle, ou des centaines de personnes étaient déjà attablées. Le brouhaha était tel que pour se faire comprendre, l'Hylien était obligé de crier dans les oreilles de son ami. Mais les deux soldats avaient l'habitude. Cela faisait 24 mois qu'ils petit-déjeunaient, déjeunaient, et dînaient tous les jours.
Paul et le Goron s'assirent donc à une table où des camarades de promotion étaient également attablés. Tous avaient l'air d'avoir souffert de la dure journée d'entraînement.
- Alors Kaskaïsh ? questionna Anchok, un jeune Hylien boutonneux. Tu es prêt pour cette nuit ?
- Cette nuit ? s'étonna le dénommé Kaskaïsh, un Piaf aux grandes ailes rousses.
- Ben oui ! L'entrainement nocturne au tir à l'arc, réservé aux archers de niveau 3. Tu t'y es inscrit la semaine dernière !
Les apprentis soldats éclatèrent de rire. Kaskaïsh avait beau être le meilleur archer de tous, il était également le plus tête en l'air, et oubliait souvent les choses importantes.
- Mais... murmura l'oiseau. Je ne pouvais pas savoir que M. Najkäk allait nous torturer toute la journée !
- Eh ben tant pis ! Tu devras y aller quand même ! Sinon tu risques de te prendre deux semaines de nettoyage intégral !
Le Piaf trembla. Le nettoyage intégral était, selon les garçons, la pire des punitions possibles. Le principe était de faire nettoyer l'entièreté d'un étage de la forteresse à la brosse et au savon. De plus, le puni devait rattraper l'entraînement loupé durant la journée lors de la nuit, ce qui fait qu'il ne dormait que très peu durant sa punition. Kaskaïsh allait donc être dans l'obligation d'aller à cette séance de tir à l'arc.
- La vie est trop injuste..., gémit l'oiseau.
Il allait ajouter quelque chose mais il fut coupé par l'arrivée d'un des cuisiniers du fort, qui leur servait le menu du soir.
- Cool ! s'exclama Paul. De la venaison ! Cela faisait trois jours que je n'en avais pas mangé !
- Ils ne servent toujours pas de gigot de caillasse rôti, se lamenta Odonk.
Depuis deux ans, le Goron s'était habitué à manger de la nourriture "molle", mais il regrettait toujours les spécialités de sa région.
- Mon pauvre Odonk ! rigola Anchok. Tu ne t'y feras donc jamais ?!
- Que veux-tu... je regrette mon volcan...
Paul allait rajouter un mot quand la cloche de la salle sonna, signe que le capitaine allait annoncer quelque chose d'important. Les bavardages se turent, et le chef de la forteresse prit la parole.
- Très chers soldats et canonniers du Royaume. J'ai une annonce à vous faire. Beaucoup d'entre vous sont présents ici depuis maintenant deux longues années. Et je sais que votre maison et votre village vous manquent...
Le capitaine jeta un regard vers Paul, qui hocha discrètement la tête.
- C'est pourquoi, continua le chef. Que je vais accorder à chacun ici présent depuis l'ouverture du fort, une semaine de répit bien mérité !
Cette annonce fut acclamée par des applaudissements et des cris d'ovations dans toute la salle. Chacun était heureux. Dès le lendemain, ils pourraient revoir leurs familles. Ainsi, Odonk dégusta sa venaison en s'imaginant dévorer un gigot de caillasse rôti...
Paul et Odonk vérifièrent une dernière fois leurs maigres bagages, contenant provisions et cartes du royaume, puis quittèrent la chambre.
- Ça va me faire bizarre de me retrouver dans un lit en pierre, soupira le Goron.
- Tu m'étonnes. Après, ce n'est que pour une petite semaine, donc ne t'habitue pas trop, d'accord ?
- Je sais, je sais. Tout ce que je voudrais en rentrant au village, c'est une bonne caillasse rôtie !
L'Hylien éclata de rire. Ils saluèrent deux archers, avant de sortir dans la cour et d'emprunter l'étroit escalier extérieur, leur permettant d'arriver au pied de la Forteresse en un rien de temps. En jetant un regard à celle-ci, ils se mirent rapidement en route.
- Je ne sais pas toi, dit le Goron à son ami, mais je trouve étrange qu'ils aient placé le bâtiment le plus imprenable du royaume dans cette région isolée.
- A l'origine, répondit Paul, ne devait être construite qu'une extension à la caserne militaire d'Akkala. Simplement, le roi et son architecte ont trouvé plus opportun de construire une Forteresse. Si tu veux mon avis, c'est pour protéger le royaume des monstres venus d'Ordinn, mais également de ceux venus du large.
- Quoi ? Tu veux dire qu'on peut se faire attaquer par des pirates venus de l'océan ?!
- J'en sais rien. C'est ce que je pense. Selon certaines sources, l'ancienne caserne était en sous-effectif de 20% par rapport aux autres postes militaires du royaume. Cela faisait d'Akkala une région peu défendue, donc un lieu propice à un début d'invasion sans résistance.
- Je ne voyais pas les choses comme ça. Cela prend du sens, maintenant. En construisant un fort aussi imposant, le roi dissuadait les éventuels envahisseurs de venir attaquer.
- Exactement.
- Notre rôle est beaucoup plus important que je ne le pensais.
- Ah bon ? Tu t'imaginais quoi ? Qu'on allait bronzer sur les plages de la région et se pavaner en armure ? pouffa l'Hylien.
- Non. Mais maintenant, je sais qu'on doit se tenir prêt à une éventuelle attaque.
- Exactement.
Les deux compères ne pipèrent mot jusqu'à la limite de la région, délimitée par un croisement entre deux chemins. L'un continuait tout droit, vers le sud du royaume, tandis que l'autre bifurquait vers l'immense volcan, qui se dressait fièrement sur leur droite. Ils allaient se séparer ici.
- Bon, dit lentement Paul. Je crois qu'il est temps de se dire au revoir.
Le Goron hocha la tête.
- Prends bien soin de toi, à Elimith.
- Compte sur moi ! Et toi, ne fais pas une indigestion de cailloux. Après deux ans sans en avoir mangé, ton estomac n'est plus habitué…
- Je sais, tu me l'as déjà dit…
Les deux amis échangèrent une dernière accolade avant de se séparer. Odonk prit le chemin qui grimpait la montagne, en admirant les paysages rougeâtres qui lui avaient manqué. De son côté, Paul prit la direction des marécages, avec l'intention de couper, une fois de plus, par l'étendue d'eau. Le chemin était sensiblement le même qu'il avait emprunté deux ans auparavant. Sauf que cette fois-ci, sa marche fut beaucoup plus rapide, signe que l'intense entrainement de soldats commençait à porter ses fruits. Il arriva à Cocorico avec près de trois heures d'avance sur l'horaire qu'il avait prévu. A son passage, les enfants le pointaient du doigt et s'extasiaient devant son épée en fer et sa cotte de maille. Il se retrouva bientôt avec une dizaine de bambins qui gravitaient autour de lui, l'assaillant de questions.
* * *
Le garçon était attaché. Il le sentit avant même d'ouvrir les yeux. Il avait les mains dans le dos, la corde lui rongeait les poignets, et sa main le faisait atrocement souffrir. Il était vraisemblablement couché par terre. Le sol était glacé et dur comme de la pierre. Il ouvrit les paupières, mais cela ne changea pas grand-chose. Il faisait noir comme dans un four. Il ne voyait rien. Alors il entendit un bruit, comme si une personne marchait près de lui. Il commença à paniquer. Dans le noir, il ne pouvait pas voir ce que ses ravisseurs allaient lui faire. C'était la pire chose à laquelle être confronté. Savoir qu'on allait souffrir mais ne rien pouvoir faire contre ça. Une main se posa sur son épaule.
- Redresse-toi, fit une voix grave et sombre.
Le garçon allait s'évanouir de peur, mais il obéit docilement à l'ordre, quoique se redresser en ne possédant l'usage de ses mains était plus compliqué que ce qu'il pensait.
- Je ne te ferai aucun mal, si tu écoutes attentivement mes consignes, reprit la voix.
Le petit déglutit difficilement. Il entendit un bruit de lame aiguisée.
- Si tu me désobéis, tu en subiras les conséquences.
* * *
Paul arriva épuisé au village. Il était étonné de l'effort qu'il avait pu fournir, car il ne pensait pas pouvoir faire le voyage d'une seule traite. Il salua joyeusement les quelques rares habitants qui étaient encore dehors à cette heure tardive, puis se rendit chez lui. Ses parents travaillant quasiment à plein temps au château d'Hyrule, il n'était guère étonné de ne trouver personne dans la maison.
Il se débarrassa en vitesse de son armure, rangea celle-ci et ses armes dans un coffre qu'il ferma à clé, puis l'Hylien s'endormit comme une masse sur son lit. Avant de fermer les yeux, il eut tout de même une petite pensée pour son ami Odonk, qu'il espérait en sécurité au Village Goron.
A suivre...
Ce texte a été proposé au "Palais de Zelda" par son auteur, "Link Pépito". Les droits d'auteur (copyright) lui appartiennent.