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The Legend of Zelda: Alliance of Marquarins

Ecrit par Makenchi
Chapitres 1 à 8   •   Chapitres 9 à 11


Avant-propos :

L'histoire se passe après les évènements de Skyward Sword et avant ceux d'Ocarina of Time.

Comme l'ombre de la lumière d'une bougie, le mal n'a jamais quitté Hyrule.

Cette terre, longuement défendue par la Déesse Hylia et ses fidèles sujets, toujours convoitée par les forces maléfiques.

Elle se déroulera à travers trois amis de longue date, Link, Lagis et Hilda, dont les reliques légendaires et divines vont faire basculer le destin et celui du royaume d'Hyrule.

Note : Quand j'ai commencé à écrire cette fan-fiction, je ne savais pas encore que la seconde princesse de "A Link Between Worlds" allait s'appeler Hilda ! Alors il n'y a aucun lien entre ces deux personnages !

Chapitre 1 : Prologue   up

"Allez au nord, ils ont besoin de renforts ! Au nord, au nord !" cria une jeune dame sur son cheval blanc. Elle était vêtue d'une armure plaqué or, aux armoiries de l'empire. En levant la tête, elle put apercevoir la géante colonne noire avancer vers la cité. L'ennemi ne devait pas atteindre la ville, qui cachait le sanctuaire d'où l'on pouvait accéder à la relique divine, la Triforce. Un grand oiseau vermeil arriva dans le champ de bataille, heurtant au passage une horde d'ennemis. L'animal plaqua encore quelques adversaires, avant de déposer un jeune homme sur le sol. La jeune dame fit claquer les rênes, orientant son cheval dans la direction de l'oiseau géant.
"Link !"
L'homme se retourna, rabattant une partie de ses cheveux blonds sur le côté. Sa tunique verte avait été entachée d'une trace de sang, mais pas du sien. Il portait en plus une armure dorée.
"Tout a été préparé, il ne reste plus que nous deux, dit-il. Il s'attendait aussi à ce que nous envisagions cette option, et il nous a tendu une embuscade. Mais par chance, nous avons triomphé.
- Nous avons assez perdu de temps. Nous devons y aller, tu me raconteras le reste en vol."
Il prit sa main pour l'aider à monter sur l'oiseau vermeil, puis ils s'envolèrent en direction de la colonne sombre. La jeune femme posa son visage sur Link, la face triste :
"Nagon... Il a toujours été avide de pouvoir. Quel idiot !
- Je n'arrive pas à croire qu'il ait libéré ce que nos ancêtres ont eu tant de mal à sceller...
- Tout ceci est difficile à digérer, mais nous ne pouvons faire marche arrière. Moi, Zelda, descendante de la déesse Hylia et toi Link, descendant du héros des cieux qui a enfermé le démon, dans la même situation que nos aînés... En tout cas, les dragons et Fay ont été clairs sur ce que nous avons à faire.
- Tu as raison. Et avec l'épée de légende, nous en finirons enfin avec ce mal qui ronge Hyrule depuis sa naissance.
- Je l'espère."
L'épée de Link se mit à briller, puis une lueur en jaillit pour laisser apparaître une jeune femme bleue aux traits atypiques. Elle ressemblait à une poupée par sa tenue, très simplement habillée.
"Maître Link, Dame Zelda, nous approchons de l'épicentre du mal. Je vous conseille de jouer le chant des Dragons pour briser la barrière de l'ennemi. En espérant que les dragons trouvent une faille, il faudra nous y introduire le plus vite possible.
- Compris," fit Zelda en sortant sa harpe.
Elle sortit de son sac une harpe dorée et se mit à jouer une mélodie, mélange de douceur et de force. Sitôt le chant terminé, trois étoiles se mirent à rayonner à l'horizon, dans trois endroits différents. Une grande dragonne bleue dont le flanc faisait penser aux ondulations de l'eau d'une rivière, un majestueux dragon rouge au souffle brûlant et un imposant dragon dont le souffle annonçait la foudre et la tempête arrivèrent sur le champ de bataille. Ils se mirent en alignement avec l'oiseau vermeil pour aborder les trois personnes qui y siégeaient.
"Alors, c'est ici qu'il s'est enfermé celui qui veut perturber l'équilibre d'Hyrule ?
- Pas pour longtemps, répliqua le dragon de feu à celle de l'eau. Nous allons faire fondre cette barrière.
- Il n'est pas nécessaire de la fondre entièrement, si cela protège le pays de l'atmosphère malsaine de l'intérieur de cette colonne de mort. Link et moi entrerons dedans pour finir ce que nous avons commencé.
- N'oubliez pas qu'il vous a mis en échec la première fois. Ne faites pas la même erreur deux fois !
- Nous n'étions pas mûrs la première fois. Nous le sommes à présent. Nous ne ferons pas la même erreur, répliqua Link au dragon doré.
- Allons-y !" cria le dragon rouge.
Ils se mirent en cercle autour d'un point de la colonne et l'attaquèrent. La colonne était résistante : elle se jouait des attaques au sol ou aériennes. Mais elle faiblit face à la puissance combinée des dragons, qui finirent par ouvrir une brèche dans la colonne, qui se stoppa. La faille n'était pas grande, mais Link n'hésita pas et envoya son destrier vers la faille. Il perdit quelques plumes durant le passage, mais tous en ressortirent de l'autre côté indemnes.

L'intérieur semblait apporter un vent de tranquillité après les hurlements de la plaine d'Hyrule en feu et les cris des tourbillons lors de la traversée de la faille. Au centre d'un plan d'eau se trouvait une personne d'apparence hylienne, cheveux argentés et habits de sorcier. Sur son dos se trouvait le blason d'Hyrule. Il se retourna et orienta ses yeux rouges vers l'animal qui effectua sa descente.
"Chevaliers de l'empire, commandants Link et Zelda. Vous arrivez bien trop tard. Je vous laisse encore l'opportunité de vous ranger dans mes rangs. Vos talents seraient très appréciés, dans mon futur empire.
- Nagon, pourquoi avoir trahi l'empire ?
- Pourquoi se contenter d'un empire quand on peut avoir le monde à nos pieds ? Je ne trahis pas l'empire, je l'aide à prospérer.
- Une guerre n'est pas le signe d'une prospérité, et nous n'avons pas besoin d'avoir le reste du monde à nos pieds.
- Vous êtes une déesse, vous protégez la sainte relique de vos ancêtres, qui ont été bafoués et destitués de leurs privilèges divins. Je vous propose de rétablir cet ordre, et vous le refusez. Votre bonté vous conduira à votre perte, Zelda. Si vous hébergez en vous une déesse faible, moi j'ai en moi un dieu puissant. Que dis-je, je suis un dieu !"
Zelda soupira.
Zelda, Link et Nagon étaient des amis d'enfance. Ils avaient grandi dans le même village. Nagon était fasciné par la science et la magie, et il rêvait de devenir plus tard un grand sorcier, pour mettre ses talents au service de l'empire. Zelda était la fille de l'armurier du village, qui était aussi le commandant en chef des soldats de l'empire, il était tout naturel qu'elle s'engage dans la voie des armes. Link rêvait d'être chevalier et de parcourir à longueur de journée les plaines de l'empire. Nagon était de cinq ans leur aîné, Link et Zelda ayant le même âge.
Nagon finit par entrer au service du palais de l'empire et Link et Zelda eurent très peu de nouvelles de lui, mis à part le fait qu'il travaillait beaucoup. Quand les deux amis finirent par entrer dans l'armée impériale, ils finirent par apprendre que Nagon avait disparu lors d'une mission. Ce n'est que deux ans plus tard qu'il réapparut sous une autre facette. On avait envoyé Link et sa troupe vérifier le sceau du temple de la déesse Hylia, reculé dans le vallon du Sceau. Nagon s'y tenait devant la statue qui retenait prisonnier un puissant démon, qui d'après les légendes, avait été enfermé par un héros venu des cieux sur son destrier vermeil et la déesse elle-même. Ce fut le premier échec de Link en tant que commandant de ne pas stopper son ami d'enfance, puis plus tard le tour de Zelda, quand elle lui déclara qu'il était impossible de lui porter le coup fatal.
De ces deux défaites, Nagon avait pu récupérer deux objets précieux qui brisèrent le sommeil du démon : des échantillons de sang des personnes qui l'avaient scellé, du moins ses descendants. Car c'est quand l'empereur envoya Link et Zelda chercher l'épée de légende qu'ils apprirent ce qu'ils étaient réellement.

Zelda, fille de soldat, qui était la descendante de la réincarnation d'Hylia, déesse d'Hyrule.
Link, orphelin, descendant du héros des cieux, guidé par Fay, l'esprit de l'épée et création de la déesse.
Dans son rituel, Nagon s'était protégé d'une immense colonne sombre, qui avançait tout droit sur le sanctuaire. Il avait pu libérer de son long sommeil l'Avatar du Néant et il s'empara de ses pouvoirs, fusionnant avec lui.
"Mon maître m'a ouvert la voie, dit Nagon. De par sa puissance et mon intelligence, nous mettrons à nos pieds toutes les créatures de ce monde, et ils nous idolâtreront ! Hylia, ce jeu n'a que trop duré, il est temps de revenir aux temps originels. Redevenons des dieux pour régner à nouveau en maîtres sur ces mondes.
- Non, fit Hylia. Ce peuple, ces terres, ce monde... Je veux qu'ils m'aiment pour ce que je suis et les bienfaits que je prodige, mais je refuse d'avoir une soumission par la peur et l'oppression.
- Hylia... tu es restée la même que lors de notre dernier combat. Tu restes toujours aussi faible. Soit ! Je te détruirai, toi et ton élu de pacotille, et je m'occuperai de ta terre bien-aimée ensuite."
Zelda et Nagon retrouvèrent leurs esprits pour se faire face. De ses mains, Nagon fit sortir une grande lame ornée d'un cristal orangée. Fay se pencha près de Link, analysant l'épée de l'adversaire. Elle n'avait pas de doute quant à la nature de cette épée.
"Maître Link. L'épée que porte Nagon est... vivante. Durant mon service auprès de votre ancêtre, il dut affronter un être du nom de Ghirahim. Cet homme est comme moi, l'esprit vivant de cette épée. Soyez prudent, maître. Même si je ne ressens aucune vibration venant de l'épée, il est possible que Nagon puisse faire appel à ses services.
- Je ferai attention, Fay. Nagon, abandonne. Les peuples ne doivent jamais être soumis par la peur. Tu étais pourtant un grand sorcier, t'en souviens-tu ?
- Étais ? J'en suis toujours un, et même plus grand qu'autrefois. C'est vous qui devrez rendre les armes ! Je vous ai déjà battus par une fois ! Je peux toujours vous..."
La tour s'ébranla et le calme qui y régnait fut perturbé. Nagon, surpris, se déplaça d'un pas. Il était conscient que la phase cruciale de la transmission de pouvoirs lui imposait de limiter ses mouvements, aussi fut-il rassuré de ne s'être déplacé que d'un pas. Il restait encore une chance d'en finir. C'est de cette même chance que profita Zelda : au léger déplacement de son adversaire, elle sut que la fusion n'était pas encore complète. Elle n'hésita pas : elle tira une flèche de lumière sur le sorcier, qui se téléporta de surprise. Il réapparut enragé :
"Moi qui pensais pouvoir gagner du temps pour permettre d'avoir un nouveau corps à mon maître... Il me faut plus de temps ! Et je vais lui en donner !"
Il s'entoura d'un champ de force protecteur et fit apparaître un clone qui les attaqua immédiatement.
Link et Zelda esquivèrent, mais l'oiseau fut pris dans une grande cage. Le sorcier projeta une boule d'énergie que Link renvoya de son épée en direction du champ protecteur. Le son de l'impact fut bref et la barrière ne se brisa pas. Zelda envoya une nouvelle flèche de lumière sur la protection, mais sans effet. Elle se tourna vers le spectre de Nagon. Après un rapide coup d'oeil à Link, elle recula, posant la main sur son épée. Link opta pour le contact rapproché avec le spectre, qui se débrouillait très bien à l'épée. Zelda en profita pour décocher une nouvelle flèche qui paralysa de douleur le spectre. Link lui ôta la tête, et le spectre s'évapora, laissant Nagon sans défense. Il sortit de sa torpeur en suffoquant, les mains sur le sol.
"Ressaisis-toi ! lui hurla Zelda en le prenant par le col.
- C'est trop tard, fit Link. Le Nagon que nous connaissions est mort lors d'une expédition, comme nous l'a confirmé l'empereur. Notre ami n'est plus.
- Zut !"
Elle frappa le sorcier tellement fort qu'il en cracha du sang. Nagon se releva en riant, essuyant le filet de sang du coin de sa bouche. Il projeta une boule fumante en direction de la jeune dame, qui esquiva en se plaçant sur le côté. Elle reprit une autre flèche de son carquois et s'apprêta à l'envoyer sur l'ennemi. La flèche partit, mais n'atteignit pas sa cible. Nagon se retourna, et dut se téléporter à nouveau pour éviter le coup d'épée de Link. Mais il finit par recevoir un coup d'épée de Zelda et il posa main à terre.
"Ah, je viens de comprendre la perturbation. Vous avez finalement arraché les dragons à la malédiction que j'avais jetée, hein ? Je dois reconnaître que depuis la dernière fois, vous avez changé. Mais c'est terminé, à présent. Je vous ai donné l'opportunité de me rejoindre et vous avez refusé, vous subirez les conséquences de vos actes ! Il n'y a plus de Nagon ou d'Avatar du Néant qui tienne, je suis le dieu démon... Ganon !"
Sur ces paroles, le corps de Nagon se déforma prenant peu à peu l'apparence d'une bête géante à tête de cochon. Il était vêtu d'une cape rouge, d'un pagne bleu et portait une épée à la main gauche et un sceptre dans sa main droite.
Ganon était né.

Pendant qu'ils assistaient à la transformation de leur ancien ami, l'oiseau parvint à se libérer de sa cage et emporta Zelda vers le ciel. Un peu secouée par l'intervention, elle hurla à l'oiseau de se poser pour récupérer Link. Mais il répliqua négativement :
"Durant son séjour dans l'antichambre de la déesse, j'ai appris à Link les techniques de ses ancêtres et les pouvoirs que renfermait l'épée qui l'a choisi. J'ai confiance en ses aptitudes, et nous ne ferons que le gêner au sol. Et puis, la jeune Fay est avec lui. Nous devons voir si nous ne pouvons pas avoir une ouverture par les airs. Et puis, Hylia attaquait toujours en ma compagnie.
- Je te fais confiance, Hylios. Essaie de faire diversion en attirant le regard sur nous si Link se trouve en difficulté. Aussi puissant qu'il soit, Nagon... enfin Ganon a sûrement un point faible."
Ganon écrasa son épée sur le sol, laissant de peu Link s'échapper. Il observa la tranchée provoquée par l'épée, avant de se concentrer sur l'adversaire. Ganon mesurait presque trois fois sa taille. De par sa hauteur, il ne pouvait toucher que ses pieds ou sa queue. Au ciel, Zelda et Hylios avaient plus de champ d'action et pouvaient viser toutes les parties du corps, mais ils étaient aussi gênants pour Ganon qu'un moucheron pour un humain. Ganon fit tourner son sceptre au ciel et invoqua des vents au-dessus de sa tête qui repoussèrent Hylios et Zelda. Il voulut se reconcentrer sur Link, mais il avait disparu. Puis il sentit un coup au niveau du pied. Ganon se retourna pour enfin voir son ennemi, qu'il écrasa d'un coup de pied. Link ne put esquiver mais reçut le coup sur son bouclier. La bête était lourde, et le bouclier n'allait pas tenir. Fay vint en renfort :
"Maître Link ! dit-elle en tenant le bouclier
- Je ne finirai pas de cette manière, Fay ! N'oublie pas que nous ne sommes pas seuls !
- Maître Hylios ! Dame Zelda !
- Ganon les a repérés, Zelda !
- Positionne-toi en face de lui, le plus proche possible que tu peux !"
Hylios s'exécuta. Il était encore à bonne distance de l'ennemi à cause des vents, mais fit son maximum pour s'en approcher. Zelda se mit debout sur l'oiseau et tira une flèche de lumière qui alla se planter dans le cristal que portait la bête sur son front. Un petit fragment se détacha du joyau, mais il fit hurler Ganon et il vacilla sur le champ de bataille. Aidé par Fay, Link se releva et jeta son bouclier hors d'usage.

"La tête !" crièrent-ils ensemble.
Ganon, sous la douleur, cacha sa tête entre ses mains, et trébucha. Link n'hésita pas : il sauta sur Ganon, cherchant à attendre la tête. Mais celui-ci le sentit et se releva, envoyant l'Hylien dans un coin de l'arène. Ganon prit son sceptre qu'il envoya sur Hylios, mais l'oiseau esquiva et le sceptre disparut dans la colonne sombre. Zelda décocha une nouvelle fois, mais Ganon dévia l'attaque d'un coup d'épée. Elle grinça des dents. Hylios vira dangereusement vers la gauche pour éviter l'attaque du monstre, manquant de faire chuter Zelda. Fay passa devant Ganon tel un éclair pour le détourner de ses amis, puis Ganon la frappa de sa main gauche. Elle atterrit sur Hylios, le bras endommagé. Zelda voulut lui porter secours, mais Fay répliqua de sa main valide qu'elle tenait le coup. Il lui fallait juste quelques minutes pour se remettre du choc. Elles se retournèrent pour voir une ombre géante fondre sur eux. Hylios vira encore brusquement et vit Ganon au sol, les pieds pris dans le grappin de Link. Ganon avait repris son épée pour couper les chaînes, mais Zelda fut plus rapide cette fois-ci. Elle envoya sa flèche au coeur de l'épée.
Celle-ci se craquela complètement et le coeur explosa en plusieurs fragments qui échouèrent dans la tornade sombre. L'épée ne ressemblait plus qu'à un immense bout de bois finement taillé. Ganon hurla de rage : il était si proche de son but, de la Triforce, du monde à ses pieds... Sans épée, il brisa de la simple force de ses pieds les chaînes et manqua d'attraper Hylios et son célestrier de sa main.
"Il faut quelqu'un pour le retenir au sol, mais Link n'est pas de taille pour le garder longtemps au sol, fit l'oiseau géant.
- Il me reste encore quelques flèches de lumière, dit Zelda l'arc à la main.
- J'espère que ce sera suffisant alors.
- Que comptes-tu faire, Hylios ?
- Je vais planter mes serres dans le torse de ce monstre en fonçant sur lui. Toi Fay, pendant que je prépare mon attaque fais-lui diversion en brouillant son champ de vision. Zelda, tu viseras ses pieds, comme le fait Link en ce moment.
- Compris, fit Fay en décollant.
- Je vous suis," fit Zelda en s'armant d'une nouvelle flèche.
Hylios fit demi-tour pour prendre l'élan nécessaire pour percuter Ganon. Il descendit au passage, déposant Zelda et récupérant Link sur son dos. Fay s'élança de nouveau vers Ganon, esquivant dans la limite du possible ses attaques. Zelda toucha son carquois : il ne lui restait que cinq flèches de lumière. Elle n'avait pas le droit à l'erreur : en générer d'autres maintenant prendrait trop de temps, et il s'avérait très précieux. Elle se concentra, puis dès qu'Hylios fut passé au-dessus de sa tête, elle décocha une flèche : Ganon tituba un peu. Encore une autre. Il était hors de question qu'elle s'arrête pour si peu. Fay évita une nouvelle fois la main de Ganon en contournant ses défenses, puis elle vira sur le côté et se posa sur sa tête. Ganon tituba une nouvelle fois sous l'impact d'une flèche qu'il reçut dans le pied et il plaça son épée sur son torse.
"Hylios, arrête-toi ! Son épée risque de te blesser, voire plus !
- Pas le temps Link ! Nous n'aurons pas d'autres occasions une fois le stratagème découvert ! Contente-toi de faire ce que je t'ai dit !"
Link ravala sa salive et se mit accroupi sur le dos de l'oiseau géant. Au moment où le tranchant de la lame de Ganon baissait, Hylios percuta son torse de plein fouet. Profitant de l'occasion, Link sauta d'Hylios et enfonça sa lame dans le cristal qui ornait la tête de Ganon. Le monstre hurla, puis la barrière se brisa.
Link descendit du monstre, l'épée ensanglantée en main. Zelda déposa son arc pour entonner un nouveau chant avec sa harpe. Les trois dragons encerclèrent le Seigneur du Malin et un symbole en forme de Triforce apparut sur le sol. Le symbole se leva de terre, et emprisonna Ganon, puis s'enfonça dans la terre. Link scella le sceau en implantant l'épée de légende sur le haut de la prison céleste. Sitôt l'opération faite, la terre se mit à cracher du sable en immense quantité. Hylios, lourdement blessé, fit un geste de l'aile :
"Allez-vous en d'ici ou vous allez tous être engloutis !"
Les dragons s'exécutèrent, emportant les rescapés de la bataille. Link et Zelda coururent vers l'oiseau vermeil, mais le dragon d'eau les happa et s'envola avec eux.
"Hylios ! HYLIOS !
- S'il te plaît, fais demi-tour !
- Je ne peux pas ! Il faut vous sauver, c'est un ordre d'Hylios. Et puis, il sait ce qu'il fait."
En effet, Hylios ne voulait volontairement pas être sauvé pour contrecarrer la dernière volonté de Ganon. Car tout ce sable qui sortait était les restes de son influence maléfique, la colonne sombre. Seule l'épée de légende résistait à cette dégradation rapide du paysage. La tête d'Hylios fondit dans la masse, et un énorme éclair jaillit. Le sable s'estompa pour laisser place à une végétation dense, presque inaccessible. Le dragon s'était arrêté pour observer le spectacle : d'une plaine ravagée par la guerre, celle-ci passa de désert à végétation dense en l'espace d'un instant. Hylios avait réussi son coup, mais perdu sa vie.

Fay baissa la tête.
"Maître Link. Dame Zelda. Du fond du coeur Maître Hylios vous remercie pour vos actions. Maintenant qu'il a rejoint Hylia, il est en paix. Quant à moi, ma fonction est terminée, et je ne vais pas tarder à replonger dans mon sommeil."
Link et Zelda se tournèrent vers elle avec une expression de tristesse.
"Merci pour tout, Fay. Nous ne t'oublierons jamais."
Elle s'inclina gracieusement devant ses maîtres et les dragons, puis disparut lentement en ne laissant qu'une brume et son sourire dans l'atmosphère.

Le dragon survola la plaine pour les déposer devant non loin du palais impérial. Un jeune homme et sa troupe arriva devant eux en s'inclinant :
"Mes commandants ! J'avais peur qu'il ne vous arrive malheur ! Qu'en est-il avec Nagon sur la plaine ?
- Nagon a été vaincu. La source du mal est détruite.
- Que la déesse soit louée ! Leur chef vaincu, les rebelles vont définitivement se calmer !
- Et le palais ? Que s'est-il passé ici ?
- Pardonnez-nous... mais les rebelles ont pris d'assaut la cité et ont pu entrer dans le palais impérial. De toute la famille, nous n'avons pu sauver que le fils unique de l'empereur. L'attaque de la plaine et la grande colonne avaient servi à faire diversion pour qu'une horde fonde sur nous. Les rebelles sont à présent maîtrisés mais au prix de lourdes pertes.
- Ce n'est pas vrai... Nous avons gagné la guerre, mais nous nous retrouvons sans régent autonome. Il a fallu que les rebelles aient une victoire au dernier moment... Qu'en est-il des rebelles ?
- Certains ont une avidité de la relique tellement grande que les sages se sont réunis dans le palais impérial pour envoyer les rebelles dans une autre dimension. La légende de la Triforce en a éveillé plus d'un, et Nagon a accentué les choses.
- Décision raisonnable, dit Zelda, après tout ce qu'il s'est passé. Pour l'heure, nous allons nous reposer et soigner les blessés. Pas la peine de vous incliner, vous avez fait du mieux que vous pouviez pour la famille impériale.
- Nous allons vous conduire devant le fils de l'empereur. Il demande à vous voir."

Épuisés, les deux commandants se plièrent aux ordres et allèrent au palais. Le fils de l'empereur les attendait dans les jardins du château, où plutôt ce qu'il en restait. Il se retourna.
Le visage à moitié couvert de poussière, il posa ses yeux émeraude devant les deux commandants. Il dépoussiéra son habit vert foncé et sa ceinture d'or, réajusta son chapeau, et s'inclina.
D'un signe de la main, il invita les autres gardes à se retirer pour les laisser seuls. Il fit un autre geste de la main, pour que Link et Zelda s'assoient. Puis, posant ses mains sur ses cuisses, il dit d'une petite voix :
"Père me disait souvent du bien de vous, commandants. Il a même prononcé vos noms avant de tomber."
Un soupir sortit à nouveau de sa bouche.
"Nous avons été trop naïfs face à Nagon et voici ce que nous récoltons. L'empire est méconnaissable, brisé mais libre. À l'heure où je vous parle, nos sorciers sont en train d'envoyer les rebelles dans une dimension parallèle, qui leur servira de prison à vie. L'empire a maintenant besoin de renaître de ses cendres et j'ai besoin de vous.
- Nous avons aidé votre père et l'empire, et nous nous battrons à vos côtés, répondit Link.
- Je vais être direct : je renonce à mon titre d'empereur. Et j'ai déjà choisi un successeur. Je connais bien le travail de Père, je resterai aux côtés de mon successeur le temps qu'il faudra. C'est à vous que je vous le demande, dame Zelda, voulez-vous diriger cet empire ?"
Zelda ne s'attendait pas à cette déclaration. Elle ouvrit la bouche sans pouvoir la refermer. Link restait dans le même état, voire choqué par les paroles du jeune homme.
"Prince Daphnès ! Sauf votre respect... Enfin, pourquoi moi ? Pourquoi pas...
- Vous vous dites être deux commandants ordinaires quand je sais très bien que vous avez les traits de la déesse Hylia, ma chère Zelda. Les rebelles échangent des ragots très instructifs, ma foi. J'aurais très bien pu choisir le descendant de l'élu des cieux, mais Père m'a souvent dit que vous aimiez agir en solitaire pour le bien de vos troupes. Dame Zelda, vous avez la force de mener ce pays, je le sens.
- Prince Daphnès..."
Elle se retourna.
Il est vrai que Zelda était une grande meneuse, levant son épée pour que toutes ses troupes obéissent. Elle avait rarement eu des histoires avec des dissidents ou des déserteurs, et ses soldats l'adulaient, fille de déesse ou non. Elle avait toujours voulu protéger la famille impériale, et elle savait pourquoi.

Elle devait avoir neuf ou dix ans, à cette époque, occupée à regarder son père battre violemment le fer chaud de ses coups puissants. La cloche du village avait sonné, et toute la population s'était regroupée sur la place principale. C'était la première fois qu'elle le voyait. Le jeune héritier de l'empire, Daphnès Nohansan Hyrule. Il se cachait dans les pans de son père, intimidé par toute cette foule. Zelda avait déjà vu d'autres enfants de son âge, mais pas comme celui-là : il était habillé d'une grande tunique vert marin, avec un chapeau assorti sur la tête. Quelques cheveux noirs dépassaient, brillants, fins, sombres. Ses yeux émeraude croisèrent ceux bleu océan de la jeune fille, surprise. Le soir tombé, la famille royale s'était retirée dans une maison de luxe, appartenant au maire du village. Daphnès était allé sur le balcon, soulageant ses oreilles du vacarme de la fête. Au coin du balcon, Zelda s'était cachée derrière une plante géante. En voyant Daphnès, elle dit :
"Hé, toi ! Si on me cherche, je ne suis pas là !"
Il n'eut pas le temps de répliquer qu'une jeune fille débarqua sur le balcon. Elle regarda aux alentours et compta se ruer vers la plante, quand elle se fit stopper par le fils de l'empereur :
"Excusez-moi, mademoiselle, mais j'ai besoin de rester seul. Cela vous dérangerait de partir d'ici ?"
Zelda soupira. Ce n'est pas avec des paroles comme ça qu'on écarte un enfant, voyons !
"On joue à un jeu avec les autres enfants ! Je dois les retrouver avant qu'il fasse nuit ! Je regarde cet endroit et je m'en vais !
- Et pourquoi ne suis-je pas invité à ce jeu ? Et puis, de toute manière, vous avez eu le temps de regarder avec cette petite discussion. Si vous voulez bien... m'excuser."
Daphnès prit la jeune fille par le bras et la mena vers l'entrée. Puis il fit appel à gardes pour surveiller l'entrée du balcon. Zelda ressortit de sa cachette en pouffant de rire.
"Tu lui as fait peur avec ton discours de roi.
- Mais je suis resté poli, et vous m'aviez donné un ordre.
- Tu aurais très bien pu ne pas le respecter.
- Je dois faire ce qui est juste. Et j'ai pensé que te protéger était juste.
- Eh bien, tu es très mature pour ton âge. Tu ne t'amuses pas souvent ?
- Quel changement de situation. Il y a, certes, des enfants de domestiques au palais, mais je ne les vois pas souvent. Je suis du genre à être tranquille dans un coin calme.
- Je ne sais pas comment tu fais. Moi, je n'aurais pas tenu une minute !
- C'est-à-dire ? J'ai tout ce qu'il me faut au palais, je ne vois pas...
- Je serais partie à l'aventure, et j'aurais parcouru les mondes ! Pourquoi tu ne t'évades pas, si tu as tout ce qu'il te faut pour le faire ?
- Juste que je n'ai pas envie. Si je dois être empereur, alors autant que je reste sage. Les peuples ont eux aussi besoin de calme, vous savez.
- Je suppose que je ne suis pas assez sage pour ça," fit-elle en poussant un soupir.
Daphnès se tourna vers elle, prenant ses mains dans les siennes, et croisant son regard avec elle, il dit :
"Il ne suffit pas d'être sage et bien instruit pour régner. Il ne suffit pas d'avoir le sang bouillant et une soif de découverte pour être aventurier. Mais quelle que soit la route que nous nous traçons, il faut tout simplement un équilibre de ces deux envies : la sagesse et le courage. Combinée ensemble, elles donnent une force plus puissante que la force physique et plus dangereuse que la magie. Je vois ce tempérament de fougue en vous, pourquoi ne pas devenir le bras droit de cet empire ?"

Cette phrase avait été le début de la période d'apprentissage de Zelda au sein de l'armée de l'empire. Les idées et les ambitions de Daphnès, qu'importe, elle allait les suivre. Son rêve allait se réaliser, après tout. Elle partit du village dans sa treizième année pour aller vivre dans la forteresse royale, jusqu'à aujourd'hui. Et bien sûr, elle avait entraîné Nagon et Link dans son périple. Elle était vite montée en grade, son ambition dévorante gagnant le terrain sur elle. Puis on lui annonça la mort de Nagon, ce qui la refroidit. Elle répandit la morosité dans sa troupe, et se fit sévèrement remonter par ses confrères. L'empereur en personne lui avait demandé de se ressaisir. Link était en mission en cette période-là. Et elle fut étonnée d'avoir trouvé un point de réconfort en Daphnès.
Il avoua regretter grandement la mort de Nagon et avoir le souhait de lui donner des funérailles décentes, avec ou sans corps. Comme son père, il exprima le souhait de la voir aussi inébranlable qu'avant et de vite reprendre du service. Et, dans la foulée, il laissa échapper l'une de ses ambitions.
"Il ne voudra pas de vous si vous continuer à entretenir cette ambiance autour de vous, ma dame.
- Qui, il ?" fit-elle en se redressant.
Elle n'eut pas de réponse. Elle ne vit que cette longue cape de velours rouge s'en aller doucement, la tête aux cheveux noirs basse.
Cette réponse, elle allait l'avoir aujourd'hui, deux ans après cette déclaration.

"Daphnès, fit-elle sans formule de politesse, c'est bien toi qui m'as dit qu'il fallait un bon équilibre pour être empereur, non ? Tu as la sagesse, j'ai le courage. Ensemble, nous avons la force.
- C'est... Oui, ce sont d'anciennes paroles...
- Anciennes ? Elles ne sont donc plus rien pour toi ? Et... ton étude sur la Triforce ? Le fragment sombre ?
- Oh, ce n'était que des théories qui se sont révélées être fausses.
- Non, pas pour moi. Durant notre périple à Link et moi, nous avons appris beaucoup, comme toi, tu as beaucoup combattu. Nous nous sommes renforcés. La Triforce, le pouvoir divin, est composée de trois fragments qui ne font qu'un : la sagesse, le courage et la force. Et quand nous représentons ce symbole, nous montrons toujours trois triangles dorés, reliés par leurs extrémités, représentant un autre triangle noir. Le fragment sombre... est-ce donc cela que tu veux me donner ?"
Link et Daphnès se retournèrent. Le premier car l'histoire l'avait intrigué au plus haut point, et le second, car il était perturbé par les paroles de sa commandante. Mais l'un des deux savait déjà comment tout cela allait se terminer.
"Zelda, tu viens de le dire toi-même... La Triforce n'est composée que de trois parties, le fragment sombre n'était qu'une stupide théorie de ma part... Et je ne vois pas le rapport avec la déclaration que je viens de te faire.
- Autant être directe alors si tu ne te souviens pas de tout... Daphnès, tu veux m'épouser c'est ça ?"
Il s'empourpra. Link fit un léger sourire. Comme toujours, Zelda n'aimait pas passer par des sentiers battus longtemps. Daphnès finit par tomber sur ses genoux, le regard au sol.
"Tu... tu as...deviné...
- C'était rapide. Tes écrits sont généralement publics, Daphnès. Mais ta théorie sur le fragment sombre n'a jamais été publiée. Pire encore, tu n'en n'as parlé à personne, à part moi. Il me suffisait de demander à Link ou... à Nagon. Je me souviens encore de tes paroles sur le fragment sombre, qui était censé représenter l'amour pour toi, ce fragment indomptable qui représente l'équilibre ultime entre les trois parties de la sainte relique. Et puis, ce que tu m'as dit quelques jours après avoir appris la mort de Nagon... tu voulais me présenter à ton père, n'est-ce pas ?
- Oui... Je voulais... Mais il y a eu la mort de Nagon, et mon coeur saignait de te voir dans cet état. Cette phrase m'a échappé, je ne voulais nullement profiter de la situation..."
Il se redressa, agitant sa robe verte et resserrant sa ceinture.
"J'ai besoin de savoir, maintenant. Je sais que ce n'est pas le moment ni même l'endroit pour cela, mais je ne peux reconstruire l'empire seul. Physiquement et psychologiquement. Je sais au fond de moi que vous ferez une bonne dirigeante. Zelda, voulez-vous m'épouser ?
- Allier la sagesse au courage, pour avoir une force indomptable et inébranlable... Daphnès, tu aurais pu me le dire plus tôt. Comme tu le dis, ce n'est ni le moment, ni l'endroit. Nous reconstruirons, puis nous annoncerons nos fiançailles au peuple.
- Le peuple s'en doutait quand même," fit Link amusé.
Zelda fit un sourire gênée. Elle avait confié tous ses secrets qu'à son meilleur ami (des secrets qui la faisaient rougir, selon Link), mais en réalité, et elle avait un regain d'énergie quand il lui parlait de Daphnès. Ce dernier se gratta la tête, à la fois heureux et confus. Qu'il en soit ainsi, Daphnès allait reprendre le flambeau de son père avec sa commandante à ses côtés. Il prévoyait aussi de monter en grade Link pour ce qu'il avait fait envers la nation.

Les jours passèrent, puis les mois.
Depuis la guerre provoquée par les ambitions de Nagon, personne n'était allé se promener dans la forêt où reposait l'épée de la déesse. Assis sur l'une des branches de la forêt interdite, une ombre fantomatique orangée regardait cette épée que la végétation recouvrait peu à peu. Elle n'avait pas de forme définie, sauf une expression de tristesse et de colère.
Elle attendait.

Chapitre 2 : Deux siècles plus tard   up

"Je crois que nous en avons terminé pour cette fois."
Le jeune homme resta à terre, une épée en bois juste au-dessous de sa nuque. Voulant reprendre son souffle, il s'étala complètement à terre, lâchant son épée et fermant les yeux.
Le temps s'écoula une petite minute puis il rouvrit les yeux. Une autre main s'était offerte à lui : il plongea son regard noir dans les yeux bleus de son ami. Hésitant au départ, il prit la main avec plaisir, l'aidant à se relever.
Il tapota sa tunique rouge bordeaux et arrangea son épaule droite. Retirant la poussière dans ses cheveux noirs, il dit :
"Vous n'êtes pas allé de main morte, Maître !"
L'homme en question se retourna. Une masse de muscle dans une armure en cuir, grattant de sa main grasse sa barbe grise. Il déposa son épée et croisa les bras :
"Voyons Lagis ! Tu hurles haut et fort que tu veux participer au concours de chevalerie du royaume, et tu veux que je reste tendre avec toi ! Je te le dis : tu n'as pas encore le niveau.
- Maître ! Cette année, nous allons y participer ! Nous nous sommes entraînés dur pour cela !
- Nous ? Comment cela ? Il t'a entraîné aussi, Link ?"
Le concerné se gratta la tête en levant les yeux au ciel.
D'un sourire gêné, il approuva la réponse de son ami :
"En dehors de notre entraînement ici, Lagis et moi nous nous sommes beaucoup entraînés pour accéder à notre rêve. Nous ne pouvons pas nous permettre de repousser cela à l'infini !
- Lagis n'arrive même pas à me mettre un coup ! Tu penses pouvoir faire mieux, Link ?
- Je me retiens parce que je n'ai pas envie de vous faire mal...
- Ah ha ha ! Mon fils pense pouvoir me faire mal ! Si tu veux devenir chevalier, tu devrais éviter d'avoir de l'empathie pour tout le monde !
- Père ! Un chevalier doit être un homme exemplaire ! Pas une brute qui ne juge que par la force !
- Un chevalier doit aussi avoir un minimum de force aussi...
- Vous ne jugez que par la force ! Vous verrez que j'y arriverai !"
En ayant dit ces mots, Lagis sortit du centre, jetant l'épée en bois au sol. Link se retourna pour tenter de le retenir, mais le père de Lagis stoppa sa course. Son regard dur s'était changé en un regard plus attendri et triste pendant un court instant, puis il reprit sa fermeté.
"Ne t'en fais pas pour lui. Il finira par atteindre son rêve, mais je veux juste lui éviter les déceptions. Il n'est pas encore prêt pour le tournoi, du moins, celui de cette année.
"Mais toi..."

Link eut un drôle de réflexe.
Sa main quitta rapidement l'épaule de son maître pour prendre l'épée que Lagis avait laissée au sol et se retourna. Son épée heurta celle de son maître, et il dut reculer pour éviter un coup venant de la main gauche de son adversaire. Link se redressa, se mettant sur la défensive. Le maître chargea de toute sa masse brute. Link fit un saut de côté, puis virevolta sur lui-même pour mettre un coup au niveau de la hanche. Il avait l'impression que le coup porté n'avait eu aucun effet, à la réaction de son adversaire. Celui-ci se retourna pour balancer un grand coup d'épée en direction de son élève. Pris au dépourvu, Link se défendit avec son épée, mais celle-ci lui échappa des mains pour atterrir dans un autre coin de la pièce.
"Ah !" hurla son maître en voulant lui porter un coup décisif.
Link tomba sur les fesses, puis plaqua ses mains au sol pour relever ses jambes et atteindre son adversaire d'un grand coup de pied au ventre. Étrangement, de cette confrontation, c'est lui qui souffrit le plus, malgré le souffle coupé de son adversaire. Il se retourna et partit reprendre son épée, refusant d'écouter la douleur de ses talons. Quand il eut repris son épée, son opposant était toujours les genoux au sol. Link baissa son arme, inquiet.
"Maître ? Est-ce que tout va bien ?"
En s'approchant de lui, il ne s'attendait pas à ce qu'il explose de rire.
"Maître ! fit Link désorienté par cette situation.
- Ha ha ha ! Tu es peut être plus dégourdi que mon fils mais tu devrais faire attention à ton adversaire ! Je parie qu'entre mon ventre et tes pieds, ce sont eux qui ont le plus souffert ! Tu pensais faire quoi au juste ? fit Ghilham rouge de rire.
- Je... voulais vous faire reculer... répondit-il doucement.
- Ha ha ha ! Contrairement à moi, tu n'es pas une montagne de muscles, mon jeune ami. Certaines de tes actions peuvent t'être fatales ! Il faut que tu apprennes à mieux analyser ton ennemi !
- Vous m'avez pris au dépourvu, maître !
- Ton adversaire ferait la même chose, reprit-il plus sérieusement. Il serait bête de penser qu'il va arriver en te disant : "Bonjour, je vais t'attaquer si tu le permets !". Tu as des bons réflexes Link, mais tu manques d'analyse. Je ne vous demande pas de repousser les inscriptions au tournoi à l'infini, mais il est hors de question de vous voir revenir avec une grande frustration dans le coeur."
Ghilham aida son élève à se redresser, puis le congédia.

Remettant son bonnet vert en place, Link sortit de la salle en direction de la colline qui surplombait le petit village qui était le sien. Le ciel était sombre, amenant ses nuages de pluie sur le village, porté par un vent doux.
"Allons bon..." fit le jeune elfe en se hâtant d'aller sur la colline.
Il savait qu'il y trouverait son ami d'enfance, assis près du vieil arbre unique de la colline.
Lagis avait posé sa tête sur le tronc, avec une expression de frustration. Il chassait de son visage ses cheveux noirs pour les placer derrière ses longues oreilles d'Hylien. En entendant des pas, il dévia son regard vers l'arbre. Son meilleur ami s'assit à côté de lui regardant les derniers rayons de soleil avant l'arrivée de la pluie.
"Père t'a dit de renoncer aussi pour cette année ?"
Link baissa la tête en signe de réponse. En lui aussi le désir d'aller affronter les meilleurs bouillonnait. Mais les paroles de Ghilham étaient vraies en ce qui les concernait...
"Père est un idiot ! Nous sommes capables de faire nos preuves dans le concours ! Et tant pis si nous ne sommes pas pris cette année, nous aurons appris beaucoup ! Ce n'est pas en restant là que l'on va s'améliorer plus !"
Dans le village, il y avait huit jeunes disciples qui suivaient les entraînements de maître Ghilham, le père Lagis. Et des huit apprentis, Lagis et Link étaient les meilleurs. Bien qu'en coopération, Ghilham avait éprouvé des difficultés à les battre, ils ne l'avaient jamais battu.
"Qu'en penses-tu Link ?
- Ton père a raison sur certains points tu sais...
- Ne me dis pas que...
- Mais, malgré ses paroles, nous devrions quand même tenter le tournoi !
- Tu me rassures ! Pendant un moment, je pensais que tu allais revenir sur ta décision ! Il nous reste deux mois avant l'ouverture du concours, nous allons montrer à Père de quoi nous sommes capable, Link !"
Ils se serrèrent vigoureusement les mains en guise de conclusion.

Un vent souffla, apportant à leurs oreilles les bruits de pas d'une personne venant dans leur direction.
Link se retourna, pour apercevoir une petite tête ornée de cheveux vermeils et longs. Elle était habillée d'une simple robe blanche tenue par un grossier cordon rouge, et à moitié visible, recouvert par un grand tablier bleu marin. La jeune demoiselle fit de grands signes aux garçons avec un sourire radieux, avant de s'étaler au sol, le pied pris par une branche de l'arbre unique. Lagis ne se retourna même pas, il devinait déjà la personne : Hilda. Elle avait toujours l'habitude de se prendre cette branche de l'arbre quand elle venait à la rencontre des jeunes apprentis, et il ne savait pas pourquoi, mais il avait beau lui répéter l'existence de cette branche, cette dernière finissait toujours par avoir la pauvre jeune fille.
Hilda se redressa, retirant le peu de terre de son visage, pour aborder un sourire magnifique :
"Alors comment s'est passé l'entraînement de nos futurs champions ?"
À ces mots, les yeux de Lagis papillonnèrent. Les arguments flatteurs étaient son point faible et Hilda savait parfaitement ce détail. Après tout, ils étaient voisins.
"Père nous a entraînés comme il le fallait, mais il nous continue à nous sermonner sur le concours de chevalerie. De toute manière, notre décision est prise, n'est-ce pas Link ?
- Nous allons y participer cette année.
- J'en connais un qui ne va pas être content de l'apprendre ! Mais il doit se faire une raison. Lagis n'arrête pas depuis deux ans ! Chevalier au sein de la famille royale !
- Vous allez voir ! dit-il en se levant, feignant de tenir une épée et un bouclier. Je deviendrai le meilleur chevalier d'Hyrule, le plus stratège ! Et l'ordre et la paix prospèreront avec moi !"
Hilda se leva, tapant sur la tête son meilleur ami. Ce dernier répliqua d'un sourire niais qui provoqua le fou rire de ses deux amis. Lagis avait souvent la tête dans les étoiles quand il s'agissait d'exposer son rêve aux yeux de tous, et il était nécessaire de lui envoyer des bouées pour le faire revenir dans le monde réel le plus souvent.

La pluie stoppa la joyeuse réunion, provoquant le départ du groupe vers un endroit où s'abriter.
Ils redescendirent la colline en courant, se bouchant les oreilles au bruit de l'orage qui venait d'éclater.
Après un pâté de maison, ils étaient enfin arrivés devant le dortoir pour les futurs combattants.
Lagis se dépêcha d'ouvrir la porte pour profiter de la chaleur des lieux.
Du hall sortit une odeur parfumée très alléchante : l'heure du dîner était arrivée. Juste à temps pour les trois compères ! Et comme toujours, lors de leurs entraînements spéciaux, Link, Lagis et Hilda étaient toujours les trois derniers arrivés. Habitués à ce décalage, les autres membres continuèrent de converser et de dîner comme si de rien n'était. Hilda alla prendre deux rations pour ses amis, en plus de la sienne, avant d'aller s'asseoir avec ses amis. Comme à l'accoutumée, Lagis la taquina :
"Nous pouvions prendre notre ration comme des grands, mère !"
Et il reçut une nouvelle claque amicale d'Hilda.
"Je fais ce qu'il me plaît ! Et puis, tu dois être bien content que je sois allée chercher ta part. Enfin bref, si je suis venue vous voir à votre coin habituel cette fois-ci, c'est pour demander de l'aide.
- De quoi as-tu besoin ? répondit Link en plongeant la cuillère dans sa soupe.
- Maître Ghilham m'a demandé d'aller récupérer un colis dans le village voisin et il m'a conseillé de prendre toute aide qui se présenterait... Donc naturellement, je viens vous voir !
- Il avait peur que tu te perdes toute seule ?
- Lagis ! Tu veux qu'on reparle de notre dernier combat ?
- C'était il y a dix mois ! J'ai fait des progrès depuis ! Et puisque tu veux tant voir mes talents, je viendrai demain !
- Et toi, Link ? Cela ne te dérange pas, j'espère ?
- Non, ne t'inquiète pas. À quelle heure devons-nous y aller ?
- Le mieux serait que nous allions en matinée, comme ça nous aurons l'après-midi pour nous reposer.
- Je serai un grand chevalier," répéta Lagis dans son coin.
Hilda finit par dévoiler un rire angélique devant l'entêtement de Lagis. Elle était convaincue que Link et Lagis feraient des bons chevaliers plus tard. Il arrivait des jours où elles les enviaient. Hilda était la seule femme apprenti chevalier du village : le choix n'était pas étonnant pour ceux qui la connaissaient bien. Dès sa plus tendre enfance, Hilda avait affirmé son côté de garçon manqué, prenant part aux combats et sauvant Lagis plus d'une fois d'un combat qu'il n'aurait pas remporté. Elle devait le reconnaître : durant ces années, Lagis avait énormément progressé dans ce domaine. Par contre, elle n'avait jamais pensé cela de Link. Elle avait l'impression qu'il était né une épée à la main, tant son maniement était exceptionnel. Il n'était pas parfait comme celui du Maître, mais il restait le plus habile.
Si bien qu'aujourd'hui, Link et Lagis étaient les favoris du Maître, bien qu'il n'ait pas l'intention de les laisser participer aux épreuves de chevalerie. Hilda ne savait pas grand-chose sur le déroulement du tournoi, mais elle ne comprenait pas non plus la réaction du Maître. Il était clair que les deux bretteurs avaient déjà fait leurs preuves... devant et aux yeux de tous. Peut-être fallait-il un miracle pour qu'ils puissent enfin voler de leurs propres ailes...

Elle se leva, déposant son bol à l'endroit où elle l'avait pris, puis prit la direction de sa chambre. Prenant ses affaires pour se détendre de la longue journée qu'elle avait eue, elle soupira. Un bruit à la porte la sortit de ses pensées.
"Entrez !" dit-elle en déposant ses affaires sur le lit.
Link entra, une broche à la main. Hilda ouvrit grand les yeux.
"La broche de ma mère ! Tu l'as retrouvée !
- Ce n'est pas moi... C'est Lagis."
Elle serra la broche fortement dans sa main gauche. Une belle petite broche représentant la silhouette d'un oiseau vermeil avec le symbole de la Triforce peint sur son bec. Elle se retourna et la posa sur son lit. Pendant un moment, l'atmosphère s'emplit d'un nuage de tristesse, avant d'être chassé par le sourire radieux d'Hilda. Elle rit un court instant, puis se figea.
"C'est tout lui. Enfin, tu le remercieras de ma part. En lui disant qu'un bon chevalier doit aussi affronter ses propres peurs !
- Non, pas ce soir, répliqua Link. Les discours de valeureux guerrier, on les écoutera ensemble demain."
Le rire d'Hilda s'éleva une nouvelle fois dans l'enceinte de la chambre.

Chapitre 3 : Le colis   up

Le rayon de soleil fit grimacer le visage de Lagis. Il tourna son drap de façon à cacher le rayon du soleil, avant de se rappeler une chose.
"Ah ! Hilda !"
Il se poussa du lit par la force de ses jambes, plaquées contre le mur. Pas le temps de ranger le désordre provoqué par son saut matinal : il ouvrit promptement la porte de son armoire pour prendre ses affaires d'apprenti chevalier. Quand il sortit de la chambre, il n'entendit pas un bruit des autres chambres. Le doute l'envahit : se serait-il levé trop tôt ? Ou... trop tard ? Non, se rassura-t-il, ses amis l'auraient attendu, même si Hilda aurait voulu que cette livraison soit une affaire classée en fin de matinée.
La toilette expédiée et ses vêtements mis, il descendit dans la salle commune. En voyant Hilda discuter avec Link et le Maître devant un bon petit déjeuner, il poussa un soupir de soulagement. En s'inclinant devant eux en signe de salut, il s'excusa de son retard.
Hilda lui lança un regard noir avant d'afficher son sourire angélique : il n'était pas en retard, pas plus qu'ils n'étaient en avance. Link venait tout juste de les rejoindre quand Lagis avait débarqué, la tunique mise à l'envers et le bonnet de travers. Ce dernier rougit, et sans prendre attention à l'entourage, il inversa sa tunique. Son père croisa les bras, sous les rires non cachés d'Hilda et de Link.
D'ailleurs, la question vint à Lagis comme un éclair : pourquoi son père déjeunait-il en présence de ses élèves ? Cela ne lui arrivait que très rarement : soit pour annoncer la venue d'un nouvel élève ou pour fêter un évènement comme la promotion d'un autre. Son père lui fit signe de s'asseoir à ses côtés, ce qu'il fit directement. Ghilham s'étonna de la capacité de son fils à se remplir le ventre, avant d'émettre une toux rauque qui incita le jeune homme à adopter une cadence plus raisonnable. Ils n'étaient pas en retard après tout.
"Hilda, Link, Lagis, aujourd'hui vous allez partir dans le village voisin de Cocorico. J'ai reçu du forgeron du village une lettre me disant que ma commande est prête. Je suis très occupé en ce moment, alors c'est à vous qu'il revient d'aller la chercher. Enfin, j'avais dit à Hilda de prendre qui elle voulait, étant donné que vous passez votre temps à l'entraînement...
- Sortir de l'arène leur fera du bien, Maître, dit-elle d'une voix douce.
- C'est pas grave, fit Lagis une miche de pain dans la bouche. Nous aurons l'après midi pour nous entraîner !
- Lagis, mon enfant, il faut savoir prendre le temps de se reposer de temps en temps ! Prends cette journée pour faire autre chose que t'entraîner !
Le tournoi est dans deux mois, père, et que vous le vouliez ou non, j'y participerai !"

Il n'avait pas dit cela dans l'intention dans lancer un défi à son père, mais plutôt comme le prélude à l'aboutissement d'un rêve. Ghilham soupira en agitant négativement la tête, puis se tourna vers Hilda, lui tenant une lettre. Après permission de son maître, elle ouvrit celle-ci : elle contenait juste le plan du village avec une grosse croix rouge indiquant le lieu de la forge, ainsi qu'une lettre adressée au nom du forgeron. Ayant terminé avec les jeunes disciples, il se retira de la table.
Lagis fit la moue en s'asseyant : son père ne croyait toujours pas en lui. Hilda lui tapota l'épaule en signe de réconfort, puis lui administra un plus grand coup pour lui annoncer le départ. Lagis se redressa comme un soldat, surpris par la réaction de la jeune femme, avant qu'il n'entende au creux de son oreille un "Merci pour la broche, monsieur le preux chevalier". Il tenta de faire semblant de n'avoir rien entendu, levant sa tête qui rougissait au plafond, sous les rires combinés d'Hilda et Link.
Quittant la table, il alla rejoindre ses deux amis.

Cocorico était à une heure de route de leur village. Par chance pour eux, l'orage de la veille avait laissé place au soleil. Le temps était encore frais le matin pour la période, mais il allait vite se réchauffer. Hilda ouvrait la marche, les cheveux vermeils au vent, habillée pour l'occasion de sa tenue d'apprentie. Elle tenait son épée en bois d'une manière non conventionnelle, la lame étant sur son épaule droite.
Traînant un peu le pas, Lagis avançait d'un pas lourd. Link, ne savant pas pour qui il devait prendre parti, était au milieu de cette configuration. Hilda finit par se retourner, grondant Lagis pour sa lenteur inhabituelle. Celui-ci s'excusa, sortit de ses pensées et finit par s'aligner avec tout le monde. Une discussion partit sur la broche retrouvée de la dame, mais Lagis se perdit encore dans ses pensées.
Il stoppa le pas devant l'entrée lointaine d'une forêt. Hilda et Link firent de même. Cette forêt n'était pas une forêt comme les autres. Les gens racontent qu'au fin fond de celle-ci reposerait à la fois trois légendes : l'épée de la déesse, la tombe du gardien ailé et le sceau du mal. Trois vestiges de la guerre qui s'était déroulée il y a plus de deux cents ans.
"C'est l'entrée de la forêt interdite...
- Ouais, fit Lagis. Rien que d'y penser, j'en ai des frissons dans le dos.
- Cette forêt qui sépare notre village de Cocorico, nous forçant à passer par une montagne...
- Arrêtons de la contempler les garçons. Elle finirait par nous attirer dans son néant.
- C'est quand même étrange... Comment se fait-il que trois reliques se trouvent au même endroit ?
- Link ! Tu dormais pendant les leçons du Maître ?
- Je veux dire... Si à l'intérieur de cette forêt se trouve l'épée de la déesse, celle qui a purifié le mal il y a deux cents ans, pourquoi au même endroit l'origine du mal y serait ?
- L'épée ne serait-elle pas maudite aussi ? Cette forêt est hostile : il suffit de l'observer de l'extérieur. Et je ne sais pas pour vous, mais moi, j'ai l'impression qu'un démon me regarde à chaque fois que je passe devant cette forêt...
- Lagis ! Link ! Enfin ! Cette épée a sauvé le royaume d'Hyrule, il y a deux cents ans. Peut-être fait-elle toujours son oeuvre en étant le dernier rempart contre la libération des forces du mal ?
- Quoi ? Tu veux dire que si on retire cette maudite épée, le mal nous rongera à nouveau ?
- Cette épée n'est pas maudite ! fit Hilda sur une pointe de rage. Mais je sens... au fond de moi, qu'elle nous protège, qu'elle est la preuve que le sceau est puissant et que le mal n'est qu'un mauvais souvenir. Allons-y, nous n'avons pas à nous attarder ici."
Les trois obéirent à l'ordre et s'éloignèrent des bois pour prendre la direction de la montagne, afin de contourner l'espace interdit. Lagis jeta un coup d'oeil derrière et frissonna : pendant un moment, un bref clignement des yeux, il aurait juré voir un fantôme orangé l'observer.
"Maudite forêt..." fit-il dans un chuchotement avant de s'éloigner.
L'ombre orangée fit un sourire, puis se replongea dans les ténèbres des bois.

Après cinquante minutes de marche, le village Cocorico était enfin en vue. La plaine d'Hyrule était grande, mais par chance, Cocorico était le village le plus proche et doté de beaucoup plus de boutiques que leur village. Après avoir gravi la pente qui sépare la plaine du village, Hilda sortit de son sac la lettre confiée par le Maître. La grosse croix rouge indiquant la forge se trouvait juste à la droite du puits. Si Lagis et Link étaient déjà habitués au village, ce fut la toute première sortie aussi éloignée pour Hilda. Laissant les messieurs discuter devant une affiche qui annonçait le concours de chevalerie, elle prit la direction de la forge. Frappant à la porte, elle fut surprise de voir celle-ci s'ouvrir rapidement.
La femme du forgeron allait justement partir faire quelques courses. En voyant la tête de la jeune femme et sa tenue d'apprentie, elle héla son mari de venir. Celui-ci fit son apparition quelques minutes plus tard, muni d'un énorme marteau et d'un tablier noirci par le travail. Il souffla si fort que sa moustache se plissa. Regardant la dame de ses yeux verts, il fit un grand sourire et administra à Hilda un grand coup à l'épaule, qu'elle devait prendre comme un salut.
"Alors, c'est toi la prodige de Ghilham ? Un peu jeunette pour tenter la chevalerie, non ?
- Toutes mes excuses, fit Hilda qui tentait de supporter la douleur, mais je crois qu'il s'agit de mes compagnons."
Elle pointa du doigt les deux jeunes bretteurs toujours occupés à discuter du tournoi, tout en avançant vers la forge. Le forgeron toussota un peu, puis reprit :
"Ah, le compte est bon.
- Pardonnez-moi, mais Maître Ghilham vous a-t-il prévenu du nombre de personnes pour le transport de votre colis ?
Entrez, entrez, jeunes poussins. Vous allez comprendre."

Hilda et les autres ne se le firent pas dire deux fois et entrèrent. Le maître forgeron les invita à prendre place autour de la table, puis il ouvrit la lettre adressée. Une fois le contenu de la lettre lu, il afficha un grand sourire.
"Bien, bien, parfait même !"
Il s'en alla dans sa forge, laissant les trois amis sans voix.
"Je me demande qu'est-ce qui ne va pas chez lui," fit Lagis d'une petite voix.
Il eut comme réponse un coup de pied d'Hilda. Avant même qu'il ne puisse répliquer, le forgeron remonta avec un grand drap couvert de suie et de poussière.
"Désolé pour la présentation ! Je n'avais que ce bout de tissu présentable !"
Il ouvrit son paquet fait à la va-vite. Les yeux des trois amis s'écarquillèrent.

Enroulé dans le drap de fortune, trois épées se trouvaient là, brillantes comme si elles avaient été forgées dans l'heure. Trois épées longues, avec une garde différente : la première avait une émeraude incrustée dans un fin pelliculage doré. La seconde était pourvue de trois saphirs sertis dans un matériau semblable à du marbre. La dernière rayonnait d'un rubis autour d'un panache bleu marine.
Personne n'osait toucher ces épées jusqu'à ce que la voix forte du forgeron les pressa d'en choisir une.
Hésitante au départ, Hilda posa la main sur celle qui portait un rubis et tenta de la soulever. Elle souffla : il y a une différence entre porter une épée de bois et une épée en acier ! Mais avec quelques jours d'entraînement, cette douleur passagère ne serait plus qu'un mauvais souvenir... Son regard s'assombrit et elle le posa sur ses amis.
Lagis avait choisi l'épée ornée de trois saphirs, la brandissant devant lui, mimant par ses joyaux la couronne d'un roi, un grand sourire sur ses lèvres. Link caressa l'épée d'émeraude comme un trésor fragile qu'il venait d'acquérir. Pour Link et Lagis, cela lui semblait plus évident, mais elle.
Pourquoi elle ?
La réponse vint du forgeron sans même qu'elle ait à poser la question.
"Ce bon vieux Ghilham... Il m'avait parlé de trois prodiges de son académie, et il pensait qu'avec ces épées, vous auriez une meilleure prestance lors du tournoi de chevalerie."
Lagis sursauta, reposant doucement son épée sur la table. Il fixa le forgeron comme s'il avait vu un fantôme. Avait-il bien entendu ? Son père qui aurait demandé à forger ces épées pour eux ? Pour le tournoi de chevalerie ? Il avait du mal à y croire. Se levant doucement, les yeux rivés sur la table, il prononça d'une forte voix :
"Mon père vous a demandé de forger ces épées pour nous trois ?
- C'est exact jeune homme. Vous avez l'intention de participer au tournoi, non ? Alors, croyez-moi, ce n'est pas avec vos épées d'entraînement que vous allez tenir là-bas. Ils ont de quoi faire, et les gens viennent des quatre coins d'Hyrule pour avoir le prestige d'entrer dans la grande école de chevalerie d'Hyrule. Il me disait souvent dans ses lettres que vous avez une grande détermination. Il a peur de l'échec, mais il espère que vous y arriverez.
- Mais pourquoi moi ? Maître Ghilham ne m'a jamais fait d'éloge concernant mes prestations, et je n'ai pas eu droit aux entraînements privés dont bénéficient Link et Lagis !
- Ah bon ? Pourtant il ne cesse de parler d'une jeune fille s'acharnant comme un lion dans l'arène... Tu devrais peut-être prendre en compte ton potentiel au lieu de te cacher derrière tes amis !
- Moi ? Mais je ne me cache pas..."
Confuse par ces paroles, Hilda finit par serrer doucement l'épée avec un sourire. Elle avait certes envie que ses compagnons suivent leur voie et aillent à l'école de chevalerie, mais elle ne voulait pas les quitter. Trop timide pour s'affirmer devant son Maître, elle n'avait jamais tenté de lui demander si elle était capable de faire le tournoi de chevalerie. Et voilà que la réponse lui apparaît sous la forme de cette épée, signe de leur maturité ! Lagis souleva fièrement son épée vers le plafond, tapant l'épaule d'Hilda.
"Cette année, nous irons tous à l'école de chevalerie !"
Link, à son tour, souleva son épée pour rejoindre celle de Lagis, d'un air fier et déterminé.
"Prête à nous rejoindre, Hilda ?"
Hilda, tentant de cacher ses larmes, ferma les yeux. Elle prit son épée de la main droite et souleva doucement sa lame pour rejoindre celle des deux autres.
"On fera de notre mieux."

"Je n'arrive pas à y croire ! C'est notre jour de chance !"
Lagis était en tête du groupe pour le retour, brandissant fièrement l'épée en main. Sous les conseils et l'entêtement d'Hilda, il se résigna à la ranger dans son fourreau. Mais ce qu'il ne put ranger, c'était bien son sourire. Link sentait plus comme une sorte de soulagement au fond de lui-même. Avoir l'aval de son maître était une bonne chose pour partir serein au tournoi de chevalerie. Hilda avançait la tête haute : elle aussi elle allait pouvoir faire ses preuves dans la cour des grands.
Perdus dans leurs rêves, ils rentrèrent d'un pas serein en direction de leur village sur la route dominant la forêt interdite. Un bruit sourd les sortit de leur torpeur euphorique : quelque chose dans les bois. Ils restèrent là pendant une minute, à observer le léger panache de poussière qui s'élevait de la forêt.
Un violent frisson parcoura la colonne vertébrale de Link. Comme si pendant une fraction de seconde, la lame d'une épée avait parcouru son dos. Poussant un cri de douleur, il posa ses mains au sol. Lagis fut le premier à réagir, se prosternant aux côtés de Link :
"Hé, ça va ? Hilda, tu n'aurais pas..."
Lagis observa Hilda. Elle était au bord de la falaise, les yeux rivés sur la forêt. Elle semblait comme hypnotisée, attirée par une force inconnue dans la forêt. Mais ses yeux exprimaient plus la colère que la soumission. Elle souleva brusquement la tête, et un éclair orangé suivit, comme si elle l'avait déclenché. Hilda en resta bouche bée. Une fraction de seconde plus tard, ce fut un éclair bleu qui jaillit du sol de la forêt. Au dessus de celle-ci, un grand tourbillon de nuages s'était formé. Hilda secoua la tête, puis se rua vers ses amis :
"Il faut partir d'ici ! VITE !"
Lagis souleva Link et suivit Hilda du mieux qu'il le pouvait.
"Tiens bon, Link !"
Il l'entendit grincer des dents sous la douleur, qui s'était centrée sur sa main gauche, comme des milliards d'aiguilles en mouvement sur sa main.
Pendant un moment, Link se perdit dans un autre univers.
Il se releva seul, sur une surface inconnue, sombre. Devant lui, une lumière orangée qui brillait faiblement. S'accrochant à ce mince espoir de vie, Link courut à la rencontre de la lumière, qui prit au fur et à mesure qu'il s'approchait la forme d'une épée. Une lumière qui lui promettait le bonheur, la joie, la paix, la chaleur, qui voulait l'éloigner des ténèbres l'entourant. Une parole d'Hilda parcourut ses oreilles, annonçant que l'épée était un symbole protecteur, scellant le mal dans sa prison. Il n'avait même pas remarqué sa main tendue vers celle-ci. Il ferma les yeux et baissa sa main, voulant laisser le mal croupir dans sa prison. Il allait se retourner, mais il fut projeté devant la relique à coups de vents violents. Il se releva tant bien que mal, avant de voir apparaître devant lui, une silhouette bleue qui lui tendait la main. Derrière elle, l'épée dont le champ d'attraction était perturbé par la présence de la femme bleue.
"Ils reviennent."
De quoi parlait-elle ? Sans prendre le temps de lui poser la question, elle le prit par le bras, l'entraînant loin de l'attraction perfide de l'épée. Il aurait juré entendre l'épée jurer et hurler sa mort pendant un moment.
"Il s'éveille. Pour toi aussi. L'heure de l'éveil a sonné."
Encore une fois, il ne put avoir une réponse à ses questions. L'épée vola, laissant émerger un énorme triangle noir qui s'ouvrit, transformant la noirceur des ténèbres en un espace rouge, comme teinté de sang. Une créature énorme sortit de ce triangle, montrant à Link comme dernière vision, sa gueule ouverte en sa direction.

"LINK ! Nom d'une pipe ! Réveille-toi !"
Il se redressa d'un trait, sorti de son cauchemar. Sa tunique était à moitié déchirée au niveau du bras droit, et une bosse se plaçait au niveau de sa tempe gauche. Il tourna la tête vers la voix qui l'avait réveillé : Lagis avait perdu son bonnet et il se débarrassait d'un peu de terre sur sa joue gauche. Il prenait appui sur sa jambe droite, reposant un peu la gauche. Autour de lui, la végétation s'étendait à perte.
"Il faut qu'on sorte d'ici, Link. Au plus vite.
- Que s'est-il passé ?
- Tu as eu un malaise... Hilda était comme paralysée face aux éclairs qui s'abattaient sur la forêt, puis nous nous sommes mis à courir. Mais dans notre course, j'ai glissé, et comme je te tenais, nous avons dévalé la pente jusqu'à atterrir dans cette maudite forêt... Les arbres sont tellement denses que je n'arrive même pas à voir le sommet de la montagne. J'espère qu'Hilda va bien...
- Nous sommes dans la forêt interdite..."
Link resta figé, comme s'il était observé par une foule nombreuse. Lagis le prit par le bras, bien déterminé à chercher une sortie dans ce guêpier. Il se grattait la tête. Pourquoi cette vision lui était-elle venue, comme ça ? En plus, au niveau de la forêt interdite... avec ces histoires d'éclairs que ne cessent de marmonner Lagis en marchant. Des éclairs bleus et orange. Comme la couleur de cette mystérieuse femme et de la lueur qui entourait l'épée. Link secoua la tête négativement : Lagis avait raison, ils devaient sortir d'ici avant tout.
Par malheur pour eux, la forêt avait plusieurs aspects maléfiques : la végétation était si dense que l'on se croyait en fin de journée, les rayons du soleil peinant à traverser la barrière naturelle de feuilles. De plus, ils avaient l'impression que chaque coin se ressemblait si bien que le doute les envahit peu à peu. Plus inquiétant encore, il n'y avait aucun bruit. Pas un écureuil, pas un oiseau, pas même un loup.
Le silence fut toutefois tué par un bruit assourdissant, comme une explosion. Lagis prit une grande inspiration et reprit son parcours, suivi de près par Link. Brandissant son épée devant lui, Lagis souffla une seconde fois. Il était nerveux.
Cette fois-ci, ce ne fut pas un éclair, mais comme une sorte de bourrasque orangée qui passa devant eux, les projetant dans une autre direction. Lagis se releva brusquement, frappant du poing sur un arbre :
"Nom d'une pipe ! Qu'est-ce qu'il se passe ici ? Vite Link !"
Le blondinet fit ce qu'il put pour suivre son compagnon, mais la douleur de sa main gauche le reprit, prête à lui arracher la peau s'il le fallait. Il serra les dents et continua de suivre son ami. L'esprit de la forêt ne le décida pas ainsi, les poussant une nouvelle fois vers le centre de la forêt.
Lagis et Link ne bougèrent pas, tentant de voir si la bourrasque orangée allait encore les attirer dans les profondeurs. Et elle arriva. Lagis pointa une direction discrètement à son allié qui valida par un bref clin d'oeil. Au moment où celle-ci devait la percuter, ils basculèrent tous les deux du côté opposé au sens du vent malin. Le vent se dissocia en deux formes humaines qui empoignèrent les jambes des deux amis, les entraînant dans une fosse.

Lagis se leva, la main droite sur le front. Link était en train de regarder la hauteur de la fosse et toucha la pente. Il tenta de l'escalader, mais son bras droit en décida autrement.
"On est fichus ? fit Lagis sur un ton morne.
- Non, on va bien trouver une autre voie. Allons-y avant que ce fichu esprit nous achève !"
Lagis fronça les sourcils et se décida à suivre Link. Il fut stoppé par Link qui le coucha dans un buisson. Mettant la main sur sa bouche, Link lui montra discrètement la bourrasque orangée en haut de la pente, tournant d'une manière furieuse. Puis cette dernière disparut.
"J'espère qu'elle a abandonné notre trace," fit Lagis dans un murmure.
Ils sortirent du buisson pour continuer leur route le plus prudemment possible.

Ils n'avaient même pas fait dix mètres qu'ils s'arrêtèrent devant un autre spectacle. Installé à distance des arbres, comme si aucun d'entre eux n'avait voulu pousser à proximité, un grand socle se présentait devant eux, avec en son centre, la fameuse relique des légendes. Seules quelques lianes avaient pris grand soin de la recouvrir, comme pour la protéger des variations du temps. Son pommeau avait un aspect plus verdoyant que bleuté. Lagis et Link se regardèrent.
"C'est elle, l'épée qui serait capable de purifier le mal ?"
Link frissonna. L'épée luisait d'une auréole... orangée. Lagis eut le même frisson. Il se rappelait du spectre qu'il avait vu à l'aller, et la couleur soudaine de l'épée ne l'inspirait pas.
"Cette épée qui scellerait le mal... ?"
La lueur orangée semblait dansante, comme pour accueillir ces deux nouvelles personnes en son sein.
Link et Lagis reculèrent. Cette épée ne devait pas être arrachée à son socle. Ils contournèrent celle-ci, prenant soin de ne pas escalader le socle, pour trouver un moyen de sortir de la forêt. A peine avaient-ils dépassé un arbre que l'esprit se manifesta, les poussant violemment dans la direction de l'arme. Ils tombèrent au sol, juste devant le socle. La main gauche de Link lui infligea une vive douleur, l'obligeant à planter ses ongles dans le sol. Lagis se releva, tirant son épée du fourreau, hurla à l'esprit de venir se battre. Link voulut parler, dire à Lagis de s'enfuir, mais la douleur le paralysait... Il tourna la tête vers sa main, pour voir qu'elle rayonnait d'une lueur bleue. La lueur prit la forme d'une main, enlaçant la sienne. En exerçant une pression sur celle-ci, Link se mit à hurler.
"Link !" hurla Lagis en se retournant vers lui.
C'était ce que l'esprit attendait. En un éclair orange, il se rua vers Lagis, le désarmant d'une facilité déconcertante. La forme bleutée lâcha la main de Link pour s'attaquer à l'esprit orangé, permettant à Lagis d'éloigner son ami de l'épée. Link respirait difficilement, essayant d'évacuer mentalement la douleur infligée par la main bleue. Lagis entendit un craquement de branche, puis se retourna. L'esprit bleu avait quitté son champ de vision et l'esprit orange tournoyait autour d'eux. Il chercha du regard son épée, en vain. L'esprit l'attaqua de nouveau, le séparant de Link et le poussant à nouveau vers l'épée. Le voyant approcher de Link, Lagis déterra l'épée sacrée pour protéger son ami.

Il se mit à hurler. Il voulut lâcher l'épée, mais elle semblait avoir pris possession de sa main. Serrant le plus fort possible son poignet droit, il s'affala au sol. L'esprit fonça vers son corps, et la lueur orangée de l'épée pénétra dans la main de Lagis, tétanisé par la douleur. Link se releva, hurlant le nom de son compagnon. Il voulut lui arracher l'épée des mains, mais guidé par une force inconnue, il posa sa main gauche sur le bras porteur de l'épée. La douleur de sa main explosa et Lagis leva la tête au ciel, se dépossédant de cette étrange entité orangée. Une fois l'oeuvre terminée, les deux hommes tombèrent inconscients au sol, l'épée libre des mains de Lagis.
L'esprit orange fit une grimace de mécontentement, avant de se faire percuter par un éclair bleu. Les deux esprits s'envolèrent dans le ciel, s'affrontant ardemment en projetant des éclairs. Une fois retourné devant le socle, l'esprit orangé fonça vers l'un des corps, mais il se heurta à l'esprit bleu au moment même où il toucha la main gauche de Link, et les deux entités explosèrent dans un éclair, laissant les deux Hyliens seuls dans la forêt.

Chapitre 4 : Le départ   up

"L'heure de l'éveil a sonné."
C'était la seule voix qui lui était permis d'entendre. Link ouvrit les yeux, pour se retrouver dans cet univers sombre. L'épée était au sol, sans sa torpeur orangée, pointant de sa lame un énorme trou béant. L'air qui s'en dégageait était suffoquant et lui brûlait les yeux, quelques larmes perlèrent sur sa joue. Un bras bleu le stoppa dans sa progression.
La personne se tenait devant le cratère, son visage voilé fixant le fond de l'abîme.
"Je n'ai pas pu empêcher sa renaissance."
La jeune femme se tourna vers les ténèbres et disparut. Resté seul devant le gouffre, Link tenta de faire un ultime effort pour voir ce qu'il y avait à l'intérieur. Impossible : il avait l'impression que le vent allait le désintégrer sur place tant il était hostile. Levant la tête, il aperçut une autre ombre qui l'observait de l'autre côté du gouffre, une épée à la main. L'ombre le fixait de ses yeux orange, puis esquissa un sourire démoniaque. Quelques minutes plus tard, le sourire disparut pour laisser place à un regard vengeur.
Link ne comprit ce changement d'expression que quand il s'observa : sa tunique était différente de celle d'apprenti, et il portait dans sa main gauche l'épée de la Déesse. Devait-il s'opposer à l'ombre qui lui faisait face ? Et pour quelle raison d'ailleurs ? Cette ombre, que pouvait-elle représenter ?
La forêt, pensa-t-il.
L'ombre regarda vers sa gauche et siffla. Il recula dans les ténèbres et disparut à son tour.
Link comprit quand il tourna sa tête dans la même direction : une femme, toute vêtue de blanc et aux cheveux d'or avançait, écartant les ténèbres de sa main comme du vent. Autour d'elle volaient trois lumières de couleur verte, bleue et rouge. La lumière que dégageait cette femme était tellement imposante que Link dut se protéger les yeux de son bras gauche. La femme se stoppa devant lui, posant sa main sur le signe divin.
"C'est l'heure de l'éveil. Si tu arrives à me trouver, tout te sera expliqué, chevalier de la lumière."

Il ouvrit les yeux. Il était couché sur un lit, à côté de lui sur un lit voisin se trouvait son compagnon d'armes Lagis, et sur sa droite, assise sur une chaise, les yeux rongés par le sommeil et les larmes, Hilda. A ses côtés, les trois épées qu'ils avaient reçues du maître forgeron de Cocorico. Son premier réflexe fut de toucher sa main gauche : elle n'avait rien, mis à part une marque en forme de Triforce...
Qu'est-ce que la marque de la relique sacrée fichait-elle sur sa main ?
"Link !"
Hilda se leva brusquement, sortie d'une torpeur, pour se mettre au chevet de son ami.
"Hilda ! Tu vas bien ?
- Je vais bien, répondit-elle. Je me suis tellement inquiétée pour vous dès que vous êtes tombés dans les bois ! Oh, par la Déesse ! Vous êtes en vie...
- Que s'est-il passé ?
- En rentrant de Cocorico, tu as fait un malaise et nous nous sommes arrêtés sur la route montagneuse qui mène à notre village. Puis, Lagis et moi, nous avons vu un étrange phénomène venant de la forêt : il en jaillissait des éclairs orange et bleus ! On a essayé de rentrer au village au plus vite, Lagis te portant sur ses épaules... mais un éclair orange s'est abattu sur nous, t'entraînant avec Lagis dans les bois. J'ai hurlé vos noms depuis le haut de la falaise, mais vous ne me répondiez pas... et je ne voyais rien avec toute cette végétation ! Alors, j'ai couru au plus vite au village pour demander de l'aide.... Nous avons fait une battue dans les bois, et c'est maître Ghilham qui vous a retrouvés au sol, inconscients et très amochés.
- Bordel ! fit Lagis en se levant."
Son torse, la moitié de son bras droit et une partie de sa main droite étaient couverts de bandages. On lui avait mis en plus une compresse sur la tête, cachant presque son oeil gauche. Plaquant sa main droite sur son front, il soupira. La douleur qui se faufilait le long de son torse s'éveilla et il se tourna vers ses compagnons, les yeux fermés. En ouvrant les yeux, il fut soulagé de voir Link et Hilda dans un meilleur état que lui. Puis, il fixa Link d'un air contrarié :
"Ce n'était pas un rêve, hein ?"
Link baissa la tête en signe de réponse. Il se tourna vers une Hilda inquiète pour lui expliquer toute la situation depuis leur séparation : la chasse dans les bois, la découverte de l'épée de la Déesse, la confrontation avec les esprits de la forêt. Hilda n'en croyait pas ses oreilles : l'épée avait été déterrée de son socle !
"Cette épée est maudite, Hilda, fit Lagis en frissonnant. Quand je l'ai prise, elle a pris possession de moi et je sentais que j'allais me perdre. Puis d'un coup, j'ai été libéré. L'épée, vous l'aviez remise à sa place ?
- Je veux bien croire à vos paroles, mais quand maître Ghilham vous a trouvés, l'épée était dans son socle, comme vous l'avez trouvée, je suppose, mais sans ses lianes. Comme si quelqu'un était passé et avait voulu la nettoyer...
- Qui a bien pu remettre cette relique en place ? Les esprits ?
Je n'en sais rien... Quoi qu'il en soit, nous devons parler de tout cela à maître Ghilham. Je vais aller le chercher."

Hilda se leva de sa chaise et quitta l'infirmerie du dortoir, en direction du bureau du maître. Il se trouvait être en pleine discussion avec monsieur Sophro, le chef du village.
Lagis se gratta la tête, et jeta un oeil au dehors : le soleil était radieux, à l'instar du temps qu'ils avaient eu à l'intérieur de la forêt. Il soupira une énième fois, avant de se retourner du côté de Link et de voir la marque sur sa main gauche. Il poussa un cri d'effroi qui fit sursauter son camarade.
"La relique sacrée ! La Triforce !"
Link l'observa de nouveau. Cette marque l'écoeurait encore un peu : elle avait été comme marquée au fer chaud, avec cette légère odeur de peau brûlée qui s'en émanait. Et la douleur qui allait avec.
"Tu as été marqué par les esprits, toi aussi ?"
Toi aussi ? Lagis déroula son bandage du bras droit, et il montra à Link une série de trois losanges, qui partaient de son poignet en remontant. Comme pour la marque de la Triforce, Lagis semblait gêné de la manière dont il avait été marqué.
"Ces saletés d'esprits nous ont marqués..."
Lagis se mordit les doigts. Ils plaçaient les deux esprits dans le même sac, comme des lutins qui voulaient s'amuser avec des gens de passage. Sauf que ces gens en question avaient été forcés d'y passer, après leur soudaine manifestation, et qu'ils les avaient marqués, comme un souvenir de leur passage, ou comme un maître le ferait avec son esclave.
Link ne pensait pas la même chose de ces esprits. L'un les avait volontairement attirés vers l'épée, dans le but de la prendre. L'autre avait tenté de s'opposer à son homologue en vain. Le premier voulait prendre possession de son ami et le second se serait servi de lui pour sauver son ami... Et puis, les visions de ces dernières heures l'embrouillaient. La femme bleue parlait d'éveil : de qui ou de quoi annonçait-elle le retour imminent ? Et l'ombre aux yeux orange, s'agissait-il de l'esprit qui les avait entraînés dans ce cauchemar ? Quant à lui, la femme lui a dit que son heure d'éveil arrivait aussi. Tant de questions qui mériteraient une réponse... Il espérait juste ne pas avoir éveillé le mal qui sommeille au coeur de la forêt interdite.

La porte s'ouvrit pour laisser entrer Hilda, maître Ghilham et monsieur Sophro. Lagis cacha promptement sa marque avant de prendre une posture plus correcte. Monsieur Sophro, en plus d'être le chef du village, était aussi son doyen. Ses épaules et son dos voûté étaient recouverts d'un grand et long châle blanc, avec au dos la broderie d'un oiseau volant vers le soleil. Tout en grattant sa longue barbe grise, il posa son bâton dans un coin de la salle pour prendre place sur la chaise qu'Hilda lui avait passée. Le doyen voulut tout entendre de leur épopée : du départ vers Cocorico à l'instant présent.
Chacun à leur tour, Hilda, Lagis, puis Link lui contèrent leur version de l'histoire. Les yeux se froncèrent quand ils parlèrent de leur mésaventure dans la forêt et du fait qu'ils avaient manipulé l'épée sacrée. Lagis frappa du poing quand le doyen les réprimanda d'avoir tenté d'utiliser l'épée : Link aurait pu y passer ! Qui sait ce que l'esprit lui préparait comme mauvais tour ! Son épée était perdue et il n'avait pas l'intention de courir dans les bois à la recherche de la sienne, laissant son ami sans défense. Ghilham tenta de soulager les esprits, en demandant s'il n'y avait pas eu d'autres manifestations de la forêt. Le doyen se gratta la barbe et répondit négativement. C'était bien la première fois que la forêt se manifestait ainsi.
"Mais, par chance pour nous, le démon n'a pas pu revenir. Il semblerait que la possession de Lagis s'est stoppée quand Link a voulu prendre l'épée à son tour... possédé par une autre personne. Peut-être que ces deux esprits étaient les derniers vestiges de l'ancienne guerre, l'un voulant ressusciter le mal, l'autre protégeant le sceau. A part ce grand tourbillon qui a plané au-dessus de la forêt pendant quelques heures, nous n'avons pas eu de manifestations physiques démoniaques. Et l'épée a été remise en place. Nous n'avons donc rien à craindre. Quant à vos marques, Ghilham m'en a parlé, je pense qu'elles feront office de cicatrice par rapport aux esprits qui ont voulu vous posséder."
Sur ces paroles, le doyen et Ghilham quittèrent la salle.
"C'est sensé nous rassurer tout ce baratin ?"
La phrase de Lagis eut un effet inattendu : entendre le rire d'Hilda.
Elle était juste heureuse de savoir ses amis en vie, et une catastrophe évitée.
Lagis finit par émettre un soupir de soulagement, avant de se mettre à rire à son tour.
Link se contenta d'un large sourire. Il avait volontairement évité de parler de ses visions au doyen et à son maître. Chassant de son esprit ces mises en garde, il se joignit à la bonne humeur du groupe.

Un mois et demi passa depuis l'incident de la forêt interdite.
Lagis, Hilda et Link, désormais sélectionnés pour participer au concours de chevalerie, s'étaient entraînés dur pour satisfaire leur maître. Des trois jeunots, Lagis était le plus motivé : son père avait enfin reconnu leur progression et leur détermination ! Il passait ses soirées à rêver du tournoi au fur et à mesure que le jour fatidique du départ approchait. Depuis l'incident, il n'avait qu'un songe étrange où un homme était venu lui proposer sa force. L'homme n'avait pas de forme précise, sauf ces yeux orange qui semblaient le poursuivre, même éveillé. Le songe s'était répété sur quelques jours, puis plus rien. Lagis en ressortit satisfait : d'une part, il n'avait pas envie de se souvenir de ces évènements et d'autre part, il devait se concentrer sur le tournoi !
Hilda avait juré de devenir plus forte pour assurer la protection de ses amis et priait la déesse pour obtenir plus de courage. Par moment, elle se demandait comment elle aurait fait dans la forêt, à la place de ses amis. Seule, confrontée à elle-même, avec ces deux esprits dont personne ne connaissait les intentions... Elle était réconfortée par les dires de ses deux amis, lui répétant que si elle n'avait pas eu la sagesse d'aller chercher de l'aide, ils ne seraient sûrement plus là pour en parler.
Link s'était plus tourmenté, pensant aux paroles de ses songes. La femme bleue du songe pouvait être l'esprit bleu, l'ombre aux yeux orange, l'esprit orange. Qu'en était-il de la femme blanche aux cheveux d'or et au monstre tapis sous terre ? Il n'avait plus eu de songe de la sorte depuis l'incident, et son regard se tournait souvent sur la forêt. Le symbole gravé sur sa main gauche ne s'était pas manifesté non plus d'ailleurs. Tant mieux.
Je n'ai pas pu empêcher sa renaissance, avait-elle dit devant ce gouffre vide. Pourvu qu'il ne s'agisse pas du démon. Une autre entité, peut-être la raison pour laquelle les deux esprits se battaient depuis des lustres. En tout cas, cette entité ne s'était pas manifestée, et depuis presque deux mois. Les pensées de Link furent interrompues par un objet qui percuta sa tête. Il tituba, recula de quelques pas, avant de voir le ballon rouler non loin de ses pieds. Puis il entendit le rire angélique d'Hilda.
"Link ! fit Lagis avec une pointe de déception. Les filles vont finir par l'emporter sur nous si tu continues à rêver ! Tu penses encore à demain ?
- Demain... Déjà je veux remporter cette victoire !
- Bien dit !"
Link recula pour relancer la balle avec toute sa force. Pour cette journée, la dernière dans leur village, ils avaient décidé de la passer avec leurs frères et soeurs d'armes, ainsi que leurs meilleurs amis. Les bagages étaient déjà prêts, les épées dans leur fourreau.

Et le soleil se leva. Le grand jour était arrivé. Lagis était le premier debout : il avait à peine dormi, tant l'excitation était grande, suivi d'Hilda et de Link, un peu plus maîtres de leurs émotions. Ghilham les accompagna jusqu'à l'entrée du village, suivi par la foule. Lagis bomba le torse, hurlant au peuple qu'ils reviendraient une fois chevalier. Hilda embrassa ses parents une dernière fois, Lagis serra la main de son père et Link celle de son oncle. Avant de partir, les deux compères avaient déposé un bouquet au cimetière, respectivement pour la mère de Lagis et les parents de Link. Le départ fut difficile, mais c'était signe d'une nouvelle naissance pour eux.
La chevalerie ! Rien que ça ! Alors que la plupart des jeunes de leur âge aspiraient à des grades plus tranquilles !
"Direction la cité d'Hyrule ! A l'aventure, futurs chevaliers !
- Nous sommes à combien d'heures de marche de la cité ? Je n'y suis jamais allé...
- Selon les indications de la carte, nous en avons pour deux jours. Par chance, nous n'allons pas passer devant la forêt interdite. Une fois à l'intersection pour aller à Cocorico, nous prendrons par le nord.
- Hilda ! Tu avais besoin de faire toutes ces recherches ?
- Ah ! Parce que tu es déjà allé SEUL à la cité d'Hyrule, toi ?
- Euh, non... Mais se perdre dans une plaine..."
Lagis fut gêné. Il ne voulait pas irriter Hilda pour cette première journée de voyage. Il se contenta d'afficher un sourire les yeux fermés. Les deux jours de voyage se passèrent sans encombre pour les jeunes apprentis. A la matinée du troisième jour, ils arrivèrent enfin devant la cité d'Hyrule.

Déjà, le pont-levis abaissé avec ses deux gardes au plastron orné du blason d'Hyrule leur imposait le respect. Leur émerveillement s'agrandit quand ils virent le bourg d'Hyurle pour la première fois. Les routes étaient si grandes que deux grands carrosses pouvaient passer sans difficulté. A gauche comme à droite, des magasins et une grande foule. Quelques personnes de haute instance, des villageois, des citadins, quelques mendiants et des gardes à chaque coin de rue. On ne pouvait nullement dire que la ville était morte dans ces conditions ! Les yeux des trois voyageurs se posèrent sur l'aspect de la place centrale : elle était circulaire, représentant le lien avec les grandes connexions de la ville. En son centre se trouvait une gigantesque fontaine, où le symbole de la Triforce et de l'oiseau de légende était gravé. Trois nymphes aux ailes frêles et aux longues oreilles tenaient des pots qui versaient l'eau de la fontaine. Au-dessus de l'une d'elles, une colombe se grattait le bec. Une fois son travail terminé, elle s'envola.
La colombe traversa des grilles presque aussi hautes que la fontaine elle-même. Derrière ces grilles, il y avait un sentier très élargi qui menait au château, la demeure des rois d'Hyrule. De loin, on pouvait voir les quatre tours annexes du château, avec leur toit orné d'un matériau vert émeraude foncé. Elles encadraient la tour principale du château, qui était de loin la plus belle de toutes.
Un bruit de ventre les fit sortir de leur rêve. Hilda montra un banc vide au niveau de la place centrale et les trois amis décidèrent de s'y asseoir pour manger un morceau.
"Je... je ne m'attendais pas à autant de grandeur ! J'en reste pantin !
- C'est vrai que ça change de notre paisible et petit village ! fit Hilda en croquant dans sa pomme. Et cette fontaine ! Oh, si seulement mes parents pouvaient voir ça !
- La fontaine, la ville, et... ce château... tout impose le respect ici ! répondit Link tout aussi admiratif que ses amis."
Une affiche du tournoi de chevalerie attira la jeune troupe. Il était indiqué que les inscriptions se déroulaient à la caserne de la cité. Après avoir demandé à un garde où se trouvait la caserne, ils décidèrent de s'y rendre. En poussant la porte, ils trouvèrent un bon nombre de prétendants au titre. A vue d'oeil, il devait y en avoir plus d'une cinquantaine à vouloir tenter l'épreuve. Et sur toutes ces personnes, seules cinq allaient être sélectionnées. Il y avait tout type de personne : les grands costauds sûrs d'eux, les personnes qui y allaient sereines, les timides qui n'arrêtaient pas de se remettre en question, les personnes pariant sur la chance, les prétentieux qui regardaient les nouveaux venus d'un oeil moqueur.

Lagis prit ses amis par les bras et les mena devant la personne responsable de l'inscription. Le garde semblait fatigué de recevoir les nouveaux arrivants. Peut-être en avait-il vu de toutes les couleurs avec toutes ces personnes venues des quatre coins du royaume.
"Bonjour ! Est-il toujours possible de s'inscrire pour le tournoi de chevalerie ?
- Les inscriptions n'ont été ouvertes qu'aujourd'hui, donc oui, il reste de la place. Il me faut vos prénoms et vos villes d'origine, s'il vous plaît.
- Voici Hilda, Link et moi-même Lagis ! Nous venons du village de Taronne. Nous avons l'aval de notre maître Ghilham, pour participer à ce tournoi ! conclut-il fièrement.
- Très bien, messires. Votre inscription est validée. Le tournoi aura lieu dans trois jours. Pensez à vous présenter aux portes du château d'Hyurle avant midi pour votre préparation. Les combats débuteront dans l'après-midi. Evitez d'emporter trop d'effectifs personnels avec vous.
- Merci à vous monsieur !
- Tiens, des bouseux de Taronne."
Les trois compères se retournèrent : assis autour d'une grande table, un groupe de cinq personnes habillées d'armures aux détails d'or et d'argent les regardèrent avec une expression de dégoût. Celui qui avait lancé la phrase les toisa du regard :
"Vous avez un problème, les mioches ? Vous nous salissez de votre regard."
Le garde occupé aux inscriptions soupira. Le groupe de Tardis, le chef de la bande assise qui avait insulté les arrivants, allait encore faire parler de lui. Lagis répliqua, en retenant toute la colère qu'il pouvait :
"Nous sommes inscrits au tournoi de chevalerie ! Si vous voulez devenir chevalier, tâchez de montrer un minimum de respect envers vos futurs adversaires !
- Du respect pour des gens qui n'auraient pas dû sortir de la terre ? Tu me rediras ces paroles quand tu seras la face contre terre, dans trois jours. Un bouseux de Taronne, ça doit rester dans son village et dans les champs ! Pas ici en train de faire semblant de manier une épée !
- Hé Tardis, il n'y a pas que des bouseux dans ce village, fit l'un de ses hommes en pointant du doigt Hilda."
La rage de Lagis s'éveilla : il mit Hilda derrière lui, écartant les bras.
"Je vous défends de toucher à elle !"
Tardis se leva. Il était plus grand que Lagis et doté d'une musculature plus généreuse, malgré le port de son armure lourde.
"Et sinon tu vas faire quoi, preux chevalier ?"
Malgré la différence physique entre lui et son adversaire, Lagis campa sur sa position. Ils se fixèrent un long moment, avant que Link n'intervienne en prenant le bras de son ami et celui d'Hilda.
"Nous nous sommes inscrits, Lagis. Dans trois jours, nous aurons l'occasion de lui montrer que nous ne sommes pas ce qu'il croit. Allons-y."
Lagis continua à fixer du regard Tardis, avant de suivre son ami et quitter les lieux.
"Quelle grossière personne, fit Hilda irritée. Je ne vois pas pourquoi on leur validerait leur inscription ! C'est indigne d'un chevalier !
- Oubliez cette personne, elle n'en vaut pas la peine. C'est une fois sur le champ de bataille que nous lui montrerons de quoi nous sommes capables ! Et il finira bien par s'incliner devant nous !
- En ce qui concerne la victoire, j'espère que tu as raison Lagis. Sortir ces mots pour se retrouver au sol ne fait pas joli !
- Ne t'en fais pas pour moi, Hilda. Je vais tous vous protéger cette fois-ci."
Link le fixa du regard. Lagis avait encore le souvenir de sa défaite dans les bois, et même s'il avait masqué cela par des sourires et rires, il était clair que ça lui avait gravé l'esprit.
"Aïe !" fit Lagis en massant son poignet droit.
Les stigmates de la forêt l'asticotèrent. Il grogna : ce n'était pas le moment de montrer le moindre signe de faiblesse. Dès qu'il arriverait à l'auberge, il changerait les bandages. La marque de Link avait brillé un court moment, comme en réponse à celle de son ami.
Pas maintenant, pensèrent les deux garçons.

Chapitre 5 : Le tournoi : phases éliminatoires   up

Les trois jours passèrent vite. Le groupe avait passé ces trois jours à visiter la ville et à prendre des renseignements supplémentaires quant au tournoi. Ils n'avaient pas croisé la route de Tardis et sa troupe, par chance. Mais de toute manière, ils allaient se revoir pour le tournoi. Assise devant les grandes barrières du château d'Hyurle, Hilda dévisageait la foule. Sur la centaine de participants au tournoi, à vue d'œil, elle ne comptait que seize femmes, elle comprise. Lagis était posté comme un loup guettant sa proie, à surveiller le groupe de Tardis qui s'en prenait à deux femmes inscrites. Les gardes eurent tôt fait de les rappeler à l'ordre, ce qui amusa le jeune bretteur. Link était impatient de commencer le tournoi, son épée émeraude à la main. Machinalement, il était en train de caresser la paume de sa main gauche.
Les cloches sonnèrent enfin. Les portes du château s'ouvraient, laissant apercevoir une troupe de soldats bien armés, avec au centre une jeune femme revêtue d'une armure lourde et d'une grande lance. Hilda eut des étoiles dans les yeux en la voyant : elle s'imaginait déjà être à sa place, ses cheveux vermeils au vent, tenant de sa main droite son épée et son casque de la main gauche. Et puis, cet esprit d'autorité qu'elle dégageait ! Elle frappa au sol avec sa lance pour calmer la foule.
"Mesdames et messieurs, le tournoi annuel de chevalerie va bientôt commencer.
Comme vous devez le savoir, ceci n'est pas qu'un simple tournoi pour illustrer vos compétences : à l'issue des matchs que vous allez vivre, nous sélectionnerons les cinq meilleurs qui auront l'honneur de commencer leur formation de chevalier au sein même de la citadelle d'Hyrule.
Dans ce cadre, nous vous demandons honneur, courage, force et respect ! Toute personne qui ne se pliera pas aux règles sera disqualifiée et interdite de tournoi pendant deux ans ! A présent, je vous prie de bien vouloir vous aligner pour que nous puissions procéder aux identifications et valider les premiers combats de l'après-midi ! Bonne chance à vous tous !"
La belle femme à la longue chevelure argentée s'en alla en direction du château.
Les participants s'alignèrent en différentes colonnes, afin que les gardes puissent procéder à leurs procédures spéciales : vérification du participant, armes autorisées, et lecture complète du règlement. Hilda fut séparée de ses deux amis, dans une autre colonne. Le passage devant les gardes effectué, elle balaya la foule du regard, tentant de trouver son idole dans la foule. Elle en avait complètement oublié Lagis et Link.

Lagis prit Link par le bras, le mettant à l'écart de la foule. Il était nerveux, mais pas dans le sens que Link pensait. Il débuta d'une toute petite voix :
"Dis-moi, Link..."
Le jeune garçon se retourna vers lui, détachant son regard de la foule.
"Depuis que tu as cette marque, il ne t'est pas arrivé de faire des rêves étranges ?"
Link se redressa. Se pourrait-il que Lagis ait aussi des songes ? Peut-être même identiques au siens ? Il se tourna complètement vers lui, attendant la suite du récit.
"Au départ, c'était toujours le même rêve... Celui d'un homme, enfin un truc qui y ressemblait, aux yeux oranges... Il n'arrête pas de me parler de l'importance du pouvoir et de la force... Je me souviens avoir répliqué en lui balançant mes idéaux de chevalier, mais il me disait que cela me conduirait à ma perte. Il me dit qu'un jour, je ferais appel à lui, car il a... ressenti... que je voulais être plus fort. Mais quelque chose ne m'inspire pas chez ce mec. Il me donne des frissons, il me met mal à l'aise... Enfin bref ! Link, as-tu déjà eu des visions semblables ou suis-je en train de délirer ?"
Lagis avait baissé les yeux, triste de son comportement. Link prit une grand inspiration, puis lui avoua à son tour avoir fait des songes, mais pas uniquement avec l'homme aux yeux malins. Il lui parla également de la femme bleue et de celle aux cheveux d'or. En discutant un peu plus, ils remarquèrent que leurs songes étaient superposés dans le temps. Les paroles du doyen remontèrent à leurs têtes : il leur avait bien dit que le mal n'avait pas été finalement libéré ?
"Tu as eu d'autres songes récemment ?
- Pour tout te dire, oui. Ils m'ont mis en garde. Contre quelque chose qui se prépare... Et puis, on m'a parlé de cet éveil, à nouveau.
- Toi, on te parle d'éveil comme si tu étais un poussin qui n'allait pas tarder à éclore. Moi, on me parle de pouvoir et de force, de domination et d'autres choses dont je n'ai pas envie. Tu crois que ce sont les esprits qui...
- C'est fort possible. Tu penses que le doyen nous aurait menti ?
- Le doyen ? Mais pourquoi aurait-il fait ça ??
- Je... je n'en sais rien..."
Link baissa la tête. Il n'était pas heureux de savoir Lagis dans le même pétrin que lui. Il devait voir la femme aux cheveux d'or, au plus vite. Après le tournoi, il partirait à sa recherche. Quelque chose se préparait, et il fallait agir.

Hilda retrouva les deux hommes devant l'arène du tournoi. Elle n'avait pas pu voir son idole, mais le déroulement du tournoi. Et elle était rouge.
"Nous allons tous combattre aujourd'hui. Je commence dans trois batailles. Et, j'espère que vous allez m'encourager de toutes vos forces. Je vais affronter Tardis."
Lagis écarquilla les yeux : Tardis, le malotru en armure à prix d'or ? La montagne de muscles arrogante ? Son visage se mit à blêmir. Il n'arrivait pas à imaginer la petite carrure d'Hilda face à cet ogre maléfique. Pire encore, il s'imaginait les pires choses quand au sort de son amie.
"Hilda ! Tu es sur que tu ne veux pas changer de place ? Il va te réduire en miettes !"
Elle posa sa main sur la bouche de Lagis, avec un grand sourire.
"Je vais devenir chevalier. Lagis, nous nous sommes entraînés ensemble, tu douterais de moi à présent ? Vaut mieux moi que vous. Et j'ai pleinement confiance en moi, alors pourquoi ne crois-tu pas en moi ?"
Lagis rougit. Il ferma les yeux en soupirant. Puis posant la main sur l'épaule gauche de son amie, il dit d'un air confiant :
"Excusez-moi de vous avoir sous-estimé, Madame."
Link fit un grand sourire. Il avait confiance en Hilda, et même si elle échouait, il était sur que le grand géant n'allait pas s'en sortir indemne.
"Allez vous placer avant que vous ne puissiez plus me voir. Lagis, tu passes en position sept, et toi Link en dixième position. Ils en font passer la moitié cet après-midi et l'autre moitié demain matin. Au moins, nous aurons le temps de dormir dans tous les cas !
- Bonne chance à toi, Hilda !
- Merci. A vous aussi les garçons !"
Le garde conduisit Hilda dans une salle à part, mais juste séparée d'un mur de ses deux amis qui, en tant que participants, avaient des places spéciales pour assister au spectacle. Le tournoi avait attiré beaucoup de monde à voir l'arène noire de monde. Dans une place bien mise en valeur, ornée de colonnes fleuries, se trouvait la famille royale. Et dans cette famille, il y avait elle.

Link dut se frotter les yeux deux fois avant de réagir. Dans une somptueuse robe blanche, des épaulettes dorées incrustées du blason d'Hyrule, semi masquées par deux mèches qu'elle avait laissé à l'avant. Des cheveux d'or. Elle s'assit aux côtés d'un homme fort et puissant, qui devait sûrement être le roi d'Hyrule. Mais il aurait juré que c'était la femme de sa vision. La princesse Zelda, la fille du roi d'Hyrule, celle qui dégageait tant de lumière dans son songe ? Il était fort possible qu'elle pourrait renseigner Link et Lagis sur les légendes liées à l'épée de la Déesse et du mal qu'elle scelle, mais quoi d'autre ? N'importe quel historien aurait pu le faire. Pourquoi elle en particulier ?
"Link ! Regarde, au balcon royal ! Le doyen !"
En effet, suivant la princesse Zelda, il reconnut le chef de son village, habillé d'une longue robe rouge et blanche pour l'occasion. Quelques personnes suivirent la princesse et le doyen pour s'asseoir à leurs côtés.
"Je ne savais pas que le doyen avait un lien avec la famille royale !
- Ou peut-être que les chefs des villages avaient une invitation spéciale pour ce genre de tournoi...
- Non, je ne pense pas. Les années précédentes, le doyen n'était pas allé au bourg d'Hyrule, et pourtant le tournoi s'était déroulé dans les mêmes périodes.
- Peut être n'avait il pas envie car il n'y avait personne de son village...
- Link ! C'est vraiment ce que tu penses ?"
Non, ça cachait quelque chose.
"Oui, c'est ce que je pense. Je ne vois pas d'autre raison..."
Lagis fit la moue.
"J'ai compris. On verra cela après le tournoi. Pas la peine de nous faire plus de souci. Allez, ça va bientôt commencer."
Link fit un léger sourire. Lagis devinait souvent et très facilement ses intentions. Ce qui, par moment, avait tendance à l'effrayer. Mais dans ce cas là, ça le rassurait. Avec un peu de chance, l'homme aux yeux orange et la femme bleue se présenteraient sûrement... Non. Qu'ils ne se présentent pas.

Le quatrième combat arriva.
Pour le combat, on avait imposé à Hilda et Tardis le même type d'armure, forçant le colosse à retirer ses plaques fabuleuses pour les troquer contre une armure bas de gamme selon lui. Hilda n'avait rien dit, pensant à la fière allure de la femme guerrière. Les deux combattants entrèrent sous les applaudissements de la foule. Tardis, d'une petite voix, souffla à Hilda :
"Tes bouseux ne seront pas là pour te protéger, petite. La sortie est par ici, vas-y pendant qu'il est encore temps.
- Je ne fuirai pas, c'est indigne d'un chevalier. En garde !"
Tardis ne s'attendait pas à ce genre de réponse. Ravalant sa salive, il sortit son épée et fit face à Hilda.
Link jeta un coup d'œil sur Lagis et manqua de laisser échapper son rire. Il avait les yeux fixés sur Hilda, et était en train de se manger les doigts. Sur le balcon royal, le doyen échangea quelques mots avec la princesse, qui hocha doucement de la tête en signe de réponse. Tardis observa Hilda : elle était bien déterminée à l'affronter. Il écarta une mèche de ses cheveux blonds de son visage, et lui dit :
"Je vais retenir mes coups pour que je n'aie pas à entendre les larmes de vos... amis... ce soir."
Hilda fonça vers lui, l'épée toujours au fourreau. Puis s'arrêtant devant lui, elle se stoppa et sortit sa lame d'un coup sec, pointant la gorge de son adversaire. La mèche de Tardis vola, avant de retomber doucement sur son visage. Il n'avait rien vu venir. La foule non plus, vu le silence qui était tombé dans l'arène.
"Allons-y !" fit Hilda qui arborait un regard différent.
Tardis leva son épée au ciel pour l'abattre sur son adversaire d'un coup. Hilda, plus agile et plus rapide que lui, malgré le port de l'armure, esquiva sans trop de problème. Elle se retourna pour tenter de lui mettre un coup au niveau de la hanche, mais ce coup ne servit à rien. La masse musculaire du colosse et celle d'Hilda allait faire la différence, et elle fronça les sourcils.
Tardis chargea. Hilda attendit le dernier moment pour se mettre sur le côté, pensant qu'il allait continuer sa charge. Mais il s'arrêta brusquement, et aidé par une rotation de son pied gauche, il toucha la jeune dame au dos. Hilda tomba au sol. Le colosse ne se stoppa pas ici : il mit son pied sur la main d'Hilda pour l'empêcher de se servir de son épée. Elle grinça des dents en silence. Lagis avait les poings serrés : il avait envie de crier, d'hurler ou de courir à la rencontre de son amie. Link ferma les yeux.
"Allez Hilda, réveille la lionne qui est en toi !"
Hilda ouvrit un œil, hurlant à Tardis que ce n'était pas terminé. Celui-ci la releva en la prenant par le col et en l'élevant au dessus de lui. Ouvrant l'autre œil, elle vit sa déesse aux cheveux argentés le regard sur la bataille. Hilda fit un grand sourire, et administra au colosse un grand coup de genou à la mâchoire. Désorienté, il la lâcha et recula, juste suffisamment pour qu'elle puisse prendre son épée. Tardis, remis du coup, tenta de parer les attaques de la lionne. La guerrière aux cheveux d'argent lui portait à présent toute son attention. Lagis aussi, vu les coups de poing qu'il envoyait dans le vide comme pour supporter son amie. Ils croisèrent le fer une nouvelle fois, à l'avantage de Tardis par sa force. Hilda battit en retraite et recula grandement.
"Fini de jouer petite ! Je vais te faire regretter ce que tu m'as fait au visage !"
Hilda ne répondit pas. Tardis rechargea à nouveau sur elle, et elle fit de même. Lagis avait les ongles plantés dans le mur, Link s'était aussi levé. Hilda et Tardis hurlèrent en s'avançant. Au moment où les lames devaient se croiser, Hilda plongea et se laissa glisser vers Tardis. Poussé par son élan, le colosse ne put ralentir et mit son épée en position défensive, couvrant le torse et la tête. C'était sans compter sur les actions d'Hilda : elle passa sous l'ogre pour lui administrer un formidable coup dans son entrejambe. Tardis leva les yeux au ciel et lâcha son épée pour se coucher à terre, humilié par le coup et la douleur reçue. Après s'être assurée qu'il ne se relèvera pas de sitôt, Hilda, la face à moitié sale, leva son épée rubis au ciel, et afficha un sourire victorieux.
"Un bon chevalier ne sous estime jamais son adversaire ! Pense à forger cela dans ta pauvre tête, Tardis ! Si j'ai gagné, ce n'est pas parce que je suis plus forte que toi, c'est que tu m'as largement sous estimé !"
Hilda vit la guerrière aborder un grand sourire quant aux paroles de la jeune fille. Le garde déclara le vainqueur, et la foule salua la performance de la lionne aux cheveux vermeils. Lagis et Link hurlèrent de joie dans les coulisses.
"Bravo Hilda, t'as été magnifique ! J'avoue avoir eu peur pour toi, mais tu t'es bien débrouillée ! Bravo !
- Lagis ! fit-elle en rougissant. Je t'ai déjà dit d'avoir plus confiance en moi !
- Tu as été exemplaire, fit Link. Je pense que ce colosse se souviendra de toi longtemps !
- Merci les amis ! A présent, c'est à vous de briller ! Moi, j'ai fini pour aujourd'hui !"
Elle partit aux vestiaires pour se débarbouiller et soigner les quelques plaies que lui avait provoqué Tardis.

Vint le tour du plus téméraire de la bande, Lagis.
Son adversaire était un jeune homme provenant du village Cocorico. Une apparence normale qui s'élançait courageusement vers l'arène où ils allaient s'affronter. Son visage était caché par ses longs cheveux bruns qu'il n'avait pas pris le temps de nouer avant le combat. Ses yeux gris en amende observèrent la foule, plus précisément un coin de la foule où il espérait voir quelques connaissances. Puis il fixa Lagis de son regard fatigué.
"Eh bien, je crois qu'il est temps d'y aller... En garde !"
Malgré les mouvements lents qu'il fit en sortant son épée, Lagis fit de même et se prépara au combat. Les deux hommes se regardèrent un moment, puis le jeune bretteur Taronnais fut le premier à lancer l'offensive. Un coup venant du haut, puis une attaque en direction des hanches, et pour terminer une visant les jambes. Toutes les trois parées par ce pseudo chevalier mou ! Lagis grogna. Il laissa son adversaire attaquer, pour en finir au même résultat. Le jeune homme brun tenta une charge, mais il trébucha dans son élan. Lagis préféra reculer au lieu d'attaquer et il avait raison : c'était une feinte. L'homme, la tête orientée vers le sol, finit par émettre un petit rire. Se redressant vers Lagis, il lui dit :
"Pas la peine de faire semblant. J'y vais réellement cette fois ci !"
Lagis lui rendit son sourire. Cette fois-ci, le combat était différent : plus vivant, plus actif et plus énergique, les deux ennemis ne se laissaient aucune faveur. Ils avaient réussi à se déstabiliser, voir toucher le sol, mais sans phase décisive. Si bien que le combat fut plus une épreuve d'endurance que de force. Il arriva, finalement, une phase décisive.
La lame de son adversaire glissant sur la sienne, Lagis eut sa vision voilée par les longs cheveux bruns de celui-ci. Il sentit l'instant d'après un coup au ventre et se plia sous l'impact. Puis un coup de pied, le mettant à terre. Le jeune homme allait conclure le combat, mais Lagis se roula sur le côté, infligeant un coup de pied au niveau de la cuisse. Celui-ci tomba sur les genoux, laissant suffisamment de temps à Lagis pour se relever. Enfin s'il le pouvait. Les deux combattants étaient épuisés. D'un regard, ils se levèrent pour faire résonner un dernier coup d'épée dans l'atmosphère. Aucun des deux ne voulait lâcher prise, même si leurs corps ne demandaient que cela. Mais doucement, l'épée de l'homme brun s'orienta vers le sol, suivie par son corps. Lagis tomba à genoux.
"Je crois qu'on en arrive à la même décision : je suis épuisé.
- De même, répondit Lagis dans un souffle. Ils doivent nous trouver pathétiques...
- Je ne suis pas d'accord. Nous nous sommes affrontés pendant plus d'un quart d'heure, alors que les combats précédents n'ont même pas duré dix minutes. Pour moi, tu es un adversaire de taille, mais pour l'heure, je dois m'avouer vaincu.
- Attends, nous devons avoir la réponse du juge..."
Le juge suivit la réponse de l'adversaire : Lagis ayant été au final celui qui avait su rester plus longtemps sur ses deux jambes. L'autre était complètement au sol, alors que lui avaient les genoux au sol, le reste du corps maintenu par son épée. Après la décision du juge, Lagis s'effondra au sol :
"Tu as raison ! fit-il dans un rire.
- Pour moi, tu es un adversaire de taille. Je m'appelle Asmelen, de Cocorico.
- Je suis Lagis, de Taronne.
- Lagis. J'espère pouvoir croiser le fer avec toi, une autre fois.
- Moi de même."
En se levant tous les deux, ils se serrèrent la main et quittèrent l'arène sous les applaudissements de la foule. Lagis jeta un coup d'œil au balcon royal : le doyen semblait lui sourire, sa barbe bougeant comme un poisson au fur et à mesure qu'il applaudissait. Link vint à leur rencontre avec un signe de satisfaction.
"Autour de moi, les gens croyaient que vous n'en finiriez jamais. Vous nous avez offert un beau combat, vraiment. Tu devrais remercier tes jambes pour t'avoir donné la victoire, Lagis !
- Oui, j'aurais besoin d'un bon massage ! Tout de suite ! répondit-il d'un ton moqueur.
- De même pour moi, répondit Asmelen. Bon courage pour votre combat, si vous n'êtes pas encore passé.
- Il ne va pas tarder. Link, je te présente Asmelen, le maître de l'endurance à Cocorico !
- Enchanté !"
Asmelen répondit par un large sourire et une bonne poignée de main, après cela il suivit Lagis à l'infirmerie pour se reposer. Une fois arrivés, il fit la connaissance d'Hilda et salua ses prouesses dans son combat, chose qui pinça le cœur de Lagis quand la belle répliqua avec une grande révérence. Mais la pique disparu quand elle se plaça aux côtés de son ami d'enfance pour lui mettre un nouveau bandage sur la main droite. Hilda était si protectrice envers les gens qu'elle aimait... Tournant la tête, Lagis ne vit aucune trace de Tardis. La belle lui répliqua qu'il s'était enfui sans demander son reste : une telle humiliation lui aurait valu le coup de se faire huer par sa bande et aurait été le sujet d'une longue et douloureuse tourmente. Tant pis pour lui ! Au moins, il aurait appris quelque chose.
Pendant qu'ils discutaient de cela, ils n'avaient même pas remarqué qu'Asmelen se concentrait sur la main droite de Lagis, comme s'il cherchait à voir quelque chose. Le dernier bandage tomba au sol, laissant apercevoir une moitié du dernier losange incrusté sur la peau de Lagis.
Asmelen fronça les sourcils.

On arriva au dernier combat du trio, celui de Link.
Il était opposé à un homme très svelte, de grande taille. Son visage était creux, à tel point qu'on aurait pu se demander s'il mangeait comme il le fallait. Néanmoins, il avait une épée de très bonne facture, et en plus une épée à deux mains. Il semblait maigre et affaibli, mais Link ne s'arrêta pas sur l'apparence. L'homme devait avoir plus d'un tour dans son sac. Il s'appelait Daphan. Ce dernier le salua, puis engagea le combat. Link fut impressionnée de la vitesse à laquelle il se déplaçait. En un instant, il s'était retrouvé derrière lui. Mais il en fallait beaucoup plus pour faire perdre ses repères au blondinet : il répliqua comme il le pouvait, mettant son épée en arrière. Un choc violent : Link recula et manqua de mordre la poussière par la puissance de l'épée à deux mains. Il analysa rapidement une faille : le poids de l'épée diminuait la vitesse de Daphan quand celui-ci l'utilisait. Promptement, Link tenta de toucher le flanc semi découvert de son adversaire. Il arriva quelque chose qu'il n'avait pas prévu : son ennemi stoppa son épée avec sa propre main. La mitaine en ferraille plia sous le coup, déchirant la chaire de Daphan pour laisser perler un peu de sang. De l'autre côté, il tenait son épée, la lame à terre. Puis Link vit celle-ci se relever lentement...
"D'une main, comme ça ?
- Oui, fit Daphan, d'une main je vais t'achever.
- Pas question !"
Link prit appui sur l'épée paralysée par la main de Daphan pour lui mettre un coup de pied sur ses orteils. Daphan gémit, laissant un peu de temps pour que Link puisse se libérer. Il se redressa, et voyant le regard déterminé de Link, il fit un grand sourire.
"Hé bien, hé bien, on dirait qu'il te faudra chercher une autre de mes faiblesses."
Il avait raison : si Daphan pouvait manier son épée d'une main, c'est qu'il pouvait d'autres prouesses malgré son corps de roseau. Un grand vent se souleva : Daphan avait effectué une rotation pour toucher Link, mais ce dernier esquiva en reculant. De toute manière, songea Link, s'il doit déployer toute sa puissance avec son épée, il le fera avec ses deux mains. Il suffit juste de ne jamais lui en donner l'occasion.
Daphan se lança sur lui l'épée à deux mains bien en avant. Link resta sur place un moment, en position défensive...
Il faut que tu apprennes à analyser ton ennemi, Link !
En avant pour la pratique. Link quitta sa position défensive pour virer sur la gauche et se baisser. Bon choix : Daphan coupa avec une nouvelle demi-rotation. Il planta son épée dans le sol pour donner un coup de jambe à Link, qui répliqua avec son épée. Mal à l'aise, Daphan abandonna son offensive pour se mettre dans une meilleure position. Il pointa son épée vers son ennemi, l'orientant doucement vers le sol pour se préparer à une nouvelle attaque. Link fonça vers lui, sans que Daphan puisse répliquer, bloqué par sa propre épée. L'elfe frêle s'attendait à ce qu'il fasse un coup direct mais la situation fut tout autre : Link se servit de la grosse épée comme tremplin pour sauter sur lui ! La vision de Daphan se couvrit du le torse du jeune hylien, qui le fit basculer vers le sol. Daphan s'effondra sur le sol, Link atterrit un peu plus loin.
Ce n'était pas du tout comme ça qu'il avait prévu de faire son attaque, mais bon, son maître ne lui avait pas reproché à maintes reprises son manque d'analyse ?
Daphan se releva, mais n'empêche qu'il était mort de rire. La situation l'avait bien plus qu'amusé, au grand désarroi de Link qui pensait en avoir fini. Il soupira en pensant à une chose idiote : il se souvenait d'un jour où il avait demandé à son maître s'il n'existait pas une quelconque magie qui pouvait identifier le point faible de son adversaire. Il haussa les épaules avec un petit sourire. Remis en position défensive, Daphan et Link s'observèrent un court moment avant de rependre. Au terme d'une nouvelle attaque chargée de Daphan, Link exécuta une meilleure attaque : il sauta pour se retrouver derrière lui et ainsi lui asséner d'un coup d'épée. Il ne s'attendait pas à ce que Daphan ne puisse se relever : avec le coup qu'il avait reçu à la tête, l'homme svelte décida de déclarer forfait. La victoire fut donc accordée à Link, sous les applaudissements de la foule.
La princesse et le doyen n'avaient pas perdu une minute de ce combat, mais leur expression restait neutre. En tout cas, la présence du doyen n'avait rien de rassurant, ni pour Link, ni pour Lagis. Link demanda néanmoins comment son adversaire se portait à la sortie de l'arène. Celui-lui lui répondit qu'il s'en sortait avec une belle bosse à la tête. Il retira son casque et se frotta la bosse qui venait d'émerger sur sa tête. Daphan le félicita de sa victoire, avant de sortir des quartiers sans même prendre le temps d'aller à l'infirmerie.
"Asmelen doit déjà y être, pensa-il. Pas la peine d'attirer les soupçons."

Une jeune dame pressa Link vers l'infirmerie, lui précisant que c'était un passage obligatoire. Link l'avertit du départ de son adversaire, mais elle répliqua que c'était un habitué de longue date à ce tournoi et que les organisateurs ne se souciaient pas de lui. Il avait beau être frêle en apparence, il a une bonne constitution. Link haussa les épaules et alla rejoindre ses amis.
Asmelen était allongé sur lit, les yeux fermés. Lagis était couché sur Hilda qui lui faisait un massage à la tête en position assise.
"Je pensais que tu n'avais besoin que d'un massage sur les jambes."
Lagis ouvrit les yeux et se redressa brusquement, comme si une mouche venait de le piquer. Hilda surprise, eut juste le temps de reculer et grogner.
"Ton combat s'est bien passé ?
- Oui, et j'ai pu le remporter.
- C'est génial ! Nous avons tous les trois passé les éliminatoires !
- Nous en avons fini pour aujourd'hui, donc ?
- Oui, répondit Hilda. Demain se déroulera le reste des éliminatoires et puis le jour suivant, nous passerons au début des phases finales... Oh ! Tout passe si vite ! Je... je ne sais pas comment je vais supporter toute cette pression !
- Je pense que pour toi, tout ira bien, vu la raclée que tu as mise à Tardis...
- Les gens se méfieront, Lagis ! Je dois être plus sur mes gardes !
- Oui, après-demain va être une autre paire de manche. En attendant, reposons nous un peu !
- Tu as raison, Link ! Hé, mais on ne peut pas partir d'ici ? Après tout, nous sommes qualifiés, non ? Nous n'avons pas besoin de rester ici.
- Non, nous devons rester jusqu'à la fin des combats du jour. Ils vont ressortir les gagnants pour les joies de la foule. On va encore parader, puis, enfin ! On pourra rentrer dans nos quartiers provisoires. Et en plus, nous bénéficierons d'un jour de repos.
- J'ai hâte ! Je veux un bon lit ! fit Hilda en allant chercher un verre d'eau."
Le temps qu'elle sorte de la salle un petit moment, Lagis se rapprocha de son ami pour lui parler d'une petite voix : la marque s'était manifestée. D'une manière douce, mais répétitive. Avec ce même refrain : le manque de force. Sitôt le combat fini, la marque s'était grandement moquée de sa prestation qu'elle jugeait minable. Lagis s'était efforcé d'ignorer les piques de la marque, d'où l'état de semi sommeil quand il était arrivé. Hilda fit un signe à ses amis, leur hélant qu'il y avait de la nourriture en distribution. A ces mots, Lagis et Link quittèrent le lit pour prendre un morceau en compagnie d'Hilda.
Asmelen ouvrit un œil, pour se gratter le menton.
"La marque de l'un s'est activée, mais pas de l'autre. Intéressant. Dommage que je ne puisse pas rester pour en savoir plus sur leur activation, mais j'en sais assez sur leur identité. Il est temps de s'éclipser..."

Chapitre 6 : Le tournoi : phases finales   up

Link fut matinal cette fois-ci.
Il avait passé une bonne partie de la nuit sous sa couverture, à ne savoir quoi dire après le tournoi. Il devait parler à la princesse Zelda, la femme dorée de son songe. Et s'il se trompait ? Si ce n'était pas elle ? Posant la main sur son front, il ferma les yeux. Non, cela ne pouvait être qu'elle. D'ailleurs, la présence du doyen de leur village l'interpellait fort, comme Lagis. Les deux amis n'avaient pas voulu impliquer Hilda dedans, la seule qui n'avait pas été marquée ce jour-la. Il se dirigea seul vers la salle de restauration, et s'attarda sur une affiche collée sur le mur du couloir. Un soldat venait de l'afficher. Saluant le jeune homme, il lui signala, d'un doigt pointé sur l'affiche, le déroulement du tournoi du jour. Les seizièmes de finale débutaient le matin, le reste - les huitième, quart, demi et finale - l'après-midi. Et à l'issue du tournoi, quelques participants, dont le vainqueur, auraient le privilège d'entrer dans l'école de chevalerie d'Hyrule.
Il passa sa tête par-dessus une fenêtre du couloir.
Le soleil se levait tranquillement, illuminant de ses rayons les montagnes lointaines qui formaient la frontière naturelle du royaume. Si lointaines et si proches à la fois... il paraissait qu'à une époque, Hyrule était un empire dont les frontières s'étendaient encore plus loin que ces montagnes. Une zone si vaste à protéger ne devait pas être de tout repos. Lui caressant la nuque et la face, le vent se prit un malin plaisir à le faire somnoler. Une voix, qui semblait venir de l'étage du dessus, le tira de son nuage.
"... Mais les deux sont marqués ! Pourquoi la troisième ne le serait-elle pas ?"
La voix ; il l'avait déjà entendu quelque part.
"Nous n'avons pas de preuve. Nous ne pouvons pas prétendre que c'est une marquée aussi. Je ne m'abaisse pas à la torture, ni à la violence. Et elle n'en n'a pas fait mention.
- Nous finirons bien par le savoir un moment ou un autre alors. C'est quand même un manque de chance que le troisième ne soit pas avec eux. Bref, qu'en est-il des deux autres ?
- La marque s'est vivement manifestée pour le premier, pendant et après son combat. Le second, quant à lui, n'a rien ressenti.
- As-tu vu l'apparence des marques ?
- Non, j'avais les yeux fermés. Il est bon de feindre le sommeil quand on recherche des informations.
- Tu devrais faire plus attention. Nous devons savoir lequel des trois éliminer. Il ne nous est pas permis d'assassiner les trois.
- Doucement, mon ami. Nous n'en n'avons que deux en notre possession. Et si celui que nous cherchions n'était pas avec eux ? Prenons notre temps. Le tournoi nous avantage déjà bien comme cela."
Link déglutit nerveusement. Ils parlaient de Lagis et lui. Il existait trois marqués, et l'un d'eux devait mourir. Le pourquoi, il ne le savait pas, et frémissait rien qu'à l'idée de germer une hypothèse.
Je n'ai pas pu empêcher sa renaissance.
Un bruit de pas indiquait le déplacement d'une personne en armure, et les deux compères stoppèrent la discussion.
"Sa Majesté désire vous voir, chevaliers.
- De suite ? Sa Majesté est bien matinale, ces derniers temps. Penserait-elle aux faits de la veille ?
- Sa Majesté ne s'attendait pas à voir en personne ser Asmelen et ser Daphan au tournoi. Elle veut juste des explications. Suivez-moi.
- Toujours aussi directe et brutale, très chère Daenylla. Vous êtes le portrait craché de votre mère.
- Ser Daenylla, s'il vous plaît. Et si vous en avez fini avec les bavardages, suivez-moi. On ne fait pas attendre Sa Majesté."
Les bruits de pas, associés au boucan des armures lourdes qu'ils portaient, s'éloignaient jusqu'à ce que Link ne puisse plus les entendre. Asmelen ... l'adversaire de la veille, celui que Lagis affrontait et avec qui il a discuté comme un bon vieil ami. Ce même Asmelen qui simulait le sommeil quand son ami lui parlait des marques. Une myriade de questions lui trottinait dans la tête, mais la plus importante était de savoir de qui ils voulaient la mort et pourquoi. Il pouvait très bien s'agir d'une autre personne, de Lagis... ou de lui-même. Il commençait à se demander si Lagis n'avait pas raison à propos de la nature maléfique des marques. Plusieurs hypothèses naissaient dans sa tête quant aux vraies motivations des deux chevaliers : aucune ne marqua le pas sur une autre. Il ne s'attarda pas et prit la direction de la salle de restauration.
Trois personnes prenaient leur petit déjeuner près de la cheminée. L'odeur alléchante de la nourriture chassa les pensées négatives du jeune homme, et il avança vivement vers les cuisiniers.

Lagis se leva quelques minutes après.
Son premier réflexe fut de chercher Link du regard, mais il n'était pas présent. Hilda dormait à sa gauche, de travers sur son lit, comme à son habitude. Cela lui tira un sourire et il remit le drap sur le corps de son amie. Et une violente flagellation le sortit de sa rêverie. Sa main droite en tremblait.
"Maudite marque, maudits songes."
Dans son songe, il avait marché pendant un bon moment, sur une route dorée mais entourée d'un néant immense. Sa voix se perdait dans l'espace. Après avoir parcouru ce sinistre sentier, il finissait par se trouver dans une réplique de la forêt interdite et à la place de l'épée de légende siégeait l'homme en noir.
"Un bon chevalier se doit d'être fort, sinon il ne peut se défendre, lui et sa nation."
Lagis se garda d'avancer plus. L'homme était armé après tout, et son aura maléfique était puissante.
"Tu veux devenir chevalier, mais tu es faible. Tes mots n'ont pas de grande valeur face à l'acier."
Il ne répondit pas, mais fixa l'inconnu du regard.
"Oh, quel mauvais regard. Je ne veux pas ton mal, voyons. Tu aspires à devenir chevalier pour tous les protéger, je sais. Mais il faut te montrer fort, malgré tout ce que tu peux dire dessus. C'est en ayant la force que tes mots auront un poids. Mais, malgré cela, tu n'auras pas cette force désirée. Tu n'auras jamais l'occasion de l'avoir."
Lagis leva un sourcil.
"Tu devrais te méfier de tes amis. C'est eux qui briseront ton rêve. Et ils te briseront aussi, si tu ne fais pas attention.
- Mes amis ne me feront jamais de mal.
- C'est ce que tout le monde pense, mais plus grande et amère est la trahison d'une personne en qui tu avais confiance. Tous tes secrets entre les mains de celui qui fut jadis ton meilleur ami... Réfléchis bien, moins on a de relation, mieux on se porte.
- Je vais suivre votre conseil : allez vous en et revenez plus jamais me hanter de peur de devenir votre ami."
Devant l'air menaçant de Lagis, l'ombre s'inclina et partit dans une direction inconnue.
"Hilda et Link ne me trahiront jamais. Jamais."

Hilda se retourna sur le côté, laissant tomber son oreiller au sol, ce qui valut encore un sourire de la part de Lagis. Elle finit par ouvrir l'œil, cherchant du regard sa surface moelleuse, et tomba sur le regard de Lagis.
"Bien dormi ? Souffla-elle
- Très bien, mentit-il. Link est matinal, il n'est pas dans son lit.
- A la salle de restauration, peut être ou aux bains. On peut aller voir si tu veux.
- A la salle de restauration d'abord, toi, tu n'as pas le droit d'aller aux bains avec nous.
- Hé ! Si ça se trouve, je deviendrai chevalier et j'aurai le droit de tout faire ; quant à vous je vous laisserai faire les sales besognes.
- Quelle terrifiante guerrière tu ferais alors !"
Il eut comme réponse un oreiller volant vers sa tête. Hilda se leva franchement, puis ils se dirigèrent vers la salle de restauration. Link s'y trouvait, et héla ses amis pour qu'ils viennent le rejoindre. Il ne voulut pas parler des marques devant Hilda et démarra la conversation sur le déroulement du tournoi d'aujourd'hui. Cette fois-ci, il allait combattre parmi les premiers, et dans une poule opposée à ses amis. Il ne pourrait les affronter qu'en cas de finale, si toutefois ils y parvenaient. Hilda et Lagis devaient s'affronter dans deux tours, s'ils sortaient victorieux de leurs combats. C'est une fois dans la salle de bains - et s'étant assuré qu'ils étaient bien seuls - que Link se décida à parler de ce qu'il avait entendu ce matin. Lagis en fut horrifié : il avait peur qu'Asmelen ait vu sa marque durant ou après le combat et des réactions qu'ils avaient eu suite à celle-ci. Par chance, il ne lui avait pas parlé ouvertement de celle-ci, mais il était fort déçu de la révélation de son ami sur le prétendu chevalier de Cocorico. Etait-ce par coup de chance ou étaient-ils vraiment surveillés ? Un hoquet sorti de la bouche de Lagis : le doyen du village était présent aussi. Cela ne lui indiquait rien qui vaille... et puis le songe de cette nuit...
Il lui déballa son songe. Link avait calmement écouté, avant de jurer à Lagis qu'il ne ferait pas de mal à un ami, que ce soit lui, Hilda ou un autre ami. Surpris d'apprendre qu'il existerait un troisième marqué, Lagis eut la même réaction que le camarade d'Asmelen, mais il se rétracta : elle n'était pas du genre à cacher quelque chose et elle n'était pas dans le bois avec eux quand l'action s'était produite. Et puis l'un des chevaliers n'avait pas il dit qu'il fallait tuer l'un des marqués ?
Lagis ressortit de la salle de bains très pâle et n'osa parler avant le début du tournoi.
Il avait peur. Peur d'être le marqué à tuer.
Et pourtant, malgré une chance sur trois, il était certain que c'était lui.

Le premier combat des seizième de finale se passa assez bien pour Link qui en sortit victorieux : contrairement au fin tacticien qu'il affrontait la veille, son adversaire était une force brute à l'état pure avec une stratégie digne des hommes de la préhistoire. Le temps fut son meilleur ami, laissant l'ennemi s'épuiser pour analyser et frapper. Il était clair que s'il avait frappé sans chercher, il aurait été le premier à terre.
Hilda eut une victoire facile par rapport à ce qu'elle avait montré la veille avec Tardis, juste parce que son adversaire était un ancien émissaire du colosse, ancien car il l'avait quitté le soir même de sa défaite face à la jeune lionne de Taronne. On ne sait pas si sa victoire était due à la peur provoquée suite aux évènements de la veille ou par pure couardise de son adversaire, mais les garçons furent heureux de la voir passer à l'étape supérieure.
Lagis dégusta amèrement son combat. Certes, il finit par le gagner mais il était ailleurs et avait du mal à se concentrer sur la stratégie de l'adversaire. Tantôt à prendre l'avantage, tantôt à être submergé par les attaques, il se défendit et attaqua, mais pas avec le même panache que la veille. Link s'était crispé à la vue de son combat : il aurait du attendre le soir avant de parler de ces révélations à son ami, mais il ne savait pas comment aller se terminer la journée. La fin de la journée équivalait à la fin du tournoi, et il savait que Lagis avait des chances d'être la victime d'une grande frustration.
Les seizièmes passèrent avec une victoire dans le clan de Taronne, et il ne resta que douze participants pour l'après midi.

Les huitièmes de finales commencèrent l'après midi.
Le combat s'était corsé pour les trois jeunes bretteurs du second village d'Hyrule.
Link n'avait pas cru à sa victoire, tant son adversaire le maîtrisait, en attaque comme en défense. Mais c'était une armure efficace contre sa faible constitution : une série de coups bien placés eurent raison de son adversaire. Mais sans cette faille, il se serait fait jeté du tournoi, battu à plates coutures. Sa victoire avait un goût amer : le reste du tournoi privilégiait aussi l'endurance, et Link avait déjà bien souffert à cause de son ennemi. Il ne restait plus qu'à espérer que son prochain concurrent soit aussi affaibli que lui.
Hilda assura sa victoire au prix de la perte de son épée. Le beau cadeau du forgeron de Cocorico n'avait pas tenu face aux chocs de celle qu'on appelle la tigresse de la cité. La lionne brava la tigresse, mais sans la fierté qui devait accompagner cet acte. Triste d'avoir perdu son épée, Hilda ne resta même pas à l'ovation de la foule, trop impatiente de lâcher ses larmes dans un coin où personne ne la verrait. Un soldat alla lui fournir une autre épée, et prit soin de donner les restes de son ancienne épée à la jeune demoiselle, pour qu'elle puisse la réparer.
Lagis resta sans voix devant le verdict du juge. La face au sol, rouge par la frappe récente de son adversaire et avec une épée à quelques centimètres de sa gorge, le jeune Taronnais avait perdu. Il s'était isolé, pour chasser ses mauvaises pensées et mieux combattre pour cette après-midi, et il s'était incliné devant son premier adversaire. Il ne l'avait pas volée sa victoire, il s'était bien battu. Mais Lagis était en bien meilleure condition que les deux autres après leur pause de midi. Il ne trouva même pas la force de se relever : c'était son adversaire qui était forcé de lui tendre la main pour l'aider. Il retourna à la salle, les yeux rivés vers le sol. Hilda fut la première à l'accueillir et le consoler du mieux qu'elle pouvait. Mais Lagis ne semblait entendre ni la voix de Link, ni celle d'Hilda. Seule une voix résonnait dans son esprit :
"Ce manque de force est pitoyable : tu es vraiment pathétique jeune homme."
"J'aurais fait beaucoup mieux que... ça."
"Tes amis sont passés, même la jeune femme qui t'accompagne. Tu devrais avoir honte."
"Je serai chevalier ! Que des mots, du vent."
Obsédé par ces paroles, Lagis jeta violemment son épée contre le mur.
Link et Hilda restèrent interdits un moment, puis voulurent le calmer. Lagis les stoppa d'une main.
"Laissez-moi seuls s'il vous plaît. Je dois faire le vide dans ma tête. Pardon les amis."
Une fois seul, Lagis se mit dans un coin de la pièce et fondit en larmes.
"Maudite marque ! Tout est de ta faute !" Hurla-il.
Tapis dans l'ombre, Asmelen tendait l'oreille. Il ressentit néanmoins de la tristesse envers Lagis, avec l'envie de lui dire de ne pas abandonner, mais il ne devait pas se faire détecter. Tels étaient les ordres.

Les quarts de finale sonnèrent le glas pour l'équipe de Taronne.
A cause de la répartition inégale, Link jouait pour une place en demi-finale et Hilda pour la finale. La fatigue, la défaite de Lagis et l'attitude de leur ami, la démotivation du groupe eurent raison des deux derniers. L'autre adversaire n'était pas aussi épuisé que Link le pensait, et il parvint à lutter pendant une dizaine de minutes avant de mettre le jeune homme au tapis. La faute au combat précédent, qui l'avait largement plus épuisé que celui de la matinée. Hilda n'était pas non plus en mesure de bien assurer son combat : la perte de son épée, la défaite de Lagis, puis celle de Link. Elle fit de son mieux, mais finit par laisser échapper sa place en finale. Et ceci au prix d'un épuisement tellement grand qu'elle ne s'en releva pas après l'annonce du juge. Les gardes durent l'acheminer vers l'infirmerie allongée, en assurant à Link qu'elle avait juste besoin de repos. Mentalement et physiquement, Hilda avait fait tout ce qu'elle pouvait.
La chevalerie partit de la tête des trois jeunes amis.
Link trouva Lagis au chevet d'Hilda, qui avait ouvert les yeux. Elle était dans un état aussi morose que ses deux amis. A l'extérieur, ils pouvaient toujours entendre les bruits de la foule et les rencontres d'acier de l'arène.
"Pourquoi devons nous attendre la fin du tournoi ? Nous n'avons plus rien à faire ici, nous pouvons d'ores et déjà profiter du temps qui nous reste pour faire la route jusqu'à Taronne.
- C'est un ordre, m'a dit le soldat. Je n'ai pas eu le courage de lui en demander plus.
- Tant pis, merci quand même Link.
- Tu vas mieux, Lagis ?
- Eh bien, j'ai toujours du mal à digérer la défaite, comme me le dit aussi bien mon père. Mais si je dois garder un point positif, c'est que nous sommes quand même arrivés à un bon niveau de compétition.
- Que ce soit toi ou nous, Lagis. Nous n'avons pas à en rougir, fit Hilda."
Et pourtant, ce fut la première à lâcher des larmes. Link et Lagis lui firent un énorme câlin.

Le tournoi se termina une heure avant la tombée de la nuit.
La victoire avait été remportée par un homme originaire du bourg d'Hyrule. Il avait sa place assurée dans la chevalerie avec les autres vainqueurs sélectionnés. La foule se dissipa, aussi bien dans l'arène que dans la salle d'entraînement, et un garde vint se présenter au groupe qui partait, suivi de deux autres gardes, d'une carrure plus imposante que le premier.
"Vous êtes bien les trois participants de Taronne, n'est ce pas ? Messires Lagis et Link, ainsi que Dame Hilda ? Veuillez nous suivre, s'il vous plaît."
Link et Lagis se regardèrent : après les révélations de ce matin, ils ne le sentaient pas très bien. Mais ils n'en furent pas plus étonnés qu'Hilda. Ils se résignèrent à suivre les soldats.
Ils sortirent de la grande bâtisse du tournoi pour se diriger vers le château d'Hyrule. Les gardes leur ouvrirent la porte, les invitant à entrer dans le palais. Toujours stupéfaits, se demandant ce qu'ils faisaient en ces lieux, ils continuèrent à suivre les gardes. Ils montèrent un escalier avant de se retrouver dans la salle royale principale. Ils n'osaient pas avancer tellement les pièces qui se succédaient étaient belles. La salle principale, plus que toute autre, avec ses vitraux presque aussi grands que les colonnes, son tapis rouge à perte de vue et son assemblée royale, assise dans des grands fauteuils aux effigies de la déesse.
"Votre Majesté." fit le soldat en s'inclinant.
Quelle ne fut pas la surprise des trois amis quand ils virent des têtes connues dans la foule qui les entourait. Elle n'était pas grande, mais étonnante.
A l'extrême gauche, se trouvait Asmelen, l'ancien adversaire de Lagis, le prétendu aspirant chevalier de Cocorico. Il portait une armure gravée des différents symboles d'Hyrule, ainsi qu'une grande lance. Une épée longue se tenait tranquille dans son fourreau. Ses longs cheveux blonds lâchés, il observait le groupe, un léger sourire au visage. Lagis fut confus : il aurait juré que les cheveux d'Asmelen étaient bruns et non pas d'une couleur éclatante !
Puis à ses côtés, son camarade et ancien adversaire de Link, le chevalier Daphan, qu'on appelait "le chevalier des Gorons". Daphan avait passé de nombreuses années de sa vie avec le peuple Goron, qu'il considérait comme ses frères et sœurs. Il n'avait jamais connu ses parents. Il tenait de ses deux mains une lourde épée à deux mains, mais qu'il pouvait manier avec une seule. Il portait la même armure qu'Asmelen. Ses cheveux courts et son air plus mature le différenciaient du jeune chevalier qu'était Asmelen. Ce qui choquait Link c'était comment ce Daphan pouvait être le même que le maigrelet en armure qu'il avait affronté lors du tournoi. Il soupçonnait une quelconque magie à l'œuvre, mais n'en dit mot à personne.
Sophro, le doyen du village de Taronne, se tenait assis sur une chaise. Il grattait sa longue barbe en observant ses trois jeunes pupilles. Son énorme habit vert émeraude le rendait très voyant par rapport au reste de la foule. Son bâton reposait à ses côtés.
Dans le siège royal se trouvait la princesse d'Hyrule, Zelda. Elle avait relâché la plupart de ses cheveux en arrière, laissant deux grandes mèches devant elle. Elle était vêtu de ses habits royaux, les mêmes qu'elle avait durant les épreuves finales du tournoi. Le regard qu'elle donnait au groupe était un peu plus rassurant que les autres regards portés sur eux.
Sur sa droite, un autre vieil homme, d'allure imposante, qui portait une grande cape rouge. Comme le doyen du village, il se tenait assis, fixant le groupe de ses yeux noirs. Sa barbe était moins longue que Sophro, et sa tête dégarnie brillait avec le coucher du soleil.
La championne d'Hilda se tenait à ses côtés. Un autre chevalier, et aussi celle qui était à la tête de la garde rapprochée de la princesse. Abordant fièrement sa chevelure argentée, elle tenait sa lance gravée de sa main droite. Dame Daenylla tenait de la main gauche un casque, orné d'un aigle sur la tête.
La dernière personne était une autre femme, tout aussi forte et robuste que ser Daenylla, mais elle avait des cheveux plus courts, et portait une armure plus légère. Une épée longue sur son côté gauche, et l'on pouvait voir le pommeau d'une épée courte dans le dos.

Zelda se leva, indiquant aux autres soldats et au petit groupe de se relever.
"Mes hommages, jeunes apprentis. Je suis Zelda, Princesse d'Hyrule. Permettez-moi de vous présenter, de gauche à droite, ser Asmelen, ser Daphan, à ce qu'on m'a dit deux de vos anciens adversaires... Les sages Sophro et Grantis, au service de la famille royale, ser Daenylla et dame Impa. Vous devez vous demander pourquoi je vous ai mandé de venir ici, je vais tout vous expliquer, ne vous en faites pas."
Ce qui ajouta un nouveau flot de question au groupe : ils s'étaient battus contre des chevaliers ? Et Sophro, le vieux du village, un sage ... royal ? Mais ils n'avaient pas le temps de les poser que Zelda avait déjà repris la parole :
"Je vais aller droit au but : nous vous avons fait venir ici car vous êtes des marqués de la Forêt Interdite.
Vous portez en vous trois symboles qui ont eu leur importance, il fut un temps, mais qui ne s'est jamais éteinte. Si ces symboles ont refait surface, nous devons craindre le pire. Messieurs les Sages, si vous voulez bien leur parler des symboles ...
- Si vous me le permettez, princesse, j'aimerai juste leur dire quelque chose ... Hilda, si tu veux bien..."
La jeune Taronnaise acquiesça d'un signe de la tête et se dévêtit, juste pour dévoiler son dos à ses amis. Un symbole d'oiseau ornait son dos, au grand étonnement de Link et Lagis, qui ne l'avaient jamais crus marquée. Elle remit son vêtement en place et fit un grand sourire à ses amis.
"Le jour où vous avez été marqué, Hilda est d'abord partie à votre rencontre dans les bois pour vous secourir. Hilda n'est pas une marquée au même titre que vous, puisque sa famille a pour charge de veiller sur l'équilibre du sceau dans la Forêt Interdite, et donc, a des liens avec les esprits. L'esprit de l'oiseau protecteur l'a envahie, et elle a pu vous secourir en vous localisant. Puis, bien sûr, elle est allée chercher des renforts quand elle n'en pouvait plus. Mais vous étiez déjà inconscients, à ses dires. Mais contrairement à vous, l'esprit de l'oiseau, cela fait longtemps qu'Hilda le ressentait. Il était devenu plus fréquent ces derniers temps."
Link et Lagis se regardèrent sans vraiment comprendre. Sophro reprit son histoire :
"Hilda porte donc la marque de l'oiseau légendaire, Link le symbole de la Triforce et Lagis le symbole de l'esprit du mal.
- Je le savais, laissa échapper Lagis. Tout ce qu'il me disait dans ces songes, ces crises de douleurs ... Je savais que c'était un esprit maléfique ! Maintenant, vous allez me tuer, n'est ce pas ?
- Qu'est ce que ... ? Pourquoi faire cela ?
- Parce que je suis la réincarnation du mal ?
- Daphan !
- Hé, du calme. D'accord ces jeunes sont futés pour avoir écouté une conversation qui ne les concernait pas, ensuite, Daenylla, je savais bien que tu te doutais de quelque chose. Mais nous devons éradiquer le mal avant qu'il ne frappe.
- Ce n'est pas une raison pour sacrifier la vie du jeune Lagis, fit Zelda, grondante. D'après son père, il serait capable de faire un très bon chevalier. Même s'il est atteint par le mal, je suis sûr que son cœur est pur, comme ses amis. Grantis, pouvez vous poursuivre, s'il vous plaît ?"
Daphan recula comme signe de soumission, mais Lagis le vit se mordre les lèvres. Daenylla leva sa tête pour approuver le choix de sa princesse et tenir tête au chevalier vétéran. Impa soupira et Asmelen se contenta de faire un sourire gêné. Puis le sage Grantis prit la parole.
"D'après vos dires et ce que m'a rapporté mon confrère Sophro, vous avez vu deux esprits se battre dans la Forêt Interdite. Puis, pour vous défendre, vous avez retiré l'épée de légende de son socle. La jeune demoiselle l'a ensuite remise sur ordre de l'oiseau légendaire. L'épée est le dernier sceau contre le mal qui est enfermé en dessous d'elle, mais je crains que ce sceau se soit grandement affaibli si vous avez pu la prendre. Elle est sensé réagir qu'à une seule et unique personne. Le mal ne va pas tarder à ressurgir, et il irait bien plus vite si l'épée n'était pas présente. Je pense que c'est pour cela que l'esprit du mal a cherché à s'emparer de toi, jeune Lagis. Mais, grâce à ton ami, il n'y a qu'une partie de cet être perfide en toi, et tu as été en mesure de lui résister jusqu'à maintenant.
Quant à vous, jeune Link, vous avez été envahi par l'esprit bleu, qui fut jadis la présence vivante de l'épée. Nul doute que cela fait de vous le porteur légitime de l'épée de légende. Ces deux esprits se sont battus en dépit de vos efforts, et ils se sont évaporés.
Quant à la jeune Hilda, sa famille a toujours été celle qui se devait de protéger la Forêt Interdite et l'épée de Légende. Mais elle n'était pas assez préparée à ressentir les vibrations négatives de la forêt. L'esprit maléfique a été très malin."
Si peu de temps et beaucoup d'informations assimilées ... Link et Lagis ne cachèrent plus du tout leur marque, les observant avec des grands yeux. Seule Hilda avait l'air de rester sereine face à tant de révélations, mais un peu déçue quant à la révélation du sage. Elle n'avait rien senti jusqu'au retour, et elle le regrettait.
"Que va-il se passer ? fit Lagis.
- Si tu n'as qu'une partie du mal en toi, il t'a sûrement poussé à faire des choses que tu ne voulais pas faire. Mais tu lui résistes, et nous t'en félicitons.
- Il ne fait que me rabaisser et me parler pour le moment.
- C'est bon signe s'il ne peut pas prendre possession de toi. Ganon est une créature maléfique très puissante qui nous résiste depuis des lustres. Il se peut que le reste de son âme soit encore enfermée dans la Forêt, mais pour combien de temps ? Tout le monde peut retirer l'épée apparemment.
- J'ai une hypothèse à cela, dame Impa. Il nous faudrait redonner à l'épée de légende sa puissance d'avant. Munie de toute sa puissance, elle pourra ...
- Sage Sophro, je vous l'ai déjà dit. J'ai fait de nombreux songes sur ces marques. Le retour du démon est proche, même en apportant les esprits dans la forêt pour qu'ils renforcent l'épée, il sortira de sa tanière. Dans mes songes, je vous ai vu tous les trois, fit la princesse à l'attention du groupe.
- Avons-nous au moins une chance ... ?
- Pour le moment, il sera absolument interdit de retirer l'épée de son socle, sous peine d'en fragiliser d'avantage le sceau et de laisser Ganon s'emparer de Lagis. Mais, la première chose à faire serait de faire une reconnaissance dans la Forêt Interdite, pour savoir ce qu'il en est vraiment des esprits. Jeune Hilda, toi qui peut communiquer avec l'oiseau légendaire, peut-être t'en dira-il plus que nous.
- Une minute ! fit Lagis apeuré sans se rendre compte qu'il s'adressait à un membre de la famille royale. Vous... vous pensez que ... ce Ganon ... finira par prendre mon esprit ?
- Ton cœur est fort Lagis. Mais si Ganon voit une faille en toi, il n'hésitera pas. C'est notre devoir de te protéger."
Lagis repensa à sa crise de nerfs de l'après-midi. Il frissonna : Ganon avait il profité de sa faiblesse ? Non, ses amis étaient ses piliers, avec eux, il était sûr et certain qu'il ne craignait rien. Link jeta un regard sur son ami, complètement déboussolé.
"Nous vous avons observé au tournoi aujourd'hui, dit la guerrière argentée, et nous avons déjà discuté de ce que nous allons faire de vous.
- Pitié, ne me tuez pas, fit Lagis d'une petite voix que seuls Link et Hilda purent entendre.
- Vous allez suivre l'entraînement des chevaliers. En principe, nous ne réservons cela que pour peu de personnes, mais pour vous, nous allons faire une exception."
La terreur disparut du visage de Lagis pour montrer une expression qui se rapprochait d'une poule ayant soif. Link avait les yeux aussi ouverts qu'une chouette, et Hilda, qui avait toujours gardé la tête baissée, la releva d'un trait.
"Comme vous l'a dit la princesse, le mal risque de se réveiller, et il faut que vous soyez prêts pour ce moment. Nous allons vous former, et vous rendre plus résistant contre la menace, les marqués. Une fois le jour venu, j'espère que nous pourrons enfouir le mal définitivement.
- Par contre, reprit Impa, le mal de la forêt n'attend pas et nous devons le surveiller, le plus tôt possible. Nous allons commencer les surveillances dès demain.
- Avez-vous d'autres questions, jeunes apprentis ?"
Puisqu'ils étaient tous au courant, l'idée vint à Link de parler de tous les songes qu'il avait pu faire depuis l'apparition de la marque et Lagis fit de même. Les sages et la princesse froncèrent les sourcils : l'esprit protecteur de l'épée avait bien implanté quelques-uns de ses fragments en Link, mais il n'avait pas survécu, d'après eux, d'où la phrase de la résurrection. L'ombre aux yeux orangés n'était que la représentation de Ganon selon les songes de Link et Lagis pour les Sages, mais la princesse trouva que quelque chose n'allait pas. Néanmoins, elle s'abstenait de le dire aux autres. Et quand à la dame du songe de Link, Zelda émit un grand sourire en disant avoir fait son office.
Daphan avait été le seul à s'opposer à l'idée d'intégrer les trois jeunes dans l'école de chevalerie, mais Daenylla n'avait que faire de ses conseils. Il était un excellent guerrier, mais il était buté quand il s'agissait de justice ou de droiture. Tuer Lagis ne pouvait être qu'une idée de lui, et son fils, Asmelen ne trouvait rien à redire. C'était un chevalier, pardi ! Rien à voir avec les confrontations qu'elle pouvait avoir avec sa mère, Impa. Asmelen ne voulait rien dire en particulier et se contentait d'obéir aux ordres de sa supérieure, Daenylla. Cela ne faisait que deux ans qu'il était chevalier, même s'il avait été honoré de la mission que lui avait donné personnellement son père - sous prétexte que c'était pour Sa Majesté - il n'y trouvait rien à redire. Il conduisit le groupe dans les quartiers des apprentis chevaliers, leur indiquant une chambre pour quatre, la seule disponible en attendant la cérémonie officielle des vainqueurs demain et leur placement dans des chambres plus décentes.
Hilda fut la seconde personne à être bombardée de questions, après Asmelen, qui décidemment persistait à garder son calme. Sa famille avait toujours été celle qui pouvait communiquer avec les esprits, et c'était pour cela que Sophro et eux s'étaient établis dans le village de Taronne, le plus proche de la forêt Interdite. Elle l'avait toujours su, mais n'y avait jamais fait attention jusqu'à ces derniers mois.
Lagis jura de ne se laisser jamais avoir par la marque et de lui fermer son esprit, tant qu'il le pouvait.
En regardant la tête de ses amis, il ne put s'empêcher de dire :
"Nous allons être chevaliers, mais j'ai l'impression que ce n'est qu'une façade pour cacher quelque chose de plus grave. Ces marques, à part faire de nous, le porteur du mal, le porteur de l'épée sacrée et le messager des esprits, elles ont autres choses.
- Ils veulent nous surveiller, c'est évident, répliqua Link. Mais nous rendre plus fort...
- Voyons, d'après eux, Link, tu devras porter l'épée de légende, donc il faut que tu te montres digne de la manier... Moi, je dois communiquer avec esprits, si comme le pensait maître Sophro, il faut redonner son blason à l'épée, il nous faudra nous rendre dans ces coins sacrés où reposent les esprits protecteurs... Quand à toi, Lagis, je me demande si ce n'est pas à double tranchant, ta marque...
- Comment ça ?
- Je me demande ... si tu peux utiliser les pouvoirs du mal pour ton propre usage. Mais j'ai peur qu'il n'en profite pour prendre possession de toi.
- Oh, je ne le ferai jamais. Le mal n'aura pas d'emprise sur moi, je vous le dis !
- Nous l'espérons tous, Lagis. Jamais nous ne te laisserons entre les mains de ser Daphan !
- Oh ! Lui ! Tout ce qu'il voulait, c'était ma mort ! Comme si ça résoudrait quelque chose ! Le gros de l'iceberg Ganon est toujours bien endormi sous l'épée, s'il croit qu'en coupant une branche il va tuer un arbre, il se trompe !
- Changeons de sujet, fit Link qui en avait mal à la tête. Nous allons devenir chevalier. C'est bien une compensation en échange de cette triste journée. Cela aura été la seule action bénéfique de ces marques pour moi."
Lagis et Hilda éclatèrent de rire. La seule et unique satisfaction de la journée, en effet, car une question avait libéré encore plus de questions, et les réponses partaient en hypothèses plus ou moins fondées. En réalité, les trois jeunes étaient tous dans le flou total. Asmelen croisa la route de Daenylla, elle l'invita d'un geste simple à le suivre.
"Tu as bien suivi les ordres ?
- Répondre à aucune de leurs questions. Pourquoi, d'ailleurs ?
- Hum, tu n'as pas saisi ? Si Lagis est le marqué de Ganon et qu'il lui fait des commentaires en songes ou directement, il est fort possible que Ganon ait été au courant de la conversation d'aujourd'hui. Nous devions leur montrer des façades, mais des façades solides.
- Avec ce qu'il a dit, il n'y a aucun doute à ce qu'il soit le marqué de Ganon. Quel est donc le vrai plan ?
- Nous allons les former du mieux et du plus rapidement que nous pouvons. Les Sages vont s'occuper de localiser les esprits avec les parents de dame Hilda, avec un petit crochet vers la Forêt Interdite. Nous devons savoir réellement ce qu'il s'est passé ce jour la. Et...
- Et ?
- Asmelen. Surveille ton père.
- Il ne trahira jamais la famille royale. Ne t'en fais pas.
- Ton optimisme... Bref, oublie ce que je viens de dire. Bonne nuit, chevalier.
- Bonne nuit, ma Dame."
Sa chevelure argentée disparut dans les ténèbres.
"Mon père a prêté serment. Il ne peut trahir la famille royale."
Il se retira dans ses quartiers et s'allongea sur son lit. Les paroles de sa cheffe l'empêchèrent de trouver le sommeil.
"Cela fait presque deux mois que j'ai l'impression que mon père n'agit que pour son propre intérêt. Presque deux mois que j'agis en agent double. Lagis, si tu veux m'affronter un jour, tâche de rester en vie. Ton avenir s'assombrit de jour en jour."

Chapitre 7 : Révélations et trahisons   up

"Vous devez faire face à vos ennemis et ne pas laisser la peur prendre le dessus sur vous."
Daenylla supervisait l'entraînement des jeunes recrues comme elle le pratiquait depuis cinq ans. La princesse Zelda lui avait tenu de garder un œil sur les trois marqués, que Daphan avait méchamment surnommés les Marquarins. Des trois, Lagis était celui qui faisait le plus d'efforts : d'une part lancé par l'euphorie du monde de la chevalerie, d'autre part pour chasser ou repousser au maximum le spectre de Ganon qui plane sur lui. Il n'avait aucune envie de devenir la marionnette de l'être maléfique. Link et Hilda suivaient avec un autre type de fougue. Mais en ces trois recrues, Daenylla y voyait des éléments prometteurs.
Link était rapide et agile. Il arrivait à bien se débrouiller avec une épée ou un arc, mais il manquait d'analyse et de force. Non pas qu'il se précipitait sur sa cible comme un fou, mais qu'il laissait passer des chances par faute de réflexion plus poussée.
Hilda avait un grand esprit d'analyse et une volonté tenace qui se lisait dans ses yeux. Elle était plus douée avec les épées, rechignant tout type d'arme à distance. Sa faiblesse n'était pas la force physique, mais son endurance. Elle se donnait à fond trop rapidement pour terrasser l'adversaire promptement, et la dame s'étonna que ce soit la faille de son grand esprit analytique.
Lagis ne jurait pas que par la force, même s'il était plus costaud que Link - cela se ressentait aux coups d'épées - il avait un autre atout en lui. Défense et endurance, deux mots qui le caractériseraient, si bien qu'il pouvait arriver à Daenylla de rêver d'un combat entre Hilda et Lagis. Le jeune homme était courageux, mais son mental était sa grande faiblesse. Il était possible de gagner un combat sans sortir l'épée du fourreau tant il était impulsif. Sa colère - et la marque qu'il portait - restait à surveiller. Néanmoins, si Ganon ne l'a jamais emporté sur lui, c'est bien grâce à son auto-flatterie, souvent alimentée par ses amis. Il ne se passait pas un seul jour sans que la jeune guerrière ne puisse entendre la joie du jeune Taronnais à ses études de chevalerie.
La journée était divisée en deux parties : la matinée servait aux cours et leçons sur diverses choses comme la droiture ou l'inventaire des armes, l'après-midi servait à un entraînement intensif. Quatre à cinq heures de combat, défense, lutte et affinement des techniques sous l'œil attentif de Daenylla et d'Asmelen.
"Ils évoluent vite ces jeunes loups," fit Asmelen, dos au mur.
"Cela fait une semaine que je les forme," répondit Daenylla sans jeter son regard sur lui.

"Votre Majesté ! Je vous le dis et je vous le répètex Laissez ce jeune homme se renforcer alors qu'il est une possession de Ganon, c'est pure foliex
- Il n'est pas une POSSESSION de Ganon, il a été MARQUE par celui-ci c'est différentx Vous vous permettez déjà d'interférer dans le tournoi en vous y inscrivant avec votre fils et en modifiant les phases éliminatoires à votre gré, vous avez proféré des menaces de mort envers un homme INNOCENT, estimez-vous encore heureux que je ne vous retire pas vos titres, ser Daphanx!!
- Il y a du bon et de la volonté de faire face à Ganon dans ce jeune homme. Je suis sûr que Lagis écoutera son cœur à la voie des ténèbres. Et puis, il reste un membre de mon village, ser Daphan, vous n'avez aucun droit sur luix
- N'allez pas me dire que je ne vous aurais pas prévenu quand le glas s'abattra sur nousx Par la main de ce... marquéx
- SER DAPHAN ! hurla la princesse. Puisque vous le prenez comme ça, vous irez dès demain à la Forêt Interdite analyser les lieux. Vous serez sous les ordres de Dame Impa, et le sage du village de Taronne, Sophro, viendra avec vous, ainsi qu'une troupe de dix hommes. Sous les ordres de Dame Impa. Asmelen et Daenylla vont superviser l'entraînement des jeunes recrues. Ce sera tout pour ce soir, vous pouvez disposer."
Daphan s'inclina puis quitta la salle en colère, outré par la décision de la princesse. Il était chevalier, et bien plus âgé que les autres présents dans la piècex Pourquoi devait-il être encore sous les ordres de cette stupide femme ? Il n'avait jamais apprécié Dame Impa à cause de leurs caractères. Et voilà que la princesse le lui infligeaitx Asmelen traînant derrière lui, il retourna dans ses quartiers.
"Père, fit Asmelen d'une voix timide.
- Qu'y a-t-il ?
- Vous auriez préféré encadrer l'entraînement des marqués ?
- Ne dis pas de bêtises ! hurla son père. Je n'ai que faire de ces... Marquarins. La sécurité du royaume passe après le sort de ces parasitesx
- Il n'empêche que seul le jeune Lagis soit porteur de la mauvaise marque. Les deux autres...
- Les deux autres sont ses amis, et pour éradiquer le mal, il faudra faire bien plus de sacrifices que prévu. Maintenant qu'ils savent que j'avais prévu de tuer le tatoué maléfique, ils vont se méfier de moi ! Sale peste de Daenylla ! Asmelen, la charge t'en revient.
- Quoi ?
- Tu m'as bien entendu, fils. Avant que ce Marquarin ne prenne trop de puissance qui fasse jouir Ganon, c'est à toi qu'il revient de l'achever. Vu que la princesse t'a placé à leur entraînement, tu pourras camoufler ça par une boutade de débutant ou un accident. Cela arrive des fois. N'oublie pas que l'avenir du royaume est en jeu. Deux siècles auparavant, il y avait la Déesse et son destrier légendaire, et l'épée de légende était au sommet de sa puissance pour contrer Ganon. Aujourd'hui, nous risquons de le combattre avec un reliquat d'épée, une divinité évaporée et une shaman qui peine à percer la voie des esprits. On ne peut prendre ce risque. Tu dois tuer ce diablotin."
Asmelen baissa la tête, puis retourna dans sa chambre.
Les paroles de son père restèrent en travers de sa gorge. Asmelen était certes un chevalier voué à la protection du royaume et de la famille royale, mais il n'avait jamais tué quelqu'un. Sa première victime devait être Lagis. Lagis, qu'il accompagna à sa nouvelle demeure après avoir parlé à son père, avec ses deux amis. Il fut silencieux pendant toute la traversée.

"Impa, ma chère, désolée de te l'infliger mais j'ai besoin que quelqu'un surveille Daphan pendant que je reste ici. Père est parti juste après les phases finales du tournoi et il ne reviendra pas de son voyage de sitôt, c'est donc à moi que revient d'assurer le commandement du royaume.
- Soyez tranquille, princesse. Nous le surveillons... je prendrai quelques fidèles soldats avec moi.
- Merci d'avoir éloigné Daphan, Majesté.
- Daenylla, comment saviez-vous que Daphan allait...
- Je n'en savais rien, Votre Majesté. Quand vous m'aviez donné l'ordre d'aller chercher les deux chevaliers, je les ai cherchés dans leurs quartiers mais ils n'y étaient pas. Je me suis donc promenée du côté de l'arène, où ils étaient en train de discuter. Ce n'est que pure hypothèse des bribes de conversation que j'ai pu entendre, mais je suis certaine que Daphan y est pour quelque chose.
- Et il ne l'a pas nié, fit la princesse en soupirant. Quand tu auras un moment, questionne les trois séparément. Il y en a forcément un qui a surpris la conversation entre Daphan et son fils.
- Ne serait-il pas préférable d'écarter Asmelen de l'entraînement alors ?
- Asmelen est un agneau comparé à son père !
- Daenylla ! Calme-toi ma fille ! Il reste quand même sous le toit de Daphan. Nous ne savons pas si nous pouvons nous fier à lui.
- Il faut prendre le risque, répondit Zelda. Mais Asmelen n'est pas un mauvais homme. Il est partagé entre sa famille et ses devoirs, comme une partie de mes chevaliers. Prends-le sous ton aile protectrice, Daenylla, et pose ton regard d'aigle sur lui.
- Bien, Votre Majesté."
Une courte révérence et la jeune femme aux cheveux argentés partit dans ses quartiers.
Elle avait ralenti le pas, juste suffisamment pour voir Asmelen revenir de l'école de chevalerie.
Surveille ton père Asmelen.
C'était la seule chose pertinente qu'elle trouva à dire. Il devait se décider, entre sa famille et son devoir. Pour la jeune femme, il était clair que Daphan déviait de ses principes de chevalier : où était passée la défense de la veuve et de l'orphelin quand il parlait d'assassiner un jeune homme qui n'avait encore rien fait ? Il n'était pas Ganon et avait la forte volonté de lutter contre lui. Elle non plus, elle ne savait plus sur quel pied danser. Dans quel camp s'était placé Asmelen. Elle avait du mal à s'imaginer qu'il agissait de son propre chef, mais son père avait toujours été l'homme qui le cachait.
"Que dois-je faire ?"

Lagis finit par transformer le pantin de paille en un tas plus inoffensif, à force de coup d'estoc et d'apprentissage de nouvelles parades. Il se tourna vers un garde pour savoir s'il pouvait en apporter un autre, mais il refusa. Le pauvre Taronnais était en sueur : son haut blanc était trempé. Il le retira et s'assit au sol, observant ses deux amis à l'apprentissage d'autres techniques.
"Il évolue bien, n'est-ce pas ?
- Je vois que Lagis t'intéresse beaucoup, Asmelen. Puis-je savoir pourquoi ?
- Daenylla ! C'est un bretteur d'exception. J'ai croisé le fer dans l'arène avec lui, je sais de quoi je parle.
- J'avais... oublié, excuse-moi Asmelen.
- Je t'en prie. Tout le monde est sous pression en ce moment.
- Et toi, tu restes calme, comme d'habitude."
Asmelen ne fit pas attention à la remarque. Il cachait bien son stress. Après tout, il devait s'occuper de Lagis... mais il n'en trouvait pas encore l'occasion.

Impa était sur place. La forêt avait toujours son aspect dense et froid, depuis la dernière fois où elle y avait mis les pieds. Ils regardèrent l'épée sans descendre de la falaise : elle était toujours présente, sur son socle, sans les racines qui l'entouraient auparavant. Sophro s'approcha avec la mère d'Hilda pour analyser le sceau, malgré les distances. Daphan et les autres gardes se tenaient en retrait, méfiants.
Sophro revint avec la dame en faisant part de leurs conclusions vis-à-vis du sceau : il était alarmant. Ils avaient ressenti la haine de Ganon, et ils se demandaient comment le bout de ferraille désenchanté pouvait tenir face à tant de pouvoir maléfique qui surgissait. Impa voulut rentrer de suite, mais Daphan simula la fatigue pour les retenir une nuit supplémentaire à Taronne. Déjà qu'il n'aimait pas être sous ses ordres, il fallait en plus qu'elle fatigue tout le monde ! Décidément incorrigible, à se demander comment sa fille, une sauvage de son rang, ait pu accéder au rang chevaleresque. La décision d'Impa fut influencée par Sophro qui ne pouvait pas tenir aussi bien la route que les autres. Ils retournèrent à Taronne en fin de matinée.
Sophro restait soucieux. Quand il était parti à la recherche des deux disparus avec une partie de son village il y a deux mois, il n'avait pas senti l'influence aussi grande. La mère d'Hilda, avec qui il discutait, approuva son choix. En deux mois, le pouvoir de Ganon pouvait-il affluer de la sorte aussi vite ? Et malgré sa grandeur, comment se fait-il que l'épée - presque vide de ses pouvoirs - puisse encore lui tenir tête ? Il attendit que les chevaliers soient couchés pour inviter les parents d'Hilda ainsi que le père de Lagis à les accompagner au cœur de la forêt.
"C'est de la folie, répliqua calmement Ghilham. Vous aviez déjà vérifié l'état de la protection ce jour même, pourquoi croyez-vous que quelque chose influe sur celui-ci ?
- N'importe qui peut prendre l'épée de légende alors qu'elle n'est sensée obéir qu'à une seule personne. Le sceau est gravement atteint, et si Ganon devait sortir ce serait maintenant. Non, quelque chose ne va pas. Je dois revérifier avant de partir pour le château, demain."
Et Sophro eut la réponse qu'il attendait.
Tout était calme dans la Forêt Interdite, et l'influence de Ganon se sentait beaucoup moins que ce matin.
Les parents d'Hilda tentèrent d'entrer en communication avec les esprits, quand l'un d'entre eux hurla :
"Derrière vous !!!"
Le père se retourna et sa vision s'obscurcit. La mère recula, effrayée par le sang de son mari sur ses mains et sa robe. Ghilham s'interposa entre l'ombre et la mère, mais ce dernier fut trop puissant. Il administra au maître d'armes un coup aux côtes qui le fit vaciller, puis trancha son bras droit. Sophro lança une boule de glace en direction de l'ennemi, mais la boule s'évapora aussi vite qu'elle était venue. Il recula, stupéfait, pour lancer un autre sort, qui échoua comme le premier.
"Vile créature démoniaque ! Es-tu à la solde de Ganon ?"
La créature ne répondit pas. Elle jeta un sort au sage qui l'empêchait de se mouvoir. Le pauvre ne put qu'assister à la disparition de ses amis : un à un, l'ombre les achevait. Puis il apparut à la lumière, son visage juste en face de celui de Sophro.
"Toi ! Ce... ce n'est pas possible... !
- Mais si voyons, vous l'aviez prévu, alors c'est que c'est possible. C'est dommage de vous tuer, mais je vous trouverai un rôle bien plus approprié dans mon monde.
- Non ! hurla Sophro."
L'épée lui transperça le corps. Jusqu'à son dernier souffle, Sophro fixa le regard de son adversaire. La besogne faite, l'inconnu sortit l'épée de son socle.

Un hurlement tira Link de son sommeil.
Lagis hurlait comme un fou, se tortillant de douleur en se tenant la main droite. Link et Hilda se mirent tout de suite à son chevet, sans savoir comment le calmer. Les hurlements eurent tôt fait de réveiller l'école, ainsi qu'Asmelen et Daenylla. Pendant que l'un cherchait à contenir la foule, l'autre s'enferma dans l'infirmerie avec ses amis. La douleur fit pleurer Lagis, des sueurs froides dégoulinant de ses cheveux noirs à son torse. Ses yeux étaient en train de le brûler. La marque n'avait jamais autant brillé.
Rien ne fut suffisant pour calmer sa douleur et ses hurlements. Asmelen et Daenylla entrèrent dans la chambre, tentant de calmer le jeune homme avec les moyens qu'ils purent, mais aucun ne fut efficace.
La souffrance s'évapora aussi vite qu'elle était venue et la marque cessa de briller. Lagis cessa de bouger et l'on n'entendit plus que sa respiration dans la pièce. Hilda fut la première à réagir et à le secouer vivement pour le sortir de sa léthargie :
"Lagis ! LAGIS ! hurla Hilda. Tu vas bien ?
- Hi... Hilda ? Qu'est-ce que... Oh, par la déesse ! Il exerçait une telle pression sur ma main, et puis il avait tenu mon cou, en me disant qu'il venait me chercher ! Il... s'est mis à rire et puis il s'est complètement matérialisé devant moi ! Ce n'était plus une ombre, c'était... c'était...
- C'était quoi ? Ou c'était qui ? fit Daenylla sous alerte.
- C'était un homme, habillé d'une tunique noire, des yeux orange avec des cheveux décolorés, qui varient du noir au blond. Il ressemble plus à moi qu'à Link. Et son poignet droit était marqué d'un bracelet de losange... Il vient me chercher !
- Quelle description précise...
- Asmelen ! Ce n'est pas le moment ! Il faut prévenir la princesse Zelda !
- J'y cours !"
Il prit une arme au passage et courut en direction des quartiers royaux.
Daenylla prit un tissu pour éponger le front de Lagis, qui se remettait doucement de ses émotions. Link craignait le pire : la résurrection du mal... Ne l'avait-on pas prévenu en songe à ce sujet ? Mais il avait encore peur de quelque chose : la représentation de l'entité maléfique que Lagis venait juste de voir. Il ne voulait pas que son ami - ou lui-même - soit la possession d'une telle chose. Hilda était encore tremblante, comme si le cri de Lagis lui avait transpercé les oreilles.
Daenylla prit place aux côtés de Lagis et baissa la tête.
"Pendant un moment j'ai eu la chair de poule, comme si l'on déchirait quelque chose en moi. Ce cri était vraiment terrifiant, Lagis. Fais voir ta marque... Oh, elle a l'air bien plus, euh, présent que les autres fois où je l'ai vue... Je n'aime pas cela du tout ! Oh, allez bon tant pis ! Prenez vos affaires ! Nous allons voir la princesse. C'est un sage de la Déesse après tout."
Ils ne discutèrent pas et s'habillèrent pour aller à la rencontre de la princesse. Durant leur traversée dans le jardin externe menant au château, Hilda tourna la tête vers la forêt Interdite. Encore une fois, elle fronça les sourcils : les yeux verts de la chère demoiselle avaient viré au bleu ciel, comme ceux de Link.
Ils trouvèrent Asmelen au pied de l'escalier, les priant de venir dans la chambre royale.

Zelda était assise sur son bureau, le visage en sueur. La nouvelle ne l'avait pas rassurée.
"J'ai fait un songe dans lequel le mal avait envahi le royaume et y dévorait toute la vie. Et puis, cherchant une issue dans ce mal, ma voix a résonné avec celle d'une vive lumière. Au départ, je ne voyais qu'une grande colonne qui dispersait le mal, mais quand je suis entrée dans la lumière, j'y ai vu un homme sur un grand oiseau, qui me recouvrait de son ombre. Cet homme, dont je ne voyais pas la tête, m'invita à le voir à travers un miroir ... Et là j'avais trois jeunes personnes marquées, mais unies comme un seul cœur."
Link, Hilda et Lagis se regardèrent.
"Il ne fait aucun doute que ce soit vous. J'en suis persuadée. Et ce soir, j'ai senti comme une dague qui s'enfonçait dans mon cœur. J'ai bien peur... qu'il ne soit de retour. Pour de bon.
- Il est libre, fit Hilda d'une voix bien plus masculine qu'à l'ordinaire."
Elle n'avait pas quitté les yeux de la fenêtre, montrant une pluie battante qui venait de se déclarer.
"Je l'ai ressenti aussi et je suis venu vous prévenir. Ganon est libre et l'épée de légende n'est plus que pacotille. Nous devons à tout prix restaurer son pouvoir et l'anéantir tant qu'il n'a pas tous ses pouvoirs.
- Tant qu'il n'a pas tous ses pouvoirs ? Mais Hilda... comment... ?
- Il s'est divisé. Il n'y a pas un Ganon, mais plusieurs fragments dans le monde. Lagis en est l'un d'eux. Mais il résiste, alors que tous les autres ont succombé. Je n'en sais pas plus, j'analyse juste ce que mes sens disent. Il faut rassembler les fragments de l'épée. Jeune héros, je vais t'aider. Je suis Hylios, l'esprit protecteur du royaume et de sa relique."
Hilda tituba un peu avant de reprendre le contrôle de son corps. Zelda ferma les yeux : le mal avait une grande longueur d'avance sur elle. Il s'agissait de savoir combien de fragments maléfiques étaient éparpillés dans Hyrule et comment les reconnaître. Il restait une question en suspens :
"Mais comment a-t-il pu se diviser, dans sa prison ? Il a dit que Lagis était l'un d'eux, mais les autres ?
- C'est... une bonne question, Asmelen, fit Daenylla en soutenant Hilda.
- J'ai... j'ai touché l'épée, dit Lagis qui tentait de comprendre la situation.
- Mais je l'ai touchée également, et j'ai été marqué d'une autre manière...
- C'est parce que tu es le héros ! C'est Hil... euh Hylios, qui te l'a dit !
- Hylios, l'oiseau légendaire de la Déesse, que chevaucha le Héros quand il fut appelé. Son fidèle et éternel compagnon. Je comprends mieux à présent.
- Expliquez-nous, princesse, nous sommes dans le brouillard, fit Daenylla déconcertée."
Elle se leva en détachant ses cheveux : vêtue d'une robe blanche éclatante, elle montra son dos à ses interlocuteurs.
"Je suis la descendante de l'avatar humain de la Déesse Hylia. Dans la famille royale, toutes les personnes de sexe féminin ont des liens plus particuliers avec notre Déesse, d'où notre statut de Sage. Etant donné que je suis la seule, je suis le Sage de la Déesse. Il y a plus de deux cents ans de cela, mes ancêtres ont combattu le mal, avec Hylios et le Héros, et l'ont confiné dans la Forêt Interdite. Au cours de cette guerre, Hylios périt en scellant Ganon. Mais son esprit a persisté à travers les siècles, et le voilà devant nous. D'où la marque sur le dos d'Hilda.
Hylios nous a informés que Ganon s'est... dispersé en plusieurs fragments dans le monde. Nul doute qu'il va tenter de récupérer sa force initiale. Link et Lagis ont tous deux touché l'épée, et pourtant il n'y a que Lagis qui a été affecté. Tout est clair pour moi à présent : il y a longtemps que Ganon a bougé alors que nous étions là à ne rien penser. Il a dû user de la même stratégie pour attirer des gens dans la Forêt Interdite pour toucher l'épée, ne serait-ce qu'un moment... Une fois près de l'épée, il a forcé la prise, pouvant appliquer sa marque sur les pauvres touchés. D'où la marque de Lagis.
Mais, toi Link, tu aurais dû être marqué, comme Lagis, non ? Quelque chose t'a sauvé : l'épée, même avec une goutte de puissance, elle t'a reconnu. Son légitime propriétaire, descendant du Héros qui nous a jadis sauvés. D'où la marque que tu as sur la main gauche.
Cependant, Hylios nous a prévenus : tous les œufs que le mal a implantés sur terre ont éclos, et dans le lot, il y a un vilain petit canard qui répond au nom de Lagis. Sinon, tu ne serais pas dans le cercle de lumière de mon songe. Il n'y a plus aucun doute sur mes hypothèses : j'attendrai avec inquiétude le retour de mes chevaliers de la Forêt Interdite."
Lagis fronça les sourcils : même étant maudit, il pouvait faire quelque chose pour son monde.
Link se leva, le poing déterminé.
"Princesse, si le mal est venu, nous nous devons d'agir. Nous devons peut-être nous mettre en route et...
- Non, il faut que je m'assure de quelque chose.
- Daphan ?
- Oui, Daenylla. Pardonne-moi, Asmelen, mais je dois m'assurer de la loyauté de ton père quant à notre égard.
- Je comprends, Votre Majesté.
Retournez tous dans vos quartiers. J'informerai Daenylla de la route à suivre très prochainement."

Deux jours après la nuit mouvementée du château, le groupe de chevaliers mené par Dame Impa revint à la citadelle. Zelda les observa entrer par la fenêtre : le compte y était. Tout le monde était présent, même le sage Sophro. Mauvais augure, pensa-t-elle, quand elle avait proposé au sage de rester dans son village si le sceau était intact. Elle descendit de ses quartiers pour rejoindre la salle royale : un garde l'intercepta. Dame Impa demandait audience et cela ne l'étonnait pas. Deux jours d'angoisse qui allaient être terminés... ou confirmés.
Elle prit place sur son fauteuil royal, lorgnant d'un œil ser Daphan. Ils s'inclinèrent tous à la vue de la princesse, puis Impa se releva.
"Nous avons tous étudié le sceau. D'après maître Sophro, l'affaiblissement est déjà très grand. Si n'importe qui peut soutirer l'épée, c'est très dangereux pour nous.
- L'onde maléfique abonde dans la Forêt Interdite, Votre Majesté. Il n'est plus permis de s'en approcher. J'ai personnellement dit aux Taronnais de ne pas y mettre les pieds. Mais nous devons agir vite.
- Il se peut que le jeune Lagis soit de plus en plus possédé par ce monstre, répliqua Daphan. L'avez-vous au moins surveillé ?
- Il va très bien et poursuit son entraînement Je vous ai déjà dit que je ne comptais pas le tuer, ser.
- Majesté, peut-être faut-il réviser votre décision."
Zelda fut étonnée d'entendre cela de la part du sage. Il s'inclina encore plus grandement, puis expliqua sa réponse :
"Pour un Sage comme moi, je trouve l'influence écrasante déjà. Comment pourrons-nous entrer pour y restaurer les pouvoirs de l'épée ? Il nous faudrait les sages et les esprits, le temps de les rassembler, il se peut que nous ne puissions plus contrôler le jeune Lagis... Aussi douloureux soit-il pour moi, mais je connais ce jeune homme. Il ne voudrait pas être le pantin du mal. Si vous le permettez, j'en discuterai avec lui. Ce n'est pas une décision à prendre à la légère, je le sais."
La princesse observa le groupe : ils avaient tous les yeux rivés sur le sol, inclinés. On ne voyait même plus la barbe de Sophro tant il était incliné. Daphan avait relevé un sourcil à l'annonce du sage, aussi bien qu'Impa mais avec une expression différente. Daphan était surpris, Impa inquiète. Mais son inquiétude était inscrite sur son visage depuis le début.
"J'y réfléchirai. Veuillez disposer. Tous."
Quelque chose n'allait pas.

Plus tard dans la journée, Zelda convoqua discrètement Impa dans ses quartiers privés pour avoir sa version des faits. Son inquiétude n'était pas une façade. Sophro était certes un très grand sage renommé d'Hyrule, mais Impa l'était aussi, malgré ses apparences de guerrière. La sensation maléfique était énorme quand ils étaient passés, elle le confirmait mais elle jugeait que l'épée pouvait encore tenir le coup, le temps de faire les préparatifs pour la renforcer. D'ailleurs, du jour au lendemain, maître Ghilham avait été froid envers elle et Sophro adressait plus la parole à Daphan qu'à elle-même. Après l'audience de ce matin, le sage était parti avec Daphan dans ses quartiers, sans même dire un bonjour aux autres sages comme il le faisait par habitude.
Zelda fit part au sage des évènements d'il y a deux jours : l'immense douleur de Lagis, son songe, et les révélations d'Hylios à travers Hilda. Impa avait senti le même frisson il y a deux jours. La princesse pria Impa d'avertir sa fille quant aux directives à prendre : une surveillance renforcée des trois marqués. Et de garder un œil sur Daphan et son fils.
De son côté, ser Daphan était surpris. Surpris de la réaction de Sophro dans le dialogue royal.
Il entra dans ses quartiers et s'enferma dedans. Il eut la surprise de voir Sophro tranquillement installé dans son bureau. Il ferma promptement la porte à clé et s'inclina, la tête bien en direction du sol.
"Que penses-tu de ma prestation auprès de notre chère princesse ?
- Vous risquez un grand jeu, maître.
- Je ne risque rien. La petite ne sait même pas qu'elle est en échec. Tu devrais éviter de me sous-estimer, Daphan. Qu'en est-il de notre petit Lagis ?
- Il est toujours en vie. Sauf votre respect, maître, je ne vois pas pourquoi vous persistez à le laisser en vie. Il va nous nuire ! S'il ne s'est pas soumis dès qu'il a retiré l'épée...
- Il est avec le Héros. Je l'ai senti quand j'ai tenté de le posséder : il m'a rejeté avec une telle force, alors qu'il n'est même pas initié. Je le veux pour pister le Héros et le tuer quand l'occasion se présentera. Daphan, ne change rien à tes règles : il est plus facile de persuader Lagis quand son cœur est rempli de haine. Qu'il continue à croire que le monde lui en veut, et il viendra naturellement à moi.
- Bien Maître.
- Quant à moi, il est temps que mes pouvoirs me reviennent... intégralement."
Daphan se releva : devant lui se tenait un jeune homme de la même carrure que Lagis, avec des cheveux allant du noir au blond et des yeux orange. Dans l'une de ses mains se tenait une petite poupée à l'effigie du sage Sophro. Derrière la porte se trouvait Asmelen, qui voulait demander quelque chose à son père. Il n'avait pas tout entendu de la conversation, mais les derniers mots lui firent craindre le pire. La porte fermée à clé, il fit promptement demi-tour.
C'était sans compter sur la main énergétique de Daphan qui le brutalisa : il se raidit. Quand il se retourna, son père lui afficha un simple sourire. Asmelen tenta de cacher sa peur grandissante face à son père, se demandant s'il n'était pas derrière la porte non plus, prêt à ouvrir.
"Asmelen, mon fils ! T'es-tu occupé de Lagis ?
- Pardonnez-moi, Père... Je le ferai quand l'occasion se présentera. Pour le moment, tout le monde est en trouble, dans le château. Nous devons être prudents.
- Bien, mon fils. N'oublie pas de me faire ton rapport sur ce qu'il s'est passé pendant que je n'étais pas présent.
- Les Marquarins s'entraînent et évoluent de jour en jour. Lagis a fait un cauchemar pendant que vous étiez absent. Je pense que l'influence maléfique doit s'étendre en lui.
- C'est pour cela qu'il faut faire vite."
Daphan tourna les talons, puis Asmelen se rendit dans ses quartiers. Il avait le cœur qui s'emballait.
"Mon père... et Sophro sont des ennemis ?"

Chapitre 8 : La libération de Nephelim   up

Il ne voulait pas attendre, mais il se devait d'avoir un comportement normal. Sophro était un sage puissant et le doute s'installerait en eux s'ils le voyaient quitter ses quartiers en pleine nuit. Le fils avait assuré à son père qu'il ferait croire la mort de Lagis à un accident, pas à un assassinat dont on connaissait déjà les coupables. Et pourtant, il voulait la voir. La nuit lui parut interminable. Et c'est pendant ce jour qu'il attendait tant que tout bascula.

Lagis fit la moue : il savait que la troupe de Dame Impa était rentrée. Heureux que tous aillent bien, sauf Daphan. Il aurait aimé ne plus le voir, mais il était toujours ici, présent, avec la menace qu'il constituait. Par chance, il ne l'avait pas encore croisé de la journée. En allant vers la salle du repas, il croisa un Asmelen épuisé.
"Mal dormi, l'ami ?"
Asmelen sortit de sa torpeur matinale et des tourments de la nuit.
"Oh, bonjour Lagis. Comment allez-vous ?
- Bien, mais toi, ce n'est pas la grande forme.
- J'ai peu dormi. Un songe atroce, mais qui n'a rien à voir avec vos songes remplis d'énigmes. Tu n'as pas fait d'autres rêves à part ça ?
- Non. Dis-moi, ton père aussi est bien rentré, j'imagine...
- Lagis, arrête. Je... sais qu'aucun d'entre vous n'aime mon père. Il est froid et brutal, mais pense le faire pour le bien d'Hyurle. Ma parole n'est que vent face à la sienne. Mais tu es couvert par la royauté. Il ne t'arrivera rien, mon ami.
- J'espère bien ! fit-il en se dirigeant dans la salle."
Asmelen le laissa partir et fila en direction des quartiers de Daenylla. Il se stoppa.
Sa mère était avec elle. Ce n'était pas le moment de passer.
Assise sur la branche d'un arbre, Hilda l'observa, un sourire aux lèvres. Ses yeux bleus s'illuminèrent.
"De quel côté vas-tu passer, Asmelen, fils de Daphan ?"

Link était occupé avec la Princesse et son autre sage. Ils s'étaient concertés pour donner un rapport de la situation au jeune héros, comme quoi quelque chose clochait entre les dires de Sophro et ceux d'Impa. Avant de partir rejoindre ses amis, Zelda retint Link par la main, l'invitant à rester un peu plus longtemps dans son bureau.
"Link, au cas où... vous devriez vous enfuir avec Lagis et Hilda, il y a un passage secret dans le jardin juste avant l'allée menant à l'école de chevalerie. Il vous conduira hors du bourg d'Hyrule. Prends avec toi cette carte et... ceci. Cette harpe fut celle de mon ancêtre. Je pense qu'elle vous facilitera la recherche des esprits pour la purification de la lame.
- Princesse... s'il nous faut nous enfuir, nous ne quitterons pas les lieux sans vous !
- De belles paroles de chevaliers... Link, je sais que vous viendriez à moi, mais j'ai bien peur que les choses se passent autrement. La présence maléfique est si proche qu'elle pourrait m'étrangler si elle le voulait. Tu dois t'éveiller.
- Mais Princesse, je...
- Il est de retour, Link. Et nous n'avons pas pu empêcher sa résurrection, j'en suis certaine."
Link savait au fond de lui que cette journée n'allait pas être comme les autres. Il prit la carte d'Hyrule ainsi que la harpe, puis se hâta de rejoindre ses amis. En croisant la route de Daphan, sa marque se mit à briller légèrement. Link se cacha dans un bosquet. Derrière Daphan, se trouvait Sophro. Un nuage noir l'envahit, le happant de ses vapeurs chaudes et empoisonnées : Link vacilla. Une fois les deux passés, il souffla un bon coup et partit. Sophro se retourna.
"Le prétendu Héros."
Il émit un large sourire sous sa cape. Posant sa main sur l'épaule de Daphan, celui-ci fit claquer ses mains en retroussant ses manches. Sur son bras, il y avait six losanges, noir fumant.

Asmelen ouvrit un oeil. Quel idiot ! Il s'était endormi à son point de garde ! Regardant discrètement autour de lui, il jeta un coup d'oeil dans les quartiers de Daenylla. Elle était seule à écrire une lettre ou autre chose. Il fonça et referma bruyamment la porte derrière lui, à double tour.
"Mère ?"
Daenylla ne put voir que la lame qui la pointait du regard... ainsi que le sourire déconfit d'Asmelen. Elle n'avait pas eu le temps de prendre une arme. Fixant son ami du regard, elle prit la parole :
"Que t'arrive-t-il, Asmelen ? Pose cette arme, tout de suite.
- Tu le savais ?
- Quoi ? Qu'est-ce que j'étais sensé savoir ?
- Tu le savais."
Il balança son épée contre le sol, au grand étonnement de la dame aux cheveux argentés. Asmelen lassa son corps tomber sur le sol, et les pleurs le submerger.
"Mon père... mon père...
- Que s'est-il passé ?
- Mon père est un traître ! Il a contribué à la libération de Ganon et il est à présent dans le château !
- Ganon... dans le château ? C'est... c'est impossible, voyons, ma mère...
- Si ce n'est pas lui, c'est un de ses émissaires ! Lagis, il le laisse en vie pour pister Link ! La princesse... elle est perdue ! Mon père... pourquoi lui, pourquoi ferait-il une telle chose ? Et toutes ces actions que j'ai menées pour lui, ce n'était que pour la perte d'Hyrule ?"
Daenylla ne savait quoi faire. Asmelen était un coeur fragile : il avait une adoration pour ses parents. Il s'était remis lentement de la mort de sa mère, il y a dix ans. A présent, son père avait ouvert les portes à Ganon, le laissant pénétrer dans le château d'Hyrule. Son père, son mentor... un allié du mal. Elle tenta de le consoler rapidement : il fallait prévenir la princesse au plus vite, mais elle ne pouvait laisser son ami dans un tel état. Qui sait, après son départ, elle le retrouverait peut-être décapité par les agents de Ganon...
"Asmelen, tu es un chevalier ! Calme-toi ! Nous devons alerter la princesse, sinon ce sera pire ! Le sang coulera à flots si nous ne la prévenons pas à temps !
- Daenylla..."
Il plongea son regard dans le sien, pendant un court instant, puis s'embrassèrent. Du moins c'est ce qu'ils auraient fait si une grosse explosion n'avait pas retenti dans la tour principale du château.

Hilda redescendit de son perchoir : les pouvoirs d'Hylios l'avaient quittée. Elle vit le jeune chevalier Asmelen dormir dans un bosquet. La situation lui tira un sourire du visage, puis son estomac lui rappela le besoin de s'alimenter. Elle se dirigea vers la salle à manger. Au détour d'un couloir, elle se heurta à un Link qui regardait encore derrière lui, comme s'il était suivi.
"Hé bien, ce château n'est pas réveillé ou quoi ?
- Hilda ! Ça tombe bien ! Tu sais où est Lagis ?
- En train de manger. C'est ce qu'il m'avait dit quand nous sommes sortis de la salle de combat. Enfin, j'espère qu'il est toujours en train de se remplir la panse. Je vais lui tenir compagnie.
- Moi aussi. Il... Une fois que nous aurons mangé, nous devons parler.
- Qu'est-ce que la princesse t'a dit ?
- Dans nos quartiers. Pas ici, Hilda."
Lagis entamait une seconde assiette de lentilles. Il leva la main pour faire signe à ses amis de venir le rejoindre. Mais voyant la tête sombre de ses deux amis, il ne put finir sa seconde assiette. Comme pour Hilda, Link lui répondit qu'il saura tout dans leurs quartiers, du moins un endroit où il pensait être à l'abri. Le repas terminé, ils se ruèrent dans leurs quartiers. Hilda jeta un coup d'oeil au bosquet, mais Asmelen avait disparu. Elle haussa les épaules.
"De quoi s'agit-il ? Que t'a dit la princesse ?
- Comme nous, elle pense qu'il est libre à présent. Si tout se passe mal, elle m'a dit de partir avec vous deux, et elle m'a donné une carte d'Hyrule ainsi qu'une harpe. C'est pour m'aider à trouver les esprits qui pourront restaurer la lame.
- Elle nous autorise donc à prendre la lame ?
- Hilda, vu que Ganon n'y est plus, c'est qu'une ferraille de plus. Pas une relique antique qui scellait quelque chose.
- Lagis, enfin ! Il se pourrait qu'une partie du pouvoir de Ganon y soit encore et qu'il n'attend que ça pour déployer sa force sur le monde !
- Hilda, s'il te plaît, cesse d'être aussi..."
Lagis n'eut pas le temps de finir sa phrase.
Le bruit d'une explosion retentit et leurs regards se tournèrent vers la tour centrale, origine du bruit.
"On nous attaque ! On nous attaque ! Aux armes !"

Daphan laissa son fils partir. Ayant oublié de prendre quelque chose, il retourna à ses quartiers. Le jeune homme aux yeux orange se tenait toujours ici. Il fit un grand sourire quand le chevalier pénétra dans la pièce.
"C'est ton fils ? Asmelen, c'est ça ?
- Oui, Maître. C'est un jeune chevalier, qui m'a beaucoup servi.
- Quel vil menteur tu fais. Pour le bien du royaume, c'est ça ?
- Il est encore jeune, il faut être docile avec lui...
- S'il veut rejoindre mon royaume, il faut être dur dès le départ. Dis-moi, es-tu sûr qu'il ne nous a pas entendus ?
- Asmelen ne m'a jamais trahi. Si je lui ai dit de tuer Lagis, il le fera. Mais s'il faut le stopper...
- Je t'ai dit de ne pas t'occuper de cela."
Mais il n'était pas dupe. Roulant ses yeux orangés vers le jardin royal, il savait qu'Asmelen avait entendu la conversation avec son père. Et il n'avait pas confiance en cet homme chétif et insouciant d'apparence, le sentant comme divisé au fond de lui. Il aurait bien aimé le posséder pour en savoir plus, mais avec les divisions faites, il en avait déjà fait assez. Il se gratta les cheveux, un court moment, juste pour adapter son plan à la situation qui venait de changer. Et quand il eut tout organisé, il roula ses yeux encore une fois. Il regarda Daphan en soupirant.
"Viens avec moi. Nous devons aller voir la princesse. J'ai réfléchi, moi aussi."
Le vieux chevalier abandonna ses affaires pour accompagner son maître, dissimulé sous l'apparence de Sophro, en direction de la salle royale. Il ricana : tout était tellement facile, dans ce monde de pleutres et d'imbéciles ! Et peut-être que dans quelques minutes, tout allait basculer en sa faveur. Il ne fallait jamais vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué, mais le plan qui se reformulait dans sa tête l'emballait dangereusement. Il arriva devant la Princesse Zelda, s'inclinant de tout son être devant son ennemi juré. Elle leva les yeux d'un manuscrit, surprise. Aucun garde ne l'avait prévenue de l'arrivée du chevalier et du sage. Ils ne le pouvaient pas non plus, endormis dans un sommeil sans réveil possible.
"Sage Sophro ? Vous venez sans prévenir à présent ? Vous avez changé depuis le passage dans la Forêt Interdite.
- Oh, tu as bel et bien perdu de ton influence Hylia. Sous cette carapace humaine, ou quoi que tu puisses avoir en relation avec ce pantin, tu n'en ressors qu'affaiblie..."
Zelda fixa le sage en fronçant les sourcils, cherchant de sa douce main une épée courte cachée dans le trône de son père le plus discrètement possible. Elle avait vu juste à propos de Ganon.
"Tu es donc revenu, fit-elle à son interlocuteur."
Il jeta la cape au sol : il était bien différent des livres, de la représentation que l'on faisait de l'Avatar du Néant, de Ghirahim, de Nagon ou de Ganon, le grand démon. Il avait la carrure de Lagis, avec ses cheveux bi colorés, et portait un vêtement simple, mais similaire à celui que portait le Héros des Cieux.
Son épée... ressemblait à l'épée de légende, mais avec une garde noire et une lame plus sombre. Il la pointa vers Zelda. Et en un instant, huit gardes fondirent sur lui.
Il ne fallut que quelques secondes pour qu'il mette à terre les huit gardes, sans pour avoir autant eu de l'aide de la part de son allié, Daphan. Il sentait la présence d'Impa dans la salle.
"Je sais que tu es dans les parages, descendante de Sage. Si tu restes sage, je ne ferai rien à la Princesse. Tente un seul misérable coup et elle rejoint les autres gardes."
Découverte, la dame n'eut d'autre choix que de se présenter à découvert devant l'homme et le traître. Secouant ses cheveux, l'homme abaissa sa lame.

"Par quoi dois-je commencer ?
Oui, ton crétin de Héros m'a bien enfermé à six pieds sous terre, et avec ce pigeon voyageur d'Hylios qui s'y est mis, j'en ai bavé pendant plus de deux cents ans. Mais quelle idée d'avoir mis l'épée de légende sous ma prison ! C'est comme mettre la clé dans la serrure ! J'ai commencé par affaiblir l'épée : il est tellement plus facile de tirer sur une cible fixe. Et puis, j'ai pu libérer une petite partie de moi-même. En me libérant, la libellule bleue s'est aussi libérée, tentant son ultime travail de protection.
Te souviens-tu de la sombre journée... il y a deux mois ? Je les ai vus, les trois Marquarins, dont un qui me lança un coup d'oeil. J'étais charmé... Je l'ai donc attiré vers moi, comme je le pouvais. Une bonne bataille avec ton challenger. Ils sont venus et je les ai forcés à me libérer. Je comptais prendre entièrement possession du premier Marquarin, mais l'autre es intervenu en sa faveur... dis-toi bien qu'ils ont eu de la chance ce jour-là. Le descendant du Héros, rien que ça ! Et le répondeur vocal du pigeon voyageur qui est venu remettre l'épée en place plus tard, mais c'était déjà trop tard.
Après que mes deux Marquarins se soient évanouis, la bataille contre la bleue a repris. Elle s'est sacrifiée, pensant m'avoir exterminé, mais je me suis dispersé.
Je me suis dispersé aux quatre coins d'Hyrule pour avoir de nouveaux serviteurs. Petit à petit, ils sont tombés en mon pouvoir, et me servent loyalement, comme tu peux le voir pour ton cher chevalier. Tu aurais peut-être dû l'écouter quand il parlait de tuer Lagis. Car c'est lui qui a tout provoqué. Je pouvais rester caché une éternité, de ta sentinelle bleue, mais quand je l'ai vu, je savais que le moment était le bon. Et tu n'as rien vu venir.
Tu m'as même bien aidé, Princesse. Lagis, mon Marquarin, avait tellement hâte de participer à ce tournoi... qu'il m'a mené à toi, et que vous m'avez libéré, entièrement. Dans ta colère contre Daphan, tu l'as envoyé dans la Forêt Interdite pour s'assurer de la validité du sceau, n'est-ce pas ? Il n'y a plus de sceau, sois-en rassurée, Daphan a fait le nécessaire pour en finir."
Zelda resta estomaquée. Il avait agi très vite en deux mois, alors qu'elle ne se doutait pas qu'il se serait libéré du sceau aussi rapidement. Elle se savait en mauvaise posture et se demandait encore pourquoi il la maintenait en vie. Elle voulut gagner du temps, mais que préparer ?
"Qu'avez-vous fait de Sophro !!!"
Il agita un porte-clés avec des petites poupées de morphologie différente.
"Je l'ajoute à ma collection de nouveaux serviteurs. C'est un Sage, après tout ?
- Ganon ! Espèce de vile créature !
- Ganon... Oh, ce nom abject ! J'ai réfléchi à un autre nom dans ma prison... Que penses-tu de Nephelim ?
- Pourquoi m'avoir raconté tout cela ? Je sais ce que tu veux et je ne te laisserai jamais mettre la main dessus !
- Oh, bien, j'aimerais bien savoir comment. Ton Héros ? Ça reste un humain, et sans épée légendaire ce n'est rien qu'un jeune fou. Toi ? Mais tu es déjà morte, ma chère."
Et sur ces paroles, Nephelim lança une grosse boule d'énergie en direction du trône royal. Zelda mit sa main en avant, pour préparer un sort pouvant le contrer, mais Impa fut plus rapide, poussant la jeune femme vers l'arrière du palais. Puis, en une fraction de seconde, elle sortit une boule blanche qu'elle lança à ses pieds et elles disparurent.
Le temps que le souffle se dissipe, et que Daphan puisse voir ce qu'il s'était passé, elles avaient pu partir.
Nephelim fit un léger sourire.
"Elles se sont échappées ! Il faut partir à leur poursuite, Maître !
- Oui, elles ne sont pas allées très loin, mais je suis encore bien faible..."
Caressent de ses doigts légers les poupées, il souffla dessus et elles prirent vie. Ainsi, il put se monter une petite armée de trente soldats, debout dans l'attente de ses ordres. Daphan s'impatienta, priant son Maître de partir à la recherche des fugitifs. Avec le bruit de l'explosion, les gardes qui vont arriver ne vont pas faciliter leur tâche. Nephelim fronça les sourcils : Daphan était un homme très loyal, mais il ne supportait pas son autorité et sa fâcheuse tendance à ordonner avec des s'il vous plaît par-ci par-là. Nettoyant son épée, il se retourna et posa sa main sur l'épaule de son serviteur le priant de se calmer. Puis il lui enfonça l'épée dans le ventre, sans qu'il puisse avoir le temps de réagir. Le seul bruit qu'il entendit de la bouche de son fragment fut un "Maître... !" presque à l'agonie. Nephelim fit un sourire démoniaque :
"Merci de m'avoir complètement libéré Daphan. Mais je me dois de retrouver mes pouvoirs, et je ne suis pas homme... à les partager. Ton rôle de Marquarin supérieur s'achève ici, maintenant rejoins ma collection !"
Il tira l'épée de son corps, laissant celui-ci tomber sur le sol, puis entreprit une nouvelle fois de l'essuyer. Il s'apprêtait à donner des ordres à ses troupes quand il entendit une voix déchirante lui percer les tympans :
"PERE !!!"
Devant la porte principale se tenait Asmelen, Daenylla, Link, Lagis et Hilda.
La troupe avait assisté à l'exécution publique du père d'Asmelen, sans qu'ils ne puissent faire quoique ce soit. Il avait rejoint les troupes de Nephelim, et c'était le prix à payer pour avoir fait un tel serment.
"Les Marquarins sont mes pantins, marqués de ma main. Parmi tous ceux que j'ai marqués, tu me résistes encore Lagis. Ton destin en tant que Marquarin est de me servir... Approche, sacrifie ta vie pour faire revenir complètement ton Maître !"

chapitres suivants...

Ce texte a été proposé au "Palais de Zelda" par son auteur, "Makenchi". Les droits d'auteur (copyright) lui appartiennent.

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Mis à jour le 14.04.24